AccueilFormes et (en)jeux de l’intermédialité dans l’espace européen (XVe-XXIe siècle)

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Formes et (en)jeux de l’intermédialité dans l’espace européen (XVe-XXIe siècle)

Forms and issues in intermediality in the European space (15th-21st centuries)

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Publié le mardi 14 février 2017

Résumé

Le colloque Formes et (en)jeux de l’intermédialité dans l’espace européen (XVe-XXIe siècles) propose un tour d'horizon épistémologique de l'intermédialité. Située dans un « entre-deux » tant méthodologique que disciplinaire – car naviguant en permanence entre systèmes de signes, arts et médias –, la réfléxion sur l'intermédialité peut s’organiser selon deux axes principaux : mise(s) en relation intermédiales : le passage du mot à l’image (fixe et/ou mobile) et inversement et mise(s) en scène intermédiales : de l’idéal du Gesamtkunstwerk aux performances contemporaines.

Annonce

Colloque Intermédialité (27-28 septembre 2017)

Argumentaire

L’intermédialité comme phénomène d’interaction entre différents arts et médiums (au sens où l’entend H. Belting) semble dominer aujourd’hui les pratiques artistiques : « [i]l n’y a pas d’œuvre qui n’ait sa suite ou son début dans d’autres arts », affirmait déjà G. Deleuze à la fin des années quatre-vingt, précisément au moment où il s’agissait, dans le débat méthodologique alors récemment engagé (à l’aube de l’ère Internet) sur la question de l’intermédialité, de dépasser ou contourner le ‘diktat’ générique imposé par G. E. Lessing dans son Laokoon (1766) en cherchant une nouvelle « ouverture intermédiale et une révision des poétologies et théories des médias traditionnelles » (J. E. Müller). Pour autant, l’iconic turn ne marque pas le début d’une histoire de l’intermédialité qui, on le sait, trouve sa scène fondatrice chez Homère, avec la célèbre description du bouclier d’Achille dans le 18ème chant de l’Ilias, premier exemple de « réflexion sur les diverses possibilités de représentation des arts plastiques et de la poésie » (I. Männlein-Robert) – l’image d’un « bouclier en devenir » (G. E. Lessing) se constituant progressivement sous les yeux du lecteur/auditeur grâce à la dialectique instaurée (intermédiale « avant la lettre ») entre description verbale et re-présentation visuelle. C’est donc aux sources antiques – Homère bien sûr, créateur du « prototype d’une forme rhétorique » (J. Robert) labellisé sous le nom d’ekphrasis et appelé à devenir une sorte de paradigme en matière de pratique intermédiale pour toute la littérature européenne (G. Boehm/H. Pfotenhauer), mais également Aristote (le père d’une théorie de l’intermédialité ?), Simonide de Céos et Horace – que pourra remonter l’exploration des formes et (en)jeux de l’intermédialité dans l’espace européen (en particulier ibérique et germanique, sans exclure pour les besoins de l’analyse le domaine hispano-américain), avant de s’ouvrir aux questions deleuziennes et derridiennes de « flux », de « contaminations », des franchissements de « frontières » qui en viennent à constituer ces zones visuelles « hybrides » mettant en dialogue diverses sources médiatiques (texte, image fixe et/ou mobile, image corporelle – le corps –etc.).

Le projet est porté essentiellement par le Centre d’Études sur les Littératures Étrangères et Comparées (CELEC – EA 3069) de l’Université J. Monnet de Saint-Étienne ; l’ouverture au champ spécifique de l’image, telle qu’elle est définie notamment chez W. Mitchell, offre également l’occasion d’une collaboration avec le Centre Interdisciplinaire d’Études et de Recherche sur l’Expression Contemporaine (CIEREC – EA 3068) appartenant à la même Université, dans une volonté à la fois de convergence scientifique et de réalisation conjointe de leurs programmes quinquennaux respectifs – portant, pour le CELEC, sur la Relation, envisagée ici sous l’angle de l’intermédialité (axe 5). Au-delà de l’intention constructive de fédérer la masse critique et méthodologique des deux centres de recherche, c’est aussi à une finalité plus ambitieuse encore que répond l’organisation de ce colloque, première étape structurelle vers la mise en place d’un projet ANR PRCI qui sera présenté par le CELEC – EA 3069 en octobre 2017 au plus tard et qui s’appuiera sur un consortium international, national et sur site dont le CIEREC – EA 3068 fera naturellement partie.

