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Influenceur·ses et communication

Revue « Médiation et information » n°56

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Published on Monday, October 03, 2022

Abstract

Face à l’évolution des réseaux sociaux numériques, les pratiques de marketing d’influence et de « publicitarisation » s’immiscent de plus en plus au sein des contenus, en particulier audiovisuels et photographiques. Placements de produits, partenariats et jeux d’influence sont devenus de véritables enjeux financiers et stratégiques pour les créateur·ices de contenus comme pour les acteur·ices professionnel·les de la communication marchande. Si l’omniprésence de ce marketing d’influence et de leur représentant·es sur les plateformes numériques est grandissant, la notion « d’influenceur·se » demeure peu étudiée et questionnée en sciences de l’information et de la communication, tout en étant au carrefour de plusieurs champs d’études. De quelle manière le marketing d’influence contribue à reconfigurer les pratiques en ligne et les représentations en circulation sur les réseaux sociaux numériques ? Qu’est-ce qui caractérise les formes de publicitarisation des contenus circulant en ligne ?

Announcement

Argumentaire

« Choisir de scruter ce que la publicité fait aux médias, dans leur forme et dans leur contenu ; c’est penser ensemble la création médiatique et le financement de l’entreprise ; c’est tisser délibérément ce qui est souvent analysé distinctement, à savoir les faits de culture et les questions économiques » (Patrin-Leclère, 2014 : 41).

Face à l’évolution des réseaux sociaux numériques, les pratiques de marketing d’influence et de « publicitarisation » (Patrin-Leclère, 2014) s'immiscent de plus en plus au sein des contenus, en particulier audiovisuels et photographiques. Placements de produits, partenariats et jeux d’influence sont devenus de véritables enjeux financiers et stratégiques pour les créateur-ices de contenus comme pour les acteur-ices professionnel-les de la communication marchande. Ils se glissent dans les interfaces sous forme de publications aux formats et aux temporalités variés.

Le marketing dit « d’influence » s’inscrit par ailleurs dans un continuum de pratiques publicitaires déjàrodées par l’industrie télévisuelle et médiatique. Les placements de produits sur les réseaux sociaux numériques ne sont pas sans rappeler la présence des marques au cinéma (Le Nozach, 2013) ou dans les magazines. Ils reprennent des formes « d’hyperritualisation » (Goffman, 1977) des corps et promeuvent un « idéal-social » (Goffman, 1977), s’inscrivant alors dans des « horizons d’attente » (Jauss, 1994 : 55) constitués de normes sociales et d’habitudes. Ces pratiques modélisent également des « lectures préférentielles » (Hall, 1972) d’un-e « lecteur-modèle » (Eco, 1985) qui cadrent, dans une certaine mesure, la production des contenus et des pratiques de « décodage » plurielles de lecteur-ices (Hall,1972).

Les placements de produits des influenceur-ses en circulation sur les réseaux sociaux numériques sont conventionnalisés et participent à la production et reproduction d’une « version du monde » (Goffman,1977) hégémonique, cadrée par l’industrie publicitaire et les valeurs encodées dans les « architextes » (Jeanneret, Souchier, 1999) des réseaux sociaux numériques. D’autres versions du monde, plus à la marge, sont à contrario mises au banc ou complètement évacuées par un processus de déshistorisation rappelant la fonction du mythe (Barthes, 1957). Pour autant, on peut malgré tout observer le développement et la promotion de pratiques contre-hégémoniques (citons par exemple le mouvement du bodypositive ou encore les influenceur-ses refusant les placements de produits comme le youtubeur Durendal).

S’intéresser aux placements de produits et plus généralement au marketing d’influence nous conduit à interroger la figure de l’influenceur-se. Dans sa recommandation « Communication publicitaire digitale », l’ARPP (Autorité de régulation professionnelle de la publicité) définit l’influenceur-se comme un « individu exprimant un point de vue ou donnant des conseils, dans un domaine spécifique et selon un style ou un traitement qui lui sont propres et que son audience identifie ».

Aujourd’hui, l’influenceur-se n’est plus seul-e intermédiaire entre les marques qu’il-elle représente et son audience : le marché de l’influence se révèle être en forte croissance, tant en volume que dansl’apparition et la structuration d’un milieu professionnel (agences, annonceurs, plateformes d’intermédiation). De la micro à la macro-influence, les contours de la professionnalisation tendent à se dessiner et se consolider, faisant émerger divers sens, mécanismes et pratiques. On observe également une porosité des frontières entre divers mondes professionnels, tandis que les pratiques professionnelles du sponsoring ont tendance à affermir la valeur sociale et la crédibilité de l’influenceur-se (Meyer, Legal, Durand, 2019)

À titre d’exemple, les candidat-es de télé-réalité sont parmi les personnalités les plus suivies en France sur les réseaux sociaux numériques et sont dans leur grande majorité en contrat avec des agences d’influence marketing gérant la médiation entre les marques et ses représentant-es. La plateforme Youtube a également vu se développer des leaders de l’influence fitness tels que Tibo InShape ou SissyMua dont les contenus participent à la promotion de compléments alimentaires ou de programmes de sport - touchant ainsi à des questions de santé publique sensibles. Les influenceur-ses, pour beaucoup « certifié-es » personnalités publiques par les plateformes, proposent donc aux internautes des contenus en apparence dépublicitarisés (Marti, 2014), insérés dans le quotidien (Marty, 2021), sous forme de placements de produits rémunérés par des marques, tout en se faisant les vecteurs de normes etre présentations sociales hégémoniques.

