HomeCriminalités et dynamiques familiales : nouvelles perspectives
Published on Monday, September 11, 2023
Abstract
Sous la direction de Carolyn Côté-Lussier, Stéphane Paquin et Leslie Touré Kapo, cet appel à contributions pour la revue Enfances familles générations vise à mieux comprendre les retombées de la criminalité sur les dynamiques familiales, à examiner les comportements criminels au sein de la famille, et à étudier leurs répercussions sur les trajectoires de vie des familles et de leurs membres à travers une perspective pluridisciplinaire (sociologie, anthropologie, criminologie, géographie, histoire, psychologie, travail social, santé publique et tout autre champ connexe).
Announcement
Coordination scientifique
- Carolyn Côté-Lussier, professeure agrégée (Institut national de la recherche scientique) et chercheure régulière (Centre International de Criminologie Comparée, Université de Montréal)
- Stéphane Paquin, chercheur postdoctoral (Pennsylvania State University) et coordonnateur de la plateforme d’analyse biopsychosociale des trajectoires en santé mentale du RQSHA
- Leslie Touré Kapo, professeur adjoint (Institut national de la recherche scientifique)
Argumentaire
Comme dans plusieurs pays du Nord global (c’est à dire, ceux de l’Europe, de l’Amérique du Nord et d’une partie de l’Asie), les Canadien.ne.s vivent une période relativement sécuritaire d’un point de vue historique (Perreault, 2023; Statistics Canada, 2018). Depuis 1990, on observe ainsi au Canada une baisse générale des taux de crimes déclarés (9 485 crimes pour 100 000 habitant.e.s en 1990, comparativement à 5375 pour 100000 habitant.e.s en 2021), mais aussi une transformation des infractions (moins de crimes contre les biens, mais légère hausse de l’indice de gravité de la criminalité imputable notamment à celle des agressions sexuelles déclarées à la police) (Moreau, 2022). Si plus de trois Canadien.ne.s sur quatre (78%) se disent satisfait.e.s en 2019 en matière de sécurité de crime, un.e Canadien.ne sur cinq (19%) croit néanmoins que le crime a augmenté dans son quartier (Cotter, 2021).
Ce numéro thématique de la revue Enfances, Familles, Générations propose de mieux comprendre les retombées de la criminalité sur les dynamiques familiales, d’examiner les comportements criminels au sein de la famille, et d’étudier leurs répercussions sur les trajectoires de vie des familles et de leurs membres à travers une perspective pluridisciplinaire (sociologie, anthropologie, criminologie, géographie, histoire, psychologie, travail social, santé publique et tout autre champ connexe). Nous proposons de définir le concept de « criminalité » de manière à englober non seulement les comportements criminalisés et ceux perçus comme faisant partie des incivilités nuisant à la qualité de vie, notamment des familles, mais également à travers les réactions à la criminalité sur les plans de l’individu et du groupe familial (p. ex., sentiment d’insécurité) ainsi que de l’État (p. ex., service de police, protection de la jeunesse, centre d’aide aux victimes d’actes criminels). L’enjeu de la criminalité est un phénomène à plusieurs dimensions qui touche directement les familles, et en particulier les enfants, leurs parents et les individus interagissant au sein de celles-ci. À ce jour, la littérature sur la famille et la criminalité se concentre en grande partie sur la famille comme lieu de transmission de la criminalité (Farrington, 2011), ou sur les effets de l’incarcération sur la famille (sur sa structure et le statut socioéconomique du ménage) (Wakefield et al., 2016). En regroupant dans ce numéro thématique des articles qui traitent de la criminalité à l’égard et envers les familles, et leurs membres, ce numéro propose de cerner les effets de la criminalité (au sens large du terme) sur les trajectoires de vie des individus. Il s’agira notamment de mieux saisir et comprendre comment la criminalité, et le système judiciaire, peuvent avoir une incidence sur les dynamiques et les interactions au sein des familles, ainsi que sur le statut socioéconomique, la santé et le bien-être des membres des familles.
Dans une perspective sociétale, l’exposition à la criminalité et la violence sous toutes ses formes est caractérisée par des processus structuraux et sociaux qui font en sorte que ces types de « problèmes sociaux » ont tendance à être regroupés ensemble (Sampson, 2004). Dans ce contexte, la famille, une unité de base du système social, représente un milieu de vie qui a le potentiel de promouvoir la résilience (p. ex., en offrant un réseau social bénéfique, un environnement marqué par une affection maternelle) (Jaffee et al., 2007), mais peut également représenter un cadre d’exposition et de reproduction de la violence sous toutes ses formes (p. ex., conflit, agression, maltraitance) (Dubé, 2011; Lessard et al., 2015). En ce sens, étudier la criminalité et la famille implique la considération d’enjeux sur le plan de l’individu, des relations, de la communauté et de la société.
