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Droit pénal et politique de l'ennemi

Penal law and politics of the enemy

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Publié le mercredi 20 mars 2013

Résumé

Le syntagme droit pénal de l'ennemi offre en effet la possibilité de penser l'orientation et les enjeux de la législation criminelle contemporaine. La catégorie élémentaire du pénal se trouve contenue par deux autres catégories qui procèdent du droit et de la politique. Prisonnier des vocables droit et ennemi, le pénal est de nouveau confronté à une interrogation qui semble accompagner les époques à haute densité politique. Parce que ce colloque a pour objet principal d'interroger un syntagme qui se situe au carrefour du droit et de la politique, mobilisant les dialectiques du commun et de l'exception et, à travers elle, celle de la vie et de la mort, il est nécessaire de le confier aux juristes, historiens, philosophes, sociologues, sémiologues, linguistes et à tous ceux qui cultivent l'art délicat de la transgression des frontières disciplinaires.

 

 

Annonce

DROIT PENAL ET POLITIQUE DE L’ENNEMI, 12 et 13 décembre 2013

Journées d’études organisées par le Centre de droit privé et public des obligations et de la consommation (CDPPOC) de la Faculté de Droit de l’Université de Savoie. En collaboration avec l’Institut Rhône Alpin de Sciences Criminelles

Argumentaire

Le droit pénal de l’ennemi. L’expression n’est pas familière et le vocabulaire semble inapproprié pour le juriste français. En effet, le droit pénal ne présente pas, classiquement, une logique guerrière. Pourtant, cette ancienne construction théorique, connue dans certains états européens voisins (Allemagne, Espagne, Italie) ou d’Amérique du Sud, sous l’influence de la dogmatique germanique, fait l’objet, à nouveau, de vives discussions doctrinales. Celles-ci ont une résonance particulière depuis les attentats perpétrés sur le territoire des Etats-Unis, le 11 septembre 2001. Plus généralement, le droit pénal de l’ennemi apparaît comme un modèle possible du droit pénal, impliquant et justifiant concrètement la multiplication d’interventions ante delictum en réponse à la crise des Etats qui seraient dans l’incapacité d’assurer le contrôle du crime et de la sécurité. La question a déjà été débattue en France, plus tardivement peut-être qu’à l’étranger, mais des colloques se sont tenus et des revues juridiques spécialisées y ont consacré des dossiers thématiques. Par exemple, la Revue de sciences criminelles a consacré un dossier au « Droit pénal de l'ennemi - Droit pénal de l’inhumain », suivi d’une seconde étude, en 2010, consacrée aux « politiques sécuritaires à la lumière de la doctrine pénale du XIXe au XXIe siècle ».

Des travaux français antérieurs ont également fait référence sommairement à la problématique du droit pénal de l’ennemi en dressant un constat de « déconstruction » du droit pénal « classique-moderne »1. Par ailleurs, des explications relatives au droit pénal de l’ennemi apparaissent dans les manuels destinés aux praticiens et non exclusivement aux universitaires2. L’intérêt des juristes français pour le droit pénal de l’ennemi est récent et ne s’émousse pas. La raison en est simple : ces différents travaux, aussi instructifs soient-ils, n’ont naturellement pas épuisé la question. De nombreuses interrogations restent en suspens et le juriste, à l’évidence, ne détient pas toutes les réponses. S’il convient d’approfondir les comparaisons avec les droits étrangers, le débat gagnerait à s’ouvrir à d’autres champs disciplinaires.

A y regarder d'un peu plus près, l’expressiondroit pénal de l'ennemi offre en effet la possibilité de penser l'orientation et les enjeux de la législation criminelle contemporaine. La catégorie élémentaire du pénal se trouve contenue par deux autres catégories qui procèdent du droit et de la politique. Prisonnier des vocables droit et ennemi, le pénal est de nouveau confronté à une interrogation qui semble toujours avoir accompagné les époques à haute densité politique. Au-delà des modalités d'une sanction qu'on ne cesse d'adapter afin d'accompagner au mieux les évolutions de la société, voici que resurgit en pleine lumière la question essentielle du fondement du droit de punir. De nouveau, les frontières du droit commun sont mises à l'épreuve de l'exception et il est tentant de chercher dans le passé les réponses aux angoisses soulevées par une telle interrogation. Par-delà les difficultés, nombreuses, qui accompagnent la question de la légitimation du droit de punir, c'est la fibre élémentaire du vivre ensemble que ce syntagme fait vibrer. D'aucuns font alors état de la nécessité de ne pas mésinterpréter la notion « schmittienne » de Feind et de distinguer l'inimicus criminel de l'hostis omnium politique. D'autres tentent de remonter aux origines en faisant dialoguer Kant et Fichte, mais on pourrait tout autant interpeller des auteurs qui, de Rousseau - considérant que « quand on fait mourir le coupable, c'est moins comme citoyen que comme ennemi » - à Bentham - confortant l'idée que « les délinquants sont des ennemis publics » -, avaient tenté de penser les conditions de l'association politique et les modalités juridiques de sa perpétuation. Esquisser de telles généalogies n'est pas sans intérêt mais, à tout prendre, pourquoi ne pas remonter au cœur de l'orthodoxie catholique médiévale en citant ce passage méconnu du docteur angélique : « le bien commun l'emporte sur le bien particulier, aussi convient-il de sacrifier celui-ci à celui-là... Puisque la paix entre les hommes est compromise par quelques hommes dangereux, il faut les retirer de la société des hommes » ?