Si l’omniprésence de ce marketing d’influence et de leur représentant-es sur les plateformes numériques est grandissant, la notion « d’influenceur-se » demeure peu étudiée et questionnée en Sciences de l’Information et de la Communication, tout en étant au carrefour de plusieurs champs d’études : approches critiques des médiations marchandes (Marti, 2019), définition et évolution des formes publicitaires et médiatiques (Berthelot-Guiet, Marti, Patrin-Leclère, 2014 ; Aubrun, Marti,Patrin-Leclère, 2021), travaux sur les amateur-ices et les communautés de fans (Jenkins, 2006 ; Flichy,2010 ; Bourdaa, 2013), réflexions sur le storytelling des marques (Marty, 2021) et les professionnel-les de la communication (Peirot, Roginsky, 2019 ; Desmoulins, Alloing, Mohli, 2018 ; Grignon, 2020). De quelle manière le marketing d’influence contribue à reconfigurer les pratiques en ligne et les représentations en circulation sur les réseaux sociaux numériques ? Qu’est-ce qui caractérise les formes de publicitarisation des contenus circulant en ligne ?

En interrogeant les liens entre influenceur-ses, pratiques numériques et représentations sociales, les propositions attendues pourront s’inscrire, de manière non limitative, dans les thématiques suivantes :

  • Stratégies de (dé)publicitarisation et pratiques professionnelles des influenceur-ses : écriture et partage de soi ; intimité ; médiations marchandes ; coopération avec des professionnel-les de l’influence ; acquisition, conversion et fidélisation de communautés ; métriques.
  • Dispositifs, temporalités et monstration de la réalité : scénarisation, sérialisation et fictionnalisation des contenus ; intericonicité ; discontinuités narratives et interprétatives ; publics et temporalités.
  • Normes corporelles et reconfigurations des représentations de la société : normes de genre ; normes de race ; norme de classe ; normes de santé ; représentations des corps normaux/normés et/ou marginaux/subversifs ; idéaux-types corporels (beauté, musclé, genré,blanchité, valide, sain), politique des corps ; inclusivité ; approches intersectionnelles.
  • Pratiques de réception des publics d’influenceur-ses : jeunes et influence (youth studies), cultural studies ; buzz, polémiques (Maëva Ghennam, 2021 ; Booba vs. Magali Berdah, 2022, etc.) et visibilité ; dramaturgie des problèmes publics ; éthique ; sociologie des publics.

Coordination scientifique

  • Sébastien Appiotti (GRIPIC, CELSA - Sorbonne Université)
  • Lucile Coquelin (CEMTI, Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis)
  • Marine Malet (CARISM, Université Paris-Panthéon-Assas)

Modalités de soumission

Les propositions devront être envoyées aux coordinateur-ices du numéro sebastien.appiotti@sorbonne-universite.fr, lucile.coquelin@yahoo.fr et marinemalet@hotmail.fr

Les propositions devront comporter :

  • un titre ;
  • un résumé de 300 à 500 mots ;
  • 5 mots-clés ;
  • les informations sur læ ou les auteur-ices : nom, affiliation institutionnelle, fonction, adresse professionnelle, numéro de téléphone et courriel, courte bio-bibliographie (5 à 10 lignes).

Les propositions d’article sont à envoyer au plus tard le 1er décembre 2022.

À partir des évaluations du Comité de lecture, la direction du numéro de MEI sélectionnera les propositions et en informera les auteur-ices le 15 décembre 2022.

Les articles complets sont d’un format de 20 000 à 25 000 signes (espaces, notes et bibliographie incluses) et devront être remis aux coordinateur-ices du numéro, au plus tard le 15 mars 2023. Il est demandé aux auteur-ices de bien vouloir respecter les consignes éditoriales de la revue (pdf).

Les articles complets seront évalués en double aveugle. Les retours aux auteur-ices se feront au plus tard le 15 mai 2023. Pour les articles retenus, les articles corrigés devront être remis au plus tard le 15 juillet 2021.

La publication du numéro est prévue pour le début de l’année 2024.

Subjects


Date(s)

  • Thursday, December 01, 2022

Keywords

  • influence numérique, publicitarisation, réseaux sociaux numériques

Contact(s)

  • Lucile Coquelin
    courriel : lucile [dot] coquelin [at] yahoo [dot] fr

Information source

  • Lucile Coquelin
    courriel : lucile [dot] coquelin [at] yahoo [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« Influenceur·ses et communication », Call for papers, Calenda, Published on Monday, October 03, 2022, https://doi.org/10.58079/19m6

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