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Les formes contemporaines de la mobilité

« Espace Populations Sociétés »

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Published on Monday, November 28, 2022

Abstract

La question des mobilités est loin d’être un sujet inédit pour la revue Espace Populations sociétés. Plusieurs numéros l’ont en effet déjà évoquée depuis 2010. Cela étant précisé, il apparaît plus que jamais nécessaire, dans le contexte actuel, d’identifier et d’analyser les formes contemporaines de la mobilité. Il suffit de penser aux enjeux écologiques qui ne cessent de se préciser et des échéances qui s’imposent en l’espèce. Comment ne pas tenir compte de l’intensification des processus de métropolisation et des flux qu’ils impliquent, de la densification de l’ensemble des infrastructures relatives aux transports des personnes et des biens, ou encore de l’encombrement de nombre d’espaces privés, semi-publics et publics ? Force est d’admettre que les enjeux de la mobilité et de ses formes contemporaines posent, ce faisant, des questions relatives au partage de l’espace et des ressources mobilitaires individuelles et collectives.

Announcement

Appel à article pour le numéro thématique « Les formes contemporaines de la mobilité » de la revue Espace Populations Sociétés.

Argumentaire

La question des mobilités est loin d’être un sujet inédit pour la revue Espace Populations sociétés. Plusieurs numéros l’ont en effet déjà évoquée : « De nouvelles mobilités dans une Europe élargie » (2008), « Nouvelles mobilités dans les Suds » (2010), « Métro-boulot-dodo : quoi de neuf dans nos routines de mobilité ? » (2015), « Mobilités et accessibilités » (2016), « Mobilités, migrations internationales et réseaux sociaux : approches inter- et transnationales » (2017).

Cela étant précisé, il apparaît plus que jamais nécessaire, dans le contexte actuel, d’identifier et d’analyser les formes contemporaines de la mobilité (Urry, 2005 ; Belton-Chevallier et al., 2019). Il suffit de penser aux enjeux écologiques qui ne cessent de se préciser et des échéances qui s’imposent en l’espèce. Et puis comment ne pas tenir compte de l’intensification des processus de métropolisation et des flux qu’ils impliquent, de la densification de l’ensemble des infrastructures relatives aux transports des personnes et des biens, ou encore de l’encombrement de nombre d’espaces privés, semi-publics et publics (ici de trottinettes, là de vélos, ailleurs d’automobiles, de deux-roues ou encore de piétons).

En outre, il faut préciser à quel point c’est dans ce contexte général qu’un mouvement de remise en question du paradigme automobile, et plus largement de « l’automobilisme » (Flonneau, 2008), s’est amorcé. Autrement dit, ce qui est remis en cause aujourd’hui, c’est la centralité de l’automobile dans l’ensemble du système des mobilités. Pour autant, ce mouvement doit être appréhendé au regard des possibilités réelles de s’affranchir de l’automobile puisque, faut-il le rappeler, près d’1 Milliard 300 millions d’automobiles sont actuellement en circulation aux quatre coins de la planète.

Cela étant précisé, on observe une diversification de l’offre de transport portée à la fois par des innovations technologiques et servicielles mais aussi par une certaine créativité dans les usages. Du côté des innovations, citons par exemple la voiture et le vélo électriques, les systèmes de trottinettes en libre-service ou encore l’autopartage. Côté créativité, pensons aux initiatives locales ou privées d’autopartage, aux organisations de covoiturage et dans d’autres aires géographiques que l’Europe, aux motos-taxis (Diaz Olvera et al. 2020) et autres systèmes de transport. Toutes ces innovations, ordinaires ou non, se trouvent en outre mises au défi par le numérique qui offre de nouvelles opportunités mais rebats les cartes de l’accès à la mobilité pour les usagers.

Ces usages font l’objet de cadrages et de (tentatives de) régulation, face à la montée des enjeux énergétiques, climatiques et sanitaires. Ainsi, les incitations, voire les injonctions, sont de plus en plus explicites à adopter des comportements mobilitaires présentés comme responsables et vertueux. Les politiques publiques sont à cet égard de plus en plus contraignantes – pensons par exemple dans d’autres pays européens aux péages urbains ou, en France, aux récentes mises en œuvre des ZFE, Zones à faibles émissions (Lyon, Grenoble, Paris et la Métropole du Grand Paris en 2021 ; les métropoles d’Aix-Marseille-Provence, Nice-Côte d’Azur, Toulon-Provence-Méditerranée, Toulouse, Montpellier-Méditerranée, Strasbourg et Rouen-Normandie en 2022). Surtout, et ce d’autant plus quand elles s’avèrent contradictoires, les politiques publiques cristallisent des résistances et/ou des incompréhensions des habitants et usagers, et génèrent de fortes tensions observables, par exemple, dans les conflits d’usages sur l’occupation de l’espace public. Les discours médiatiques montrent également des conflits de valeurs très forts en matière de transport, qui témoignent de la force structurante du système automobile et de la difficulté à s’en départir ou à le dépasser. Le rapport de force, ou du moins la cohabitation contrariée, entre automobilité et altermobilités est plus que jamais source de clivage.

