HomeDe l’aliénation au positionnement dans les arts
Published on Thursday, January 04, 2024
Abstract
« De l’aliénation au positionnement » suppose un processus, un constat suivi d’une réaction individuelle ou collective. En effet, l’aliénation est à lire comme un postulat qui peut déboucher sur des réactions multiples ou sur des prises de position variées. Jean-Marc Lachaud se demande si les œuvres modernes participent à un processus d’émancipation de l’individu et de la collectivité. L’acte de création artistique est-il de fait libérateur ou participe-t-il, par ricochet, à l’aliénation de l’artiste ? De même, se positionner par rapport aux normes artistiques établies revient-il à défendre l’indépendance de l’art vis-à-vis des autres intérêts, qu’ils soient moraux, esthétiques ou mercantiles ?
Announcement
Békalta le 21 avril 2024
Argumentaire
Dans le domaine des arts, l’aliénation rappelle immanquablement son antonyme, à savoir l’autonomie, l’indépendance ou l’autosuffisance. L’art traditionnel -ou prémoderne selon la qualification de Karol Berger[1]- était assujetti à l’éthique. Il « […] façonnait l’ethos commun de son public : il véhiculait, clarifiait, précisait, renforçait et galvanisait les valeurs religieuses, éthiques, politiques et, plus généralement, culturelles de ceux à qui il s’adressait.[2]» De plus, l’art était appelé à enseigner les normes sociales, culturelles, esthétiques, etc.[3] Il était un lieu de mise en scène permettant de faire voir les pratiques individuelles et collectives en une époque déterminée.
Il est à préciser que l’intitulé « De l’aliénation au positionnement » suppose un processus, un constat suivi d’une réaction individuelle ou collective. En effet, l’aliénation est à lire comme un postulat qui peut déboucher sur des réactions multiples ou sur des prises de position variées.[4] Jean-Marc Lachaud se demande si les œuvres modernes participent à un processus d’émancipation de l’individu et de la collectivité.[5] L’acte de création artistique est-il de fait libérateur ou participe-t-il, par ricochet, à l’aliénation de l’artiste ? De même, se positionner par rapport aux normes artistiques établies revient-il à défendre l’indépendance de l’art vis-à-vis des autres intérêts, qu’ils soient moraux, esthétiques ou mercantiles ? Refuser l’instrumentalisation de l’art ne se comprend-il pas comme un positionnement vis-à-vis du marché, de la religion et de toute institution désirant l’inféoder servilement pour véhiculer des projets ou pour soutenir une idéologie ? Ne convient-il pas d’affirmer haut et fort l’idée de l’inutilité de l’art, caution indispensable pour garantir son inaliénation ?
Par ailleurs, œuvrer dans le domaine de l’art pour satisfaire le goût du public de l’époque ne renvoie-t-il pas à l’aliénation de l’artiste ? Pour des raisons purement lucratives, certains créateurs se voient réduits à des caisses à résonance d’un parti politique ou d’une institution de tutelle. Leur situation n’est-elle pas un positionnement vis-à-vis d’une conjoncture qui les a réduits à l’indigence ? S’ils ne sont ni autonomes, ni libres de leur choix, sont-ils pour autant responsables et conscients des conséquences de leur positionnement ? Ces artistes - ou prétendus tels selon leurs détracteurs - qui sont nourris à la cuillère d’un régime politique ou d’une institution, qui profitent des manifestations culturelles pour créer le buzz et qui ne rechignent devant aucune manœuvre pour se faire parler d’eux, sont-ils artistiquement « bien rangés » ou plutôt ballotés d’un extrême à l’autre selon les désirs des décideurs et des bailleurs de fonds ?
En outre, si les uns considèrent l’aliénation comme un facteur exogène, d’autres estiment qu’elle est aussi une attitude endogène et avancent l’idée d’une « auto-aliénation». Interviennent alors dans ce processus de création artistique les facteurs psychologiques et la capacité de se décentrer par rapport à la position occupée et au statut assigné. Outre le fait que certains artistes ne parviennent pas à se libérer du joug de la culture occidentale - laquelle culture est prise pour longtemps pour référence indépassable - ou des legs de l’époque coloniale et se trouvent ainsi réduits à de simples continuateurs de modèles (école, esthétique, courant, norme, etc.) qui ne sont pas les leurs, une autre forme d’aliénation apparait ; elle est due au désir de l’artiste de s’inscrire dans une lignée « officielle » afin d’éviter les foudres des critiques d’art contemporains si par mégarde il se positionne en dehors de la sphère de esthétique en vogue. Se plier ainsi aux exigences de la doxa critique peut-il être considéré comme un positionnement délibéré ?
De surcroît, les musées – « artephages » dans la mesure où ils accumulent les œuvres d’art et les dévorent symboliquement – participent, eux aussi, au phénomène de l’aliénation et de l’artiste et des productions plastiques. Ne procèdent-ils pas par la mise en place de critères selon lesquels ils répertorient les œuvres, les cataloguent et en fixent les valeurs ? En agissant de la sorte, ils s’érigent en critique d’art et, de manière prudente et probablement « raisonnée », ils se réfèrent à des données renvoyant soit au style, soit au courant, soit à une technique précise afin de justifier la valeur d’un tableau ou d’une statue. Ils ne font que légitimer leur positionnement tacite vis-à-vis des créations artistiques émancipées des tutelles des institutions.
Axes de recherche
- Dans quelle mesure peut-on considérer la quête de « l’unité formelle » des œuvres artistiques comme un processus d’aliénation ?
