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Boèce au fil du temps

Boecio a través del tiempo

Boethius revisited

La réception de son œuvre et son influence sur les lettres européennes du Moyen Âge à nos jours

La recepción de su obra y su influencia en las letras europeas desde la Edad Media hasta hoy

The reception of his works and his influence on European literature from the Middle-Ages to the present time

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Publié le vendredi 17 juillet 2015

Résumé

Grâce au concours de spécialistes venus de plusieurs horizons des sciences humaines, nous nous proposons de mettre en lumière des aspects méconnus, ou partiellement explorés de l’œuvre de ce grand classique de l’Antiquité, figure exemplaire de l’éclectisme scientifique, qui contribua par son œuvre à l’universalisation des savoirs. Nous prêterons une attention particulière à la manière dont le legs culturel et scientifique de Boèce est reçu par des auteurs européens dans leurs propres productions, pour le faire fructifier selon les sensibilités, les inquiétudes et les aspirations propres à chaque contexte et à chaque époque.

Annonce

Organisation

Colloque International organisé par Alicia Oïffer-Bomsel (CIRLEP – URCA EA 4299), Sophie Conte (CRIMEL – URCA EA 3311) et María Elena Cantarino Suñer (GIUV2013-037 – Universitat de València), en deux parties :

  1. Université de Reims Champagne-Ardenne, France, 2-3 Juin 2016 : « Littérature et Arts »
  2. Université de Valence, Espagne, 17-18 Novembre 2016 : « Théologie et Philosophie »

Présentation

Homme influent à la cour de Théodoric avant d’être déchu, Boèce a joué un rôle important dans la vie politique de son temps, peu après la chute de l’Empire romain d’Occident. Il devient l’une des figures les plus marquantes de l’histoire culturelle occidentale pour avoir récupéré et transmis la culture grecque dans le monde latin[1]. Son contemporain Cassiodore, secrétaire des rois ostrogoths en Italie, a relevé, dans une lettre qu’il lui adressait, l’importance pour le monde latin de son travail de traduction des œuvres fondatrices de la culture grecque :

Nous savons que tu es rempli d’une ample érudition, et que tu as puisé à la source même de la science les arts que le vulgaire pratique sans les connaître… Au moyen de tes traductions, on peut lire en Italie Pythagore le musicien, Ptolémée l’astronome ; l’arithmétique de Nicomaque, la géométrie d’Euclide sont entendues des Ausoniens, et le théologien Platon, le logicien Aristote, disputent dans la langue de Romulus […] tous les arts et toutes les sciences que des hommes différents avaient donnés à la Grèce féconde, Rome les a reçus de toi seul[2].

Boèce a aussi joué un rôle dans le développement des arts libéraux – dont on trouve l’origine chez Martianus Capella – notamment par l’élaboration de traités consacrés aux disciplines du quadrivium, œuvrant aussi par ses traités de logique, de philosophie et de théologie à l’essor de la pensée scientifique occidentale. Boèce est ainsi l’un des principaux précurseurs du mouvement de renaissance de la culture antique, qui se produisit par exemple sur les territoires ibériques dès le VIIe siècle grâce à l’œuvre d’Isidore de Séville.

C’est assurément la Consolation de Philosophie, très tôt qualifiée de chef d’œuvre littéraire, qui suscita le plus grand nombre de lectures et d’interprétations au fil des siècles. Créé dans des circonstances extrêmes pour Boèce, devant l’imminence de sa mise à mort, cet ouvrage d’inspiration néoplatonicienne fut perçu en particulier par les scolastiques comme une œuvre majeure de philosophie morale, animée par trois préoccupations fondamentales : quête spirituelle, recherche de la vérité et finalité didactique. L’orthodoxie de la pensée religieuse de Boèce, si imprégnée de platonisme, fut mise en question au cours de l’histoire.

