AccueilLa sociologie, une science contre nature ? Réseau thématique 11 sociologie de la consommation et des usages

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La sociologie, une science contre nature ? Réseau thématique 11 sociologie de la consommation et des usages

Sociology, an unnatural science ? RT 11 consumer sociology and uses

VIe congrès de l'association française de sociologie

VIth conference of the association française de sociologie

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Publié le jeudi 04 décembre 2014

Résumé

L’un des enjeux du prochain congrès de l'Association française de sociologie est de repenser, sans les opposer, les approches naturalistes et culturelles de la consommation. C’est en effet dans les articulations multiples, différentes selon les cas, mais avec des points de comparaison, que la dichotomie nature / culture peut être fructueuse pour la sociologie de la consommation et des usages. Assiste-t-on aujourd’hui dans certains mouvements comme « la simplicité volontaire » ou les « objecteurs de croissance » à un retour du « naturel » comme catégorie de consommation politique ? À l’autre bout du marché, les approches marketing du big data ne rejouent-elles pas, avec des moyens décuplés, une forme de naturalisation de la consommation, les intentions d’achat étant davantage prédites dans ces modèles en émergence que suggérées ? Les infrastructures et les usages liés aux TIC participent grandement de cette évolution.

Annonce

Argumentaire

La tension entre nature et culture traverse la consommation dans ses approches tant théoriques qu’empiriques. Les premiers travaux des sociologues visaient à révéler des lois dans lesquelles la consommation exprimait des besoins « naturels » des hommes vivant en société (s'alimenter, se loger, se chauffer...) (Engel). Ces besoins variaient en fonction du niveau des revenus. Le caractère naturel des choses apparaissait également dans les théories du choix rationnel, en économie comme en sociologie, dans la mesure où pour arbitrer entre différentes options, les consommateurs devaient appréhender les qualités des objets comme naturelles. Il faudra attendre les années 1970 pour que d’autres approches, s’appuyant davantage sur les travaux des anthropologues cette fois, mettent l’accent sur les marquages culturels de la consommation ; alors que l’approche bourdieusienne insistera sur sa construction et ses dynamiques sociales. Ces marques peuvent autant être celles d’un espace géographique particulier que celles d’une communauté proprement dite (Douglas). Au même moment, dans son mouvement critique, les sociologues et philosophes de la consommation en appelaient à un retour à l’authenticité (Illich), en phase avec la critique artiste du capitalisme industriel et l’émergence de nouveaux modèles faisant une large place au compromis entre les « besoins » de la nature (se reproduire, se préserver de la main de l’homme) et ceux des individus. Elle a donné lieu à de nombreux travaux liant consommation et écologie politique. Elle se prolonge aujourd’hui dans une série de modèles qui prônent le développement durable et inventent différents compromis entre les attentes supposées de la nature et des humains. Ces modèles vont de l’économie circulaire à l’économie des fonctionnalités (commercer l’usage et non les produits) en passant par l’économie du partage.

Dans les années 1980-1990, le renouveau de la sociologie économique s’est accompagné d’une autre manière de poser la question de la prise de décision. Les différents travaux ont mis en évidence que l’espace des choix sur le marché reposait sur la mise en forme et le partage d’un savoir conventionnel – donc contestable – sur la qualité des choses (Callon-Latour, Boltanski-Thévenot, Salais, Eymard-Duvernay). Les approches naturalistes ou culturelles de la consommation apparaissaient alors comme des points limites d’un modèle plus général du marché dans lequel intervenaient professionnels de l’offre et consommateurs. Ces études avaient pour particularité de reposer sur une description du fonctionnement des entreprises et oubliaient assez souvent la figure plurielle du consommateur-usager (Akrich). Ce champ est depuis largement investi, que cela soit par la sociologie des usages en ce qui concerne les technologies de l’information, que par toute une série de recherches portant sur la circulation des biens dans la sphère domestique (Appadurai).

L’un des enjeux du prochain congrès est de prolonger ces différents travaux en repensant, sans les opposer, les approches naturalistes et culturelles de la consommation. C’est en effet dans les articulations multiples, différentes selon les études de cas, mais avec des points de comparaison, que la dichotomie nature/culture peut être fructueuse pour la sociologie de la consommation et des usages. Assiste-t-on aujourd’hui dans certains mouvements comme « la simplicité volontaire » ou les « objecteurs de croissance » à un retour du « naturel » comme catégorie de consommation politique ? À l’autre bout du marché, les approches marketing du Big Data ne rejouent-elles pas, avec des moyens décuplés, une forme de naturalisation de la consommation, les intentions d’achat étant davantage prédites dans ces modèles en émergence que suggérées ? Les infrastructures et les usages liés aux TIC participent grandement de cette évolution. En effet, la disponibilité de volumes de données sans précédent sur les consommateurs, par le biais du Web, entraîne l’émergence de savoirs experts (psychologiques, marketing, commerciaux, etc.) qui essentialisent la consommation et surtout les consommateurs : leur identité sociale est en quelque sorte réduite à leurs traces sur les réseaux et à leurs comportements d’achat. On retrouve ainsi le fantasme d’une consommation « naturelle », mécanique, qui va de soi et se trouve affranchie de toute référence à un contexte socio-culturel.

Nous attendons pour le prochain congrès des contributions qui permettent de documenter ces évolutions. Selon quelles modalités pratiques s’opèrent les rencontres nature/culture et comment les deux se redéfinissent mutuellement dans l’espace d’une consommation notamment « équipée » par les TIC ? Comment ces évolutions prennent place dans la contestation de nouveaux marchés en émergence qui s’exonèrent de la définition ancienne de la nature puisqu’il s’agit d’en domestiquer les forces (nucléaire, OGM) ou d’en organiser la reproduction (gestion des déchets) ?

