AccueilQuel avenir pour l’Europe sociale dans le contexte du retour des nations ?

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Quel avenir pour l’Europe sociale dans le contexte du retour des nations ?

What future for the social Europe in the context of the return of nations?

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Publié le mardi 09 août 2016

Résumé

Une journée d’étude « Quel avenir pour l’Europe sociale dans le contexte du retour des nations ? » sera organisée le jeudi 24 novembre au CNAM avec le concours de la DREES, du CNAM-LISE et de RT6, afin de faire le point sur les transformations qui affectent les piliers de l’intégration/ construction européenne (crises financière, économique et migratoire ; remaniements institutionnels et politiques ; évolution de la jurisprudence ; montée des populismes ; Brexit ; ...) et sur l’avenir des politiques sociales des États membres et de l’Union.

Annonce

Cette journée d’étude aura lieu le jeudi 24 novembre 2016 au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) dans l’amphithéâtre Fabry Pérot. Entrée par le 292, rue Saint Martin, métro Réaumur Sébastopol ou Arts et Métiers. 

Elle est organisée par Jean-Claude Barbier1, Arnaud Lechevalier2, Olivier Giraud3, Romain Roussel4 et Aurore Lambert5.

(voir numéro de juillet –septembre 2015 de la RFAS, coordonné par Jean-Claude Barbier et Arnaud Lechevalier [en ligne] http://www.cairn info/ revue-francaise-des-affaires-sociales-2015-3.htm), avec le concours de la DREES, du CNAM-LISE6 et de RT67

Pour vous inscrire, merci d'envoyer un message à Zaëra Mariaux : zaera.mariaux@cnam.fr. Une confirmation vous sera envoyée en septembre. 

Orientations du séminaire

Dans les sciences sociales, depuis plusieurs décennies, l’idée d’une intégration européenne toujours plus poussée a été une donnée partagée, au moins implicitement, entre les chercheurs. Ceci a concerné aussi bien les économistes − bien qu’une part croissante d’entre eux soient devenus interrogatifs avec l’introduction de l’euro − que les politistes. Plusieurs économistes renommés pensent désormais que l’Union européenne n’est ni politiquement ni économiquement viable, et une majorité d’entre eux considèrent l’euro comme une faute de construction de l’Union européenne. Pourtant, du point de vue de la vision d’ensemble du monde qui animait tous les chercheurs, quelle que soit leur discipline − y compris une bonne part des chercheurs nord-américains qui se sont intéressés à l’Europe et à l’intégration européenne – leur préférence en faveur de l’intégration européenne allait de soi. En France, on a même inventé un terme, la « construction européenne » qui est chargé de normativité positive beaucoup plus que l’integration de la langue anglaise. Cette période s’est interrompue et nous ne savons pas pour combien de temps. Elle fait apparaître comme problématiques des questions qui semblaient, pendant des décennies, résolues et qu’il faut remettre sur le métier de la recherche. Pour les sociologues et, surtout, pour les politistes, l’évidence, la certitude même était dans la direction de « l’union sans cesse plus étroite » (laquelle figure encore dans le préambule hérité de 1957 du Traité de l’Union dit de Lisbonne de 20098) ; c’était le sens de l’histoire et, qui plus est, de l’histoire progressiste. Le poids de ces prénotions n’était certes pas partagé uniment dans toutes les traditions nationales, comme il était clair dans l’influence du scepticisme présent dans la communauté scandinave des sciences sociales (Suède et Danemark en particulier). À la fin des années 1990, par ailleurs, de nombreux chercheurs se sont réclamés du cosmopolitanism9 (l’archétype de ces travaux a sans doute été l’ouvrage d’Ulrich Beck et Eduard Grande, Das kosmopolitische Europa (2004), traduit dans toutes les langues et intitulé en français Pour un empire européen (2007). Ulrich Beck a, par ailleurs, été le promoteur le plus actif de la notion de « nationalisme méthodologique », qu’il n’a pas inventée mais qu’il a promue comme concept sociologique et qu’il a cherché à faire passer pour un accompagnement indispensable du modernisme, du dépassement des « vieilleries » nationales et nationalistes. Chez Ulrich Beck, on est sans doute allé à un point extrême puisque, dans Pour un empire européen, les auteurs vont jusqu’à identifier une liste de « traditions » qu’ils mettent sur le même plan : celles du « colonialisme, du nationalisme, de la persécution et du génocide » qui sont « d’origine européenne, mais les valeurs et les catégories juridiques à l’aune desquelles elles sont jugées et condamnées au titre de crimes contre l’humanité le sont tout autant » (2007, p. 20). À la faveurde l’influence de ces thèses, diffusées dans la littérature de sciences sociales transnationale en anglais par des auteurs réputés (Giddens, Beck, etc.) les contributions plus anciennes de la sociologie et de la science politique à l’analyse des caractères nationaux et des nations ont été oubliées, comme celle de Norbert Elias, en particulier dans La société des individus, et dans Studien über die Deutschen. D’autres auteurs majeurs ont également été minorés, comme Ernst Gellner et Benedict Anderson. La philosophie de Jürgen Habermas a joué un rôle éminent, appuyant le présupposé partagé dans les sciences sociales sur un vigoureux plaidoyer pro-européen, ancré dans l’histoire allemande et le refus de la guerre fomentée par le nazisme. Cette littérature rejoignait presque « naturellement » celle que nourrissaient de hauts fonctionnaires européens pour tisser l’éloge des formes de l’intégration européenne à l’aide d’arguments nombreux et riches : on pense par exemple à Europa forza gentile de Tommaso Padoa-Schioppa, publié en 2001.

