Published on Tuesday, October 28, 2025
Abstract
La dernière décennie a vu la multiplication d’études qui convergent vers une conclusion similaire : à partir du début du XIXe siècle, l’intérêt pour le Moyen Âge en Europe s’accompagne d’un investissement politique particulièrement important. Pourtant, comme on le sait, dès la fin du XVe siècle se manifeste une curiosité pour la période qui n’est pas nécessairement nommée « Moyen Âge », mais qui est bien identifiée comme un passé national et non-antique. Ce sont les enjeux politiques de ce « médiévalisme » de la première modernité, jusqu’ici peu étudiés, que ce colloque voudrait explorer.
Announcement
Argumentaire
La dernière décennie a vu la multiplication d’études qui convergent vers une conclusion similaire : à partir du début du XIXe siècle, l’intérêt pour le Moyen Âge en Europe s’accompagne d’un investissement politique particulièrement important. Pourtant, comme on le sait, dès la fin du XVe siècle se manifeste une curiosité pour la période qui n’est pas nécessairement nommée « Moyen Âge », mais qui est bien identifiée comme un passé national et non-antique. Ce sont les enjeux politiques de ce « médiévalisme » de la première modernité, jusqu’ici peu étudiés, que ce colloque voudrait explorer.
Quelques contributions, isolées, parfois discordantes, ont déjà porté sur ces enjeux. Alors qu’en 1977, à la suite des travaux de Donald R. Kelley et de George Huppert, Marc Fumaroli voyait dans les « origines de la reconnaissance historique du Moyen Âge » au XVIe siècle une manière pour les monarchies européennes de prouver leur antiquité face aux prétentions de l’Église romaine, Quentin Skinner, un an plus tard, situait les travaux de Du Haillan et Pasquier dans un autre contexte politique : celui de ce qu’il nommait le « retour du constitutionnalisme » dans les années 1560, contestation des tendances absolutistes de la royauté française. Une telle différence de vues vaut aussi pour le XVIIe siècle, dans des études plus récentes : si Marine Roussillon souligne l’utilisation de la culture du Moyen Âge dans la propagande louis-quatorzienne, Sébastien Douchet met quant à lui en valeur le potentiel contestataire de l’institution littéraire des « cours d’Amour » médiévales, notamment quand elles font l’objet du travail érudit d’une famille de parlementaires écartés des responsabilités par le pouvoir absolu, les Gallaup de Chasteuil. Autrement dit, le passé national est investi, dans une période d’affirmation croissante de l’absolutisme, de valeurs politiques fortement contrastées, qui vont de la glorification de la figure du roi à la contestation du caractère absolu de sa volonté, en passant par la promotion de certains lignages nobiliaires, ou encore par l’exaltation d’une « nation » ou d’un « peuple », termes dont le sens est encore peu fixé et fait l’objet d’instrumentalisations diverses. Il s'agit en somme de comprendre « à qui profite le Moyen Âge ». Notre colloque voudrait être un lieu de travail collectif pour repérer ces diverses valeurs politiques, et comprendre leurs interactions durant les derniers siècles de la monarchie française.
Pour répondre à cette question, nous voudrions faire se rencontrer différentes méthodologies et disciplines. On privilégiera en particulier, dans les études « littéraires », celles qui s’appuient sur une approche matérielle de la transmission des textes médiévaux aux époques ultérieures, en cherchant à comprendre comment se constitue un corpus d’écrits médiévaux, et en s’interrogeant sur les valeurs politiques qu’il véhicule. En outre, l’on ne saurait ignorer qu’entre les XVIe et le XVIIIe siècle, l’intérêt pour les écrits médiévaux est souvent le fait de juristes de métier, plus ou moins directement investis dans la formalisation d’un droit français qui passe par la rédaction et l’harmonisation des coutumes locales, héritage d’un passé considéré comme national et immémorial. C’est pourquoi la question de la transmission des textes médiévaux avec celles d’histoire du droit nous intéressera particulièrement. Enfin, notre colloque se voudrait un lieu d’échanges entre histoire et littérature, au regard notamment de la question éminemment politique de la transmission de l’historiographie médiévale.
