Cet appel à contribution suite au congrès international sur les méthodes et Pédagogies des dessins de conscience qui s’est déroulé le 13 et 14 février 2025 à Paris. Nous vous proposons de publier un article pour la revue Recherches & Educations au sein d’un dossier spécial sur les dessins de conscience, coordonné par Marie Agostinucci et Lisa Lefèvre. La publication se fera en 2026.

Argumentaire

L’usage du dessin dans la compréhension de l’expérience corporelle

Depuis plus d’un siècle, le dessin est utilisé par les chercheurs et cliniciens comme un outil permettant d’explorer et de comprendre l’expérience corporelle. Parmi les exemples emblématiques figurent le bonhomme de Goodenough (1926) ou encore les pain charts employés dès 1949 par Palmer pour localiser les douleurs. Aujourd’hui, ces techniques d’investigation évoluent et s’enrichissent grâce à divers supports visuels (Leavy, 2017 ; Rose, 2014, 2022). Elles tendent à se standardiser, comme en témoignent la création de nouveaux outils tels que le Body Awareness Chart (ABC) (Danner et al., 2017) ou encore l’usage toujours actuel des pain charts (Bernhoff et al., 2016). Par le biais du dessin, il devient possible de révéler ce qui ne peut toujours être mis en mots.

Dans la littérature, McCarthy et Muthuri (2018) mettent en évidence le potentiel du dessin en tant que méthode de recherche participative. Il favorise une implication significative des participants en capturant leurs sentiments et leurs opinions sur des sujets sensibles (p.158). Ce type de méthode génère ainsi des données visuelles qui enrichissent et soutiennent les discours des participants tout en diversifiant les matériaux d’analyse pour les chercheurs (Leavy, 2017 ; Rose, 2014, 2022). En complément de la parole, ces approches permettent d’accéder à des dimensions de la connaissance et de l’expérience qui restent parfois inaccessibles par le langage seul (Leavy, 2017 ; Toraldo et al., 2018).

Produits en première personne, les dessins traduisent la perception consciente que le corps vécu se forge de l’activité du corps vivant (Andrieu, 2018, 2023). Cette activité interne, souvent tacite et souterraine (Gusdorf, 1957), se manifeste sous forme de sensations corporelles et d’émotions. Elle porte les traces des expériences passées, des blessures et des traumatismes. À travers le dessin, ces manifestations internes, sensibles et intimes prennent forme à travers les couleurs, les lignes et les silhouettes. Cette production devient alors un moyen de redécouvrir son propre corps et d’en offrir une représentation inédite.

Quels usages du dessin en recherche ?

Loin d’être un simple outil illustratif, le dessin constitue un levier méthodologique puissant dans l’étude de l’expérience corporelle. Il ouvre de nouvelles perspectives pour explorer la subjectivité, la mémoire corporelle et l’expression des ressentis. Il reste donc essentiel de poursuivre les réflexions sur ses usages, ses limites et ses apports en tant que mode d’exploration de l’expérience humaine.

L’utilisation du dessin dans la compréhension de l’expérience corporelle soulève plusieurs questions méthodologiques, pédagogiques et éthiques. Quatre axes principaux d’analyse sont proposés :

1. Apports et limites du dessin dans la compréhension de l’expérience corporelle

Le dessin constitue un outil puissant pour explorer l’expérience intime et souvent invisible du corps vécu. Mais que nous apporte-t-il réellement dans cette compréhension ? Quelles en sont les limites ? Les contributions pourront inclure :

• Des comparaisons méthodologiques détaillées entre différentes approches visuelles et non visuelles.
• Une réflexion sur les forces et les faiblesses du dessin en tant qu’outil d’investigation.
• Une discussion sur la complémentarité du dessin avec d’autres méthodes de recueil de données (entretiens, questionnaires, observations, etc.).

2. Le dessin comme outil pédagogique

Le dessin n’est pas seulement un moyen d’évaluation ou d’investigation scientifique, il est aussi utilisé comme support pédagogique dans l’apprentissage et les pratiques thérapeutiques. Dans ce cadre, comment peut-il enrichir ou soutenir les apprentissages corporels ? Les contributions pourront aborder :

• L’utilisation du dessin dans des dispositifs d’apprentissage (portfolio, carnet de bord, schémas corporels, etc.).
• Son rôle dans l’appropriation du corps et des sensations en milieu éducatif et thérapeutique.
• Des études de cas illustrant son intégration dans des contextes variés, notamment en milieu scolaire, sportif, ou clinique.

