Página inicialEntre opposition et participation. Les syndicats face aux réformes en Afrique

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Entre opposition et participation. Les syndicats face aux réformes en Afrique

Between opposition and participation. The unions faced with reforms in Africa

Revue Tiers Monde

Tiers Monde journal

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Publicado segunda, 03 de novembro de 2014

Resumo

Ce numéro propose d’interroger le rôle des syndicats dans les changements économiques et politiques que l’Afrique a connus au cours de ces deux dernières décennies. Les syndicats ont été directement impliqués et / ou affectés par la libéralisation de la vie politique, la réforme des institutions publiques, la privatisation croissante de l’économie et l’implantation de nouveaux investisseurs. La manière dont ils ont fait face à ces changements offre un angle particulièrement fécond pour analyser les rapports de force auxquels ceux-ci ont donné lieu. L’ambition de ce numéro est de mettre en exergue l’inscription des syndicats dans la fabrique des sociétés africaines contemporaines en plaçant au centre de la réflexion l’ambivalence de leurs rapports avec les entreprises et l’État. L’objectif est ainsi d’étudier les dynamiques qui traversent le champ de la représentation des intérêts et les espaces de participation, entre opposition, adaptation et collaboration avec les pouvoirs économiques et politiques.

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Argumentaire

Ce numéro propose d’interroger le rôle des syndicats dans les changements économiques et politiques que l’Afrique a connus au cours de ces deux dernières décennies. Les syndicats ont été directement impliqués et/ou affectés par la libéralisation de la vie politique, la réforme des institutions publiques, la privatisation croissante de l’économie et l’implantation de nouveaux investisseurs. La manière dont ils ont fait face à ces changements offre un angle particulièrement fécond pour analyser les rapports de force auxquels ceux-ci ont donné lieu. L’ambition de ce numéro est de mettre en exergue l’inscription des syndicats dans la fabrique des sociétés africaines contemporaines en plaçant au centre de la réflexion l’ambivalence de leurs rapports avec les entreprises et l’État. L’objectif est ainsi d’étudier les dynamiques qui traversent le champ de la représentation des intérêts et les espaces de participation, entre opposition, adaptation et collaboration avec les pouvoirs économiques et politiques.

La lecture de la production scientifique récente sur le syndicalisme en Afrique révèle quelques angles privilégiés et des disparités. Dans leur majorité, les travaux sur le syndicalisme reviennent sur le rôle joué par les syndicats dans les processus de libéralisation politique que plusieurs pays africains ont connus dans le cours des années 1990 (voir la bibliographie). Ils se concentrent de ce fait sur les pays où les syndicats ont effectivement joué un rôle dans ces processus (principalement l’Afrique du Sud, le Ghana, et la Zambie) pour éclairer leurs rapports avec les partis politiques. Par contraste avec ces travaux, ce numéro porte principalement sur le devenir du syndicalisme depuis la vague des libéralisations politiques, dans le contexte des réformes institutionnelles et économiques des années 1990 et 2000. Au plan théorique, il a pour ambition de rompre avec la visée normative et téléologique sous-jacente à nombre de ces travaux, qui voient a priori dans les syndicats un vecteur de changement démocratique, pour mieux penser les rapports de dépendance réciproque qu’ils entretiennent avec les entreprises et les partis politiques.

Enfin, ce numéro souhaite rassembler des contributions qui permettront de couvrir un large spectre des différentes situations syndicales en Afrique, en offrant pour la première fois dans une revue scientifique francophone un panorama de la diversité des usages de cette forme d'organisation sur ce continent.

