AccueilConceptions et instruments de gouvernement aux XVIIe et XVIIIe siècles (journée n° 1)

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Conceptions et instruments de gouvernement aux XVIIe et XVIIIe siècles (journée n° 1)

Conceptions and instruments of government in 17th and 18th centuries

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Publié le mercredi 07 mars 2012

Résumé

La construction de l’Etat à la période moderne est un chantier historiographique visité et revisité ces trente dernières années. De la notion d’absolutisme à l’exercice quotidien du pouvoir, les recherches sont aujourd’hui multiples. Des études récentes tentent de confronter les discours et les pratiques de gouvernement, les relations entre l’administration centrale et ses représentants locaux, les institutions provinciales et leur rôle réel, la transmission des informations, le mécanisme de la prise de décision dans les différents domaines gouvernementaux. Quelle approche de l’absolutisme est remise en cause par l’étude des pratiques ? Nous informent-elles sur les capacités de résistance à la centralisation des pouvoirs municipaux et provinciaux? Que nous apprennent les études sur l’appropriation des techniques administratives à différentes échelles ? Influencent-elles l’exercice du gouvernement ?

Annonce

Cette première journée d’études de l’université de Rouen souhaite aborder les résultats de recherches de tendances historiographiques différentes, tels les historiens du politique, du droit, de l’administratif, des techniques afin de confronter les théories aux pratiques, les pouvoirs aux exercices, dans un premier état des lieux centré sur le XVIIIe siècle.

Argumentaire :

Le chantier de l’histoire de la construction de l’Etat à la période moderne, ré-ouvert par les deux programmes de recherche sur la Genèse de l’État moderne conduits par le CNRS et la Fondation européenne de la science (1984-1993) dans le contexte du retour de l’histoire politique est aujourd’hui porteur de multiples pistes de recherche. La monarchie classique et l’absolutisme français ont fait l’objet de nombreux travaux qui ont souvent privilégié les écrits des juristes à l’origine d’une théorie de l’État, ce que Pierre Bourdieu a appelé « un discours performatif sur la chose publique » tel l’ouvrage dirigé par Yves-Charles Zarka (dir.) Théoriciens et théories de la raison d’État aux XVIe et XVIIe siècles, 1994, ou l’étude des institutions centrales (Françoise Monnier (dir.), L’administration des finances dans l’Ancien Régime, 1997).

Des études récentes éclairent le rôle des périphéries, notamment des cours souveraines qui furent longtemps présentées comme soumises au pouvoir royal et dont le rôle, considéré au cas par cas, s’avère beaucoup plus contrasté, comme le montrent les actes du colloque sur les Parlements de Louis XIV (PUR, 2010) qui insistent sur leurs pouvoirs effectifs, et les recherches sur les Cours du XVIIIe siècle qui soulignent leur rôle dans l’administration publique, rôle plus important que celui, tant considéré, d’opposant politique.

La monarchie a développé ainsi une vocation administrative pour gérer et contrôler tous les pouvoirs, dans un processus de bureaucratisation qui éclot à la période moderne. Les études du personnel au service de la monarchie (intendants et officiers moyens) notamment celles de Michel Cassan et Vincent Meyzie, permettent de mieux appréhender leur recrutement, leur formation et leur carrière, ainsi que les réseaux familiaux et clientélaires auxquels ils appartiennent. Les biographies et les rares dictionnaires prosopographiques révèlent la complexité des relations et l’empirisme « en partie apparent » des pratiques.

Si les différentes doctrines de la théorie politique et les prescriptions juridiques constitutionnelles, législatives ou réglementaires continuent de faire l’objet de recherches, ainsi sur l’absolutisme lui-même (Robert Descimon et Fanny Cosandey, 2002) ou pour le XVIIIe siècle, sur le thème de la constitution (coutumière), un champ nouveau est apparu. Il concerne l’exercice quotidien du pouvoir, le fonctionnement dans le détail des bureaux de l’administration, les rapports entre roi et ministres mais aussi les institutions centrales et périphériques.

Pour les provinces, sont ainsi reconsidérés les activités et les pouvoirs réels des administrations locales, notamment les États provinciaux dont Marie-Laure Legay a exhumé la véritable participation au développement de l’administration étatique dans le Nord de la France (Droz, 2001). Les circuits d’information, l’élaboration et l’exécution des décisions royales et ministérielles, la marge d’autonomie des grands subordonnés du roi (ministres, maréchaux, conseillers officieux) doivent être connus par l’étude minutieuse de ces personnels et de leurs pratiques, (ce que propose par exemple le Dictionnaire biographique des ministres de la Guerre des origines à nos jours, T. I, 2007), mais aussi par la prise en compte des processus de décision.

Louis XIV est l’exemple du souverain, à la fois chef de l’État, chef du gouvernement et secrétaire général de la monarchie. Il assure la coordination du travail entre ses ministres et gouverne par le détail. Quelle autonomie de décision peuvent alors avoir les commis, techniciens dans leur domaine ? Philippe Cénat a étudié le processus de décision à la guerre de Louis XIV et les analyses minutieuses du fonctionnement de la prise d’information, de la concertation, de la formulation de l’ordre et de son exécution sont aujourd’hui au cœur de plusieurs recherches (par exemple celles de Matthieu Stoll pour Claude Le Peletier et d’Alexandre Dupilet et Laurent Lemarchand pour la polysynodie de la Régence).

