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Les Océaniens dans la première guerre mondiale

Nation, nationalisme et sentiment d’appartenance

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Publié le vendredi 22 mars 2013

Résumé

Cet appel à communication et /ou à publication concerne la part prise par les îles et les États du Sud Pacifique dans la Grande Guerre (1914-1918) ainsi que ses conséquences notamment dans la mise en place du sentiment d’appartenance et du nationalisme insulaire. Le bombardement de la ville de Papeete par deux navires allemands, le 22 septembre 1914, plonge l’Océanie dans la guerre dès les premières semaines du conflit. Les chiffres, signes, symboles, et représentations de l'engagement du sud Pacifique dans le conflit sont souvent négligés, dispersés ou perdus au milieu d’autres implications, d’autres conséquences, d’autres signes. En conséquence, la part du Sud Pacifique dans la Grande guerre et ses conséquences, et non pas la Grande Guerre en elle-même, constitue l’objet d’un projet pluri-annuel de recherches.

Annonce

Le programme de recherche Destins d’Outre-Mer et d’Océanie, 1914-2018 : nation, nationalisme et sentiment d’appartenance (DOMO 14-18) qui veut approfondir la thématique du sentiment d’appartenance suite au colloque Destins des collectivités politiques d’Océanie de mars 2011, organise, en lien avec le centenaire de la Première Guerre mondiale, un colloque international intitulé : Les Océaniens dans la première guerre mondiale.

Argumentaire

Espace essentiellement maritime, qui justifie pleinement la traditionnelle appellation d’ « Océanie », le « cinquième continent » si différent des autres et si original, se définit d’abord par son immensité. L’Océanie, région qui est au cœur de l’étude, englobe[1] au sud de l’Équateur, l’Australie et la Nouvelle-Zélande et l’ensemble des archipels constituant, selon une appellation traditionnelle héritée de Jules Dumont-d’Urville, la Mélanésie[2], la Polynésie[3] et la Micronésie[4]. Les États insulaires privilégient l’appellation de Pacifique Sud, expression qui inclut alors l’archipel des Hawaii, bien qu’il forme à de nombreux égards un cas à part. Ne représentant que des surfaces modestes de quelques km² à quelques milliers de km² (à l’exception de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande), les îles et archipels dispersés au sein de ces solitudes océaniques n’ont pas été épargnés par les grands enjeux internationaux. À la veille de 1914, à l’exception de Tonga, elles sont administrées par des puissances occidentales ce qui les met rapidement et brutalement en contact avec la réalité et les conséquences du premier conflit planétaire.

Le bombardement de la ville de Papeete[5] par deux navires allemands, le 22 septembre 1914, plonge l’Océanie dans la guerre dès les premières semaines du conflit. En s’imposant jusqu’aux îles des antipodes où le temps était censé « suspendre son vol », cette guerre atteint une ampleur mondiale. L’implication des contingents d’outre-mer, parfois massive au regard des chiffres des populations, demeure encore méconnue voire totalement ignorée de l’histoire d’une guerre pourtant largement et longuement étudiée, « et pourrait en constituer un vaste domaine » selon l’historien Jacques Frémeaux qui rappelle « l’acharnement de Clémenceau en 1917 et 1918 à mobiliser les contingents coloniaux »[6]. Les chiffres, signes, symboles, et représentations de cet engagement océanien sont souvent négligés, dispersés ou perdus au milieu d’autres implications, d’autres conséquences, d’autres signes. En conséquence, la part du sud Pacifique dans la Grande Guerre et ses conséquences, et non pas la Grande Guerre en elle-même, constitue l’objet d’un projet pluri-annuel qui s’inscrit dans un programme de quatre ans, appelé Destins d’outre-mer et d’Océanie, 1914-2018 : nation, nationalisme et sentiment d’appartenance. Cet appel à communications qui concerne un premier colloque international à Amiens du 17 au 20 avril 2014 puis à Rochefort le mois suivant, veut dresser un état des lieux d’une question qui, selon Jacques Frémeaux (p. 220) n’est « qu’en apparence « exotique » : les problématiques de l’historiographie récente » s’y appliquant pleinement.

