AccueilEnseignement supérieur en Afrique : le temps des mutations

AccueilEnseignement supérieur en Afrique : le temps des mutations

Enseignement supérieur en Afrique : le temps des mutations

Higher education in Africa - the time of change

*  *  *

Publié le mardi 20 septembre 2016

Résumé

Confrontés à de multiples enjeux, l'ensemble des systèmes d'enseignement supérieur en Afrique est l'objet aujourd'hui de profondes mutations. Portée par la récente massification de l'enseignement primaire et secondaire, la demande d'enseignement supérieur s'accroit fortement. Une offre inédite, soutenue par des acteurs publics ou privés, locaux et transnationaux, confessionnels ou non, se déploie de manière parfois spectaculaire et modifie en profondeur le paysage de l'enseignement supérieur. Les états réinvestissent, par le biais de réformes et de contrôles, un secteur jusque-là souvent délaissé. Ces mutations et les différentes dynamiques qui en résultent expliquent l'intérêt grandissant de la recherche pour les transformations de l'enseignement tertiaire.

Annonce

Argumentaire

Confrontés à de multiples enjeux, l’ensemble des systèmes d’enseignement supérieur en Afrique est l’objet aujourd’hui de profondes mutations. Portée par la récente massification de l’enseignement primaire et secondaire, la demande d’enseignement supérieur s’accroit fortement. Une offre inédite, soutenue par des acteurs publics ou privés, locaux ou transnationaux, confessionnels ou non, se déploie de manière parfois spectaculaire et modifie en profondeur le paysage de l’enseignement supérieur. Les Etats réinvestissent, par le biais de réformes et de contrôles, un secteur jusque-là souvent délaissé, voire regardé avec méfiance, comme en témoignent la faiblesse des budgets, la vétusté des infrastructures universitaires, le déficit et le vieillissement du corps enseignant, les difficultés de pilotage des établissements ou encore le non-renouvellement des formations proposées.

Ces mutations, qui impactent tant les conditions d’apprentissage et de vie des étudiants que les carrières et pratiques professionnelles des enseignants et des administrateurs, s’inscrivent, à la fois, dans des contextes politiques, économiques et sociaux particuliers, tout en s’intégrant dans le temps de la globalisation et dans l’espace de l’internationalisation et de la convergence des systèmes.

Ces transformations qui affectent l’enseignement supérieur sur le continent africain se manifestent de manière spécifique dans chaque pays, selon des logiques et des temporalités singulières. Mais, elles renvoient, dans le même temps, à une dynamique globale qui prend forme dans l’intérêt croissant des organisations internationales et des bailleurs de fonds, dont témoignent les montants de l’aide internationale en matière d’éducation. Plusieurs grandes fondations américaines (Carnegie, Ford, MacArthur et Rockefeller pour les plus connues) se sont par exemple rassemblées dans un Partenariat pour l’enseignement supérieur en Afrique, notamment pour financer les réformes du secteur sur le continent (Partnership for Higher Education in Africa, 2009), et des Etats européens ont engagé des projets de coopérations bilatérales, visant notamment à soutenir des mutations inspirées de celles mises en place dans le cadre du processus européen de Bologne. Ces réformes bénéficient cependant de moins de soutiens, politiques ou financiers, que celles touchant l’enseignement scolaire.

Ces différentes dynamiques expliquent l’intérêt grandissant de la recherche pour les transformations de l’enseignement tertiaire. Pour autant, si la littérature s’est jusqu’à présent surtout questionnée sur l’internationalisation des systèmes universitaires (Brock-Utne, 2003 ; Zeleza et Olukoshi, 2004 ; Musselin, 2008 ; Akkari et Payet, 2010 ; Lange et Henaff, 2015), sur la circulation transnationale des modèles (Charlier, 2006 ; Charlier et Croché, 2010 ; Charlier et Croché, 2012 ; Leclerc-Olive et al., 2011) ou sur les conséquences sociales des réformes entreprises (Lebeau et Mobolaji, 2000 ; Hirtt, 2003 ; Mamdani, 2007 ; Bugwabari et al., 2012), ce dossier thématique tend plutôt à saisir et ces mutations en privilégiant leurs trajectoires, configurations et ancrages nationaux et locaux à partir de multiples sites d’observations : la fabrique des politiques publiques, les établissements issus des nouvelles offres de formation, les stratégies des administrateurs-manageurs, ou encore, les pratiques quotidiennes des enseignants ou des étudiants.

