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Les usages politiques de l'histoire

Les usages politiques de l'histoire dans la France contemporaine, des années 70 à nos jours

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Publicado domingo, 08 de setembro de 2002

Resumo

Les conceptions de l'histoire et du temps qui se réclamaient de la dynamique du progrès et de la linéarité du temps sont réputées avoir été mises à mal par de multiples facteurs ayant conjugué leurs effets depuis près d'un quart de siècle : ainsi l'efface

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Les conceptions de l'histoire et du temps qui se réclamaient de la dynamique du progrès et de la linéarité du temps sont réputées avoir été mises à mal par de multiples facteurs ayant conjugué leurs effets depuis près d'un quart de siècle : ainsi l'effacement des formations politiques qui avaient ancré leur légitimité dans une histoire avec laquelle ils entretenaient de puissants liens (PCF, gaullisme historique, et, sur un mode différent, composantes marxistes de l'extrême-gauche), la disparition de la génération politique à laquelle elles ont donné corps, la "fin des sociétés mémoires" (P. Nora), la disparition des "horizons d'attente" (R. Koselleck)...
Ces assertions sont aujourd'hui tenues pour des manières d'évidence, presque pour des lieux communs. Mais à quelles pratiques et conceptions effectives renvoient-elles ? Quel est leur ancrage dans le social s'il s'avère qu'il existe bien ? Quelle serait alors l'opérativité sociale de ce nouveau rapport à l'histoire et au temps ? Telles sont les questions que souhaite aborder ce colloque prévu pour octobre 2003.
Ce colloque voudrait permettre la confrontation de réflexions et d'approches développées sur ce thème en ordre dispersé dans divers lieux depuis plus d'une décennie. Il englobe, sous le terme d'histoire, toutes les formes de discours et de représentations concernant le passé, le temps historique, et leurs usages, politiques autant que culturels, ou toutes ses modalités de mobilisation ; sans privilégier l'histoire savante ou l'écrit (on prendra ainsi en compte les fêtes historiques, la patrimonialisation, les productions culturelles…). Il entend "politique" dans cette large acception qu'est, ici, la demande sociale. Il souhaite enfin privilégier l'étude des pratiques.

Le rôle des événements de 1968 dans l'émergence de conceptions et d'usages nouveaux de l'histoire par les acteurs politiques mériterait à lui seul une étude. Il apparaît toutefois que ces usages et conceptions ne se sont affirmés qu'à la faveur des mutations politiques ultérieures (et, pour certaines, consécutives). On se propose donc de se focaliser sur les trente dernières années du siècle en assignant, entre autres tâches, au colloque de fonder (ou d'infirmer) cette périodisation.
Dans la France contemporaine ainsi comprise, les usages politiques de l'histoire demeurent nombreux et contradictoires
· Au regard de l'Etat, l'histoire conserve des vertus civiques que traduisent, notamment, la place demeurée sienne dans les programmes scolaires, la "fièvre commémorative" qui se manifeste dans France contemporaine ou la fréquence, retrouvée sous la Ve république, des panthéonisations. Entre autres symptômes.
· Les vertus politiques de l'amnistie, de l'oubli et du refoulement ont obligé les générations concernées par Vichy, l'Occupation ou les guerres coloniales à faire leur deuil en empruntant d'autres voies, dont le rapport à l'histoire mériterait une étude. Le passage de témoin de la génération des acteurs et des victimes à celle de leurs descendants autorise ( ?) exige ( ?) un retour du refoulé - au nom d'une exigence de justice et d'un "devoir de mémoire" aujourd'hui relayés par les pouvoirs publics - avec une ampleur inégale, il est vrai, selon qu'il s'agisse de Vichy ou de la guerre d'Algérie. Ce recours à l'histoire confère à celle-ci une fonction de légitimation et à certains historiens des fonctions politiques inédites, dont l'expertise. Il conviendra d'en mesurer les effets tant sur la politique elle-même que sur l'histoire qui s'écrit.
· L'histoire nationale s'est longtemps vue créditée d'une fonction creuset, d'amalgame (que d'aucuns lui confèrent encore : ce qui pose, au demeurant, la question de la nature de ses rapports à "l'instruction civique"). Or, ce dernier quart de siècle est caractérisé par l'effritement de certaines identités (nationales ou régionales, quand ces dernières étaient fondées sur une activité disparue ou en sursis) et par l'émergence ou l'affirmation d'identités concurrentes, infra ou supra-nationales. Quelle place font à l'histoire ces identités menacées ou fragmentées - locales, professionnelles ou catégorielles ? Quelle place lui accordent celles en gestation à l'échelle régionale, européenne ou transnationale ? L'histoire n'est-elle qu'une simple emplâtre pour les collectivités en redéfinition (comme pour les individus pris dans le maelström de l'histoire)? Est-elle, au contraire, une des possibles modalités du deuil et par là de possibles reconstructions ? L'engouement constaté pour la généalogie, la multiplication des "fêtes historiques", la patrimonialisation participent-ils de ces phénomènes ?
· L'émergence de nouveaux acteurs politiques induit, simultanément, des refus d'histoire ou des tentatives d'invention de traditions nouvelles, supposant alors des actes fondateurs et des années zéro. Elle peut aussi déboucher sur des captations d'héritages. Tandis que se multiplient, a contrario, des pratiques dites de repentances, émanant des horizons politiques les plus divers, avec ce que cela suppose alors de mise à distance et de réécriture du vécu des acteurs individuels ou collectifs. Il conviendra d'en étudier les effets pour les acteurs concernés et, plus généralement, pour le politique.