Programme
Jeudi 6 novembre 2025
- 13h30 Accueil
- 13h45 Introduction : Benoît Autiquet et Lionel Piettre
Légitimations médiévales du souverain moderne
Présidence : Marine Roussillon
- 14h00 Beatrice Beys : « Louis XII et Ogier le Danois : une image synchronisée de François Le Barbier fils, pour Antoine Vérard »
- 14h40 Marta Francia : « Le récit troyen du Moyen Âge à la Renaissance dans l’œil des artistes : une stratégie politique au service de la légitimation monarchique »
- 15h20 Inès Oiciny : « Alphonse X le Sage à Séville : usages politiques d’une figure médiévale »
- 17h00 Visite guidée en partenariat avec le Centre d’Interprétation de l’Architecture et du Patrimoine (CIAP) d’Amiens
- 19h30 Dîner de colloque
Vendredi 7 novembre 2025
Crises de la modernité et Moyen Âge
Moyen Âge et crises politiques de la modernité : l’exemple de la Ligue
Présidence : Benoît Autiquet
- 9h00 Nicolas Champeaux et Alexandre Goderniaux : « Le Moyen Âge au service dutyrannicide. Usages des écrits médiévaux dans les libelles imprimés par la Ligue contre Henri III (1589) »
- 9h40 Benoît Autiquet : « Armagnacs, Bourguignons… et Ligueurs. Etienne Pasquier, historien des Guerres de Cent Ans et chroniqueur de son temps »
10h20 Pause
Moyen Âge et crises religieuses de la modernité
Présidence : Audrey Duru
- 10h40 Lionel Piettre : Blaise Vigenère et la réécriture de la 4e croisade
- 11h20 Timothée Guyon : « L’assemblée de Vincennes de 1329 et la crise du jansénisme audébut du XVIIIe siècle : les appropriations politiques et littéraires d’un événement médiéval »
12h00 Déjeuner
Inscrire le Moyen Âge dans la modernité : juristes et historiens
Les juristes modernes face aux écrits médiévaux
Présidence : Sébastien Douchet
- 14h00 Arnaud Le Gonidec : « Sources et actualités médiévales du premier droit français (fin XVIe siècle) »
- 14h40 Camille Pollet : « La documentation médiévale de John Selden : entregent,bibliothèques et trajectoire socio-politique dans l’Angleterre des Stuarts »
15h00 Pause
Les historiens modernes face aux écrits médiévaux
Présidence : Lionel Piettre
- 15h20 Anna Mikhalchuk : « Les ouvrages historiques des mauristes au service de la monarchie »
- 16h00 Bidossessi Marthe Hounkponou : « Entre érudition et écriture de l’histoire littéraire : lesécrits médiévaux dans les collections de Jean IV Bouhier et Jean-Baptiste La Curne de Sainte- Palaye »
- 16h40 Conclusion : Sébastien Douchet et Marine Roussillon
Subjects
- Early modern (Main category)
- Society > Political studies > Political history
Places
- Logis du Roi
Amiens, France (80)
Event attendance modalities
Full on-site event
Date(s)
- Thursday, November 06, 2025
- Friday, November 07, 2025
Attached files
Keywords
- médiévalisme, première modernité, transmission de l'écrit, enjeu politique
Contact(s)
- Benoît Autiquet
courriel : benoit [dot] autiquet [at] gmail [dot] com
Information source
- Benoît Autiquet
courriel : benoit [dot] autiquet [at] gmail [dot] com
License
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To cite this announcement
« Usages politiques de l’écrit médiéval dans la première modernité (XVe-XVIIIe siècle) », Conference, symposium, Calenda, Published on Tuesday, October 28, 2025, https://doi.org/10.58079/151wi