3. La place des dessins dans la recherche : un outil central ou secondaire ?

Quel rôle joue le dessin dans la conception d’une étude ? Peut-il être un élément central du protocole de recherche ou reste-t-il un outil secondaire ? Les contributions pourront explorer :

• Les impacts de l’utilisation de méthodes visuelles sur la production et l’interprétation des résultats de recherche.
• Les principes méthodologiques du recueil et de l’analyse des dessins selon les publics, les pratiques et le positionnement des chercheurs.
• Des études de cas mettant en lumière comment les dessins ont influencé la collecte, l’analyse et l’interprétation des données.
• Des critères de codage et de catégorisation des dessins, ainsi que les choix méthodologiques sous-jacents.

4. Défis éthiques et relationnels

L’usage du dessin soulève des questions éthiques et relationnelles lorsqu’il implique des participants partageant des expériences personnelles, parfois intimes et traumatiques. Quels sont les enjeux liés à cette pratique ? Les contributions pourront traiter :

• Des précautions à prendre dans l’interprétation des dessins pour éviter les biais et les surinterprétations.
• Des considérations éthiques sur la confidentialité et la protection des données visuelles.
• De l’orientation de la relation entre chercheur/clinicien/pédagogue et participant/patient/apprenant.
• Des défis liés à l’analyse de dessins réalisés par des publics vulnérables ou en situation de souffrance.

Ces axes visent à enrichir la réflexion sur l’usage du dessin comme outil de recherche, d’apprentissage et de médiation dans l’exploration de l’expérience corporelle.

A propos de la revue

Cette revue est en open access et est qualifiante en science de l’éducation.

Les articles sous soumis à une relecture par les pairs. Les propositions d’articles seront donc soumises à une double expertise en aveugle, puis au comité éditorial.

Le site de la revue : https://journals.openedition.org/rechercheseducations/

La revue ne dispose pas de sa propre plateforme de dépôt pour les articles, nous avons donc créé un site pour les dépôts d’articles.

Modalités de soumission

• Cet article peut être écrit en français ou en anglais.
• Chaque texte est d’environ 30 000 caractères (espaces compris).
• Les références seront citées selon les normes APA 7.
• Les résumés doivent faire 250 mots assortis de 5 mots clés.
• Les figures et tableaux doivent faire l’objet d’un appel dans le texte et être fournis dans un fichier à part.

L’argumentaire du numéro, similaire à celui du colloque est disponible sur le site de dépôt

Soumission de l’article sur la plateforme :https://article-drawing.sciencescall.org

avant le 30 juin 2025

Calendrier

• Date limite de dépôt : 30 juin 2025
• Retour de l’expertise aux auteurs : entre septembre et octobre 2025
• Réception de la version finale de l’article : décembre 2025

Coordination scientifique

• Lisa Lefèvre, HEP Vaud, Lausanne, lisa.lefevre@unistra.fr
• Marie Agostinucci, Université de Strasbourg, agostinucci@unistra.fr

Références

Andrieu, B. (2018). S’activer : L’émersion du corps capacitaire face à la dismose actuelle du monde. Cahiers Sens public, 21-22(1), 57‑74.

Andrieu, B. (2023). Les dessins de conscience : Une théorie du corps circassien. Épure, Éditions et presses universitaires de Reims.

Bernhoff, G., Landén Ludvigsson, M., Peterson, G., Bertilson, B. C., Elf, M., & Peolsson, A. (2016). The pain drawing as an instrument for identifying cervical spine nerve involvement in chronic whiplash-associated disorders. Journal of Pain Research, 9, 397‑404. https://doi.org/10.2147/JPR.S104747

Danner, U., Avian, A., Macheiner, T., Salchinger, B., Dalkner, N., Fellendorf, F. T., Birner, A., Bengesser, S. A., Platzer, M., Kapfhammer, H.-P., Probst, M., & Reininghaus, E. Z. (2017). “ABC”—The Awareness-Body-Chart : A new tool assessing body awareness. PLOS ONE, 12(10), e0186597. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0186597

Goodenough, F. L. (1926). A new approach to the measurement of the intelligence of young children. The Pedagogical Seminary and Journal of Genetic Psychology. https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/08856559.1926.10532353

Leavy, P. (2017). Handbook of Arts-Based Research. Guilford Publications.

McCarthy, L., & Muthuri, J. N. (2018). Engaging fringe stakeholders in business and society research : Applying visual participatory research methods. Business & Society, 57(1), 131‑173. https://doi.org/10.1177/0007650316675610

Rose, G. (2014). On the relation between ‘visual research methods’ and contemporary visual culture. The Sociological Review, 62(1), 24‑46. https://doi.org/10.1111/1467-954X.12109

Rose, G. (2022). Visual Methodologies : An Introduction to Researching with Visual Materials.

Toraldo, M. L., Islam, G., & Mangia, G. (2018). Modes of knowing : Video research and the problem of elusive knowledges. Organizational Research Methods, 21(2), 438‑465. https://doi.org/10.1177/1094428116657394