L’œuvre de Boèce connut une grande fortune pendant toute l’époque médiévale et dès les premiers temps de la Renaissance (Dante et Pétrarque en Italie, Jean Gerson en France, Thomas More en Angleterre). Elle fut mise à contribution dans la littérature du XVIIe siècle pour répondre aux préoccupations religieuses du moment (jésuites de la Contre-Réforme, Polyeucte, tragédie chrétienne de Corneille, Pensées de Pascal, courant ascétique et moralistes chrétiens). Dans le cadre du mouvement antitrinitaire qui parcourut l’Europe aux XVIe et XVIIe siècles, sa pensée théologique fut d’un grand secours. Aux XVIIIe et XIXe siècles, en France par exemple, des auteurs comme Saint-Simon ou Chateaubriand furent en quelque sorte héritiers de Boèce et du genre littéraire qu’il a initié avec sa Consolation. En Espagne, cette œuvre, rééditée en castillan, est présente dans les écrits des principales figures de l’Illustration. De nouvelles traductions et des réimpressions paraissent au XIXe siècle dans plusieurs pays européens, parfois sur l’initiative des tenants d’une culture scientifique et philosophique classique dont l’intégrité semble être menacée, en raison de l’emprise croissante des doctrines matérialistes et positivistes. Dans les premières décennies du XXe siècle, l’œuvre de Boèce n’est pas ignorée, même dans des terres que l’on s’imagine trop aisément étrangères à la latinité ; ainsi Johan Schotman traduit en néerlandais la Consolation de Philosophie, parue en 1924 sous le titre De vertroosting der wijsbegeerte. On lira ci-dessous les problématiques privilégiées à Reims puis à Valence.

Université de Reims Champagne-Ardenne, France, 2-3 Juin 2016 : Littérature et Arts

Sur le plan lexical et conceptuel, Boèce fut le créateur d’une terminologie latine appelée à influencer considérablement le langage philosophique et scientifique dès l’époque médiévale. On pourra étudier le processus d’intégration de ce vocabulaire spécialisé dans les langues vernaculaires européennes (romanes, anglo-saxonnes, germaniques) ou comparer des traductions d’œuvres de Boèce réalisées soit dans une même langue, soit dans diverses langues européennes, en choisissant une perspective diachronique ou synchronique.Héritière de la tradition antique, la Consolation de Philosophie est à la croisée de plusieurs genres littéraires et philosophiques : consolatio stoïcienne (Sénèque), dialogue à visée didactique (Platon et Cicéron), dialogue intérieur (saint Augustin)... Parmi les procédés littéraires mis en œuvre dans cet ouvrage écrit sous la forme du prosimètre (satire Ménippée), figure l’allégorie (Martianus Capella). Boèce exploite le motif du songe, enraciné aussi bien dans la tradition biblique que dans la tradition païenne, et restaure celui de la Fortune, notion honnie dans la tradition patristique (saint Augustin), en lui donnant toute sa valeur paradoxale et sa versatilité sémantique. On pourra s’interroger sur la manière dont ces antécédents d’ordre formel ont été repris dans des productions ultérieures pour donner lieu à des créations diversifiées, selon les circonstances du moment, les enjeux et les finalités de l’écriture.

Avant le XIIe siècle, c’est par le truchement de Boèce que l’Occident eut accès aux écrits aristotéliciens sur le langage et la logique : les Catégories et le Peri Hermeneias, puis l’Organon, les Premiers et Seconds Analytiques, les Topiques et les Réfutations sophistiques.

C’est principalement dans le De differentis topicis que Boèce montre le lien entre la dialectique et la rhétorique. Il existe des études sur la diffusion et la réception de ce traité au Moyen Age. Qu’en est-il pendant les périodes postérieures ?

Boèce, réduit à la dernière extrémité, trouve en lui-même les ressources pour devenir maître de lui-même, puisant dans sa mémoire le souvenir des auteurs qu’il a lus toute sa vie : c’est précisément dans ces circonstances de profond dénuement qu’émerge l’acte créateur. On pourra s’intéresser aux rapports que la mémoire entretient avec l’écriture et la création, dans la continuité des travaux de Frances Yates et Mary Carruthers.L’influence du De institutione musica fut comparable à celle de la Consolation et des traités logiques. D’inspiration néo-pythagoricienne, la théorie musicale de Boèce associe poésie et musique. On peut s’interroger par exemple sur les modes d’adaptation de cette théorie au théâtre européen, comme l’a fait J. Sage à propos de Pedro Calderón de la Barca[3].

