AccueilJeunesses, vulnérabilités et marginalités autour de la Méditerranée (XIXe-XXe siècles)

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Jeunesses, vulnérabilités et marginalités autour de la Méditerranée (XIXe-XXe siècles)

The Vulnerability and Marginality of Youth in the Mediterranean Basin (19th-20th centuries)

Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière »

French Journal for the History of “Unconventional” Childhood

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Publié le vendredi 18 juillet 2014

Résumé

La Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière » consacre son prochain numéro à la façon dont la jeunesse marginale a été perçue et prise en charge dans les pays méditerranéens au XIXe et au XXe siècles. L’espace géographique étudié comprend la rive Nord de la Méditerranée, le Levant, le Machrek et le Maghreb. Il s’agit de questionner la notion de bassin méditerranéen en tentant de voir si, sur le terrain des politiques de la jeunesse, la Méditerranée relève d’une construction culturelle ou idéologique, ou si au contraire des éléments d’unité, de spécificité et de continuité sont repérables.

Annonce

Argumentaire

Le « Printemps arabe » a récemment posé la question de la place des jeunes dans l’espace public des pays de la rive sud de la Méditerranée. Face au rôle marginal que lui assignaient des sociétés confrontées au chômage, à la corruption et au blocage des mécanismes de représentation politique, la jeunesse est apparue comme une force de contestation capable de  se mobiliser massivement et dans la durée pour faire entendre ses revendications. A la lumière de ces événements récents, le prochain numéro de la Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière » souhaite interroger le rôle de la jeunesse dans les pays du pourtour méditerranéen en s’inscrivant dans le temps long du XIXe et du XXe siècles, et en se centrant sur les préoccupations qui sont les siennes, à savoir la marginalité et la déviance.

Le cadre géographique choisi comprend les pays riverains du bassin méditerranéen (rive nord de la Méditerranée, Levant, Machrek et Maghreb). Il ne s’agit pas de se départir complètement  du modèle braudélien et de sa vision de l’unité méditerranéenne qui, soixante-cinq ans après la parution de La Méditerranée au temps de Philippe II, exerce toujours son influence sur les sciences sociales, mais bien de tenir compte des critiques qui en ont été faites. L’anthropologue Michael Herzfeld  a par exemple forgé la notion de « méditerranéisme », sur le modèle de « l’orientalisme » d’Edward Saïd, pour critiquer les positions des anthropologues considérant la Méditerranée comme une entité unique et homogène, et relayant une diversité de stéréotypes sans questionner la façon dont ceux-ci avaient été forgés et diffusés [1]. Le présent appel se propose justement de questionner la notion de bassin méditerranéen en tentant d’apporter des éléments de réflexion pour savoir si, sur le terrain des politiques de la jeunesse, la Méditerranée relève d’une construction culturelle ou idéologique, ou si au contraire des éléments d’unité, de spécificité et de continuité sont repérables.

Les propositions pourraient aborder les thèmes suivants

1) Les caractéristiques des politiques de la jeunesse dans l’espace méditerranéen

Si « l’unité du monde méditerranéen ne peut être postulée » [2], peut-on néanmoins détecter des similitudes entre les diverses politiques publiques en matière de gestion des jeunes classes d’âges dans les différents pays constitutifs de cet espace ? Si oui, des mécanismes spécifiques d’échanges, de circulation des pratiques et des modèles institutionnels et législatifs de prise en charge de la jeunesse marginale peuvent-ils être repérés ? En quoi se différencient-ils des mécanismes similaires identifiés dans d’autres espaces (transatlantiques, transcontinentaux, globaux) ? Existe-t-il des temporalités propres aux sociétés méditerranéennes dans l’élaboration de dispositifs de la gestion et de contrôle de la jeunesse en danger ou à risque, notamment en rapport avec diverses formes de « modernité » (sociabilité juvénile, pratiques de consommation, addictions) ?

2) La définition de l’identité juvénile

La question des seuils d’âges permettant de délimiter respectivement l’enfance et la jeunesse pourra en outre être étudiée à partir de l’espace méditerranéen : les politiques de protection ou d’encadrement qui y sont mises en place se distinguent-elles des dispositifs mis en œuvre dans d’autres aires géographiques et culturelles ? Âge de la majorité civile ou pénale, âge au mariage, âge minimum pour l’entrée au marché du travail sont en effet étroitement conditionnés par des facteurs culturels délimitant un accès progressif à l’autonomie et à l’indépendance juvéniles. Au Maroc par exemple, on définit moins les « jeunes » par rapport aux « vieux », que par rapport à des possibilités inégales d’insertion dans la société [3]. Comment la fixation de ces seuils a-t-elle évolué face à différents chocs de modernité au cours des décennies, et avec quels effets sur les dispositifs de contrôle des déviances ou de protection des vulnérabilités ?

