Ce colloque interdisciplinaire jeunes chercheur∙ses a pour objectif de réfléchir et mettre en lumière l'impact de l'épistémologie occidentale en sciences humaines par la mise en exergue de la diversité des sources et des formes prises par les contre-savoirs et les contestations de l'histoire officielle, l’écriture d’une la mémoire collective et relative à la construction du quotidien.

Argumentaire

Le savoir, tel qu'il a été conçu à partir de l’épistémologie occidentale, repose sur une compréhension relative des phénomènes et une organisation réfléchie des idées, reflétant le choix d'une méthodologie, d'une sélection, d'une catégorisation qui structure la pensée et érige ainsi un contrôle des connaissances.

Ces préoccupations transcendent toutes les disciplines, et tout au long de l'histoire, l'épistémologie a laissé son empreinte sur les manières de concevoir et de narrer l'histoire de l’art. Michel Foucault a suggéré que les outils qu'il a déployés dans son archéologie du savoir scientifique pourraient également s'appliquer à l'histoire de l'art (Foucault, L'archéologie du savoir). Dans L’ordre des choses, et notamment dans son commentaire sur Les Ménines, Foucault suggère que l’analyse des productions artistiques constitue un moyen d’étudier la structure de la connaissance. Malgré les différences fondamentales entre les modèles esthétiques, tous convergent vers une quête de l'universel. Toutefois, au-delà de l'eurocentrisme, d'autres paradigmes esthétiques émergent.

Les diverses dimensions des contre-savoirs et les multiples formes de contestation de l'histoire officielle mettent en exergue les perspectives critiques et les approches alternatives. Par exemple, la décolonisation esthétique-épistémique a souligné la nécessité de se débarrasser des théories de l’art construites selon les paramètres de la raison eurocentrique afin de permettre l’ouverture d’une « autre esthétique ». Depuis les années 1990, la colonialité du savoir a suscité un grand intérêt académique. La colonialité est un terme qui constitue le point de départ d’une série de critiques contemporaines dirigées, entre autres, contre l’eurocentrisme épistémique.

L'importance des sources dans la construction de l'histoire explore la façon dont les récits de vie, les entretiens et les témoignages peuvent compléter et enrichir la compréhension du passé. La question de la mémoire collective et de la construction du quotidien met en lumière une volonté de préserver les traditions et les identités, des formes de résistance face à l'oubli et à la manipulation de la mémoire. Les réécritures encouragent la remise en question des paradigmes établis, par exemple une exploration des possibilités de mutation sociale. La théorie décoloniale s'impose comme l'un des nombreux outils pédagogiques et critiques qui questionnent les connaissances qui nous ont été imposées au fil de l'histoire, critiquant les processus eurocentrés relatifs à la connaissance et aux savoirs, et proposant une nouvelle manière de penser, de créer. Ce mode de dialogue interculturel et transdisciplinaire des connaissances met en lumière divers phénomènes, parmi lesquels la reconstruction des savoirs. La réappropriation des connaissances s'effectue par l'interrogation de ce qui avait été initialement transmis à travers les récits, la religion, l'art et plus largement le patrimoine, tout un ensemble de connaissances perçues comme une matière malléable. La spécificité des pratiques littéraires et artistiques offre ainsi de nouvelles perspectives. Les milieux académiques et universitaires, au tournant du XXIe siècle, ont pris en considération de nouveaux rapports critiques afin de confronter le regard officiel sur des événements à travers des prismes économiques, politiques, géographiques, sociaux, artistiques, philosophiques, etc.

À travers ces nouveaux champs d'études, parfois ouvertement contestés, des chercheur·es proposent d'offrir des relectures en vue d'une réécriture des connaissances afin de combler les lacunes de la pensée.

Axes thématiques

Les intervenants seront invités à intégrer leur communication dans l'un ou plusieurs des axes suivants, sans forcément s'y limiter :

1. Construction des savoirs, contre-savoirs et critique des modèles épistémiques : Construction des savoirs, structurés et influencés par des modèles épistémiques, construction des connaissances dans diverses disciplines, contre-savoirs, remises en question des modèles dominants.
2. Mémoire, réappropriation des connaissances et réécriture de l’histoire : Mémoire collective et individuelle, réappropriation des connaissances historiques et des récits du passé, réécriture de l'histoire, analyse des processus de sélection, de préservation, de commémoration.
3. Dialogue interculturel et transdisciplinarité des connaissances : Dialogue interculturel et transdisciplinarité, échanges culturels et collaborations interdisciplinaires, circulation des modèles, notamment en histoire, histoire de l'art, esthétique, patrimoine, littérature, etc.
4. L’émancipation artistique face aux schémas universels : Concept d’universalité, émancipation des pratiques artistiques par rapport aux schémas, remise en question des conventions esthétiques et développement d’approches originales, innovation et diversité artistique, circulation économique.