Le De institutione musica et le De arithmetica développent la doctrine esthétique de la proportion, héritée de Vitruve et appelée à une grande fortune tant dans le domaine musical que dans l’architecture et la peinture. D’une manière générale, on pourra analyser l’impact des théories esthétiques de Boèce (concept de beauté et plaisir visuel, en lien avec les justes proportions) sur les idées esthétiques postérieures.

Université de Valence, Espagne, 17-18 Novembre 2016 : Théologie et Philosophie

Lors de la session de Valence, on s’interrogera sur la postérité des idées développées dans les œuvres de Boèce, relevant de la théologie et de la philosophie, selon les axes esquissés ci-dessous.

Au croisement de la philosophie morale et de la spiritualité, on trouve dans la Consolatio le principe de l’inanité des biens terrestres, indissociable du courant ascétique représenté par Sénèque et par l’écrivain romain lui-même. C’est dans cette lignée que s’inscrit le mouvement ascétique chrétien caractérisé par le mépris du monde qui, à partir du Contemptus mundi attribué à Thomas a Kempis, donnera lieu à l’écriture en Europe d’une multitude d’ouvrages consacrés à cette thématique.

La lecture de la Consolation conduit également à une méditation sur l’existence du mal, sur son origine et sur les moyens auxquels l’homme peut avoir recours pour s’y dérober. Unde malum, d’où vient le mal ? Avant d’apparaître dans la Consolation de Boèce, cette interrogation se trouve au cœur du Livre VII des Confessions de saint Augustin.

À partir des discussions opposant les théologiens d’Orient et d’Occident au sujet de la Trinité et de la nature du Christ, Boèce, sans doute animé du désir de contribuer à l’unification de l’Église catholique, étape préalable à une hypothétique restauration de l’Empire, en vient à corroborer le bien-fondé du Symbole de Nicée, en se servant de la logique aristotélicienne. Cette question conserva toute sa vigueur quand l’Église de Rome dut faire face au mouvement antitrinitaire qui traversa l’Europe au XVIe et au XVIIe siècle.

Le grand apport de Boèce à la science théologique est le recours systématique à la philosophie dans le traitement des questions relatives à la foi. Il développa ainsi, dans le contexte des disputes christologiques, sa définition de persona, devenue fondamentale dans l’histoire des dogmes du christianisme.

Depuis la métaphysique aristotélicienne, le rapport entre l’éternité et le temps devient une question récurrente dans la pensée grecque, traitée par les néo-platoniciens. Saint Augustin commente ce problème dans le Livre XI des Confessions. Le concept d’éternité, que Boèce définit dans le Livre V de la Consolatio, en tant que catégorie indissociable de la divinité permet de comprendre la prescience divine. L’auteur montre ensuite l’absence d’incompatibilité entre la providence et la liberté de l’homme.

Le libre arbitre est l’un des principes structurants de la philosophie chrétienne. Boèce reprend dans la Consolation les questions déjà traitées dans le Peri Hermeneias sur la prescience divine et les futurs contingents. C’est surtout à partir du XVe siècle que l’étude de cette question épineuse acquiert une vigueur particulière, jusqu’à avoir une large répercussion chez les humanistes. Lorenzo Valla entame le débat avec son De libero arbitrio, un ouvrage sous forme de dialogue où il prend position contre les idées de Boèce exposées dans la Consolation, et auquel Leibniz se réfère dans ses Essais de Théodicée (1710), en poussant jusqu’au bout l’explication entamée par l’humaniste italien trois siècles auparavant.

Notes

[1] Liste complète des œuvres de Boèce et de leurs éditions modernes : J. Magee & J. Marenbon, “Appendix : Boethius’ works”, in J. Marenbon, éd., The Cambridge Companion to Boethius, Cambridge, University Press, 2009, p. 303-310.[2] Cassiodore, Ep. I, 45. (L. J. de Mirandol, La Consolation philosophique de Boèce, Paris, Hachette, 1861, p. viii).[3] J. Sage, « The function of music in the theatre of Calderon », in D.W. Cruickshank and J.E. Varey (ed.), P. Calderón de la Barca, Comedias. A facsimile edition with textual and critical studies, Farnborough, Gregg International, 1973, t. 1, p. 209-227.