Lentement mais sûrement, un certain nombre de facteurs ont cependant profondément transformé l’Union européenne, en particulier dans le rapport central entre sa stratégie économique (au sens de la coordination macroéconomique et budgétaire, de la stratégie monétaire) et du gouvernement de fait de l’Union qui a remplacé la « gouvernance ». Des crises majeures ont jalonné ce parcours depuis les premiers signes de la crise financière. Elles ont débouché sur des crises politiques multiples et sur une « reprise en main » institutionnelle centrée sur l’adoption de règles, mises en musique par la création de nouvelles institutions et organismes (consacrés au contrôle de plus en plus étroit des pouvoirs économiques nationaux) dont la plupart ne sont pas situés pleinement et clairement au sein de l’architecture institutionnelle de l’Union. Ces profonds remaniements institutionnels et politiques ont cohabité avec la transformation du paysage électoral de l’Union qui, depuis l’échec des référendums de 2005, a augmenté une délégitimation des « élites ». Les résultats des élections européennes en 2014 ont vu le triomphe des partis qualifiés par paresse de « populistes », tandis que les grands partis du Parlement européen étaient mis en cause. Plus récemment, les réponses à la crise de la zone euro ont accentué les disparités économiques et sociales entre les États membres. La crise politique occasionnée par les flux migratoires venus du Proche- Orient et d’Afrique et les concessions faites au Royaume-Uni pour prévenir le « Brexit » ont eu pour résultat de porter atteinte à des principes fondamentaux depuis la création de la Communauté économique européenne, comme ceux de non-discrimination et de liberté de circulation des travailleurs : c’est ici l’architecture juridique de l’Union, dont on sait le rôle directeur et fondateur, qui est mise en cause.

Quant aux « élites » elles-mêmes, en dehors de leur maîtrise toute relative dans le domaine économique, qui tient unilatéralement et de façon déséquilibrée à l’influence de la Banque centrale européenne, il n’apparaît même plus loisible de les penser, pour peu qu’on emprunte ces catégories normatives, dans les termes habermassiens d’un groupe qui devrait finalement « sauter par-dessus sa propre ombre 11 ». Parallèlement, la perspective selon laquelle une réforme de la législation de l’Union européenne et de l’Union économique et monétaire interrompant le processus d’involution sociale n’est plus envisageable, gagne en audience. Un nombre croissant de spécialistes préconisent explicitement l’abandon de la perspective d’une Europe sociale, c’est-à-dire la limitation voire le retrait de l’activité des institutions européennes dans le champ du droit social au sens large (y compris le droit du travail), dans les champs de compétence qu’elle partage aujourd’hui avec les États membres, au profit d’un retour exclusif aux régulations nationales, seules à mêmes dans cette perspective de protéger l’État social de la logique de la concurrence socio-fiscale prévalant dans l’Union européenne. D’autres préconisent de repartir de l’échelle nationale, seule légitime du point de vue démocratique, mais c’est avec pour finalité de réorienter la gouvernance − le gouvernement de facto – de l’Union économique et monétaire.

 Est-ce que la préservation de l’État social n’est plus envisageable que par le repli national pour échapper à la concurrence entre les espaces nationaux d’allocation du travail porté inlassablement par les institutions de l’UE ? Avec quels enjeux et selon quelles modalités concrètes ? Le projet d’une Europe sociale est-il mort ? Quel nouveau partage des compétences entre l’UE et les États membres est ainsi promu et quels outils juridiques sont ainsi envisagés ? Quels sont les risques encourus par cette approche ? Quelle est la logique économique et sociale sous-jacente ? Quels dispositifs sont concevables pour limiter ou contrebalancer la jurisprudence de la Cour de Justice ? Tous ces éléments conduisent à la nécessité de repenser l’intégration européenne et, particulièrement, dans la lignée du numéro 3 de la Revue française des affaires sociales de juillet-septembre 2015, consacré à la crise de la zone euro et à l’Europe sociale, à faire de ce thème le sujet d’un séminaire scientifique dans le but de réfléchir à ces profondes transformations qui mettent en cause, comme jamais ce fut le cas, les piliers de l’intégration/construction européenne.

Programme

 Ouverture par Franck von Lennep Directeur de la DREES

 Le gouvernement européen face au fait national

Président de la séquence : Patrice Duran Sociologue, président de l’Institut national d’études démographiques

  • Retour des nations : les enjeux pour l’Europe sociale Arnaud Lechevalier Université Paris 1, Laboratoire interdisciplinaire pour la sociologie économique (UMR 3320) CNAM-CNRS.
  • L'écart radical: les analyses de la sociologie et de la science politique et les représentations populaires Jean-Claude Barbier Université Paris 1 CES Centre d’économie de la Sorbonne, Directeur de recherche CNRS émérite.
  •  Droit d'asile: l'introuvable Union Européenne Annalisa Lendaro Sociologue, Université de Toulouse.
  • Les attitudes des citoyens européens à l'égard de l'Europe et leurs conséquences dans les vies politiques nationales Bruno Cautrès CEVIPOF.