Ainsi, force est d’admettre que les enjeux de la mobilité et de ses formes contemporaines posent, ce faisant, des questions relatives au partage de l’espace et des ressources mobilitaires individuelles et collectives (Kaufmann, 2007). Plus encore peut-être, les questions d’accessibilité et de « disponibilité » (Rosa, 2020) de certains territoires plus ou moins bien dotés économiquement apparaissent comme incontournables, d’où l’importance d’avoir à l’esprit des logiques, assez universelles au demeurant, de rejet des populations les plus précaires au sein d’espaces dépourvus de mobilités – des ghettos sans mobilités –, ou du moins théâtre d’une mobilité fortement contrainte et sélective. Et puis, il faut compter avec la démultiplication et la cohabitation, ici heureuse, là contrariée, des formes de mobilité.

Axes thématiques

Le présent numéro d’Espace populations sociétés est donc ouvert à toute contribution pouvant apporter des éclairages sur l’un ou l’autre de ces phénomènes. En particulier, nous attendons des contributions autour de :

  1. Innovations et diversification des usages :

Quelles sont les nouvelles pratiques mobilitaires aujourd’hui ? Comment les innovations sont-elles appropriées par les usagers et à quelles conditions ? Quelles sont les réponses des habitants en matière de mode de déplacement en fonction de leurs niveaux de ressources économiques, de leurs rythmes de vie et de leur(s) lieu(x) de vie ? Qui peut accéder à quoi, quand, comment, où et à quel prix ? Quelles valeurs sous-tendent les pratiques mobilitaires pré-existantes ou en émergence, qu’elles relèvent de l’innovation technologique ou d’une forme de frugalité écologique ? Comment s’articulent-elles aux systèmes de valeurs pré-existants ? Cohabitent-elles ou bien occasionnent-elles des conflits ? En d’autres termes, qui s’engage dans les mobilités actuelles, avec quels moyens et selon quelles formes ?

  1. Les cohabitations :

Comment différentes valeurs ou systèmes de mobilité cohabitent-ils dans le concret du quotidien ? Cette cohabitation pourra être questionnée à deux niveaux. Premièrement, à l’échelle de l’espace-temps du déplacement : quels sont les usagers qui se côtoient ? Dans quels lieux, dans quels contextes, de quelle manière ? Qui accepte de cohabiter avec l’autre proche physiquement mais socialement étranger dans l’espace collectif d’un train, dans l’espace intime de l’automobile (co-voiturage) (Marchal, 2014) ou encore dans l’espace public d’une gare ou d’un quai de tramway ? Deuxièmement, la cohabitation pourra aussi renvoyer à la pluralité des usages de l’espace public et des infrastructures partagées pour le déplacement. Piétons, cyclistes, motards, automobilistes sont amenés à cohabiter sans forcément interagir et se comprendre.... (Rigal, 2020) Comment les uns et les autres se perçoivent-ils ? De quelle manière entrent-ils en relation si tant est que ce soit le cas ? Dans quels espaces s’opèrent concrètement le partage des différents supports de mobilité ?

  1. L’action publique et ses effets :

Quelles orientations aujourd’hui en faveur de certaines formes de mobilités ? En particulier, quelles sont les politiques publiques, les innovations, les actions mises en œuvre pour une mobilité plus durable/soutenable ? Quels en sont les effets ? Dans quelle mesure les préférences et choix des individus en matière de mobilité peuvent être pris en compte dans le cadre des politiques d’aménagement du territoire en cohérence avec les impératifs de la transition écologique ? Comment l’aménagement favorise-t-il le recours à tel ou tel mode de mobilité, l’accès à l’emploi, aux loisirs, à l’éducation ou encore à la culture ? Qu’est-ce qu’ont réellement produit les expériences de gratuité des transports en commun ? (OVTG, 2022) Inversement, quels sont les coûts que doivent supporter les différentes populations – coûts qui engendrent ici et là plus ou moins de flux mais qui, inévitablement, marginalisent de fait certaines populations ? Quelles sont pour les territoires les retombées des aménagements liés aux mobilités douces et censés se conjuguer à des logiques de développement touristique par exemple ? A qui cela profite-t-il concrètement ? Et la question se pose de savoir quels sont les liens ou les effets entre les nouvelles formes de mobilité et la géographie de la population, à commencer par le ou les lieux de résidence des individus.

Plus largement, toujours dans le cadre de cet axe 3, n’assistons-nous pas à un changement de paradigme dans la mesure où la puissance publique, qui créait l’offre de transport lointain et organisait largement la mobilité locale par les lignes de bus et des infrastructures lourdes (voiries, métro…), tend à devenir avant tout régulatrice, souvent a posteriori, de la diversification et de la multiplication de l’offre de transports (opérateurs privés, initiatives individuelles/locales, applications numériques…), et ce, quelle que soit la distance ?

