Ce dossier, intitulé « Démocratie et surveillance : perspectives critiques et interdisciplinaires », s’inscrit dans une démarche critique visant à analyser les techniques de surveillance à la lumière des principes fondamentaux de la démocratie et du respect des droits et libertés. Ce dossier interdisciplinaire propose ainsi de croiser les regards issus de différentes disciplines afin d’évaluer les tensions entre surveillance et exigences démocratiques.

 

 

Argumentaire

Ce dossier, intitulé « Démocratie et surveillance : perspectives critiques et interdisciplinaires », s’inscrit dans une démarche critique visant à analyser les techniques de surveillance à la lumière des principes fondamentaux de la démocratie et du respect des droits et libertés. Ce dossier interdisciplinaire propose ainsi de croiser les regards issus de différentes disciplines afin d’évaluer les tensions entre surveillance et exigences démocratiques.

Il est coordonné par des chercheurs de l’Observatoire de la surveillance en démocratie, créé au sein de l’Université de Bordeaux en 2023.

Les contributions attendues pourront aborder des réflexions épistémologiques sur la production et la circulation des savoirs liés à la surveillance dans une perspective interdisciplinaire. Des éclairages historiques permettront de mieux comprendre l’émergence et le développement de ces techniques, en interrogeant notamment les rationalités – parfois complémentaires, parfois contradictoires – qui les sous-tendent.

Une attention particulière sera portée aux acteurs à l’origine de la conception, de la mise en œuvre et de la diffusion des dispositifs de surveillance, ainsi qu’aux usages variés qui en sont faits, selon les contextes sociaux et politiques. Dans une perspective critique de la démocratie, les articles pourront traiter aussi bien de la surveillance des populations marginalisées que de celle exercée sur les élites, afin de questionner les dynamiques de pouvoir à l’œuvre.

Les critiques et résistances suscitées par les pratiques de surveillance seront également au centre de ce dossier : qui les formule, sur quels fondements, avec quels effets sur les débats démocratiques et les régulations institutionnelles ? Les réponses, qu’elles soient juridiques, techniques ou politiques, seront examinées sous l’angle de leur capacité à renforcer ou à affaiblir les garanties démocratiques. Enfin, ces analyses pourront conduire à une relecture critique des notions juridiques clés telles que la « vie privée » ou le « principe de proportionnalité », mobilisées à la fois par les opposants et par les défenseurs des techniques de surveillance dans des espaces de débat qui participent pleinement de la vitalité démocratique.

Ces réflexions pourront plus spécifiquement s’inscrire dans les axes développés lors du colloque interdisciplinaire qui s’est tenu à l’Université de Bordeaux en février 2025 :

• Méthodologie et conditions de production et de diffusion d’un savoir interdisciplinaire sur la surveillance en démocratie : examiner les conditions de production, de circulation et de légitimation des savoirs sur la surveillance, ainsi que les tensions épistémiques qui peuvent émerger de la collaboration interdisciplinaire.
• État des lieux socio-historique, juridique et technologique des techniques de surveillance en démocratie : proposer un panorama des dispositifs de surveillance à travers une approche diachronique et comparée, en s’intéressant à l’évolution des cadres juridiques, des infrastructures techniques et des pratiques sociales, afin de comprendre comment la surveillance s’ancre, se transforme et se justifie dans des régimes démocratiques.
• Constitution et production des techniques de surveillance en démocratie : éclaircir les processus par lesquels les techniques de surveillance sont conçues, développées et intégrées dans des dispositifs concrets, en s’intéressant notamment aux acteurs impliqués (autant publics que privés), aux logiques techniques et économiques à l’œuvre, ainsi qu’aux choix sociopolitiques incorporés dans les architectures de surveillance.
• Usage des techniques de surveillance dans un régime démocratique : explorer les usages concrets des techniques de surveillance dans différents contextes (police, renseignement, gestion des populations, espaces numériques, etc.), en mettant en lumière en particulier les pratiques d’appropriation, de détournement ou de contestation, ainsi que les effets produits sur les comportements, les relations sociales et les formes de pouvoir.
• Surveillance et libertés : interroger les tensions entre dispositifs de surveillance et protection des libertés individuelles et collectives inhérentes au régime démocratique, en examinant les mécanismes juridiques, politiques et techniques de limitation ou de justification de la surveillance, ainsi que les reconfigurations des droits fondamentaux dans les démocraties contemporaines.