Le colloque pourrait s'organiser autour de plusieurs thèmes

1/ Poser un diagnostic de la conjoncture présente.

En premier lieu, le colloque doit être l'occasion de formaliser et de discuter la spécificité du rapport social contemporain au temps historique et, notamment, l'hypothèse d'un changement de régime d'historicité qui octroierait une place prépondérante au présent ("le présent dilaté" de Pierre Nora) en raison de l'effacement d'"horizons d'attente" forts qui structuraient la perception de l'histoire depuis la rupture moderne et, surtout, la seconde moitié du XVIIIe siècle.
Au-delà de cette thématique forte qui devrait irriguer l'ensemble de la réflexion du colloque plusieurs chantiers pourraient servir de laboratoires pour tester la validité des analyses globales de la conjoncture contemporaine.

2/ L'histoire en politique : vue du politique.

La plupart des acteurs politiques sont susceptibles de mobiliser l'histoire : Etat, Education nationale, élus, collectivités locales, partis, syndicats, associations…, dans un rapport aux historiens, aux érudits locaux et aux médias qui n'est pas nécessairement le même. Tous n'y recourent cependant pas au même titre. Quel est le rôle, conservé ou non, des cultures politiques et de la place - différentielles , qu'elles accordent à l'histoire ? Quel est celui des clivages générationnels ou des échelles, locales, nationales, inter ou supra-nationales ? Les données structurelles, conjoncturelles et événementielles qui participent de la (re)définition des usages politiques de l'histoire déterminent-elles un champ contraignant pour la totalité des acteurs ? Autorisent-elles, au contraire, des plages d'autonomie permettant aux cultures politiques initiales de conserver leur force et leurs vertus discriminantes ?
Quelle est la valeur heuristique d'une étude des usages politiques de l'histoire pour l'histoire politique française de ces trois dernières décennies ? Les pratiques de l'histoire induites par les différents types de demande politique ont-elles des effets sur le politique, les citoyens, et si oui, lesquels ? Constituent-elles une modalité du renouveau politique ? Un effet induit ? Dans quelles mesures les nouvelles pratiques politiques émergentes conditionnent-elles ce(s) nouveau(x) rapports à l'histoire ? Dans quelle mesure la mémoire et l'histoire induisent-elles de nouveaux usages politiques ? Peut-on faire une histoire politique de la mémoire ? On pourrait distinguer trois types d'acteurs et d'échelle : acteurs et espaces nationaux, locaux et transnationaux. En sachant qu'un même acteur peut jouer à ces trois niveaux, cela obligera à s'interroger sur l'homogénéité des trois dernières décennies du siècle. Est-elle ou non traversée de séquences plus courtes ? Sous l'effet de quels déterminants ?

3/ Le politique en histoire : vu des historiens.

Ces modalités de la demande sociale induisent DES histoires et des mémoires, cloisonnées, de l'initiative acteurs étrangers les uns aux autres
Quels événements ou périodes sont (re)mobilisés ? (il faudra s'interroger sur les guerres mondiales ou coloniales et la Révolution française, bien sûr, mais aussi bien sur les "usages" de la démocratie grecque, de Clovis, du millénaire capétien, du moyen-âge ; plus généralement sur ce qui "fait histoire" à chacune des échelles concernées, sur la manière "d'entrer dans l'histoire"). Quels autres sont occultés ? Tout est-il également commémorable au regard des objectifs politiques poursuivis ? Avec une même force opératoire ?
Quels sont les usages du politique par l'historien et les usages de l'historien par le politique ? Quelles sont les instances et les modalités de la légitimation ? Qui sont les producteurs d'histoire ? Quelles sont leurs marges d'initiative et d'autonomie ? Quel rôle jouent les médias ? Quel est le rôle respectif des historiens universitaires et des autres ?
Cette fonction, politique au premier chef, dévolue à l'histoire ne semble pas constituer un phénomène universel. On la tient souvent pour une modalité de la culture politique nationale. Mais il convient là encore de tester cette autre manière d'évidence. On se propose d'y contribuer en organisant des journées d'étude comparatives qui se tiendront dans la foulée de ce colloque en janvier 2004.



Locais

  • Paris, França

Datas

  • domingo, 01 de dezembro de 2002

Contactos

  • Centre d'histoire sociale du XXe siècle
    courriel : lortolar [at] univ-paris1 [dot] fr

Licença

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Para citar este anúncio

« Les usages politiques de l'histoire », Chamada de trabalhos, Calenda, Publicado domingo, 08 de setembro de 2002, https://doi.org/10.58079/7ul

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