Dans la continuité de la recherche historique sur l’État, cette journée d’études tente donc de confronter les théories aux pratiques, les pouvoirs aux exercices. Dans une perspective de bilan, elle voudrait ainsi relier les résultats de recherches de tendances historiographiques différentes (tels les historiens du politique, du droit et des conceptions, les historiens de l’administratif, des techniques et des instruments).

Cette journée d’études se propose de réunir des chercheurs qui explorent ces voies de remise en cause de l’absolutisme centralisateur et triomphant par une mise à jour du rôle des élites locales, des représentants locaux du pouvoir central, interrogeant leur marge d’autonomie en examinant leur correspondance, le suivi des dossiers et des budgets notamment, mais encore de ceux qui tentent de pénétrer au cœur du fonctionnement d’une institution, comme Michel Antoine a pu le faire dès 1955 pour le conseil d’État du roi (Le fonds du Conseil d’État du roi aux Archives nationales : guide des recherches).

Les pratiques de gouvernement dépendent aussi des procédures suivies (orales et écrites), des instruments techniques (outils comptables, cartes etc), des formalisations du style administratif, de la rapidité ou de la lenteur de la circulation des missives et des documents joints, de la routine des secrétaires ou au contraire de l’ « invention » d’instruments de gouvernement empruntés à d’autres domaines du savoir, ceux des scientifiques, des négociants, du personnel judiciaire, des voyageurs, des ecclésiastiques qui améliorent les résultats des actions exécutées, la transmission des ordres ou la clarté d’un fonctionnement administratif, à l’exemple des tables dans le dernier quart du XVIIe siècle (voir leur usage à des fins politiques par Vauban, Michèle Virol, 2003). L’étude des « outils » est un moyen de renouveler une histoire intellectuelle de l’abstraction, les usages précédant temporellement de beaucoup les théories (Jean- Claude Perrot 1992, Eric Brian 1994).

Les études récentes, qui semblent s'inscrire dans la remise en cause de l’absolutisme par l’étude des pratiques qui contredisent ou nuancent les prétentions théoriques, contribuent en fait à mieux faire connaître la formation de l’État à la période moderne, en mettant notamment en évidence l’appropriation des techniques administratives à différentes échelles et des conceptions de gouvernement.

Programme : 29 mars 2012, Université de Rouen, Bâtiment Robespierre, salle F101

  • 9h 30  accueil
  • 9h 45  Présentation de la journée Michèle Virol (Université de Rouen, GRHIS – Centre Roland Mousnier UMR 8596) et Laurent Lemarchand (Université de Rouen, GRHIS)

Les tendances sur la longue durée

  • 10h 15 Mathieu Marraud (EHESS) : La pensée corporative de l'Etat, mi XVIIe-mi XVIIIe siècle : formes, échanges, conflits.

    Le XVIIIe siècle à l’étude

    • 14h 30 Joël Félix (Université de Reading) : Sortir de la crise : les projets de réforme financière à la mort de Louis XIV.
    • 15h 05 Stéphane Blond (Université d’Evry) : L'innovation au service de la tradition : la réforme routière de Philibert Orry, 1737-1738.
    • 15h 40 Vincent Milliot (Université de Caen) : Les « écrits » de la police : dévoiement bureaucratique ou garantie contre l’arbitraire ?  (Paris, XVIIIe siècle).
    • 16h 15 Discussion animée par Jean-Pierre Jessenne (Université Charles de Gaulle-Lille III) :  Les influences des Lumières sur l’appareil d’Etat.
  • 10h 50 Christophe Blanquie (EHESS) : La fabrique des provisions sous les rois Bourbons: des quittances aux lettres.

11h 25 pause-café

  • 11h 40 Mireille Touzery (Université Paris-Est Créteil Val de Marne) : Les assemblées politiques, 1302-1789, évolution d’un outil de gouvernement à la période moderne.
  • 12h 15 Discussion, animée par Jean-Pierre Jessenne (Université Charles de Gaulle-Lille III) : Les évolutions de l’historiographie sur la question de l’Etat moderne et de sa construction.

13h 15  Déjeuner

Lieux

  • Campus de Mont-Saint-Aignan
    Rouen, France

Dates

  • jeudi 29 mars 2012

Fichiers attachés

Mots-clés

  • Etat, construction, théories, pratiques, administration, gouvernement, outils, absolutisme, Lumières

Contacts

  • lemarchand #
    courriel : NLEMARCHAN [at] aol [dot] com

URLS de référence

Source de l'information

  • Laurent Lemarchand
    courriel : laurent [dot] lemarchand [at] univ-rouen [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Conceptions et instruments de gouvernement aux XVIIe et XVIIIe siècles (journée n° 1) », Journée d'étude, Calenda, Publié le mercredi 07 mars 2012, https://doi.org/10.58079/kdr

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