Modalités de soumission

Les auteurs sont invités à envoyer les articles dans leur première version (approximativement 30000 signes espaces compris) pour sélection en double aveugle à etudes.digitales.observatoire@gmx.fr,

avant le 30 octobre 2025.

Calendrier

• Date limite d’envoi des articles complets : 30 octobre
• Retour des relecteurs en double aveugle et notification d’acceptation : 30 novembre
• Livraison des contributions finalisées : 30 décembre
• Parution printemps 2026

Coordinateurs

• Yoann Nabat
• Elia Verdon
• Marine Lamare
• Frederic Alexandre

Références bibliographiques

Olivier Aïm, Les théories de la surveillance. Du panoptique aux Surveillance Studies, Malakoff, Armand Colin, 2020.

Zygmunt Bauman et David Lyon, Liquid Surveillance, Cambridge, Malden, Polity Press, 2013.

Mattéo Bartolucci, Yoann Nabat et Kieran Van Den Bergh (dir.), Les droits et libertés face aux transformations technologiques, Paris, IFJD, 2023.

Antonio A. Casilli, « Contre l’hypothèse de la “fin de la vie privée” : la négociation de la privacy dans les médias sociaux », Revue française des sciences de l’information et de la communication, 35(1) : 1-20, 2013.

Florent Castagnino, « Critique des surveillances studies. Éléments pour une sociologie de la surveillance », Déviance et Société, 42(1) : 9-40, 2018.

Hadrien Clouet, Vincent Dubois, Jean-Marie Pillon, Luc Sigalo Santos et Claire Vivès, Chômeurs, vos papiers ! Contrôler les chômeurs pour réduire le chômage ?, Paris, Raisons d’agir, 2023.

Sami Coll, « La vie privée comme outil de gouvernance », Les Cahiers du numérique, 10(1) : 45-68, 2014.

Mireille Delmas-Marty, Libertés et sûreté dans un monde dangereux, Paris, Seuil, 2010.

Jacques Ellul, Le bluff technologique, [Hachette, 1988] Paris, Pluriel, 2012.

Muriel Fabre-Magnan, L’institution de la liberté, Paris, PUF, 2021.

Didier Fassin, Punir. Une passion contemporaine, suivi de À l’épreuve de la pandémie, Paris, Seuil, 2020 [2017].

Michel Foucault, Surveiller et punir, Paris, Gallimard, [1975] 2015.

Antoine Garapon et Jean Lassègue, Le numérique contre le politique, Paris, PUF, 2021.

Bernard E. Harcourt, La Société d’exposition. Désir et désobéissance à l’ère numérique, Paris, Le Seuil, 2020.

Jean Lassègue et Giuseppe Longe, L’empire numérique. De l’alphabet à l’IA, Paris, PUF, 2025.

Groupe Marcuse, La liberté dans le coma. Essai sur l’identification électronique et les motifs de s’y opposer, Paris, La lenteur, 2012.

Christophe Masutti, Affaires privées : Aux sources du capitalisme de surveillance, Caen, C&F Éditions, 2020.

Cathy O’Neil, Algorithmes : la bombe à retardement, Paris, Les Arènes, 2018.

Olivier Razac, Une société de contrôle ? Enfermements, surveillance électronique, gestion des risques et gouvernementalité algorithmique, Paris, Édition Kimé, 2023.

Denis Salas, La justice dévoyée. Critique des utopies sécuritaires, Paris, Les Arènes, 2012.

Félix Tréguer, Technopolice : La surveillance policière à l’ère de l’intelligence artificielle, Quimperlé, Éditions divergences, 2024.

Shoshana Zuboff, L’Age du capitalisme de surveillance, Paris, Zulma, 2018.