Si les organisateurs de ce colloque entendent encourager ceux qui voudraient se lancer dans de telles entreprises, leur parti est toutefois de tenter de saisir comment chaque époque a pu mettre en mots ce qui aujourd'hui est porté par le signifiant droit pénal de l'ennemi. Un tel parti suppose de porter l'attention sur des « moments historiques » qui ont pu s'articuler autour d'un tel objet. De ce point de vue, le XVIIIe siècle et la révolution française, la IIIe République, le XXe siècle arc-bouté sur la seconde guerre mondiale, ainsi que la période contemporaine, semblent propices, justement parce que ces moments sont saturés d'une historiographie ou d'une littérature partisane, pour engager une discussion dans des conditions aussi sereines que possible. Dès lors, un tel colloque trouve-t-il sa principale raison d'être dans la rencontre de champs disciplinaires trop longtemps cantonnés dans leur pré carré découpé par les exigences de l'enseignement académique et les cloisonnements institutionnel, parfois excessifs, de la recherche scientifique.

Parce qu'il s'agit d'interroger un syntagme qui se situe au carrefour du droit et de la politique, mobilisant les dialectiques du commun et de l'exception et, à travers elle, celle de la vie et de la mort, il est nécessaire de le confier aux juristes, historiens, philosophes, sociologues, sémiologues, linguistes et à tous ceux qui cultivent l'art délicat de la transgression des frontières disciplinaires.

Notes

  • 1 Un droit pénal postmoderne ? Mise en perspective de certaines évolutions contemporaines, recherche réalisée par l’Equipe Poitevine de Recherche et d’Encadrement Doctoral en Sciences Criminelles, novembre 2007.
  • 2 V. not., La criminalité organisée, Droit français, droit international et droit comparé, ss. la dir. de J. Pradel et J. Dallest, LexisNexis, 2012.

Modalités de participation

Adresser vos propositions de contribution (10 000 signes, 5 mots clés)

au plus tard le lundi 9 septembre 2013

Par voie postale :

Jean-François Dreuille
Faculté de Droit de Chambéry
Université de Savoie
b.p. 1104
73 011 Chambéry cedex

Par courrier électronique :

Comité scientifique

  • Heike Jung, Professeur émérite, Université de la Sarre
  • Jean-Charles Froment, Professeur de droit public, science-po Grenoble
  • Martine Kaluszinki, Socio-historienne, Directeur de recherche au CNRS
  • Anne Simonin, Historienne, Directeur de recherche au CNRS, Directrice de la maison française d'Oxford
  • Thierry Ménissier, Maître de conférences de philosophie politique, Grenoble
  • Pierrette Poncela, Professeur de droit privé et sciences criminelles, Paris Ouest
  • Geneviève Giudicelli-Delage, Professeur de droit privé et sciences criminelles Paris I
  • D. Scalia, Docteur en droit international pénal, chercheur à l'université catholique de Louvain et de Genève
  • Xavier Pin, Professeur de droit privé et sciences criminelles, Université Jean Moulin, Lyon III
  • Jérôme Ferrand, Maître de conférences en histoire du doit, UPMF, Grenoble
  • Jean-François Dreuille, Maître de conférences de droit privé et sciences criminelles, Université de Savoie, Chambéry

Organisation des journées d’études

  • Jean-François Dreuille, Faculté de droit de Chambéry,  Université de Savoie
  • Jérôme Ferrand, Faculté de droit de Grenoble, Université Pierre Mendès-France
  • Xavier Pin, Faculté de droit de Lyon, Université Jean Moulin, Lyon III

Lieux

  • Faculté de Droit de Chambéry - Université de Savoie
    Chambéry, France (73)

Dates

  • lundi 09 septembre 2013

Mots-clés

  • droit pénal, politique criminelle, criminologie, histoire, philosophie politique, sociologie politique

Contacts

  • Jérôme Ferrand
    courriel : jerome [dot] ferrand [at] upmf-grenoble [dot] fr
  • Jean-François Dreuille
    courriel : jean-francois [dot] dreuille [at] univ-savoie [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • Jean-François Dreuille
    courriel : jean-francois [dot] dreuille [at] univ-savoie [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Droit pénal et politique de l'ennemi », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 20 mars 2013, https://doi.org/10.58079/mvw

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