L’effort consenti et ses conditions : Dans un premier temps, s’impose une réévaluation de la place du sud Pacifique dans le conflit, et concerne tant la population autochtone des îles que ses migrants et ses colons dont certains ne quittèrent cet espace géographique que le temps du conflit. Il s’agit du recrutement des hommes et de ses méthodes, (agents, moyens, cadres juridiques, etc.), desstatuts et des fonctions exercées (manœuvres[7], combattants, auxiliaires, travail forcé), et bien sûr de l’ampleur démographique de la mobilisation/réquisition, massive au regard des populations insulaires. Ainsi, environ 2 300 Néo-Calédoniens et 900 Tahitiens[8] entrent dans le bataillon des Tirailleurs du Pacifique. Un bilan de l’effort total d’hommes issus tant de l'Empire français que britannique peut-il être établi : hommes incorporés (tués, disparus, prisonniers, blessés), itinéraires suivis, tâches accomplies, lieux de stationnement et de combat, etc. ?

Cependant, produit des représentations d’une communauté, l’histoire ne coïncide pas nécessairement avec la mémoire des communautés. Aussi, ce que retiennent les ressortissants du sud Pacifique de leur part au conflit, de son caractère mondial, vital, des attitudes des élites, des valeurs océaniennes qui justifient ou non leur participation (mobilité, soumission, sens du sacrifice et impôt du sang, tradition guerrière, enjeu de prestige), de leur vison et de la réalité de l’expérience du Front (voyage jusqu’au front, dépaysement, communautarisme, etc.) au travers de leur correspondance, journaux intimes, récits mais aussi d’études postérieures, constitue l’avers de ce premier volet. L’étude possible des itinéraires individuels destinée à renseigner sur les parcours collectifs s’inscriront de préférence dans les méthodologies propres aux historiens, par exemple celles du courant historiographique des post-colonial studies qui veut éviter les raccourcis occidentaux et un euro-centrisme souvent dénoncé.

Le Premier conflit mondial fondateur de la nation : Un second volet porte sur l’impact, voire l’instrumentalisation de la Grande Guerre dans la construction identitaire des îles et des sociétés au cours du siècle (1914-2014). S’avère-t-elle un ancrage historique, étant par exemple perçue comme une rupture de l’homogénéité culturelle sereine concomitante à une ère de modernité, ère de refondation de sociétés multiculturelles et polyethniques facilement en conflit, ou au contraire une ère de reconnaissance sociale/politique pour les sacrifices consentis ? Le rôle de la Première Guerre mondiale dans la mise en place du sentiment d’appartenance et du nationalisme insulaire retient ici l’intérêt. Si l’on en croit l’exemple de Pouvana a Oopa[9] du Bataillon du Pacifique devenu père du nationalisme en Polynésie française, l’expérience de la métropole et du Front semble nourrir les luttes postérieures de certains « poilus » pour une évolution institutionnelle de leur archipel. Cependant, alors que Tahitiens et Néo-Calédoniens découvrent que la pleine signification de leur appartenance à la France leur impose de venir la défendre sur son sol, pour les Néo-Zélandais et les Australiens au contraire, le conflit constitue la concrétisation de leur existence sur la scène internationale. La Grande Guerre devient-elle le mythe fondateur, objet de fierté et d’orgueil national, et donc le fondement de la construction identitaire de ces nouvelles nations ? Aux cimetières érigés sur place au temps des combats (le rapatriement des corps étant alors impossible), édiles et gouvernements ajoutent des monuments aux morts et des mémoriaux. Une importante « diplomatie mémorielle » notamment australienne et néo-zélandaise s’est mise en place en Belgique, en Grèce ou en Turquie, mais aussi et surtout dans la Somme. Les pèlerinages sur le Front dès 1919, les signes et symboles et représentations symboliques propres à l’Océanie, la politique de l’image mémorielle et les « usages politiques du passé », l’esthétique de la mémoire matérielle et de la construction identitaire, le patrimoine et le tourisme de mémoire constituent un échantillon non exhaustif des thématiques de ce volet sur les héritages du premier conflit mondial en Océanie, son poids dans ses transformations, le sens donné à cet événement et les variations des constructions identitaires.

La place du sud Pacifique dans la Guerre peut aussi s’apprécier au travers des productions culturelles réalisées entre 1914 et 2018. La littérature (fictions, autobiographies, bandes dessinées), l’image animée ou fixe (photos privées, presses illustrées nationales ou internationales, presse de propagande, œuvres d’art, imagerie populaire), ou encore les faits de langues (par exemple l’argot des tranchées ), permettrait également de déterminer l’effort de guerre du Pacifique Sud tant dans ses représentations culturelles (spécificité des Océaniens, solidaires et loyaux ou interdits de permission/désertion par l’éloignement, inadaptés au froid, objets du racisme/de sacrifices excessifs) que dans celles des Occidentaux (le mythe de la barbarie des coloniaux, leur assignation aux bataillons d’étapes ou au contraire aux bataillons de combat, l’édition de journaux spéciaux et/ou de courriers pour combler l’éloignement). Les représentations sociales de l’Océanie et des Océaniens dans le conflit, avant, pendant et après l’événement, en fonction des époques comme des espaces préciseront la perception des Océaniens dans la Grande Guerre. Certaines communications pourraient prendre place dans le courant historiographique des visual studies, représentations – littéraires, historiques, cinématographiques, iconographiques – de l’autre.