- L’exigence de vérité rend-elle les arts plastiques, les arts de la scène et la littérature immanquablement aliénés ?
- Les nouvelles technologies sont-elles aliénantes pour l’artiste ou plutôt émancipatrices des carcans aujourd’hui désuets ?
- « L’auto-aliénation » est-elle un positionnement délibéré ou une exigence due aux circonstances et à l’intervention des institutions dans le processus de création ?
- La critique artistique moderne : son positionnement vis-à-vis de la création actuelle et son influence sur la réception de l’œuvre.
- La marginalisation de l’artiste : un positionnement vis-à-vis de la norme institutionnalisée et un refus catégorique du dictat du pouvoir, du mécène, de l’idéologie et du marché de l’art ou plutôt un échec à intégrer l’ordre établi ?
Modalités de soumission
Les résumés des propositions de participation (300 mots au plus) doivent être envoyés, au plus tard, avec CV sommaire (pas plus d’une demie page) obligatoire à l’adresse électronique suivante : zaiene_sedki@yahoo.fr
le 20 janvier 2024.
Dates clés du colloque
- 20 janvier 2024 : dernier délai pour envoyer les propositions de communication (intitulé et résumé (300 mots/Format WORD) + CV sommaire).
- 25 janvier 2024: dépouillement et sélection des communications par le comité scientifique.
- 15 avril 2024 : dernier délai pour envoyer le texte complet pour la publication.
Frais de participation
Kit de colloque-Pause-café- Frais de publication et de l’envoi des actes du colloque : 80 Euros.
Comité scientifique
- Hafedh Djedidi : Pr. de l’Enseignement supérieur: études théâtrales et arts du spectacle, Univ. de Sousse.
- Faten Chouba Skhiri : Pr. de l’Enseignement supérieur en arts plastiques, Univ. de Sousse.
- Ali Aoun : Maître de conférences (HDR) en langue, lettres et civilisation françaises, Univ. de Tunis Al Manar.
- Mohamed Sami Bchir : Maître de conférences (HDR) en arts plastiques, Univ. de Sousse.
Coordinateur du colloque: Sadok Zayene
Références
BERGER, Karol, A Theory of Art, New York, Oxford University Press, 2000.
CARROLL, Noël, « Art et aliénation », Cahiers philosophiques, n°131, année 2012/4, éditions Vrin, Paris, pp. 86-107.
LACHAUD, Jean-Marc, Art et aliénation, PUF, Paris, 2012.
LOGET, Violette, « L’aliénation des œuvres d’art : raisons et déraisons » in Revue Vie des arts, n° 252, année 2018, Montréal, Canada
Arts & marchés : aliénation ou émancipation ? Université de Saint‐Gall, 17‐18 novembre 2016 Colloque international co-organisé par le Comité de recherche Sociologiedes arts et de la culture (CRSAC) de la SSS et le Seminar für Soziologie (SfS) de l’Université de Saint‐Gall (Suisse)
Notes
[1] BERGER, Karol, A Theory of Art, New York, Oxford University Press, 2000.
[2] CARROLL, Noël, « Art et aliénation », Cahiers philosophiques, n°131, année 2012/4, éditions Vrin, Paris, pp. 86-107.
[3] Sur ce sujet, il est intéressant de reprendre les propos de Noël Carroll : « En bref, l’art prémoderne fonctionnait comme l’un des plus puissants vecteurs – sinon le plus puissant – de l’ethos d’un peuple et était largement reconnu comme possédant cette capacité. L’art était une source globale d’enculturation dans la mesure où il engageait bien souvent la personne dans son ensemble – en mettant en mouvement, simultanément, son esprit et son corps (ses sens, ses émotions, ses désirs et ses plaisirs). » in « Art et aliénation », op. cit.
[4] Dans son article « L’aliénation des œuvres d’art : raisons et déraisons », Violette Loget évoque une autre forme d’aliénation méconnue du grand public. Elle note : « Techniquement, l’opération {l’aliénation] consiste à retirer un objet inventorié dans la collection d’un musée pour en transférer les droits de propriété à autrui. Si l’aliénation réalisée par la vente fait davantage parler d’elle, d’autres types de cessions existent : l’aliénation par la restitution au propriétaire légitime, par le don ou l’échange à une institution publique, par la rétrocession au donateur, et même par la destruction et la disparition qui entraînent de facto la perte de la propriété de l’objet concerné. » (In Revue Vie des arts, n° 252, année 2018, Montréal, Canada)
[5] Il convient à ce propos de se référer à Jean-Marc Lachaud et à son ouvrage intitulé Art et aliénation (PUF, Paris, 2012.)
Subjects
- Europe (Main category)
- Zones and regions > Africa
- Zones and regions > Africa > North Africa > Algeria
- Zones and regions > Europe > France > Paris and suburbs
- Mind and language > Representation > History of art
- Zones and regions > Asia > Near East
- Zones and regions > Europe > France
Places
- Salle des conférences VENIZIA - BD. de l'environnement Békalta
Al Baqāliţah, Tunisia (5090)
Date(s)
- Saturday, January 20, 2024
Attached files
Keywords
- aliénation, positionnement, nouvelle technologie, marginalisation
Contact(s)
- sadok zayene
courriel : zaiene_sedki [at] yahoo [dot] fr
Reference Urls
Information source
- sadok zayene
courriel : zaiene_sedki [at] yahoo [dot] fr
License
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To cite this announcement
« De l’aliénation au positionnement dans les arts », Call for papers, Calenda, Published on Thursday, January 04, 2024, https://doi.org/10.58079/ve7p