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Territorialisation de la production et régulation publique

L’État et le verdissement des systèmes industriels et agricoles au temps des catastrophes

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Published on Monday, January 29, 2024

Abstract

Ces journées d’étude proposent de porter notre regard vers la régulation publique des activités productives et le gouvernement local des critiques que suscitent fréquemment l’implantation de nouvelles activités, industriels ou agricoles, y compris lorsqu’elles sont présentées comme des projets nécessaires à la transition écologique des systèmes productifs (énergies renouvelables, extraction minière, numérisation et robotisation de l’agriculture, évolution de la filière bois etc.). Il s’agira ainsi avant tout de comprendre comment la territorialisation des projets de transition se négocie entre l’administration (déconcentrée et/ou décentralisée), les porteurs de projets et les acteurs locaux des territoires impactés par les nouvelles activités de transition.

Announcement

26-28 juin 2024

Argumentaire

La crise environnementale contemporaine et l’importance de l’enjeu climatique dans le débat public impactent les mondes industriels et agricoles de différentes manières. D’une part, les industries, mais aussi les pratiques agricoles, sont montrées du doigt comme étant en large partie responsables des atteintes environnementales. D’autre part, l’impératif de transition écologique offre des possibilités inédites de reconversion productive et les projets de transition reçoivent d’importants soutiens des pouvoirs publics. Les politiques publiques de transition font désormais l’objet de nombreux travaux et le travail de lobbying des industriels et des défenseurs de l’agriculture intensive pour limiter les contraintes réglementaires est bien connu. L’histoire environnementale des débordements industriels (Fressoz 2012, Le Roux 2011) a ainsi mis en lumière comment l’État a favorisé le développement de l’industrie au détriment de l’environnement ainsi que de la santé des ouvriers et des riverains. De même, les effets environnementaux de la concentration de la population dans les villes et de la transformation des campagnes en zones d’extraction de ressources ont été bien analysé (Foster 1999).

Penser conjointement l’évolution des pratiques industrielles et agricoles est plus rare ; un tel rapprochement nous semble pourtant particulièrement heuristique. En effet, de la transition énergétique (méthanisation, agri-voltaïsme, bio-carburant) à l’agro-industrie, les dépendances sont multiples entre ces deux secteurs, tout comme les conflits entre eux et contre eux, liés notamment à la gestion de l’eau ou aux débordements qu’ils génèrent. En outre, penser le rôle de l’Etat dans l’écologisation conjointe des pratiques agricoles et industrielles permet d’interroger la territorialisation des politiques publiques de transition et les conflits liés à l’usage de l’espace dans les zones rurales et dans les périphéries des villes où ces projets s’implantent aux côtés des entrepôts logistiques et des zones d’activités.

Ces journées d’étude proposent de porter notre regard vers la régulation publique des activités productives et le gouvernement local des critiques que suscitent fréquemment l’implantation de nouvelles activités, industriels ou agricoles, y compris lorsqu’elles sont présentées comme des projets nécessaires à la transition écologique des systèmes productifs (énergies renouvelables, extraction minière, numérisation et robotisation de l’agriculture, évolution de la filière bois etc.). Ces journées seront l’occasion d’interroger comment la régulation publique des activités productives se transforme face au déploiement d’activités nouvelles présentées comme des projets en faveur de l’écologisation de nos sociétés. Plutôt que d’appréhender cette régulation par la fabrique et l’évolution des normes – et le travail de lobbying – les communication s’attacheront avant tout à analyser l’évolution des pratiques de l’administration, en fonction des territoires sur lesquels elle intervient, et dans ses liens avec les acteurs de ces territoires. Il s’agira ainsi avant tout de comprendre comment la territorialisation des projets de transition se négocie entre l’administration (déconcentrée et/ou décentralisée), les porteurs de projets et les acteurs locaux des territoires impactés par les nouvelles activités de transition.