Contextualisation

Dans un contexte marqué par la remise en cause des régimes autoritaires et le soutien des institutions financières internationales à la « société civile », la majorité des pays africains ont autorisé, dans le cours des années 1990, la création de nouveaux syndicats pour représenter les intérêts des travailleurs. Les centrales uniques du passé ont alors cédé la place à un nombre plus ou moins important de syndicats entre lesquels s’est développée une concurrence parfois féroce, et ce sans que l’on puisse toujours clairement évaluer leur représentativité et distinguer leurs orientations idéologiques. Le syndicalisme a pu être affaibli par le poids croissant des associations et organisations non-gouvernementales et la fragmentation du champ de la représentation des intérêts sociaux. En même temps, comme on a pu le constater lors des mobilisations qui ont conduit au renversement de plusieurs régimes autoritaires (tout récemment encore lors du « printemps arabe » en Tunisie ou de la crise politique qui a suivi le putsch militaire au Mali en 2012), il n’en est pas moins demeuré, dans de nombreux pays, une force sociale incontournable. Celle-ci n’a en tout cas pas échappé aux milieux patronaux et aux dirigeants, qui continuent à s’ingérer dans les syndicats pour tenter de les contrôler et de les maîtriser. Mobilisations contre la « vie chère », participation à de larges coalitions politiques, luttes contre les privatisations, grèves dans le secteur public : les syndicats restent plus que jamais un objet propice pour analyser les évolutions de la situation politique et sociale en Afrique.

Le dynamisme politique des syndicats est plus visible dans certains pays africains que dans d’autres et contraste souvent avec leur faible capacité à influencer les politiques économiques et sociales. Depuis les années 1980, la plupart des pays africains ont été contraints par les institutions financières internationales de réduire leur appareil administratif, de privatiser les entreprises publiques et de prendre des mesures pour attirer des investisseurs privés. Ces politiques ont fortement impacté les secteurs qui constituaient autrefois des bastions syndicaux : les chemins de fer, l’enseignement, ou encore les mines. Quant aux entreprises privées, que leurs activités soient formelles ou non, elles recourent très largement à différentes formes de travail précaire sur lesquelles les syndicats ont très peu de prise. A une échelle plus large, l’afflux de nouveaux investisseurs étrangers, qui permet à certains pays africains d’afficher des taux de croissance bien supérieurs à ceux de l’Europe, ne doit pas masquer le fait que leurs activités génèrent généralement peu de retombées pour l’État et les populations locales. Cette « croissance sans développement » a suscité l’émergence de mouvements de protestation, dans lesquelles les syndicats et leurs partenaires à l’étranger se trouvent souvent, mais pas toujours, au premier plan. Les réactions et positionnements des syndicats sur ces enjeux constituent d’excellents révélateurs de la manière dont se forment les coalitions et les clivages entre factions à l’échelle locale, nationale et internationale.

Cela étant dit, le syndicalisme africain n’est pas un objet univoque. Non seulement il peut constituer un moyen de contrôle social tout autant qu’un instrument au service des luttes, mais il intervient également, dans le même temps, dans différentes arènes et champs de pouvoir. Il faut donc penser ensemble le rôle économique, politique et social des syndicats, les distinctions en la matière résistant difficilement à l’observation. A l’échelle du continent, le syndicalisme présente par ailleurs une grande diversité, ses champs d’intervention et ses modalités d’action variant selon le poids du secteur public, le caractère autoritaire ou non du régime en place, la présence de multinationales, etc. Ce sont cette complexité et cette diversité du syndicalisme africain que ce numéro voudrait analyser plus en profondeur, en les mettant en perspective avec les bouleversements que le continent a traversés depuis les années 1990.

Axes thématiques

Ce numéro accueille des contributions qui traitent du syndicalisme (salarié, agricole, étudiant, etc.) sur l’ensemble du continent africain à partir de différentes disciplines (anthropologie, économie, histoire, science-politique, sociologie). Les contributions peuvent proposer des études de cas à partir de recherches empiriques et/ou des réflexions plus théoriques, par exemple sur les modes/répertoires d’action, les formes de mobilisation, les orientations idéologiques des syndicats, la situation des corps intermédiaires et/ou les questions de participation et représentation. Sans prétendre à l'exhaustivité, voici quatre axes susceptibles d’orienter les propositions des contributeurs, qui peuvent bien évidemment être croisés. Ils ne correspondront pas nécessairement à une division thématique du dossier.