Les articles peuvent porter aussi bien sur les centres-villes les plus densifiés que sur les zones rurales les plus excentrées en passant par toute la diversité des zones intermédiaires que sont les banlieues, les espaces périurbains proches et éloignés... Si la problématique de ce numéro s’appuie principalement sur le cas français, les articles attendus ne sont en revanche pas limités à ce seul terrain, peu s’en faut. Les travaux centrés sur d’autres pays feront l’objet d’une égale attention, d’autant plus que les questions abordées ici concernent nombre de pays, dont ceux du sud notamment, où la demande de mobilités est bien plus forte, l’offre bien plus faible et les moyens tout autant. Et comment ne pas rappeler que les Suds innovent en permanence en la matière et peuvent inspirer des pratiques et réflexions du Nord. Il suffit de penser aux tuk-tuks qui sont présents de l’Amérique centrale à l’Afrique en passant par l’Asie.

Enfin, la revue Espace populations sociétés étant ouverte à la pluridisciplinarité, les textes retenus pourront s’inscrire dans le champ de la géographie, de la démographie et de la sociologie ou/et au carrefour de ces disciplines.

Modalités de contribution

Les résumés puis les articles sont à adresser à :

  • Hervé Marchal, Université de Bourgogne-Franche-Comté, Laboratoire Interdisciplinaire de Recherches « Sociétés, Sensibilités, Soin » - UMR 7366 herve.marchal [at] u-bourgogne.fr
  • Gaëtan Mangin : Université d’Artois, LEM - UMR 9221 gaetan.mangin [at] gmail.com
  • Stéphanie Vincent : Université Lumière Lyon 2, Institut d’urbanisme, LAET - UMR 5593 stephanie1.vincent [at] univ-lyon2.fr

Avant le 1er janvier 2023 (pour les propositions d’article)

Lire les Consignes de publications.

Calendrier

  • Date limite pour l’envoi des propositions d’articles (titre et résumé d’environ 1-2 pages) : 01/01/2023
  • Sélection des résumés par le Comité de rédaction et annonce aux auteurs : 30 janvier 2023
  • Date limite de l’envoi des articles au Comité de rédaction : 30 juin 2023

Comité de rédaction

  • Hervé Marchal, Université de Bourgogne-Franche-Comté, Laboratoire Interdisciplinaire de Recherches « Sociétés, Sensibilités, Soin » - UMR 7366 herve.marchal [at] u-bourgogne.fr
  • Gaëtan Mangin : Université d’Artois, LEM - UMR 9221 gaetan.mangin [at] gmail.com
  • Stéphanie Vincent : Université Lumière Lyon 2, Institut d’urbanisme, LAET - UMR 5593 stephanie1.vincent [at] univ-lyon2.fr

Bibliographie

Belton-Chevallier L., Oppenchaim N., Vincent-Geslin S., Manuel de sociologie des mobilités géographiques, Tours, Presses universitaires Francois Rabelais, 2019.

Diaz Olvera L., Plat D., Pochet P., « Looking for the obvious. The case of the motorbike-taxis in Sub-Saharan Africa », Journal of Transport Geography, “Informality in transport”, 2020.

Flonneau M., Les cultures du volant XXe-XXIe siècles. Essai sur les mondes de l’automobilisme, Paris, Autrement, 2008.

Kaufmann V. (2007), « La motilité : une notion clé pour revisiter l’urbain ? », in Bassand M., Kaufmann V. Joye D. (dir.), Enjeux de la sociologie urbaine, Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes, pp. 171-188.

Marchal H., Un sociologue au volant. Le rapport de l’individu urbanisé à sa voiture, Paris, Téraèdre, 2014.

Marchal H., Stébé J.-M., La France périurbaine, Paris, PUF, 2018. DOI : 10.3917/puf.march.2018.01

Observatoire des villes du transport gratuit (OVTG), La gratuité des transports. Une idée payante ?, Lormont, Le Bord de l’eau, coll. « Documents », 2022,

Rigal A., Habitudes en mouvement : vers une vie sans voiture, Genève, Métis Presse, 2020.

Rosa H., Rendre le monde disponible, Paris, La Découverte, 2020.

Urry J., Sociologie des mobilités. Une nouvelle frontière pour la sociologie ?, Paris, Armand Colin, 2005.DOI : 10.3917/arco.urry.2005.01


Date(s)

  • Sunday, January 01, 2023

Keywords

  • transport, mobilité, ville

Contact(s)

  • Stéphanie Vincent
    courriel : s [dot] vincent [at] univ-lyon2 [dot] fr
  • Hervé Marchal
    courriel : Herve [dot] Marchal [at] u-bourgogne [dot] fr
  • Gaëtan Mangin
    courriel : gaetan [dot] mangin [at] gmail [dot] com

Information source

  • Gaëtan Mangin
    courriel : gaetan [dot] mangin [at] gmail [dot] com

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« Les formes contemporaines de la mobilité », Call for papers, Calenda, Published on Monday, November 28, 2022, https://doi.org/10.58079/1a1f

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