Interroger les mutations contemporaines du secteur de l’enseignement supérieur en Afrique, c’est donc d’abord questionner les évolutions qui affectent ce secteur et ses (nouveaux)  acteurs, mais c’est aussi, par ce biais, réfléchir sur la place de l’éducation et de la formation dans les sociétés africaines contemporaines. Afin d’appréhender ces changements dans la pluralité, la singularité et l’historicité des processus observés, plusieurs portes d’entrée, qui constituent autant d’axes thématiques potentiels, nous semblent heuristiques :

i) Les réformes de l’enseignement supérieur et leurs acteurs 

Un premier questionnement porte, tout d’abord, sur les réformes fabriquées et mises en œuvre pour répondre aux défis structurant le champ de l’enseignement supérieur, qu’elles aient trait à la régulation des modalités d’ouverture des institutions publiques et privées, au défi de la viabilité économique sur le long terme du secteur, à l’implémentation de nouvelles normes de gouvernance au sein des établissements ou encore à la restructuration des cycles et à la transformation des curricula et des offres de formation. L’accent pourra être notamment mis sur les acteurs qui ont participé au processus d’élaboration des politiques publiques ou qui ont été concernés par ces réformes. Si la littérature s’est surtout intéressée aux influences des acteurs internationaux dans les réformes du secteur, il nous apparaît important de déplacer le curseur vers les acteurs nationaux et locaux (décideurs politiques, conseillers ministériels, responsables universitaires, personnels administratifs, enseignants, étudiants, diplômés) pendant tout le temps du processus (mise sur agenda, prise de décision, implémentation et évaluation), sans pour autant écarter les acteurs régionaux (organisations inter-gouvernementales, réseaux universitaires, experts) actifs dans ce secteur.

ii) La diversification de l’offre d’enseignement, ses ressorts et ses effets

L’accroissement de l’offre d’enseignement supérieur apparait sans précédent sur le continent. Partout on observe, d’une part, une extension de la carte universitaire publique (par création d’universités, de facultés et d’écoles) permettant un nouveau maillage territorial, d’autre part, un développement d’établissements privés, en particulier confessionnels et parfois à dimension régionale, et, enfin, l’installation d’antennes délocalisées de structures étrangères (écoles de commerce, de management, d’ingénieurs…), notamment d’origine européenne ou nord-américaines. Ces évolutions, auxquelles il convient de rajouter le développement des formations à distance et l’avènement des instituts techniques spécialisés, contribuent à construire progressivement un marché concurrentiel de l’enseignement supérieur, enjeu économique et politique des mutations en cours. Les ressorts de cette diversification comme les modèles qui se diffusent pourront constituer ainsi des pistes de réflexion et de questionnement de départ : comment ces nouveaux entrepreneurs de l’enseignement supérieur contribuent-ils à une forme de marchandisation de l’éducation et à une restructuration de l’ensemble du champ ?

iii) Administrer, enseigner et étudier au quotidien

Au sein des établissements, parfois dans un contexte persistant de paupérisation, de nouvelles formes de gouvernance se mettent en place qui impactent aussi bien les pratiques des enseignants, des étudiants que le personnel administratif, notamment du fait de l’avènement saisissant des instruments issus du nouveau management public. Ces nouvelles techniques de management engagent la restructuration administrative des institutions et la généralisation des procédures visant à y promouvoir la « bonne gouvernance ». Thématique peu abordée par la littérature sur l’enseignement supérieur en Afrique, ces mutations participent, plus généralement, à la redéfinition des missions du secteur, des établissements et de ces acteurs. Des approches localisées et qualitatives de suivi des trajectoires doivent permettre d’appréhender ces transformations, tant au niveau des conditions d’apprentissage des étudiants que des modalités de l’exercice professionnel des enseignants et du personnel administratif. Plus largement, ce sont les transformations du statut social des étudiants, des diplômés, des enseignants et des administrateurs qui peuvent être questionnées.

iv) L’enseignement supérieur et son environnement

Enfin, les réflexions sur l’enseignement supérieur ne peuvent pas être déconnectées de l’environnement (économique, politique, social) dans lequel ses acteurs se déploient, afin de saisir les spécificités des trajectoires locales et nationales, mais aussi leur articulation avec les attentes parfois contradictoires des sociétés. Ainsi, les considérations en termes de professionnalisation des formations, de rapprochement entre les universités et les entreprises et d’insertion des diplômés traduisent-elles la prise en considération des attentes des acteurs économiques et leur place croissante dans l’enseignement supérieur et ses finalités mêmes. De même, les impératifs de développement portés par les gouvernements à travers des programmes nationaux peuvent impacter le secteur par une prise en compte des objectifs fixés ou en donnant lieu à des réappropriations par les acteurs académiques.

Ces thématiques ne sont que des indications pour penser les mutations contemporaines de l’enseignement supérieur en Afrique. Toutes propositions liées à ces problématiques seront bien évidemment étudiées attentivement, qu’il s’agisse d’études de cas ou d’analyses comparatives. Les propositions pourront porter sur les divers espaces géographiques et linguistiques du continent et relever de toute science sociale permettant d’interroger, de manière originale, les transformations présentes du secteur de l’enseignement supérieur en Afrique.

Conditions de soumission

La revue sollicite deux types d’articles.