Les communications pourront s’ancrer dans différentes disciplines des sciences sociales mais elles s’appuieront sur des enquêtes empiriques minutieuses (archives, observations, entretiens). Abordant les questions industrielles et agricoles de façon séparée ou conjointe, elles pourront s’inscrire dans un ou plusieurs des axes suivants :

Régulation publique locale des transitions et échelles d’action publique

Les transitions écologiques sont souvent pensées comme étant aussi une transformation démocratique. Pourtant, en matière de transition énergétique notamment, les décisions les plus structurantes restent prises par l’État central et les élu.es locaux ont des capacités d’action limitées (Poupeau 2014, Chailleux & Hourcade 2021, Mazeaud et al. 2022). De plus, dans le secteur agricole, le poids du syndicat majoritaire, historiquement productiviste et hostile à l’écologisation des pratiques, reste déterminant (Ansaloni & Fouilleux 2006, Ansaloni & Allaire 2016). Pour autant, les demandes d’autorisation environnementale des nouveaux projets, les demandes de subvention ou encore l’inspection et le contrôle des installations sont effectués par les administrations déconcentrées ou décentralisées : celles-ci occupent une place centrale dans la reproduction du capitalisme et son adaptation aux catastrophes environnementales contemporaines. Comment ces administrations ont-elles fait évoluer leurs pratiques et prennent-elles en compte le contexte écologique local ? Comment sont harmonisées nationalement les pratiques de l’administration déconcentrée lorsqu’elles traitent d’environnement et de transition ? Comprend-on différemment les transitions environnementales et leur territorialisation lorsqu’on les pense depuis les pratiques de l’administration ? Ce premier axe aura ainsi pour ambition de discuter des liens entre la territorialisation des transitions et les différentes échelles d’action publique à partir de l’étude de l’administration territoriale.

Travail administratif, mobilisation et évolution de l’expertise

Le deuxième axe sera dédié aux rapports qu’entretient l’administration avec les porteurs de projet de transition et les acteurs locaux. En particulier, il s’agira d’interroger le travail administratif et la production d’expertise publique en contexte de transition, c’est-à-dire à un moment où les dégâts des pratiques productives passées sont connus et dénoncés, mais aussi où les nouvelles activités qui portent des promesses de transition suscitent localement des controverses et des mobilisations. En effet, la mesure de l’impact environnemental des nouvelles activités de transition mais aussi l’adéquation entre leur impact global espéré et les destructions environnementales qu’elles peuvent parfois perpétuer localement sont régulièrement dénoncées. Comment la production d’une expertise publique, le travail d’instruction et d’inspection ont-ils évolué ? Comment l’administration fait-elle évoluer ces pratiques pour encadrer l’essor de nouveaux projets de transition ? Observe-t-on une régionalisation des pratiques administratives en matière de transition en fonction des liens de l’administration avec les acteurs locaux et des territoires particuliers ? L’objectif de cet axe sera ainsi de penser comment l’administration adapte ses pratiques face aux enjeux environnementaux actuels et aux débats que suscitent localement les projets de transition agricoles et industriels.

Environnement, climat, paysage et cadre de vie.

Le troisième axe sera consacré plus spécifiquement aux cadrages des débats que suscite la territorialisation des activités de transition. En particulier, la « climatisation » (Aykut, 2020) de ces débats a parfois tendance à favoriser les promesses d’une production qui permettrait de rendre le développement capitaliste globalement compatible avec la lutte contre le dérèglement démesuré du climat, et ce au détriment d’impacts locaux sur la biodiversité, le paysage, la santé des riverain.es ou des travailleur.euses de ces secteurs. Par ailleurs, la distinction et la prise en compte diversifiée des impacts paysagers, sanitaires, environnementaux dans l’action publique, mais aussi leur déliaison des enjeux démocratiques, sont susceptibles de peser sur le cadrage des débats et sur les interactions entre l’administration, les porteurs de projets et les acteurs locaux. En partant de l’étude des pratiques et des discours des acteurs mais aussi de leurs interactions, l’objectif de cet axe sera de comprendre ce que produisent les cadrages historiques des questions agricoles, industrielles, environnementales et patrimoniales dans l’action publique et dans les débats que les transitions suscitent localement. Cet axe pourra aussi permettre d’interroger les liens (ou l’absence de lien), tant dans les mobilisations que dans les pratiques de l’administration, entre la prise en compte des impacts sanitaires ou qui relèvent du cadre de vie d’une part, et les impacts sur l’environnement et la biodiversité d’autre part.

