Página inicialRecherche, expertise et comparaisons internationales dans les politiques sociales et de santé

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Recherche, expertise et comparaisons internationales dans les politiques sociales et de santé

Research, expertise and international comparisons in social and health policies

Revue française des affaires sociales (RFAS n°2020-4)

Revue française des affaires sociales journal (RFAS no.2020-4)

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Publicado sexta, 24 de janeiro de 2020

Resumo

Cet appel à contribution s’adresse aux chercheurs en science politique, droit sociologie, philosophie, histoire ainsi qu’aux acteurs du champ de la protection sociale et de la santé. Santé, vieillissement, éducation, accueil des jeunes enfants, emploi, handicap, lutte contre la pauvreté… sont autant d’enjeux d’intervention dans le champ des politiques sociales. Ils sont construits socialement à la croisée de savoirs disciplinaires sur les « populations », leurs « besoins », les « territoires » où elles se concentrent, mais aussi sur les modalités « soutenables de financement », ou encore (et il est impossible d’être exhaustif) les scenarii probables d’évolution des professions ou des technologies.

 

 

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Coordinateurs

Le dossier sera coordonné par :

  • Olivier Giraud, UMR Lise-CNRS-Cnam, Paris.
  • Philippe Warin, UMR Pacte-CNRS-IEP de Grenoble

Argumentaire

Cet appel à contribution s’adresse aux chercheurs en science politique, droit sociologie, philosophie, histoire ainsi qu’aux acteurs du champ de la protection sociale et de la santé.

Santé, vieillissement, éducation, accueil des jeunes enfants, emploi, handicap, lutte contre la pauvreté… sont autant d’enjeux d’intervention dans le champ des politiques sociales. Ils sont construits socialement à la croisée de savoirs disciplinaires sur les « populations », leurs « besoins », les « territoires » où elles se concentrent, mais aussi sur les modalités « soutenables de financement », ou encore (et il est impossible d’être exhaustif) les scenarii probables d’évolution des professions ou des technologies.

Des travaux pionniers avaient émis l’idée que la mobilisation des savoirs par les pouvoirs politiques s’est d’abord inscrite dans une logique de concurrence renforcée entre les États européens, à l’aube des Temps modernes (pour une synthèse : Laborier, 2011). Aujourd’hui, les relations entre les États, notamment en Europe, combinent compétition économique et coopération politique (sans compter bien d’autres aspects comme le contournement du droit, par exemple avec la « crise des migrants » et l’accueil de ceux-ci). Le processus de construction européenne n’a pas résolu ce dilemme. Les modèles sociaux des États-membres sont aux prises avec une compétition, mâtinée de coopération au sein même de l’Union européenne. Plus encore, les liens toujours plus importants entre les politiques sociales – cela a commencé dans le domaine sanitaire il y a plusieurs années – et le marché introduisent une dimension supplémentaire dans la façon dont l’action publique construit ses liens au(x) savoir(s), donc à la recherche académique et, plus largement, à l’expertise.

Dans le champ des politiques sociales et de la santé, ce questionnement est en lien avec les dynamiques dans des domaines connexes comme celui de l’environnement. Chercheurs et experts, et les savoirs disciplinaires dont ils disposent, contribuent à construire les problèmes publics dans ces domaines et jouent un rôle important dans l’orientation des débats (Dumoulin et al., 2013). Recherche et expertise déclinent alors les enjeux démocratiques de l’action publique en ce qu’ils renvoient non seulement à des choix collectifs (quelles sont les options disponibles dans le domaine du logement ou de la lutte contre la pauvreté ? et avec quelles conséquence prévisibles ?) mais aussi à des modalités de mise en œuvre de ces choix collectifs (comment atteindre les objectifs déterminés collectivement dans le domaine de la lutte contre la toxicomanie ou dans celui de l’emploi des seniors ?).

Le Comité d'orientation des retraites est un exemple pertinent du point de vue du positionnement de l'institution (entre recherche et administration, comme en témoigne la composition de ses instances) ou du point de vue de sa production (avis, rapports). Le processus de « réforme des retraites » lancé en France il y a plusieurs mois, illustre l’importance de l’expertise dans les débats publics, de la concurrence des disciplines de recherche, de l’internationalisation des débats et des « modèles » de réforme mis en discussion, ou encore du rapport à l’institutionnalisation de la recherche et de l’expertise. Dans l’actualité immédiate également, les politiques de lutte contre les violences faites aux femmes mobilisent également recherche et expertise.