Intégration et désintégration : droit, économie et territoires

Président de la séquence : Olivier Giraud Co-directeur du Laboratoire interdisciplinaire pour la sociologie économique (LISE)

  • Diversité des sources et tendances régressives du droit social européen Etienne Pataut École de droit de la Sorbonne.
  • La question nationale dans l’Allemagne post-réunification Klaus Peter Sieck Centre Marc-Bloch - Berlin, Allemagne.
  • Les conséquences du référendum britannique sur l’Union européenne Pauline Schnapper Université Sorbonne Nouvelle - Institut du Monde Anglophone.
  • Les effets macro-économiques de la non-coopération en Europe Jérôme Creel et Xavier Timbeau OFCE.
  • Discutant de la deuxième séquence : Steffen Lehndorff Economiste (docteur en science politique) et chercheur associé à l’Institut Arbeit und Qualifikation (IAQ), université de Duisbourg-Essen, Allemagne.

Quel avenir pour l’Europe sociale ?

Président de la séquence : Gérard Cornilleau OFCE

  • Une Europe sociale est-elle possible ? Eva G. Heidbreder Institut des sciences sociales, Heinrich Heine Universität Düsseldorf, Allemagne actuellement professeure au Centre d'intégration européenne, Freie Universität Berlin, Allemagne.
  • Les maigres perspectives de l’investissement social Francesco Laruffa Doctorant en socio-économie sur les politiques sociales européennes du point de vue des théories de la justice, Humboldt-Universität zu Berlin, Allemagne.
  • Monnaie unique et Europe sociale Agnès Bénassy-Quéré Présidente-déléguée du Conseil d’analyse économique.
  • Le multilinguisme européen après le Brexit Michele Gazzola Chercheur postdoctoral au département de sciences de l'éducation de la Humboldt-Universität zu Berlin, Allemagne. et Till Burckhardt Doctorant en gestion de la communication multilingue à l’Université de Genève.

Discussion et présentation des conclusions de la journée

  • Allan Larsson (sous réserve) Ancien ministre des finances suédois, ancien directeur général de l’emploi et des affaires sociales à la Commission européenne, conseiller spécial du président de la Commission européenne pour le pilier européen des droits sociaux 

1. Université Paris 1 CES Centre d’économie de la Sorbonne, Directeur de recherche CNRS émérite. Jean-Claude.Barbier@univ-paris1.fr

2. Université Paris 1, Laboratoire interdisciplinaire pour la sociologie économique (UMR 3320) CNAM-CNRS. arnaudlechevalier@orange.fr

3. LISE - CNRS / CNAM (UMR 3320). olivier.giraud@cnam.fr

4. adjoint à la sous-directrice des synthèses, des études économiques et de l'évaluation - Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère des Affaires sociales et de la Santé : http://drees.social-sante.gouv.fr/etudes-et-statistiques/.

5. secrétaire générale de la Revue française des affaires sociales (RFAS) - Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère des Affaires sociales et de la Santé : http://drees.social-sante.gouv.fr/etudes-et-statistiques/.

6. Laboratoire interdisciplinaire de sociologie économique du Conservatoire national des arts et métiers : http://lise-cnrs.cnam.fr/.

7. Réseau de l’Association française de sociologie : Protection sociale, politiques sociales et solidarités : http://rt6.hypotheses.org/. 

10. « Die Traditionen des Kolonialismus, des Nationalismus, der Vertreibung un des Völkermordes sind europäischen Ursprungs, aber ebenso sind es die Werte und Rechtskategorien, an denen sie gemessen und als Verbrechen gegen die Menschheit verurteilt werden » (2004, p. 21).

11. Selon l’expression employée par le philosophe, « über seinen Schatten springen », laissant entendre qu’à un moment du futur, les élites politiques se trouveraient obligées en quelque sorte de se « dépasser », en laissant leur propre incapacité à donner une orientation noble à l’Union européenne.

Lieux

  • Amphithéâtre Fabry Pérot - 292 rue Saint-Martin
    Paris, France (75003)

Dates

  • jeudi 24 novembre 2016

Mots-clés

  • Union européenne, État social, politique sociale, Brexit, intégration, construction.

Contacts

  • Aurore Lambert
    courriel : aurore [dot] lambert [at] sante [dot] gouv [dot] fr
  • Zaera Mariaux
    courriel : zaera [dot] mariaux [at] lecnam [dot] net

Source de l'information

  • Aurore Lambert
    courriel : aurore [dot] lambert [at] sante [dot] gouv [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Quel avenir pour l’Europe sociale dans le contexte du retour des nations ? », Journée d'étude, Calenda, Publié le mardi 09 août 2016, https://doi.org/10.58079/vk3

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