Une perspective socioépidémiologique, intégrant des théories psychosociales et sur les déterminants sociaux de la santé, suggère que l'exposition directe et indirecte à la criminalité vient à avoir un effet sur les individus et leurs trajectoires de vie. Selon cette perspective, la famille est touchée par des enjeux de sécurité publique, tels que la présence d’incivilités, le sentiment d’insécurité et une perception négative de la cohésion sociale à l’échelle du quartier résidentiel (Côté-Lussier et al., 2014). En particulier, Côté-Lussier et al. (2015) montrent qu’un sentiment d’insécurité à l’échelon du quartier peut avoir des effets néfastes sur la santé chez l’enfant (p. ex., être moins propice à faire de l’activité physique). Être victime de violence ou témoin de violence dans le ménage a également des répercussions négatives sur le développement des enfants, notamment en menant à des réactions biologiques de stress (Clement et Chamberland, 2007; Theall et al., 2017). Finalement, la victimisation et la délinquance chez l’adolescent.e peuvent entraîner des répercussions graves sur son cheminement de vie, telles que l’expérience de symptômes d’anxiété et de dépression, et une diminution de l’engagement scolaire (Janosz et al., 2018; Lanctôt et al., 2007). Du côté des parents, des expériences de victimisation et des perceptions d’insécurité et de manque de cohésion sociale à l’échelle du quartier résidentiel peuvent entrainer une détresse psychologique (Weisburd et al., 2018). Chez les adultes racisés et aux marges de la société, des biais systémiques de la part de la police et du système judiciaire peuvent également contribuer à un sentiment d’exclusion et nuire au bien-être (Bradford, 2014; Shmool et al., 2015). Ces expériences néfastes peuvent avoir des répercussions importantes sur le milieu familial, menant à des niveaux de stress et de symptômes de dépression plus élevés pour les enfants, les adolescent.e.s et les adultes (Santiago et al., 2011; Simons et al., 2002).
Ces illustrations ne constituent que quelques exemples de nouvelles perspectives de recherche s’insérant au cœur de la notion de criminalité qui déborde donc des comportements criminalisés ou de la victimisation.
Le présent numéro cherche, dès lors, à recueillir des articles qui abordent la criminalité sous ses diverses facettes, et qui présentent des résultats empiriques ou des avancées théoriques dans la conceptualisation des retombées de la criminalité sur les dynamiques familiales, les croyances et les comportements au sein de la famille, et sur les trajets de vie des familles et de leurs membres. Nous attendons en particulier des propositions mettant en évidence l’effet cumulatif des « désavantages » dans le vécu des familles face à la criminalité, et les effets de la criminalité dans les milieux de vie (quartier, école, ménage) sur les trajectoires de vie des enfants, des adolescent.e.s et de leurs parents.
Modalités de soumissions
Les propositions (résumés) doivent être soumises sur notre site
Il s'agit d'un prologement du premier appel et la date limite a été reportée au 20 décembre 2023.
Veuillez sélectionner le titre du numéro thématique dans le formulaire de soumission. Les propositions d’article devront comprendre un titre provisoire, un résumé (1500 à 2000 caractères, espaces compris) et les coordonnées des autrice/teur·s. Les autrice/teur·s des propositions retenues devront remettre leur manuscrit au plus tard le 29 avril 2024.
Pour consulter les règles d’édition de la revue. Les manuscrits sont acceptés ou refusés sur la recommandation de la direction de la revue et des responsables du numéro après avoir été évalués à l’aveugle par deux ou trois lectrices/teurs externes.
Références
Bradford, B. 2014. « Policing and social identity: procedural justice, inclusion and cooperation between police and public », Policing and society, vol. 24, no 1, p. 22-43.
Clement, M.-E. et C. Chamberland. 2007. « Physical violence and psychological aggression towards children: Five-year trends in practices and attitudes from two population surveys », Child Abuse and Neglect, vol. 31, no 9, p. 1001-1011.
Côté-Lussier, C., Jackson, J., Kestens, Y., Henderson, M. et T. Barnett. 2014. « A child’s view: Social and physical environmental features differentially predict parent and child perceived neighborhood safety », Journal of Urban Health, vol. 92, no 1, p. 10-23.
Côté-Lussier, C., Mathieu, M. E. et T. A. Barnett. 2015. « Independent associations between child and parent perceived neighborhood safety, child screen time, physical activity and BMI: a structural equation modeling approach », International Journal of Obesity, vol. 39, p. 1475–1481.
