HomeBâtis et habitats forestiers d’hier et d’aujourd’hui

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Published on Thursday, June 01, 2023

Abstract

Les activités de pâturage, de chasse, d’artisanat et de proto-industrie, ont très majoritairement retenu l’attention des chercheurs travaillant sur la thématique de la forêt. En revanche, les « hommes des bois » qu’ils soient bûcherons, charbonniers, sabotiers, gardes forestiers, bien que cités par les historiens, demeurent globalement méconnus. L’objectif de cette journée d’étude du Groupe d’histoire des forêts françaises (GHFF) est de s’intéresser aux structures bâties, sommaires et modestes ou plus élaborées, qui ont émaillé, sous une forme ou une autre, les paysages forestiers. Objets délaissés, il s’agit surtout de dresser un état des lieux tant des sources disponibles que des études déjà menées, et permettre ainsi de proposer de nouvelles recherches et synthèses.

Announcement

Argumentaire

Les espaces forestiers, réservoirs de ressources vivrières et marchandes, abondamment exploités et transformés depuis longtemps, ont joué un rôle majeur dans l’économie des sociétés anciennes (antique, médiévale ou moderne). Ce sont ces aspects, à travers les activités de pâturage, de chasse, d’artisanat et de proto-industrie, qui ont très majoritairement retenu l’attention des chercheurs travaillant sur la thématique de la forêt. En revanche, les « hommes des bois » qu’ils soient bûcherons, charbonniers, sabotiers, gardes forestiers, bien que cités par les historiens, demeurent globalement méconnus[1]. Ce sont pourtant les hôtes familiers, et surtout les « façonneurs » de la forêt. Ce sont eux, habitants véritables des bois, souvent mal vus d’ailleurs des communautés paysannes[2], qui ont aménagé des espaces de vie temporaires (saisonniers ou nomades en fonction des chantiers)[3] – abris, loges, cabanes de bûcherons, huttes de charbonniers, ateliers de sabotiers – ou pérennes comme les maisons forestières qui se sont multipliées à partir du XIXesiècle. En 1901, on en comptait plus de 1 600 sur l’ensemble du territoire français métropolitain d’alors[4].

Tous les types de contribution (étude de cas, chronique, étude comparative, synthèse) seront considérés. Plusieurs approches et points de vue pourront être envisagés.

I - Loges, cabanes, huttes de charbonniers et de bûcherons

Ce sont tous des habitats particuliers, de « professionnels » de la forêt qui y vivent plus ou moins en permanence[5]. Les sources d’avant 1789 ne semblent guère prolixes sur ces populations, et encore moins sur leurs habitats. Mais les a-t-on vraiment cherchés ? Ces derniers sont-ils des vestiges voués à la disparition totale ? Comment ont-ils été conservés dans la mémoire des sols ?

Certains d’entre eux ont pu être repérés par les sources cartographiques anciennes, afin d’en étudier leurs modes de construction ou de les utiliser comme indices de présence humaine historiques dans des études sociologiques, géographiques ou écologiques (en lien notamment avec l’ancienneté ou la naturalité des forêts).

Les suivis archéologiques à l’occasion notamment des travaux d’exploitation ou de dessertes forestières, les restes de fours à charbon, et surtout les relevés LiDAR peuvent aider à les identifier sur le terrain. N’est-ce pas là une piste de recherche à poursuivre par les archéologues de la forêt ? Si les repérages des charbonnières sont désormais bien documentés (multiplication des travaux de paléoanthracologie), les habitats en eux-mêmes ne semblent pas avoir fait l’objet d’investigation archéologique particulière hormis le travail pionnier d’A. Riou sur le massif de Lorris-les-Bordes[6]. Difficultés de l’approche : quels outils, quelles méthodologies mettre en œuvre ?

La prise en compte de la représentation de ces habitats dans l’art, par les peintres de l’école de Barbizon ou leurs descendants, peut également apporter de précieuses informations : élément de pittoresque tout comme les troupeaux de bœufs (cf. Dupré, Troyon, Rousseau), rareté, absence ?

Les quelques études monographiques auxquelles ces habitats ont donné lieu en font des structures immuables, n’ayant guère changé depuis le Néolithique. Encore faudrait-il se demander si ce bâti ne s’adapte pas aux pratiques des « hommes des bois » au fil du temps ?

Se décline alors toute une série de questionnements :

- Comment cet habitat s’implante-t-il en forêt ? Des emplacements sont-ils désignés, voire réservés, par les gardes-forestiers pour installer loges et ateliers comme dans le massif de Bercé ?[7]

- Quelle est la durée de vie de ces constructions, leur localisation topographique, leur proximité avec les lieux de travail, leur situation (isolé, à proximité de voie de communications) ?