3) Les acteurs collectifs et individuels

On s’interrogera sur la diversité des acteurs intervenant dans la prise en charge de la jeunesse marginale, en danger ou dangereuse, et notamment sur la répartition des tâches entre les secteurs privé et public. Quelle est, dans les différents pays, la part du fait religieux et quels rôles jouent les organisations liées aux différentes religions (complémentarité, concurrence, compartimentation) ? Il s’agira ici de questionner un certain nombre de stéréotypes, faisant par exemple des pays d’Europe du Sud des sociétés archaïques dans lesquelles l’Eglise (catholique ou orthodoxe) joue un rôle prépondérant, figurant autant de réceptacles tardifs de modèles venus d’Europe du Nord. On questionnera en outre le rôle des communautés religieuses dans les territoires de culture islamique et leur rapport, spécifique ou non, aux phénomènes de déviance juvénile, à leur perception et à leur prise en charge.

4) Mouvements et migrations juvéniles

Si l’espace méditerranéen est traversé de courants et de mouvements circulatoires multidirectionnels, la question de la place des jeunes dans ces déplacements, volontaires ou subis, peut être posée. Dans quelle mesure les jeunes classes d’âge participent-elles de ces flux, selon quelles logiques et dans quelles circonstances (isolés, en famille, absences temporaires ou migration à plus long terme) ? Observe-t-on, dans les territoires du pourtour méditerranéen, des cycles migratoires propres aux populations juvéniles et, si oui, avec quels effets sur les pays d’accueil ou de départ ?

5) Déviance juvénile et rapports de genre

Dans les pays de la rive nord de la Méditerranée, il est désormais prouvé que la déviance des filles n’est pas perçue de la même manière que celle des garçons, les familles et les autorités étant plus sensibles à la dimension morale de leur inconduite. Cette dimension genrée de la prise en charge de la marginalité des jeunes est-elle prégnante dans les pays du Levant, du Machrek et du Maghreb, accréditant alors l’idée de représentations sociales transcendant les normes et les pratiques culturelles, religieuses et politiques ?

6) Contexte colonial et gestion des populations juvéniles

Le rapport au colonialisme et à l’impérialisme pourra également être interrogé par le biais d’entrées multiples, en posant par exemple la question de l’origine des normes en vigueur dans les pays colonisés : les politiques et les pratiques en contexte colonial ou postcolonial constituent-elles de simples prolongements de l’Etat métropolitain ou, au contraire, un ensemble de dispositifs juridiques autonomes ? Dans quelle mesure le statut politique et administratif des territoires considérés influe-t-il sur la direction prise par les dispositifs étudiés (contrôle direct, protectorats, territoires sous mandat) ? Les comportements et les situations vécues ou subies par les jeunes, mais aussi les réponses qui y sont apportées par les autorités, ont-ils été affectés par le fait colonial ou par les différentes étapes du processus de décolonisation (phénomènes de vulnérabilité et/ou de violence spécifiques) ?

En définitive, ce numéro souhaite apporter de nouveaux éléments d’interprétation à notre connaissance du développement historique des systèmes de gestion de la jeunesse en difficulté ou déviante en questionnant, pour ce faire, la pertinence du choix d’un cadre d’analyse spatial et ses implications socio-culturelles.

[1] Herzfeld Michael, « The horns of the Mediterraneanist dilemma », American Ethnologist, vol. 11, n°3, 1984, p. 440 ; idem, « Of Horns and History: The Mediterraneanist Dilemma Again », American Ethnologist, vol. 12, n°4, 1985, p. 779.

[2] Chastagnaret Gérard, Ilbert Robert, « Quelle Méditerranée ? », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, n°32, octobre-décembre 1991, pp. 3-6.

[3] Bono Irene, « Une lecture d'économie politique de la « participation des jeunes » au Maroc à l'heure du Printemps arabe », Revue internationale de politique comparée, 2013/4, vol. 20, p. 148.

Modalités de soumission

Les propositions de communication (en français ou en anglais) doivent contenir les informations suivantes :

  • nom et prénom
  • université
  • fonction
  • court CV avec e-mail
  • titre de la communication
  • résumé de 250 à 500 mots.

La revue paraîtra en novembre 2015.

La date limite de soumission des propositions est repoussée au 31 décembre 2014.

Responsables scientifiques

  • Joëlle Droux, maître d’enseignement et de recherche à l’Université de Genève (Joelle.Droux@unige.ch)
  • Amélie NUQ, maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université Pierre-Mendès-France de Grenoble (amelie.nuq@upmf-grenoble.fr)

Dates

  • mercredi 31 décembre 2014

Mots-clés

  • jeunesse marginale, politiques de la jeunesse

Contacts

  • Amélie Nuq
    courriel : amelie [dot] nuq [at] univ-grenoble-alpes [dot] fr

Source de l'information

  • Amélie Nuq
    courriel : amelie [dot] nuq [at] univ-grenoble-alpes [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Jeunesses, vulnérabilités et marginalités autour de la Méditerranée (XIXe-XXe siècles) », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 18 juillet 2014, https://doi.org/10.58079/qn3

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