Donner la parole aux artistes du sud-ouest de l’océan Indien, zone qui passe le plus souvent sous les radars des productions critiques, voilà l’objectif de ce cycle de rencontres. Au fil de quelques créations contemporaines, artistiques et littéraires, nous espérons voir se dessiner cet espace rêvé, fantasmé, qu’est la Lémurie, « Atlantide » du Grand Océan. L’existence géologique de la Lémurie a certes été infirmée mais, si elle continue à exister, c’est bien à travers le geste artistique. De La Réunion à l’Inde, en passant par Maurice, Mayotte, Madagascar ou encore la Chine, serait-ce là un continent à inventer, reliant les insularités entre elles et à leurs sources indianocéanes ?

Présentation

Les occasions d’entendre parler des créations artistiques et littéraires de l’océan Indien sont assez rares : les expositions ou autres événements au sujet des territoires dits « ultramarins » mettent souvent en avant les Antilles, mais ils laissent bien souvent de côté la région indianocéane. Durant un semestre, nous invitons des artistes de La Réunion, mais aussi de Maurice, de Mayotte ou de Madagascar à prendre la parole sur leur rôle dans l’émergence d’un continent imaginaire, englouti sous les eaux du Grand Océan, la Lémurie.

La Lémurie, continent enfoui dont l’existence géologique a été réfutée, a servi de mythe fondateur pour nombre d’artistes du sud-ouest de l’océan Indien et leur a permis de penser des connexions dans leur pratique, qui se nourrit, en plus de sources européennes, de mêmes sources mozambicaines, indiennes, chinoises ou encore arabes. Elle avait en particulier été rêvée par Jules Hermann, dans un ouvrage publié à titre posthume, Les Révélations du Grand Océan (1927). Le Réunionnais cherchait à voir dans l’île de La Réunion, alors encore appelée île Bourbon, le dernier vestige émergé d’un continent immergé ou, pour le dire avec Boris Gamaleya, poète également originaire de La Réunion, le « front [d’une] reine » que serait la Lémurie. Ce projet fera donc intervenir non seulement des artistes qui affichent clairement l’importance de la Lémurie dans leurs œuvres, mais encore des artistes qui donnent à sentir un esprit lémurifique dans leurs œuvres, sans toujours le formuler en ces termes. Par « esprit lémurifique », il faut entendre la conscience de vivre dans un espace singulier, l’océan Indien, où se mêlent plusieurs cultures. À ce titre, la Lémurie n’a rien d’une idée figée, anesthésiée, morte ; au contraire, si elle vit aujourd’hui, c’est bien dans le geste de chacune et chacun des artistes invité·es, d’où la question de savoir si elle est « un continent à inventer ».

Ainsi, à partir d’une interrogation autour de la pertinence de ce continent artistique et littéraire, il sera possible de mettre en place un dialogue par les arts et par les lettres, entre La Réunion, Maurice, Madagascar ou encore Mayotte, avec la Chine, l’Inde et tous les autres espaces indianocéaniques.

Avec le soutien du Département ARTS de l’ENS, de l’A-Ulm, du Programme Suds de l’ENS, de l’association Africana-ENS et du Ciné-Club de l’ENS.

Programme

24 septembre, 18-20h

« Une cosmogonie lémurienne. Repenser le monde à partir de l’océan Indien »

• avec un transmetteur lémurien, Christian Jalma dit Pink Floyd

1 octobre, 19h-21h

« Sacrées sirènes ! Voix indianocéanes » 

• avec la chanteuse Kaloune

8 octobre, 18h-20h 

« Géopoétique d’un continent »

• avec l’artiste plasticien Jonathan Potana

15 octobre, 18h-20h

« Un geste lémurien ? Danser en/la Lémurie »

• avec les danseuses & chorégraphes Chlowé Aguero, Sylvette Annibal et Soraya Thomas

22 octobre, 18h-20h

« Des nouvelles de Lémurie. Autour de la revue de création littéraire Lettres de Lémurie »

• avec les écrivain·es lémurien·nes Ananda Devi, Monique Séverin, Sophie Bazin, Johary Ravaloson et Nassuf Djailani

12 novembre, 18h-20h

« Le Théâtre Vollard, un théâtre lémurifique ? »

• avec le directeur de la compagnie, Emmanuel Genvrin

19 novembre 18-20h

« Traduire, mettre en scène, habiter l’océan Indien »

• avec la comédienne, traductrice, metteuse en scène et directrice du CDNOI, Lolita Tergémina

3 décembre, 18h-20h

« Un art lémurien de la composition musicale ? »

• avec le compositeur Labelle

10 décembre, 18h-20h 

« Imaginer un musée lémurien »

• avec la chercheuse et militante, Françoise Vergès

17 décembre, 20h-22h

« Lémurie sur grand écran. Projection du film Lémuria au ciné-club de l’ENS »

• suivie d’un échange avec la réalisatrice, Marine Hervé, et la productrice, Bérangère Condomines