- Que connaît-on de leur architecture fonctionnelle, de leurs formes (circulaire ou rectangulaire), des matériaux de construction (des branchages et fougères aux planches et tôle), de leur organisation sociale (habitat individuel ou abritant plusieurs familles), ou encore leur saisonnalité ?

- Comment ces structures bâties évoluent-elles au fil des temps ? Les reconstruit-on périodiquement ?

- Ces habitats et leurs déplacements au rythme des coupes de bois ne témoignent-ils pas de l’évolution de la végétation forestière (déforestation, recolonisation par des essences parfois différentes, sélection d’essences forestières diversifiant les sylvofaciès), en somme du façonnage des paysages forestiers ?

II - Logements des forestiers

Plus pérennes car construites « en dur », sont les maisons forestières qui ont été étudiées en partie par certains forestiers[8] et les chercheurs de l’Inventaire Général du Patrimoine Culturel[9]. Quelques associations patrimoniales ont alerté sur l’urgence de prendre en compte « ces oubliées » de l’histoire forestière, de moins en moins souvent habitées, mises en vente depuis quelques décennies déjà pour nombre d’entre elles, voire détruites.

Les quelques études menées (Pays de la Loire, Alsace) montrent la nécessité de mieux appréhender ce patrimoine bâti forestier :

- Avant la construction systématique de maisons forestières au XIXe siècle, comment le forestier « habitait-il » la forêt ou ses alentours ? Que sait-on des habitats des forestiers sous l’Ancien Régime, voire aux derniers siècles médiévaux quand une administration des eaux et forêts se met en place ? Qu’en disent les sources écrites ? Il y a nécessité sans doute de revoir le vocabulaire utilisé, et de proposer une typologie de ces maisons forestières. Cet habitat est-il limité aux forêts royales ou princières aujourd’hui domaniales, ou en trouve-t-on, des exemples dans les forêts seigneuriales puis bourgeoises à partir du XIXe siècle ?

- Existe-t-il un modèle-type d’habitat ou une adaptation aux spécificités régionales, voire locales, comme par exemple les maisons forestières de la côte atlantique ? Il s’agit de s’interroger sur les maisons forestières dans l’Hexagone (grandes différences entre le Grand Ouest de la France et le Sud-Est par exemple), mais aussi dans les colonies et sur un siècle élargi au temps des conversions (vers 1840-vers 1940).

- La localisation topographique : un choix dicté par le terrain, par des idéologies politiques ? Cet habitat et son maillage territorial traduisent les représentations que l’État, les collectivités locales et le corps des ingénieurs forestiers, se font de ce que doit être l’aménagement du territoire au XIXe siècle.

- Les rôles assignés au forestier (surveillance des coupes, martelage, présence physique du pouvoir politique, etc.), sa place dans la société locale, et au sein des massifs forestiers à gérer et surtout historiquement à « surveiller », ses relations avec les communautés paysannes et villageoises[10].

- Au XXe siècle, l’évolution des modèles-types de la maison forestière comme révélatrice de l’évolution du rapport à la forêt et des nouvelles considérations de l’administration.

- Aujourd’hui, le bâti forestier : ce qui subsiste, les modalités d’occupation et les usages actuels ; quelles protection, conservation, valorisation sont envisagées ?

Répondre à ces questions non exhaustives, suppose de faire le point sur les très nombreuses sources disponibles : textuelles, cartographiques, archéologiques (notamment rapports de fouilles dans les services régionaux de l’archéologie), photographiques et audio-visuelles (archives de Pathé-Gaumont et de l’INA), etc. Certes, ces sources ne sont pas toujours d’un accès aisé car conservées en des lieux et des fonds divers : archives nationales, départementales, communales, voire dans des fonds privés comme celui de la famille de Mérode, fonds de l’Inventaire Régional du ministère de la Culture, archives forestières des services de l’Office National des Forêts, ou toujours déposées dans les maisons forestières elles-mêmes. Sans oublier les mémoires et témoignages de forestiers logés en forêt aujourd’hui ou l’ayant habitée.

Sans aucun doute, la réalisation d’une recension systématique serait-elle souhaitable pour faciliter et encourager les recherches sur cette problématique.

Modalités de soumission et de sélection

Propositions de communications à envoyer avant le 15 septembre 2023 à l’adresse suivante :

Corinne BECK : cbeck16@wanadoo.fr

Chaque proposition de communication devra comporter :

  • Un titre explicite et court.
  • Un résumé d’une page de 1 500 à 2 000 signes maximum.
  • 5 mots-clés.
  • Une courte bibliographie de 10 titres maximum.
  • L’affiliation scientifique et les coordonnées du ou des auteurs.
  • L’adresse e-mail du correspondant de la communication.

Les auteurs seront informés de l’avis du Comité scientifique en octobre 2023. Le programme de la journée d’études sera diffusé courant novembre 2023.