Précisément, la définition des alternatives possibles est devenue un enjeu politique dans le contexte politique contemporain, particulièrement bien illustré par le fameux TINA - There is no alternative – (dans le cas des débats sur les retraites, Lebaron, 2010). Le pilotage en amont des choix politiques donne cependant souvent lieu aujourd’hui à un rejet non seulement d’un certain type de politiques libérales, mais aussi d’une façon de légitimer des choix politiques sur la base d’expertises spécifiques et fermées. Recherches et expertises dans le domaine des politiques sociales sont sujettes à des évolutions continues dont certaines sont caractéristiques sinon de rejet, au moins de résistances.

Pour interroger la part des expertises quant aux enjeux démocratiques de l’action publique, il convient d’analyser leurs principales évolutions.

1- Impacts de la focalisation de l’action publique sur certaines disciplines scientifiques 

En premier lieu, l’emprise de certaines disciplines scientifiques – la micro-économie, la statistique (Desrosières, 2008), l’épidémiologie, la psychologie sociale, les neurosciences, les sciences de gestion (Gay, 2017), etc. – s’accroît dans un certain nombre de domaines de l’action publique. Dans le champ des politiques sociales, la santé, mais aussi de façon croissante, les politiques du logement, de l’emploi, de l’éducation, sont directement concernées. Quelles sont les conséquences de ces évolutions sur l’orientation des contenus de l’action publique ? Donnent-elles lieu à la recherche et au développement d’alternatives de façon à préserver une fonction critique ? L’interdisciplinarité de la recherche et de l’expertise peuvent-elles en être une modalité, sinon une garantie ? Enfin, le cloisonnement disciplinaire ne remet-il pas en cause la fonction de médiation entre des demandes et alternatives politiques différentes jouée par l’expertise dans différentes configurations ?

2- Le rôle de l’internationalisation des réseaux

Deuxièmement, la focalisation de l’expertise sur certaines disciplines a été interprétée comme l’expression de l’internationalisation des réseaux et de la montée de l’influence d’organisations internationales comme l’OCDE sur l’action publique nationale (Normand, 2017). Est-ce la seule explication et que révèle cette évolution ? A-t-on assisté aussi dans le monde francophone et ailleurs en Europe, à un turn de l’evidence-based ? Quel retour avoir sur les méthodes d’expérimentation ? Comment transforment-elles la place de l’expertise dans l’action publique (Bureau et al. 2013) ? À quelles conditions (scientifiques ou politiques) ces comparaisons sont-elles valides ?

La réflexion peut également porter sur la circulation des débats sur les indicateurs sociaux ou sur les méthodes du risk assessment. Le partage de valeurs et de grilles d’analyse communes circulant à l’échelle internationale par le biais de communautés d’experts qui gravitent autour d’institutions internationales ou européennes, ou, différemment, qui participent à des réseaux d’intérêts (par exemple contre l’extrême pauvreté, le sans-abrisme, la privatisation de la santé et de la protection sociale…), annonce-t-il une standardisation, une uniformisation des modalités nationales d’action publique ? D’une façon plus générale, l’internationalisation de l’expertise agit-elle sur les enjeux politiques de la quantification ordonnée notamment par la technologie managériale du benchmarking ?

3- Nature des évolutions entre recherche, action publique et recours aux expertises

Assiste-t-on en troisième lieu à une transformation des liens structurels entre l’action publique, la recherche et l’expertise ? En France par exemple, les lieux d’échange institutionnalisés entre la recherche scientifique, notamment publique, et l’action publique ont été transformés, et presque toujours, affaiblis. Le Commissariat général au plan ou le Centre d’étude des revenus et des coûts sont sans doute les structures dont la disgrâce politique a été la plus médiatisée. L’affaiblissement continu des services d’études et de recherche attachés aux ministères centraux (le Centre d’études de l’emploi pour ce qui concerne le Ministère du travail par exemple) ou des agences publiques (comme Pôle Emploi) complète cependant cette tendance. L’État se défait des structures de recherche semi-autonomes qu’il abritait en son sein. Et les gouvernements successifs ne laissent guère de place à une expression indépendante sur les inégalités économiques, sociales, territoriales, numériques, de revenu, de santé, de logement, d’éducation… Le report de l’enquête Sans domicile de l’INSEE ou l’absorption toute récente de l’ONPES (Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale) par le CNLE (Conseil national de lutte contre l’exclusion) peuvent être interprétés comme étant d’autres illustrations de cette tendance.