D’une part des articles ayant un format de 35 000 signes espaces compris (notes de bas de page et bibliographie comprises) dans leur version destinée à la publication, ainsi qu’un court résumé de 800 signes (espaces compris), des mots clés et la biographie de l’auteur (150 signes). Les auteurs pourront intégrer à leur article des iconographies (tableaux, graphiques, cartes, photos, dessins, etc.).

D’autre part, des articles destinés aux pages « Repères » du numéro, plus courts et centrés sur un objet empirique plus ciblé (chronique professionnelle, observation participante, trajectoires d’acteurs, etc.). Les auteurs pourront aussi intégrer à leur article des ressources iconographiques.

Faire acte de candidature en envoyant une courte note d’une page (problématique du texte, exposé du déroulé de l’argumentaire, exposé des données, des sources et terrains mobilisés).

Les propositions suivront la procédure d’évaluation scientifique auprès de deux référés anonymes et du comité de lecture d’Afrique contemporaine.

La soumission des articles se fait sur la plateforme Editorial Manager à l’adresse suivante : http://www.editorialmanager.com/afriquecontemporaine/.

La publication finale des articles sera conditionnée au succès de la procédure d’évaluation scientifique auprès de deux référés anonymes et du comité de lecture d’Afrique contemporaine.

Vous pouvez nous contacter pour toutes précisions aux adresses suivantes : fortuiti@afd.fr;

ibchitou@yahoo.fr, c.mayrargue@gmail.com et olivier_provini@yahoo.fr.

Coordination

Ibrahim Chitou, Cédric Mayrargue et Olivier Provini.

Calendrier

Envoi de la proposition d’article : 1er novembre 2016

Réponse de la rédaction d’Afrique contemporaine aux auteurs : 30 novembre 2016

Envoi d’une première version des articles présélectionnés : avril 2017

Publication du numéro : septembre 2017

Bibliographie

  • Akkari A. et Payet J.-P. (éd.) (2010), Transformations des systèmes éducatifs dans les pays du Sud. Entre globalisation et diversification, Bruxelles, De Boeck.
  • Brock-Utne B. (2003), « Formulating Higher Education Policies in Africa : The Pressure from External Forces and the Neoliberal Agenda », JHEA/RESA, vol. 1, n°1, pp. 24-56.
  • Bugwabari N., Cazenave-Piarrot A., Provini O. et Thibon C. (éd.) (2012), Universités, universitaires en Afrique de l’Est, Nairobi/Paris, Institut français de recherche en Afrique/Karthala.
  • Charlier J.-E. (2006), « Savants et sorciers. Les universités africaines francophones face à la prétendue universalité des critères de qualité », Education et Sociétés, vol. 2, n° 18, pp. 93-108.
  • Charlier J.-E. et Croché S. (2010), « L’inéluctable ajustement des universités africaines au processus de Bologne », Revue française de pédagogie, n°172, pp. 77-84.
  • Charlier J.-E. et Croché S. (2012), « L’influence normative du processus de Bologne sur les universités africaines francophones », Education et Sociétés, n°29, pp. 87-102.
  • Hirtt N. (2003), « Au Nord comme au Sud, l’offensive des marchés sur l’université », Alternatives Sud, vol. 10, n°3, pp. 9-31.
  • Lange M.-F. et Henaff N. (2015), « Politiques, acteurs et systèmes éducatifs entre internationalisation et mondialisation. Introduction », Revue Tiers Monde, n°223, pp. 11-28.
  • Lebeau Y. et Mobolaji O. (éd.) (2000), The Dilemma of Post-Colonial Universities. Elite Formation and the Restructuring of Higher Education in Sub- Saharan Africa, Ibadan, IFRA-ABB.
  • Leclerc-Olive M., Scarfo Ghellab G. et Wagner A.-C. (2011), Les mondes universitaires face au marché. Circulation des savoirs et pratiques des acteurs, Paris, Karthala.
  • Mamdani M. (2007), Scholars in the Marketplace : The Dilemmas of Neo-Liberal Reform at Makerere University (1989-2005), Saint-Paul (Sénégal), CODESRIA.
  • Musselin C. (2008), « Vers un marché international de l’enseignement supérieur ? », Critique internationale, vol. 2, n°39, pp. 13-24.
  • Partnership for Higher Education in Africa (2009), Report of Activities, 2008- 2009, New York, Partnership for Higher Education in Africa.
  • Zeleza P. T. et Olukoshi A. (éd.) (2004), African Universities in the Twenty-First Century. Volume I: Liberalisation and Internationalisation, Dakar, CODESRIA.

Dates

  • mardi 01 novembre 2016

Mots-clés

  • enseignement supérieur, mutation, dynamique, recherche, réforme

Contacts

  • Isabelle Fortuit
    courriel : afcontemporaine [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Isabelle Fortuit
    courriel : afcontemporaine [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Enseignement supérieur en Afrique : le temps des mutations », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 20 septembre 2016, https://doi.org/10.58079/vqw

Archiver cette annonce

  • Google Agenda
  • iCal
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search