Modalités pratiques d'envoi des propositions

Les propositions pour une présentation de 30 minutes sont à faire parvenir

avant le 4 mars 2024 à l’adresse suivante : crae.doctorant.e.s@gmail.com

Sous la forme suivante :

• Un titre de la présentation
• Un descriptif de 2000 signes, précisant l’axe choisi
• Une bibliographie indicative
• Une courte biographie précisant le rattachement institutionnel et scientifique
• Entre cinq et dix mots-clés

Date et lieu

Les 24 et 25 avril 2024, à l’auditorium du Musée de Picardie et à l’UPJV - Pôle Citadelle

Comité scientifique

• Marta ANTON MARTÍ, Doctorante - Histoire de l’art, UPJV, CRAE (UR 4291)
• Cléa CALDERONI, Historienne de l'architecture et du patrimoine, Doctorante - Histoire de l’art, UPJV, CRAE (UR 4291)
• Antoine HOFFMANN, Artiste-chercheur, Doctorant, UPJV, CRAE (UR 4291), ATER en Arts visuels, Unistra, ACCRA (UR 3402)
• Lise LERICHOMME, Maîtresse de conférence en arts plastiques UPJV, CRAE (UR 4291)
• Androula MICHAEL, Maîtresse de conférences, HDR, UPJV, directrice du CRAE (UR 4291)
• Ophélie NAESSENS, Maîtresse de conférences, HDR, Université de Lorraine, co-responsable équipe Praxitèle, Crem (EA 3476)
• Annick NAOUR, Artiste plasticienne, Doctorante - arts plastiques, UPJV, CRAE (UR 4291)

Comité d'organisation

• Marta ANTON MARTÍ, Doctorante - Histoire de l’art, UPJV, CRAE (UR 4291)
• Anna BUNO, Artiste plasticienne, Doctorante - arts plastiques, UPJV, CRAE (UR 4291)
• Cléa CALDERONI, Historienne de l'architecture et du patrimoine, Doctorante - Histoire de l’art, UPJV, CRAE (UR 4291)
• Antoine HOFFMANN, Artiste-chercheur, Doctorant, UPJV, CRAE (UR 4291), ATER en Arts visuels, Unistra, ACCRA (UR 3402)
• Annick NAOUR, Artiste plasticienne, Doctorante - arts plastiques, UPJV, CRAE (UR 4291)

Bibliographie indicative

• BHABHA, Homi K., Les lieux de la culture : une théorie postcoloniale. trad. de l’anglais par Françoise Bouillot, Paris, Payot & Rivages,  07 [1994], 416 p.
• BECKER, Howard Saul, Écrire les sciences sociales, Ed. Economica, 2004, 179 p.
• CHAKRABARTY, Dipesh, Provincialiser l’Europe. La pensée postcoloniale et la différence historique. trad. de l’anglais par olivier RICHET et Nicolas VIEILLESCAZES, Paris, Éditions Amsterdam, 2009 [2000], 381 p.
• CERTEAU, Michel de, L'écriture de l’histoire, Gallimard, 1975, 358 p.
• CERTEAU, Michel de, L’invention du quotidien, Paris, Gallimard, 1990, 7 p.
• CIXOUS, Hélène, Entre l’écriture, Paris, Des femmes, 1986, 204 p.
• DESCAMPS, Florence, L’historien, l’archiviste et le magnétophone : De la constitution de la source orale à son exploitation, Institut de la gestion publique et du développement économique, 2005, 724 p.
• DORLIN, Elsa (dir.), Sexe, race, classe : pour une épistémologie de la domination, Paris, PuF, 2009, 320 p.
• DUSSEL, Enrique, Philosophie de la libération, Presses universitaires de France, Métaphysiques, 2023, 346 p.
• FOUCAULT, Michel, Les mots et les choses : une archéologie des sciences humaines, Gallimard, 1966, 434 p.
• GROSFOGUEL, Ramón, « The epistemic decolonial turn », Cultural Studies, 2007 vol. 21, n° 2-3 (mars-mai), p. 211-223.
• HOBSBAWM, Eric et RANGER Terence (dir.), 2006 [1983]. L’invention de la tradition. trad. de l’anglais par christine vivier. Paris, Éditions Amsterdam, 384 p.
• LEVI-STRAUSS, Claude, Le regard éloigné. Paris, Plon, 1983, 398 .
• MALDONADO- TORRES, Nelson, 2004. « The topology of being and the geopolitics of knowledge : modernity, empire, coloniality ». City, vol. 8, n° 1 (avril), p. 29-56.
• MORIN, Edgar,  lier les connaissances. - Le défi du XXIème siècle, Seuil, 1999, 471 p.
• NORA, Pierre (dir), 1984-1992, Les Lieux de mémoire, Gallimard, 7 vol., rééd. « Quarto », 1997, 3 vol.
• NORA, Pierre, Présent, nation, mémoire, Gallimard, 2011, 420 p.
• PUIG DE LA BELLACASA, Maria, litiques féministes et construction des savoirs. « Penser nous devons » , L’Harmattan, 2013, 258 p.
• SOUSA SANTOS, B., Épistémologies du Sud : mouvements citoyens et polémique sur la science, Desclée de Brouwer, 2016, 437 p.