Le réseau thématique « Sociologie de la consommation et des usages » propose en ce sens de dépasser le clivage traditionnel entre nature et culture en explorant trois thèmes (non exclusifs).

La consommation du naturel

  • La revendication d’une consommation d’une nature « civilisée », « préservée » ou « authentique » dans des buts environnementaux et/ou de lien social avec des locaux –  tourisme vert, villages sur l'eau, vacances à la ferme, cure détox-jeune –, retraite méditative…), alimentation –, ou à l’inverse « naturalisation de la ville » – jardinage partagé (ville/campagne, loisirs/nécessité, etc.), espaces naturels variés etc.
  • L’émergence d’une consommation durable (consommation collaborative, frugale, partagée, locative, etc.) plus ou moins collective, visant parfois explicitement à préserver la nature. La réflexion pourra par exemple se tourner vers la construction d’offres à partir de ce que la nature procure, ou vers les tentatives d’institutionnalisation de ce mouvement via différents labels. Dans cette thématique prennent place également des travaux autour des énergies renouvelables (en ce qu’elles développent les potentialités de la nature sans la malmener)

Effets de la consommation sur la nature

  • Les controverses portant sur les modes de consommation / production de la nature (OGM, nucléaire, nanotechnologies), notamment en termes d’ensevelissement des déchets ou d’atteinte à la santé. L’examen des figures discursives mobilisées par le marché pour mettre les innovations en récit et en circulation dans l’espace public, de même que les résistances qu’elles suscitent, pourra compléter ce type de questionnement.
  • Le corps comme lieu de la tension nature-culture, en particulier autour des questions de l’esthétisation (chirurgie, botox, humain augmenté, piercing, tatouage…), du rapport à la beauté et au vieillissement.
  • Le rôle ambivalent joué par les TIC et leurs usages dans la « consommation de la nature ». Par exemple, en adoptant un point de vue critique, les plateformes en ligne de mise en relation favorisent le développement du co-voiturage mais ne remettent pas en cause le monopole de la voiture par rapport à d’autres modes de transport moins polluants. Plus généralement, a priori « immatérielles », les TIC ne contribuent-elles pas à consumer la nature, puisque les usages se trouvent sans limites matérielles et peuvent donc s’avérer voraces en termes de consommation énergétique ?

La naturalisation de la consommation et des consommateurs

  • La construction des données personnelles sur la consommation et les consommateurs, leur formalisation et leur incidence en termes de naturalisation – Big Data, sites de Quantified Self, réseaux sociaux, psychologisation et mesures implicites, neuromarketing, essentialisation des comportements déviants…
  • Les usages, le rapport à l’objectivation de soi et la réappropriation par les consommateurs eux-mêmes de données personnelles accessibles par différents supports numériques : géolocalisation pour se situer dans la nature/espace, statistiques sur leur santé, monitoring pour équiper et accompagner une pratique sportive…

Ces trois axes sont indicatifs. Le RT 11 est plus largement ouvert à toute thématique qui ne serait pas développée dans cet appel, en lien avec le croisement de la sociologie de la consommation et des usages et le thème du congrès.

Par ailleurs, une session croisée entre le RT 11 (sociologie de la consommation et des usages) et le RT12 (sociologie économique) sera organisée sur le thème des reconfigurations croisées de la consommation et de la production de la nature (consommation durable, consommation collaborative, mise en forme et objectivation d’une production « naturelle »…). Merci d’indiquer dans votre proposition si vous souhaitez y participer.

Soumission des propositions de communication

Les propositions de communication doivent être envoyées le 15 janvier 2015 au plus tard

et doivent contenir :

  • Le nom, prénom, adresse postale, institution de rattachement, adresse courriel, de chaque auteur
  • En cas d’auteurs multiples, le nom de l’auteur « contact »
  • Le titre de la proposition de communication
  • Un résumé de 1 500 signes maximum, espace compris
  • La proposition peut éventuellement être accompagnée d’un développement plus long, entre 600 et 2 000 mots, qui ne sera pris en compte que si un résumé est également soumis.

La proposition de communication consistera en un seul fichier nommé : « AFS2015-RT11-NOMdu1erauteur », en .doc, .docx, .pdf, ou .rtf

L’ensemble sera envoyé à : rt11colloque2015@gmail.com

Calendrier

  • Sélection et réponses aux auteurs : 01 février 2015
  • Diffusion du programme définitif : 27 février 2015
  • Envoi des communications (30 000 signes) aux organisateurs : 01 juin 2015
  • Colloque : 29/06/17 au 03/07/15, université de Versailles - Saint Quentin

Comité de sélection

  • Sandrine Barrey,
  • Yoann Demoli,
  • Gérald Gaglio,
  • Isabelle Garabuau-Moussaoui,
  • Renaud Garcia-Bardidia,
  • Emmanuel Kessous,
  • Catherine Lajealle,
  • Jean-Philippe Nau,
  • Eric Remy,
  • Dominique Roux,
  • Stéphanie Tabois. 

Catégories

Lieux

  • Université de Saint-Quentin
    Saint-Quentin-en-Yvelines, France (78)

Dates

  • jeudi 15 janvier 2015

Mots-clés

  • consommation, nature, culture, objet

Contacts

  • Emmanuel Kessous
    courriel : emmanuel [dot] kessous [at] unice [dot] fr

Source de l'information

  • Emmanuel Kessous
    courriel : emmanuel [dot] kessous [at] unice [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« La sociologie, une science contre nature ? Réseau thématique 11 sociologie de la consommation et des usages », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 04 décembre 2014, https://doi.org/10.58079/rgr

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