En revanche, on relève non plus l’émergence, mais la généralisation de la convocation d’experts privés (cabinets de consultants, experts associatifs par exemple), notamment dans les politiques sociales. Cette transformation consacre-t-elle une pluralisation de l’expertise ou plutôt l’éviction ou a minima la marginalisation des experts universitaires mais aussi des experts professionnels, issus des syndicats ou d’autres groupes d’intérêts professionnels ou sectoriels ? De quelles données dispose-ton pour l’affirmer et comment l’expliquer ? Faut-il voir l’effet d’une plus grande retenue, en France comparativement à d’autres pays, de la recherche universitaire vis-à-vis de l’évaluation des politiques sociales ? Est-ce dû à une évolution des standards scientifiques qui éloignerait la recherche des besoins des acteurs des politiques ? Que dire de l’évolution de la commande publique de recherche au sein des ministères sociaux, et plus largement, du financement de la recherche publique via l’ANR, qui s’accompagne de l’importance croissante de la cotation des publications scientifiques ?

Simultanément, on assiste à l’inverse à des rapprochements, par exemple au travers d’une territorialisation des liens entre recherche publique, expertise et action publique. Sur ce plan peut-on relever un lien avec l’émergence de nouvelles thématiques qui viennent justifier le besoin de réformes ? Cette évolution ultérieure a certes accompagné la décentralisation mais elle consacre également l’importance grandissante des registres de l’innovation sociale ou encore de la confusion entre concepteurs et prestataires de mesures d’action publique. D’un côté comme de l’autre, il s’agit de comprendre si ces changements tendent à rendre poreuses – et jusqu’où ? – les frontières entre recherche, expertise et ingénierie de projet, et, de plus en plus, consultance et management public.

Les travaux de John Campbell et Ove Pedersen (2014) avaient mis en évidence des « régimes de connaissance ».  Élaborés à l’échelle nationale, ces types de rapports de l’action publique à l’expertise combinent la prise en compte du caractère plus ou moins pluraliste ou centrée sur des acteurs publics intégrés de l’expertise avec la structure des institutions socio-économiques, dans une lecture caractéristique des variétés de capitalisme. Les quatre types de régimes de connaissance esquissés se distribuent alors selon les dimensions retenues : le modèle « marchand » combine une forme pluraliste de relation à l’État et une économie libérale de marché ; la forme « politiquement modérée » associe une expertise d’État centralisée à une économie de marché peu coordonnée ; la logique « centrée sur le consensus » émerge d’une relation non centralisée à l’État et d’une économie de marché coordonnée ; alors qu’enfin, une forme « stato-technocratique » combine une centralisation de l’expertise dans les mains de l’État avec un type spécifique d’économie de marché coordonnée. Ces modèles contrastés illustraient la diversité et les polarités des différents cas nationaux européens. Sont-ils en train de s’effacer au profit d’une régulation qui appartiendrait à une autre logique structurelle ? Dans ce cas, assisterait-on notamment à un regain de l’intérêt général, les experts privés répondant à une « crise de confiance » dans une expertise publique qui aurait cédé au particularisme de l’advocacy ?

La recherche universitaire en perte d’autonomie et d’influence ?

Enfin, la recherche comparative en sciences humaines et sociales produit depuis ses fondations un corpus de travaux de recherche validés empiriquement qui s’attache à dévoiler les mécanismes clés des dynamiques sociales (par exemple Martin, 1997 ; Clasen, 2004). L’autonomie revendiquée par la recherche scientifique universitaire en Europe est-elle aujourd’hui mise à mal par les transformations concomitantes des modalités de financement de la recherche publique et de ses liens – abordés plus haut –  avec l’action publique ? La capacité de la recherche universitaire à asseoir la crédibilité de ses analyses, mais aussi leur succès relatifs dans les débats et l’action publique est-elle face à une impasse ?  Qu’est-ce qui relève de la rigueur de la méthode scientifique, de la capacité de la recherche à transmettre ses résultats pour l’action, ou de la capacité à promouvoir, comme le font les think tanks, des idées en mesure de consolider une vision économique du social (Beland, 2009 ; Argibay 2016) ?