1) Syndicats et mouvements sociaux

Dans un contexte où la marge de manœuvre des syndicats est parfois limitée du fait des restrictions imposées aux libertés publiques, il faut interroger comment cela impacte les « répertoires de l’action » et la manière dont ils portent leurs revendications. Les propositions pourront aussi porter sur les alliances et concurrences qui s’opèrent avec les ONG, associations et partis politiques, ou avec l’international, dans le cadre des mouvements sociaux. Comment émergent les revendications ? Quels rapports les syndicats développent-ils avec les ONG, les partis politiques, les organisations internationales ? Quels relations entretiennent-ils avec l'Organisation Internationale du Travail ? De quelle façon les discours passent d’une arène politique à l’autre, et entre échelles locale, nationale et internationale ? Enfin, il faut également mesurer les effets des mobilisations sur la vie syndicale, ceux-ci étant souvent porteurs de recompositions (éclatement, fusion, dissolution).

2) Le syndicalisme au quotidien

Cet axe invite à s’intéresser à la vie syndicale, à la variété des orientations et formes d’organisation syndicale. Par exemple, les propositions pourront revenir sur la façon dont les syndicats ont fait face aux réformes des administrations publiques et à la privatisation des entreprises publiques, et analyser comment ils se sont ancrés dans les entreprises nouvellement privatisées, les sociétés mixtes, et les sociétés privées en général. Elles pourront présenter le profil des leaders syndicaux, leurs trajectoires, leurs stratégies militantes, ainsi que les risques et formes de rétribution de l'engagement (avoir accès à un travail, à des formes de promotion). Il paraît important de mieux caractériser les rapports entre travailleurs, délégués syndicaux, directions syndicales et employeurs, et de mesurer ce que représente le travail des syndicalistes au quotidien, notamment dans les entreprises. Quel recours les syndicats font-ils au droit et aux tribunaux ? Quelles ressources matérielles mobilisent-ils pour financer leur action ? En quoi les syndicats participent-ils à la reproduction et/ou à la remise en question de certaines hiérarchies (de genre, d’âge, de niveau scolaire et professionnel, etc.) ? Les contributions pourront également s’intéresser aux questions de l’héritage, de la circulation et de l’évolution des modèles syndicaux (trade-union, social-démocrate, etc.) et des idéologies syndicales (marxisme, anarchisme, etc.).

3) Les syndicats dans l’arène politique

Si certaines traditions syndicales prônent l'apolitisme, cette position est souvent difficilement tenable, notamment en contexte électoral ou lors des crises qu'il occasionne (par exemple au Kenya et au Zimbabwe en 2008). De plus, beaucoup de mobilisations sociales sur des questions économiques s'imbriquent dans des revendications d’ordre politique – par exemple au Burkina Faso en 2013, où à la mobilisation contre la vie chère s'est mêlée une opposition à une possible réforme constitutionnelle permettant au chef de l’État de se représenter. Il s'agit donc ici de questionner les formes de participation des syndicats à la vie politique, à travers l'examen de leur rapport au pouvoir, au gouvernement comme aux partis de l’opposition. Il s’agit également de cerner la manière dont ils font face aux politiques de décentralisation et à la multiplication des niveaux de pouvoir. Les contributions pourront s’intéresser aux attentes que les syndicats expriment vis-à-vis de l’État (régulation, arbitrage des conflits sociaux), et à la façon dont ils s’inscrivent dans les débats politiques et participent aux luttes factionnelles qui caractérisent le champ politique.