Cotter, A. 2021. Criminal victimization in Canada, 2019. https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/85-002-x/2021001/article/00014-eng.pdf
Dubé, M. 2011. « Enfants exposés à l’homicide conjugal. Quelques éléments de réflexion », Revue internationale de l’éducation familiale, vol. 1, p. 107-122.
Farrington, D. P. 2011. « Families and crime », Crime and public policy, p. 130-157.
Jaffee, S. R., Caspi, A., Moffitt, T. E., Polo-Tomas, M. et A. Taylor. 2007. « Individual, family, and neighborhood factors distinguish resilient from non-resilient maltreated children: A cumulative stressors model », Child Abuse and Neglect, vol. 31, no 3, p. 231-253.
Janosz, M., Brière, F. N., Galand, B., Pascal, S., Archambault, I., Brault, M.-C., . . . et L. S. Pagani. 2018. « Witnessing violence in early secondary school predicts subsequent student impairment », Journal of Epidemiology and Community Health, vol 72, no 12, p. 1117-1123.
Lanctôt, N., Cernkovich, S. A. et P. C. Giordano. 2007. « Delinquent behavior, official delinquency, and gender: Consequences for adulthood functioning and well‐being », Criminology, vol. 45, no 1, p. 131-157.
Lessard, G., Montminy, L., Lesieux, É., Flynn, C., Roy, V., Gauthier, S. et A. Fortin. 2015. « Les violences conjugales, familiales et structurelles: vers une perspective intégrative des savoirs », Enfances Familles Générations. Revue interdisciplinaire sur la famille contemporaine, no 22.
Moreau, G. 2022. Police-reported crime statistics in Canada, 2021. https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/85-002-x/2022001/article/00013-eng.htm
Perreault, S. 2023. Police-reported crime in rural and urban areas in the Canadian provinces, 2021. https://www150.statcan.gc.ca/n1/en/pub/85-002-x/2023001/article/00002-eng.pdf?st=HHQzTpij
Sampson, R. J. 2004. « Neighbourhood and community: Collective efficacy and community safety », New Economy, vol. 11, no. 2, p. 106-113.
Santiago, C. D., Wadsworth, M. E. et J. Stump. 2011. « Socioeconomic status, neighborhood disadvantage, and poverty-related stress: Prospective effects on psychological syndromes among diverse low-income families », Journal of Economic Psychology, vol. 32, no 2, p. 218-230.
Shmool, J., Yonas, M., Newman, O., Kubzansky, L., Joseph, E., Parks, A., . . . et J. Clougherty. 2015. « Identifying Perceived Neighborhood Stressors Across Diverse Communities in New York City », American Journal of Community Psychology, vol. 56, no 1-2, p. 145-155.
Simons, R. L., Murry, V., McLoyd, V., Lin, K.-H., Cutrona, C., & R. D. Conger. 2002. « Discrimination, crime, ethnic identity, and parenting as correlates of depressive symptoms among African American children: A multilevel analysis », Development and Psychopathology, vol. 14, no 2, p. 371-393.
Statistics Canada. 2018. Canada's crime rate: Two decades of decline. https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/11-630-x/11-630-x2015001-eng.htm
Theall, K. P., Shirtcliff, E. A., Dismukes, A. R., Wallace, M. et S. S. Drury. 2017. « Association between neighborhood violence and biological stress in children », JAMA pediatrics, vol. 171, no 1, p. 53-60.
Wakefield, S., Lee, H. et C. Wildeman. 2016. « Tough on crime, tough on families? Criminal justice and family life in America », The annals of the American Academy of Political and Social Science, vol. 665, no 1, pp. 8–21, p. 8-21.
Weisburd, D., Cave, B., Nelson, M., White, C., Haviland, A., Ready, J., . . . et K. Sikkema. 2018. « Mean streets and mental health: Depression and post‐traumatic stress disorder at crime hot spots », American Journal of Community Psychology, vol. 61, no 3-4, p. 285-295.
Subjects
- Sociology (Main category)
- Society > Sociology > Gender studies
- Society > Sociology > Urban sociology
- Society > Political studies > Governance and public policies
- Society > Sociology > Demography
- Society > Sociology > Criminology
Places
- 385, rue Sherbrooke Est
Montreal, Canada (H2X 1E3)
Date(s)
- Wednesday, December 20, 2023
Attached files
Keywords
- criminologie, famille, dynamique familiale, trajectoire familiale, comportement criminalisé, perspective pluridisciplinaire, transmission de la criminalité, effet de la criminalité sur la famille
Contact(s)
- Amélie Cousineau
courriel : efg [at] inrs [dot] ca
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Information source
- Amélie Cousineau
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« Criminalités et dynamiques familiales : nouvelles perspectives », Call for papers, Calenda, Published on Monday, September 11, 2023, https://doi.org/10.58079/1brl