Axes thématiques

Située dans un « entre-deux » tant méthodologique que disciplinaire – car naviguant en permanence entre systèmes de signes, arts et médias (au sens, cette fois, moderne du terme) –, la réflexion sur l’intermédialité peut s’organiser en deux axes principaux :

1. Mise(s) en relation intermédiales : le passage du mot à l’image (fixe et/ou mobile) et inversement

L’analyse de toute forme d’ « iconotextes » (Ikonotexte), selon le concept proposé par P. Wagner et repris par L. Louvel, entre dans ce premier champ épistémologique, délimité en grande partie par le topos horacien de l’ut pictura poesis – l’ekphrasis dans le domaine rhétorique (liée au concept-clé de l’evidentia), trouvant encore un prolongement au XVIIIème siècle dans la Naturlyrik d’un B. H. Brockes ou chez A. Haller (l’auteur d’un des chefs d’œuvre de la poésie descriptive, le poème « Die Alpen », précisément celui sur lequel s’appuya Lessing pour démontrer les limites de l’hybridation générique) ou l’emblème comme mise en application inédite, sur le plan générique, du principe horacien sont des exemples représentatifs de cette mise en interaction du mot et de l’image, génératrice de tensions (intermédiales) qui ont rarement fait l’objet de tentatives de théorisation (en particulier dans le cas de l’emblème).

Les questions traditionnelles de l’illustration (des premières « histoires en images » ou Bildergeschichten de R. Töpffer et W. Busch à la bande dessinée moderne) et de l’adaptation (notamment dans le domaine cinématographique, confronté alors aux problèmes de traitement du temps, de l’espace, de la diégèse, des personnages, de la représentation et de la réception, que le support choisi soit le grand ou le petit écran) pourront être élargies à des phénomènes plus récents de re-création verbale et/ou visuelle : la « novelización » dans le domaine espagnol, l’esthétisation de la bande dessinée par le développement de formes telles que la graphic novel (W. Eisner) ou « littérature graphique » (McCloud) offrant des exemples de transposition de grands classiques de la littérature mondiale – le Faust de Goethe par exemple ou Guillaume Tell de Schiller – ou bien encore le phénomène, aujourd’hui en pleine évolution et auquel trop peu d’études scientifiques ont été consacrées jusqu’alors, de réécriture littéraire dans le court-métrage d’animation… 

2. Mise(s) en scène intermédiales : de l’idéal du Gesamtkunstwerk aux performances contemporaines

À partir du concept d’ « œuvre d’art totale » (Gesamtkunstwerk), déterminant la théorie (et la pratique) esthétique(s) du XIXème siècle, s’offre un deuxième « angle d’attaque » de l’intermédialité : il s’agirait ici d’étudier les différentes formes de réalisation possibles de cette idée (ou plutôt idéal) de totalité que portaient les romantiques allemands (initiateurs d’une « poésie universelle progressive »), (ré)unissant en une même représentation les arts de la poésie, de la musique, de la mimique et de la danse (K. F. Eusebius) – en une forme de résurgence moderne, résolument intermédiale, de la tragédie attique.

Là encore, une impulsion nouvelle pourrait être donnée à la recherche grâce à l’analyse de ces scénographies ultra-contemporaines où sont réécrites des œuvres d’horizons divers (œuvres en langues étrangères, de diverses époques, de genres distincts…) sous des formes « hybrides » où s’agrègent la chorégraphie, les arts circassiens, la vidéo-projection, la musique (classique, contemporaine, ethnique, orientale).

Indépendamment de cette double orientation possible, c’est fondamentalement à la question de la « présence médiale » (mediale Gegenwärtigkeit) des différents médiums mis en œuvre dans et par l’acte même de production intermédiale – ce que W. Benjamin désignait déjà par la notion d’« aura » – que nous ramène toute réflexion sur l’intermédialité, soit à la capacité propre à un médium de « faire sens » et/ou transmettre un message lorsqu’il s’aventure dans un domaine qui, pour ainsi dire, lui est génériquement étranger. À ce titre, un champ d’expérimentation privilégié, axé cette fois plus sur la confrontation – voire rivalité – entre les arts que sur leur « irriguation » mutuelle, pourrait être celui de la re-présentation – ou présentification pour reprendre le terme de Jean-Claude Schmitt – du sacré, liée à la problématique de l’imago médiévale. Les « images verbales » (F. Flückiger, R. Wetzel) qui alimentent les sermons des prédicateurs, sous forme d’exempla, de récits imagés, de métaphores et d’allégories, sont un bel exemple d’interférence(s) (« inter-référence(s) » écrirait M. Serres) médiale(s) à une époque où « interagissent les formes orales, écrites et visuelles de la communication culturelle ». À l’inverse, lorsque, au XIXème siècle, le peintre allemand J. Schnorr von Carolsfeld, proche du mouvement nazaréen, s’attelle à ce grand chantier qu’est l’illustration de la Bible (Die Bibel in Bildern), c’est bien à une réflexion sur la capacité de l’image à ‘dire le sacré’ (sans recourir nécessairement à la médiation du mot) que nous invite l’artiste, comme on peut le lire dans la préface jointe à l’ouvrage.