Modalités de contribution

Les propositions de communication (environ 500 mots) sont à envoyer à Doris Buu-Sao (doris.buusao@univ-lille.fr), Jimmy Grimault (jimmygrimault@hotmail.fr) et Leny Patinaux (leny.patinaux@unilim.fr)

avant le 15 février 2024.

Une réponse sera apportée fin février et le texte des communications retenues (environ 20 000 signes) sera à envoyer pour le 31 mai. Les propositions des doctorant.es, docteur.es sans poste et post-doctorant.es sont particulièrement bienvenues. Les frais de transport et d’hébergement pourront être pris en charge en fonction des situations des intervenant.es.

Ces journées sont organisées avec le soutien du Ceraps dans le cadre du projet Poléol – Politisation de l’impact paysager des éoliennes dans les Hauts-de-France, financé par l’Ademe entre 2022 et 2024. La journée du 28 juin sera dédiée à une visite de terrain dans les Hauts-de-France.

Comité d'organisation

  • Doris Buu-Sao
  • Jimmy Grimault
  • Leny Patinaux

Références

ANSALONI, Matthieu et ALLAIRE, Gilles. La grande transformation des politiques agricoles anglaise et française : une sociologie de l’hégémonie économique. Revue de la régulation. Capitalisme, institutions, pouvoirs, 2016, n° 20.

ANSALONI, Matthieu et FOUILLEUX, Eve. Changement de pratiques agricoles. Acteurs et modalités d’hybridation technique des exploitations laitières bretonnes. Économie rurale, 2006, vol. 292, n° 2, p. 3-17.

AYKUT, Stefan C. Climatiser le monde. Éditions Quae, 2020.

CHAILLEUX, Sébastien et HOURCADE, Renaud. Politiques locales de l’énergie : un renouveau sous contraintes – Introduction. Natures Sciences Sociétés, 2021, vol. 29, n° 1, p. 3-12.

FOSTER, John Bellamy. Marx's theory of metabolic rift: Classical foundations for environmental sociology. American journal of sociology, 1999, vol. 105, n° 2, p. 366-405.

FRESSOZ, Jean-Baptiste. L’Apocalypse joyeuse. Une histoire du risque technologique. Paris, Le Seuil, 2012.

LE ROUX Thomas, Le Laboratoire des pollutions industrielles. Paris, 1770-1830. Paris, Albin Michel, 2011.

MAZEAUD, Alice, AULAGNIER, Alexis, SMITH, Andy et COMPAGNON, Daniel. La territorialisation de l’action climatique. Pôle Sud, 2022, n°2, p. 5-20.

POUPEAU, François‐Mathieu. Central‐local relations in French energy policy‐making: Towards a new pattern of territorial governance. Environmental Policy and Governance, 2014, vol. 24, n°3, p. 155-168.

Places

  • 1 Pl. Déliot
    Lille, France (59)

Event attendance modalities

Hybrid event (on site and online)


Date(s)

  • Thursday, February 15, 2024

Attached files

Keywords

  • territorialisation, régulation publique, industrie, État, transition écologique, transition énergétique, transition agricole

Contact(s)

  • Jimmy Grimault
    courriel : jimmygrimault [at] hotmail [dot] fr

Information source

  • Jimmy Grimault
    courriel : jimmygrimault [at] hotmail [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« Territorialisation de la production et régulation publique », Call for papers, Calenda, Published on Monday, January 29, 2024, https://doi.org/10.58079/vosp

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