Le projet met l’Océanie au centre de la scène du théâtre du conflit et les communications ne devront aborder qu’à la marge la guerre elle-même. Ce premier colloque destiné à mesurer le poids de la Première Guerre mondiale, sans omettre les problèmes internes qu’elle génère (révoltes des autochtones, francisation, maintien de l'ordre par les gouverneurs, problèmes sociaux, tensions et adaptations pour d'aussi faibles populations au départ massif d'hommes jeunes), tente d’inventorier les études existantes, de combler les lacunes historiographiques mais aussi d’engager une véritable perspective comparatiste à travers l’espace et le temps afin que l’approche monographique et surtout descriptive cède la place à une étude d’ensemble, dans un va-et-vient entre histoire et mémoire, entre global et local. Il s’agit moins de dresser une typologie des différentes îles et sociétés du Pacifique, mais, à l’aune de leur diversité, de conduire une réflexion sur la manière dont ces îles se sont/ont été impliquées dans la Grande Guerre, comment s’est façonné un « atlas mental » de cette implication tant en Océanie qu’en Occident, et quels en sont les héritages. La construction des identités nationales et des mythes nationaux (objets politiques, sociaux, culturels voire économiques) à laquelle ont pu contribuer les champs intellectuels (littéraires, artistiques) et politiques est au centre de cette histoire. Selon les propos de Françoise Vergès[10] il ne s’agit « pas de pieuse invocation de la mémoire, mais une écriture de l’histoire ouverte aux réinterprétations, aux découvertes, aux relectures ».

Modalités de soumission

Le colloque se tiendra à Amiens en prélude à l’Anzac Day du 17 au 19 avril 2014, et pour les questions relatives à l’image animée, à Rochefort en préambule du Festival du Cinéma du Pacifique Sud, du 27 au 29 mai 2014.

En Picardie, une visite des mémoriaux est envisagée le dimanche 20 avril.

Les propositions de communications devront présenter brièvement les sources mobilisées (archives, témoignages…), donner un titre provisoire + un résumé en anglais et en français, d’une longueur maximale de 500 mots + 4/5 mots-clés dans les deux langues + un curriculum vitae d’une dizaine de lignes soulignant les liens entre la communication et les travaux déjà menés ou en cours, et enfin les coordonnées personnelles ou professionnelles de l’auteur.

Merci de les adresser à vivianefayaud[at]gmail[point]com,

avant le 15 juin 2013.

Les auteurs seront informés dès le 1er juillet de l’acceptation de leur participation. Les propositions d’interventions non-conventionnelles sont possibles : tables rondes, débats, ateliers, posters.

Afin d’encourager le débat, les communications seront diffusées avant le colloque. Après un temps de réponse réservé des auteurs, le débat sera ouvert à l’assistance. Une version des communications sélectionnées à diffuser aux intervenants est attendue pour le 15 mars 2014.

Les langues de communication sont le français et l’anglais avec traductions simultanées dans ces deux langues (à confirmer). Ce colloque veut rassembler des chercheurs, qu’ils soient doctorants ou chercheurs établis, autour de nouvelles approches de l’Océanie, et contribuer aux collaborations interdisciplinaires et aux échanges.

Il n’y a pas de frais d’inscription. Les frais d’hôtel et de restauration seront pris en charge. Les chercheurs qui ne pourraient pas être financés par leur institution de rattachement dans leurs frais de déplacements pourront contacter : regnaultjm[at]yahoo[point]fr

Appel à publication

Il est possible de proposer un article pour la publication qui suivra le colloque indépendamment de la participation au colloque. Les propositions doivent être soumises avant le 15 juin 2013. Le résumé inclura les sources mobilisées (archives, témoignages, etc…), le titre provisoire + un résumé en anglais et en français, d’une longueur maximale de 500 mots + 4/5 mots-clés dans les deux langues + un cv d’une dizaine de lignes mettant en valeur les travaux précédents ou en cours liés aux thématiques du colloque.