Enfin, s’interroger sur les formes et (en)jeux de l’intermédialité revient forcément à s’intéresser aux propres frontières, à la fois théoriques et ‘techniques’, de l’intermédialité : dans quelle mesure se distingue-t-elle de ces phénomènes connexes que sont la pluri-, la trans- et même la métamédialité et surtout, « l’utilisation inflationnaire du concept » (J. Schröter) – tout comme la multiplicité des formes de réalisation intermédiale, encore aujourd’hui – ne mènent-elles pas à son épuisement ? L’exploration, dans une optique d’esthétique analytique, des approches théoriques les plus contemporaines – notamment celles de la mouvance française (J. Baudrillard, P. Bourdieu, G. Deleuze, J. Derrida, M. Foucault, F. Guattari, J.-F. Lyotard, J. Rancière…) qui pourront être confrontées, en ce qu’elles ont de spécifique, aux ‘grilles’ de la tradition anglo-saxone (N. Goodman notamment) ou de la phénoménologie de source germanique (M. Heidegger, E. Husserl, M. Merleau-Ponty, P. Ricoeur, etc) – permettra peut-être d’éviter le constat auquel parvient J. E. Müller pour ce qui est de la recherche sur l’intermédialité : celui des « illusions perdues ». Quoi qu’il en soit, un tel « tour d’horizon » épistémologique répondra à la volonté d’ouverture internationale de ce colloque, auquel participeront des chercheurs rattachés non seulement aux laboratoires sur site (CELEC, CIEREC et Passages XX-XXI de l’Université Lyon 2) ainsi qu’à d’autres en France (Universités de Lille, de Nice Sophia Antipolis et de Reims notamment), mais également à des centres de recherche relevant d’universités européennes (Universidad Complutense de Madrid, Universités de Navarre, de Zurich et Cologne…), nord-américaines (State University of New York –SUNY–, Université de Bâton Rouge) et sud-américaines (Universidad de los Andes, Universidad de Buenos Aires, Universidad de Montevideo) – afin de garantir le plus grand rassemblement possible de chercheurs et la plus vaste confrontation de théoriques et d’approches critiques, le recours aux moyens électroniques aujourd’hui mis à disposition de ce type de manifestation scientifique (visio-conférences par exemple) est fortement envisagé.

Modalités pratiques d'envoi des propositions

Les propositions de communication, accompagnées d’une brève biographie, sont à transmettre par voie électronique à

Emmanuel Marigno (emmanuel.marigno@univ-st-etienne.fr) et Patricia Viallet (viallet.patricia@orange.fr)

au plus tard le 28 février 2017.

Composition du comité de sélection des propositions de contribution

  • Danièle Meaux, professeur des Universités, Esthétique et science  de l’art, Université de Saint-Etienne
  • Philippe Merlo, professeur des Universités, Etudes des mondes hispanophones et lusophones, Université Lyon 2
  • Isablelle Steffen-Prat, professeur des Universités, Université de Cergy-Pontoise
  • Isabelle Reck, professeur des Universités, Institut d’études romanes, Université de Strasbourg
  • Frederick De Armas, Full Professor, Romance Languages and Literatures, Université de Chicago
  • Fabrice Malkani, professeur des Universités, Département d’études allemandes, Université Lumière Lyon 2
  • Bernard Banoun, professeur des Universités, UFR d’études germaniques, Université Paris Sorbonne.
  • Santiago Fernández Mosquera, Catedrático de Universidad, Universidade de Santiago de Compostela

Lieux

  • Université de Saint-Etienne, campus Tréfilerie
    Saint-Étienne, France (42)

Dates

  • mardi 28 février 2017

Mots-clés

  • intermédialité, interaction du mot et de l'image, recréation verbale, recréation visuelle, littérature graphique, œuvre d'art totale, scénographie

Contacts

  • Emmanuel Marigno
    courriel : emmanuel [dot] marigno [at] univ-st-etienne [dot] fr
  • Patricia Viallet
    courriel : viallet [dot] patricia [at] orange [dot] fr

Source de l'information

  • Emmanuelle Perrin
    courriel : ihrim-seminaire-index [at] univ-st-etienne [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Formes et (en)jeux de l’intermédialité dans l’espace européen (XVe-XXIe siècle) », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 14 février 2017, https://doi.org/10.58079/ws3

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