Le numéro consacré aux enjeux de la recherche et de l’expertise comparée dans les politiques sociales que nous proposons ambitionne de susciter une réflexion comparative à la fois dans les différents secteurs de la protection sociale et de la santé, mais également de façon transversale par rapport à des phénomènes spécifiques. Les comparaisons internationales ou entre territoires ou échelles de diverses natures, mais saisies comme des espaces d’interaction sociale, sont particulièrement bienvenues. De l’ethnographie à la science politique, en passant par la socio-économie, la sociologie ou l’histoire, l’ouverture disciplinaire de ce numéro est un objectif également prioritaire. Les propositions d’articles pourront se ranger entre les quatre axes de réflexion proposés dans ce document.

Modalités de soumission

Des informations complémentaires sur le contenu de cet appel à contribution peuvent être obtenues auprès des coordonnateurs aux adresses suivantes :

  • olivier.giraud@lecnam.net
  • philippe.warin@umrpacte.fr

Les auteurs souhaitant proposer à la revue un article sur cette question devront l'adresser accompagné d'un résumé et d'une présentation de l'auteur

(cf. les « conseils aux auteurs » de la RFAS [en ligne] http://drees.social-sante.gouv.fr/etudes-et-statistiques/publications/revue-francaise-des-affaires-sociales /)

à cette adresse: rfas-drees@sante.gouv.fr

avant le lundi 6 avril 2020

Références bibliographiques

Argibay Camilo (2016), « Quand le savant devient politique. Sociologie de l’expertise du think tank Terra Nova », Participations, 16, 195-222.

Beland Daniel, (2009), « Idées, institutions politiques et production de l’expertise : une perspective comparative sur le rôle des think tanks au Canada et aux Etats-Unis », Quaderni, 70, 39-48.

Bureau Marie-Christine, Sarfati François, Simha Jules, Tuchszirer Carole, (2013), « L’expérimentation dans l’action publique. Usages, pratiques et jugements des acteurs », Travail et emploi, 135, p. 41-55.

Campbell, John ; Pedersen, Ove Kaj (2014). The National Origins of Policy Ideas: Knowledge Regimes in the United States, France, Germany, and Denmark. Princeton, Princeton University Press.

Clasen, Jochen (2004), « Defining comparative social policy ». In Kennett, Patricia (ed.), A Handbook of Comparative Social Policy, Cheltenham, Edward Elgar, p. 91-102.

Desrosières, Alain (2008). Gouverner par les nombres : L’argument statistique II. Paris : Presses des Mines.

Dumoulin, Laurence ; La Branche, Stéphane ; Robert, Cécile ; Warin, Philippe (2013). Le recours aux experts – Raisons et usages politiques. Grenoble, PUG.

Gay, Renaud (2017) « Des chercheurs en gestion au service de la réforme hospitalière – années 1970-2000 ». In Barbier, Jean-Claude ; Poussou-Plesse, Marielle (dirs.) Protection sociale : le savant et la politique. Paris, La Découverte, p. 65-81

Laborier, Pascale (2011). « Les sciences camérales, prolégomène à toute bureaucratie future ou parades pour gibier de potence ? » In Laborier, Pascale et Trom, Danny (dirs.). Les sciences camérales : activités pratiques et histoire des dispositifs publics. Paris, PUF, p. 11-29.

Lebaron, Frédéric (2010). « Retraites et (in)sécurité économique : d’autres indicateurs (et d’autres politiques) sont possibles ». Savoir/Agir, n°13, p. 107-111.

Martin, Claude (1997). "La comparaison des systèmes de protection sociale en Europe. De la classification à l’analyse des trajectoires d’État providence." Lien social et Politiques, n° 37, printemps, p. 145–155.

Categorias


Datas

  • segunda, 06 de abril de 2020

Palavras-chave

  • méthode, comparaison, international, Union européenne, OCDE, expertise

Contactos

  • Aurore Lambert
    courriel : aurore [dot] lambert [at] sante [dot] gouv [dot] fr

Fonte da informação

  • Aurore Lambert
    courriel : aurore [dot] lambert [at] sante [dot] gouv [dot] fr

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Para citar este anúncio

« Recherche, expertise et comparaisons internationales dans les politiques sociales et de santé », Chamada de trabalhos, Calenda, Publicado sexta, 24 de janeiro de 2020, https://doi.org/10.58079/148e

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