Les communications retenues, après évaluation par le Comité scientifique, seront publiées dans le Cahier du GHFF Forêt, Environnement et Société en 2025. Les auteurs devront rendre leur texte aux normes au plus tard le 30 mars 2024.

Dates et lieu de la journée d’études

Vendredi 26 janvier 2024 à Paris (lieu à définir)

Contacts : cbeck16@wanadoo.fr

Comité d’organisation

  • Corinne Beck, Professeur émérite en Histoire et Archéologies médiévales, Université de Valenciennes
  • Marc Galochet, Professeur des Universités en Géographie, Université de Valenciennes (UPHF)

Comité scientifique

  • Stéphanie Barioz-Aquilon, Chargée de mission Inventaire général du Patrimoine, PETR Pays Vallée du Loir (Sarthe) avec la Région Pays de la Loire
  • Corinne Beck, Professeur émérite en Histoire et Archéologie médiévales, Université de Valenciennes
  • Martine Chalvet, Maître de conférences en Histoire contemporaine, Aix-Marseille Université
  • Cécile Dardignac, Office National des Forêts, Agence Étude Seine-Nord
  • Jean-Pierre Husson, Professeur émérite en Géographie, Université de Lorraine
  • Laurent Lathuillière, Office National des Forêts, DT Auvergne-Rhône-Alpes
  • Xavier de Massary, Conservateur du Patrimoine, ministère de la Culture

Notes

[1] Constat fait notamment par Emmanuel Garnier dans sa thèse sur les forêts vosgiennes.

[2] Tania Jolas, Françoise Zonabend, 1973 « Gens des finages, gens des bois. Paris, Annales ESC, 1, p. 285-305. Ces auteures ont montré les nombreuses dissymétries individualisant les deux groupes, les uns étant rejetés, voire chassés par les premiers. Les gens des bois sont sans terre, sans arbre généalogique, sont réputés dénués de repères moraux, sans habitat solide, ne sont pas enracinés mais mobiles. Les textes du XVIIIe siècle sont féroces, parlent d’inutiles pour évoquer ces insolvables multirécidivistes. Voir Cahier d’Études du GHFF, 1991, n° 1 « Forêts, villageois et marginaux », 70 p.

[3] Marie-Carmen Gras, 2009, Sociétés bocagères et pratiques forestières : L’exemple de la forêt de Saint-Sever XVIIe-XIXe siècles, ONF, Collection dossiers forestiers, n°20, 202 p. ; Yves Gouchet, 2002, Le massif forestier de Bercé, Ed. Alan Sutton, 126 p.

[4] Stéphanie Barioz Aquilon, « La maison forestière : un intrus dans la forêt domaniale ? », Cahier du GHFF Forêt, Environnement et Société, n°28, 2018, p. 68-75, voir p. 70.

[5] Danielle Musset, « Charbonniers, le métier du diable ? », in Migrance, marges et métiers. Le monde alpin et rhodanien, 2000, 28-1-3, p. 133-150.

Agathe Riou, 2019, Les paysages anciens de la forêt d’Orléans : l’exploitation des données LiDAR du massif de Lorris-les-Bordes (Loiret), mémoire de Master 2 en archéologie des périodes historiques, Université Paris 1, 2 vol.

[7] Yves Gouchet, 2002, Le massif forestier de Bercé, Ed. Alan Sutton, 126 p.

Yves Gouchet, « Les maisons forestières ». Au Fil du Temps, déc. 2003, n° 22

[8] Yves Gouchet, op.cit. Jean-François Clémence (dir.), Jeanne Dufour, Yves Gouchet, L’or vert de la Sarthe, tome 1 : L'Histoire, éditions de la Reinette, Le Mans, 2007.

Stéphanie Barioz Aquilon, « Les sentinelles de la forêt : petite histoire des maisons forestières dans les Pays de la Loire », dans 303 Arts, Recherches et Créations, n°127 L’Appel des forêts, Nantes, 2013.

[9] Stéphanie Barioz Aquilon, « Les maisons forestières, de la Direction générale des forêts à l’ONF (XIXe-XXIe siècle). Les oubliées du paysage de la forêt domaniale », Projets de paysage [En ligne], 22 | 2020.

[10] Voir la Statistique forestière de 1878 contenant l’inventaire par cantonnement des personnels et des délits perpétrés.

Places

  • Paris, France (75)

Event attendance modalities

Full on-site event


Date(s)

  • Friday, September 15, 2023

Keywords

  • patrimoine, bâti, forêt, habitat forestier, maison forestière

Contact(s)

  • Corinne Beck
    courriel : cbeck16 [at] wanadoo [dot] fr

Information source

  • Corinne Beck
    courriel : cbeck16 [at] wanadoo [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« Bâtis et habitats forestiers d’hier et d’aujourd’hui », Call for papers, Calenda, Published on Thursday, June 01, 2023, https://doi.org/10.58079/1b9s

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