Organisation et direction scientifique 

  • Alicia OÏFFER-BOMSEL, Maître de conférences en Civilisation de l’Espagne moderne à l’Université de Reims Champagne-Ardenne (CIRLEP EA 4299).
  • Sophie CONTE, Maître de conférences en Langue et Littérature latines à l’Université de Reims Champagne-Ardenne (CRIMEL EA 3311).
  • María Elena CANTARINO SUÑER, Professeur titulaire de Philosophie morale et Philosophie politique à l’Université de Valence, Espagne (GIUV2013-037).

 Comité scientifique 

  • Jesús ALCOLEA BANEGAS, Professeur titulaire de Logique et de Philosophie des Sciences. Doyen de la Faculté de Philosophie et de Sciences de l’Éducation à l’Université de Valence, Espagne.
  • Jean-Frédéric CHEVALIER, Professeur des Universités en Langue et Littérature latines (études latines et néo-latines) à l’Université de Lorraine (Metz).
  • Carmen CORTÉS ZABORRAS, Professeur titulaire en Langue et Littérature française du Moyen Âge à l’Université de Málaga.
  • Christophe ERISMANN, Historien des idées, Professeur de Philosophie médiévale à l’Université de Lausanne.
  • Véronique GÉLY, Professeur des Universités en Littérature générale et comparée à l’Université Paris-Sorbonne.
  • Miren LACASSAGNE, Maître de conférences en Langue et Littérature médiévales à l’Université de Reims Champagne-Ardenne.
  • Alexandra MERLE, Professeur des Universités en Civilisation et Littérature de l’Espagne moderne à l’Université de Caen Basse-Normandie.
  • Nicoletta PALMIERI, Professeur des Universités en Langue et Littérature latines (époques antique et médiévale) à l’Université de Reims Champagne-Ardenne.
  • Rosa Rius GATELL, Professeur titulaire d’Histoire de la Philosophie de la Renaissance à l’Université de Barcelone.
  • María Jesús SOTO-BRUNA, Professeur titulaire de Philosophie Médiévale. Directrice de l’Institut d’études Médiévales de l’Université de Navarre.
  • Christian TROTTMANN, Directeur de recherche en Philosophie au CNRS au Centre d’études Supérieures de la Renaissance de Tours.
  • Vincent ZARINI, Professeur des Universités en Littérature latine de l’Antiquité tardive à l’Université Paris-Sorbonne.

Modalités de soumission

Les langues du colloque seront le français, l’espagnol ainsi que l’anglais, sans que ce critère soit exclusif ; des interventions en italien et en allemand pourront être acceptées.Les propositions de communication (environ 200 mots) accompagnées d’un bref Curriculum Vitæ, sont à envoyer aux trois responsables scientifiques : sophie.conte@univ-reims.fr ; alicia.oiffer-bomsel@univ-reims.fr ; Elena.Cantarino@uv.es

  • avant le 15 novembre 2015 pour le colloque de Reims,

  • et avant le 15 janvier 2016 pour le colloque de Valence

L’acceptation des propositions, après examen par le comité scientifique, sera signifiée au plus tard le 15 décembre 2015 pour le colloque de Reims, le 15 février 2016 pour le colloque de Valence.

Frais d'inscription

  • Frais d’inscription (colloque de Reims) : 40 euros (hébergement, repas, pauses café, actes du colloque).
  • Frais d’inscription (colloque de Valence) : à préciser prochainement.

Lieux

  • Université de Reims Champagne-Ardenne - 57, rue Pierre Taittinger
    Reims, France (51)
  • Universitat de València
    Valence, Espagne

Dates

  • dimanche 15 novembre 2015
  • vendredi 15 janvier 2016

Mots-clés

  • Boèce, art, théologie, Consolation de Philosophie

Contacts

  • Alicia Oïffer-Bomsel
    courriel : alicia [dot] oiffer-bomsel [at] univ-reims [dot] fr
  • Sophie Conte
    courriel : sophie [dot] conte [at] univ-reims [dot] fr
  • María Elena Cantarino Suñer
    courriel : Elena [dot] Cantarino [at] uv [dot] es

URLS de référence

Source de l'information

  • Benoit Roux
    courriel : benoit [dot] roux [at] univ-rouen [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Boèce au fil du temps », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 17 juillet 2015, https://doi.org/10.58079/t22

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