4) Orientations économiques et services sociaux

Cet axe vise à interroger le rôle économique et social que jouent les syndicats. Les syndicats peuvent être des forces de proposition économique : comment se définissent leurs orientations et de quelle manière produisent-ils leur plaidoyer ? Les contributions pourront s’intéresser à l’engagement des syndicats dans les organismes consultatifs ou dans la cogestion (organismes paritaires ou tripartites, par exemple dans la gestion des caisses de retraite ou de l’assurance maladie). Comment les syndicats participent-ils à la production des normes dans le domaine du travail (droit du travail, convention collective, droits syndicaux) ? A la dimension représentative et combative des syndicats peut par ailleurs s’ajouter la prestation de services économiques et sociaux (mise en place de centrales d’achats, de coopératives d’habitat, etc.). Ces activités peuvent participer d’une certaine professionnalisation et bureaucratisation de l’activité syndicale, mais interroge sur leur capacité à répondre aux attentes plus militantes de la base. De quelle façon l’offre de tels services contribue-t-elle à redéfinir les rapports que les syndicats entretiennent avec les entreprises, l’État et travailleurs ?

Conditions de soumission

Les propositions d'articles (4000 signes espaces compris) sont à envoyer à Cléa Chakraverty (tiermond@univ-paris1.fr) et aux coordinateurs du numéro, Benjamin Rubbers (brubbers@ulg.ac.be) et Alexis Roy (royalexi@gmail.com)

avant le 1 décembre 2014.

Les articles (7000 mots maximum, ou 47.000 signes) devront être envoyés au plus tard le 9 mars 2015. 

Les propositions et articles peuvent être rédigés en français ou en anglais.

Coordinateurs scientifiques

  • Alexis Roy, docteur en anthropologie sociale, membre associé de l'UMR « Développement et Sociétés », IRD/Université Paris 1
  • Benjamin Rubbers, Professeur en anthropologie, LASC, Université de Liège

Repères bibliographiques

Les références ci-dessous, insérées à titre indicatif, se limitent aux ouvrages et articles récents sur la question du syndicalisme.

  • Beckman, B. et Sachikonye, LM, (eds), 2001 : Labour regimes and liberalization : the restructuring of state-society relations in Africa, Mount Pleasant, Harare, Zimbabwe : University of Zimbabwe Publications, 190 p.
  • Beckman, B., Buhlungu, S. et Sachikonye, L. (eds), 2010: Trade unions and party politics – labour movements in Africa, Cape town, HSRC Press, 224 p.
  • Barchiesi, F., Bramble, T. (eds), 2003, Rethinking the labour movement in the “new South Africa”, Aldershot, Ashgate Publishing Limited, 258 p.
  • Freund, B., 2013, 'Labour studies and labour history in South Africa: perspectives from the apartheid era and after', International review of social history, vol. 58, issue 3.
  • Kester, G., 2007, Trade unions and workplace democracy in Africa, Aldershot, Ashgate Publishing Limited, 346 p.
  • Kraus, J., 2007, Trade unions and the coming of democracy in Africa, New York, Palgrave Macmillan, 310 p.
  • Larmer, M., 2007, Mineworkers in Zambia : Labour and political change in post-colonial Africa, London & New York, Tauris Academic Studies, 270 p.
  • Phelan, C., (eds) 2011, Trade unions in West Africa, Historical and contemporary perspectives, Oxford, New York, Peter lang, 282 p.
  • Phelan C., 2011, ‘Trade unions, democratic waves, and structural adjustment: the case of francophone west Africa’, Labor history 52 (4), p. 461-481.
  • Rakner, L., 1992, Trade Unions in Processes of Democratization: A Study of Party-Labour Relations in Zambia, Bergen, C. Michelsen institute, 192 p.

Datas

  • segunda, 01 de dezembro de 2014

Palavras-chave

  • syndicalisme, mouvements sociaux, mobilisation, travail, libéralisation

Contactos

  • Benjamin Rubbers
    courriel : brubbers [at] uliege [dot] be
  • Alexis Roy
    courriel : royalexi [at] gmail [dot] com
  • Cléa Chakraverty
    courriel : tiermond [at] univ-paris1 [dot] fr

Fonte da informação

  • Alexis Roy
    courriel : royalexi [at] gmail [dot] com

Licença

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Para citar este anúncio

« Entre opposition et participation. Les syndicats face aux réformes en Afrique », Chamada de trabalhos, Calenda, Publicado segunda, 03 de novembro de 2014, https://doi.org/10.58079/r91

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