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Pratiques délibératives et scripturales des conseils urbains en temps de crise (XIIIe-XVe siècle, Europe méridionale)

Deliberative and scriptural practices of urban consultancy in times of crisis (13th-15th century, southern Europe)

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Publié le mardi 18 juillet 2017

Résumé

Les assemblées délibératives et conseils urbains médiévaux participent, à partir du XIIIe siècle, à la formidable expansion de la scripturalité de gouvernement. À partir de l’émergence des gouvernements populaires italiens, se systématise l’enregistrement des réunions. Que ce soit sous la forme d’instruments publics ou de registres tenus de façon continue, la mise par écrit de procédures essentiellement orales les formalise et leur donne une validité juridique. Une première journée d’études tenue l’an passé Aix-en-Provence a permis d’identifier les spécificités des registres de délibérations urbains méridionaux. La réflexion portera cette fois-ci sur les tensions et conflits traversant les assemblées délibératives. Pour cela, seront examinées des périodes-clés dans la gestation, l’évolution et la diversification des écritures urbaines.

Annonce

24 novembre 2017

Aix-en-Provence, Maison méditerranéenne des sciences de l’Homme

UMR 7303 Telemme (AMU-CNRS),

Axe 2 « Individus, Identités, Corps social »

Groupe 4 « Lien social, lien moral. Éthique et politique en Europe méridionale, XIe-XVIIe siècle »

Argumentaire

Les assemblées délibératives et conseils urbains médiévaux participent, à partir du XIIIe siècle, à la formidable expansion de la scripturalité de gouvernement[1]. À partir de l’émergence des gouvernements populaires italiens, se systématise l’enregistrement des réunions[2]. Que ce soit sous la forme d’instruments publics ou de registres tenus de façon continue, la mise par écrit de procédures essentiellement orales les formalise et leur donne une validité juridique.

Une première journée d’études tenue l’an passé Aix-en-Provence a permis d’identifier les spécificités des registres de délibérations urbains méridionaux[3]. La réflexion portera cette fois-ci sur les tensions et conflits traversant les assemblées délibératives. Pour cela, seront examinées des périodes-clés dans la gestation, l’évolution et la diversification des écritures urbaines.

Les villes de la fin du Moyen Âge connaissent des tensions internes multiformes : rivalités et conflits entre grandes familles aristocratiques ou marchandes, pouvant aller jusqu’à des processus de faide et vendetta ; rapports de force entre groupes sociaux aux intérêts concurrents ou contradictoires ; jeux de pouvoir entre les institutions urbaines et les représentants d’une tutelle extérieure (seigneuriale, souveraine, papale) ; montée des seigneuries urbaines s’associant de larges parts du corps civique[4]. Pourtant, l’institutionnalisation du gouvernement urbain sous sa forme communale offre aux regards l’image d’une construction politique spécifique, cultivant le consensus vis-à-vis de l’extérieur. Les registres de délibérations parlent volontiers d’une seule voix, en particulier dans l’énoncé des ordonnances adoptées après discussion – les reformationes.

Davantage que comme une façon de tronquer les dissensions, la construction de cette unanimité mérite d’être examinée comme un objet historique : comment percer le secret des assemblées délibératives, connaître le déroulement des débats et des affrontements, comment mettre au jour les rapports de forces qui les traversent ?

Dans la continuité documentaire des enregistrements de séances, certains moments de crises majeures cristallisent et mettent en évidence ces jeux de pouvoirs, en participant à la structuration des assemblées et du matériau documentaire produits par celles-ci.

Le terme de crise est ici principalement entendu comme définissant des conflits politiques, diplomatiques et militaires affectant la ville. Vécues comme paroxystiques par les acteurs, les crises durent le plus souvent de quelques semaines à quelques mois, quelques années tout au plus. Ces crises, souvent multiformes et touchant progressivement plusieurs domaines de la vie publique, créent une situation nouvelle et incertaine, parfois incontrôlable, poussant les acteurs à se déterminer et à se manifester[5]. Il s’agira d’observer les effets de ces crises dans les assemblées urbaines au travers des délibérations enregistrées. Comment évoluent leur forme et leurs usages, en tant qu’outils quotidiens du gouvernement ?

Ainsi, l’apparition des enregistrements systématiques constitue un temps fort de l’institutionnalisation des assemblées délibératives et correspond souvent aux nécessités d’une période de troubles : émergence d’un gouvernement populaire (Italie du Trecento), prérogatives nouvelles obtenues d’un pouvoir princier mis en difficulté par les communautés citadines (ainsi en Provence lors de l’avènement disputé de la seconde maison angevine en 1385-1387). De quelle manière les grands conflits internes aux villes, puis les étapes décisives de la progression des pouvoirs seigneuriaux ou souverains sur les institutions urbaines, sont-ils retranscrits, enregistrés ? Quels effets ces contextes troublés ont-ils sur la production documentaire urbaine ?

Bornes chronologiques et géographiques

L’amplitude géographique et chronologique assez large (l’Europe méridionale, du XIIIe au XVe siècle) permet d’envisager des périodes précises au sein de la documentation délibérative produite depuis l’émergence des gouvernements populaires italiens jusqu’aux crises politiques des derniers siècles du Moyen Âge. L’ensemble méditerranéen de l’Occident chrétien sera pris en compte, au sens d’une aire culturelle, politique et juridique dans laquelle les conseils urbains développent une administration par l’écrit appuyée sur le notariat et l’expertise en droit. La circulation, l’adaptation et l’hybridation des modèles documentaires, en particulier pour l’enregistrement des délibérations, est un marqueur de cet ensemble géographique dans lequel les villes entretiennent des relations permanentes.