Les textes acceptés, issus ou non d’une communication aux colloques d’Amiens et de Rochefort, devront être compris entre 35 et 45 000 signes et suivre les normes d’édition qui seront adressées lors de l’acceptation de la proposition. Le comité se réserve le droit de renvoyer les textes à leurs auteurs pour modification et celui d’écarter les contributions ne répondant pas aux critères retenus pour la cohérence de la publication, indépendamment de la qualité des communications.

Les auteurs seront informés de la décision au 1er juillet 2013.

Les textes retenus devront être remis au plus tard le 1er juillet 2014.

Calendrier

  • 15 juin 2013 : fin de l’envoi des propositions de communications et d’articles

  • 1er juillet 2013 : réponse aux auteurs
  • 15 mars 2014 : envoi des textes de communications pour diffusion aux intervenants et des articles pour le Comité scientifique
  • 1er juillet 2014 : réception des textes finalisés pour la publication des actes

Comité scientifique

  • Jacques Frémeaux, professeur des universités en histoire contemporaine, Université de Paris Sorbonne (Paris IV).
  • Philippe Nivet, professeur des universités en histoire contemporaine et vice-président de l'Université de Picardie JulesVerne, Directeur du Centre d'Histoire des Sociétés, des Sciences et des Conflits (CHSSC).
  • Jean-Marc Regnault, maître de conférences honoraire, chercheur associé du GDI de l’Université de la Polynésie française.
  • Robert Aldrich, Professor of European History, University of Sydney.
  • Louise Dessaivre, Conservateur et directrice de la Bibliothèque universitaire, Université de Picardie JulesVerne.
  • Viviane Fayaud, Dr en histoire et histoire de l’art, chercheure associée du Centre d’histoire des sociétés, des sciences et des conflits, Université de Picardie Jules Verne, et du Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines, Université de Versailles-Saint-Quentin en Yvelines.

[1] Luc Vacher, Sarah Mohamed-Gaillard, Fabrice Argounès, Atlas de l’Océanie, Paris, Autrement, 2011.

[2] La Mélanésie aussi appelé l’espace des îles noires par référence aux grandes terres volcaniques qui la composent, comprend la Nouvelle-Calédonie, le Vanuatu anciennement Nouvelles-Hébrides, la Papouasie Nouvelle-Guinée, Fidji et les îles Salomon.

[3] La Polynésie est l’espace des îles nombreuses et dispersées. Le triangle polynésien qui s’étend au Nord jusqu’à Hawaii, au Sud-est à Rapa Nui et au Sud-ouest à la Nouvelle-Zélande comprend la Polynésie française, Wallis et Futuna, les îles Cook, Niue, Pitcairn, Samoa, les Samoa américaines, Tokelau, Tonga, Tuvalu ex-îles Ellice.

[4] La Micronésie ou aire des petites îles émiettées comprend Nauru, Palau, les îles Marshall, les Mariannes du Nord, Guam, les États Fédérés de Micronésie et Kiribati ex-îles Gilbert.

[5] Voir les clichés de Lucien Gauthier, Bombardement de Tahiti, 1914.

[6] Jacques Frémeaux, « Les contingents impériaux au cœur de la guerre », Histoire, économie et sociétés, 2004, n°2, p. 215-233, p. 215.

[7] L’enrôlement de la main-d’œuvre chinoise dont témoigne le cimetière de Nolette en Picardie.

[8] Voir Sylvette Boubin-Boyer, « Communautés calédoniennes et guerres mondiales », in J.-Y. Faberon, V. Fayaud, J-M Regnault, Destins des collectivités politiques d’Océanie, Aix-en-Provence, PUAM, 2011, p. 593-603 ; Corinne Raybaud, Les EFO pendant la Première guerre mondiale, Papeete, 2011.

[9] Catherine Vannier, Jean-Marc Regnault, Le Metua et le Général, un combat inégal, Éditions de Tahiti, 2009.

[10] Les Guerres de Mémoire, Paris, éd. La Découverte, 2008.

Lieux

  • Amiens, France (80)
  • Rochefort, France (17)

Dates

  • samedi 15 juin 2013

Mots-clés

  • Pacifique Sud, Océanie, première guerre mondiale, histoire, représentations sociales

Contacts

  • Viviane Fayaud
    courriel : viviane [dot] fayaud [at] u-picardie [dot] fr
  • Jean-Marc Regnault
    courriel : regnaultjm [at] yahoo [dot] fr

Source de l'information

  • Viviane Fayaud
    courriel : viviane [dot] fayaud [at] u-picardie [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Les Océaniens dans la première guerre mondiale », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 22 mars 2013, https://doi.org/10.58079/n4i

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