Le choix de l’échelle urbaine correspond à l’hypothèse que la ville constitue un cadre pertinent pour l’étude des conflits politiques. Il s’agit aussi de prolonger la perspective comparatiste dans laquelle s’inscrivait la rencontre précédente. Confronter la documentation de plusieurs gouvernements urbains doit permettre de dégager des logiques institutionnelles et scripturales communes.

Les propositions de communication devront s’insérer dans les axes de réflexion suivants :

 Axe 1 : Crises, institutions et documentation délibérative

Ici seront examinés les effets des crises sur les institutions et sur la documentation communale. Quel rôle les crises jouent-elles dans la structuration et l’institutionnalisation des assemblées délibératives et, conjointement, dans la structuration des productions écrites du gouvernement urbain ? Quelle présence (ou dissimulation) des crises et conflits peut-on observer dans les enregistrements de délibérations ? Quelle en est la tonalité (explicite, évasive, unanimiste) ? Des modifications ou transformations apparaissent-elles alors dans les séries et dans la tenue des délibérations ?

Axe 2 : L’assemblée urbaine, lieu d’expression et/ou de règlement des conflits politiques ?

Les assemblées délibératives sont-elles le lieu d’expression et/ou de règlement des conflits, s’affirment-elles comme centre de la vie politique à l’occasion des crises ? Ou bien d’autres institutions parallèles ou ajoutées (conseils restreints, commissions spéciales devenant pérennes) concentrent-elles la prise de décision, vidant peu à peu de leur substance les assemblées et conseils à participation civique plus large ? Peut-on observer une corrélation entre la vitalité de la participation politique dans les assemblées urbaines et la forme des enregistrements ?

Ici aussi seront interrogées les relations entre les crises politiques et les mutations documentaires constatables sur les registres de délibérations. Ces questions seront examinées au regard de l’état et du contenu de la documentation, du point de vue du paysage documentaire communal dans son ensemble : assouplissement ou rigidification des formes d’enregistrement, insertion de pièces justificatives, hybridation avec d’autres types de documents (correspondances, comptabilités, registres de défense) ou apparition de séries nouvelles.

Procédure de participation

Les propositions de communication devront parvenir sous format électronique à François Otchakovsky-Laurens et Laure Verdon (f.otchakovsky.laurens@gmail.com + laure.verdon@univ-amu.fr)

avant le 25 septembre 2017.

Elles se présenteront sous la forme d’un résumé de 1000 caractères espaces compris maximum et mentionneront le lieu de rattachement institutionnel de leur auteur.

Les propositions émanant de jeunes chercheurs doctorants et post-doctorants sont bienvenues. Après examen des propositions, le comité scientifique retiendra 6 communications ; une réponse personnalisée sera apportée pour chaque proposition avant le 2 octobre 2017.

Organisation

Coordination

François Otchakovsky-Laurens, Laure Verdon

Comité scientifique

  • Jean-Paul Boyer (AMU),
  • Pierre Chastang (U. Versailles Saint-Quentin),
  • Noël Coulet (AMU),
  • Michel Hébert (UQAM, Canada),
  • François Otchakovsky-Laurens (AMU),
  • Thierry Pécout (U. Saint-Etienne),
  • Lorenzo Tanzini (U. Sassari, Italie),
  • Laure Verdon (AMU). 

Références

[1] L. Tanzini, A consiglio, la vita politica nell’Italia dei comuni, Rome, 2014. Id., Delibere e verbali. Per una storia documentaria dei consigli nell’Italia comunale, dans Reti Medievali Rivista, 14, 1 (2013), p. 43-79.

[2] Albert de Gandino, Quaestiones statutorum, ed. H. Solario, dans Scripta anecdota glossatorum vel glossatorum aetate composita, Bologne 1901, p. 157-214. Jean de Viterbe, Liber de regimine civitatum, G. Salvemini (éd.), Scripta anecdota glossatorum, Bologne, 1901 (Biblioteca iuridica medii aevi, III), p. 217-280.

[3] Les registres de délibérations urbains au Moyen Âge : le « Midi » en questions, 25 novembre 2016, UMR 7303 Telemme, Maison méditerranéenne des Sciences de l’Homme.

[4] A. Zorzi (dir.), Conflitti, paci e vendette nell’Italia comunale, Florence, 2009. D.L. Smail, « Hatred as a Social Institution », Speculum (76), 2001, p. 90-126. R. Rao, Signori di Popolo. Signoria cittadina e società comunale nell Italia nord-occidentale, Milan, 2011.

[5] M. Dobry, Sociologie des crises politiques. La dynamique des mobilisations multisectorielles, Paris, [1986] 1992. 

Lieux

  • Maison méditerranéenne des sciences de l'Homme - 5 rue du Château de l'Horloge
    Aix-en-Provence, France (13094)

Dates

  • lundi 25 septembre 2017

Mots-clés

  • délibération, gouvernement, Europe méridionale, commune, Moyen Âge

Contacts

  • Laure Verdon
    courriel : laure [dot] verdon [at] univ-amu [dot] fr
  • François Otchakovsky-Laurens
    courriel : f [dot] otchakovsky [dot] laurens [at] gmail [dot] com

URLS de référence

Source de l'information

  • Laure Verdon
    courriel : laure [dot] verdon [at] univ-amu [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Enregistrer les conflits », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 18 juillet 2017, https://doi.org/10.58079/y3t

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