HomeAux origines de l'anthropologie française : Paul Lacombe (1834-1919)
Published on Monday, April 06, 2009
Abstract
Announcement
L’œuvre de Paul Lacombe (1834-1919) est tombée aujourd’hui dans l’oubli. Elle n’est presque jamais citée, à l’exception d’une poignée de spécialistes.
L’oubli est souvent justifié. Dans le cas de Lacombe, il ne l’est pas : on lui doit un des tout premiers ouvrages en langue française où le mariage et la parenté sont analysés dans une perspective anthropologique moderne, et Braudel le tenait pour l’inventeur du concept d’histoire événementielle. Est-ce négligeable ?
En tous cas, pour ceux qui ont eu la chance de lire La Famille dans la société romaine (1889) ou De l’Histoire considérée comme science (1894), le doute n’est plus possible. Lacombe a été un des esprits les plus pénétrants et les plus inventifs de son temps – voire du nôtre, dans la mesure où certaines de ses idées prennent sens aujourd’hui. On peut d’ailleurs se demander si ce n’est pas parce qu’il était trop en avance sur son temps que Lacombe est tombé dans l’oubli. Mais si cette explication était la bonne, n’aurait-il pas été ignoré déjà de son vivant ? Or il n’en a rien été, nous le savons par la biographie que son ami Henri Berr lui a consacrée en 1921. Non, Lacombe n’est tombé dans l’oubli qu’après sa mort, progressivement, et pour un ensemble de raisons qui restent à identifier.
Mais aussi importantes soient-elles, ces questions ne doivent venir qu’en second lieu. Avant de s’interroger sur le destin d’une œuvre, il faut commencer par en prendre la mesure : tel est le but du colloque auquel nous vous invitons à participer.
La difficulté, c’est que cette œuvre est multiple. Lacombe ne s’est pas intéressé qu’à l’institution familiale et à la théorie de l’histoire. Il a présenté des réflexions originales sur la guerre, sur la propriété foncière, sur le racisme, sur l’éducation, sur les techniques…, et c’est sans doute cette multiplicité d’intérêts qui a contribué à sa mise à l’écart. Lui qui se plaisait à confondre histoire et sociologie (« nous aurions pu mettre ici partout, à la place d’histoire, le mot sociologie », écrit-il dans sa préface à De l’histoire…) ne s’est laissé saisir ni par l’une ni par l’autre. Et notamment pas par la sociologie, qui cherchait alors à affirmer sa spécificité.
Cette multiplicité résulte en réalité d’un sens aigu de l’interaction de tous les faits sociaux. Ou plus exactement de l’idée que les faits rangés par nous dans une certaine catégorie (le mariage…) ne peuvent pas être compris si on ne fait pas intervenir des faits relevant des autres catégories. Mais cela nécessite, pour ne pas tomber dans un travers trop courant chez les historiens de l’époque, un usage de la comparaison qui respecte l’originalité des expériences humaines. Pour comprendre la famille romaine, nous dit Lacombe, il est tout aussi nécessaire de l’examiner par rapport à la famille en général que de l’intégrer aux autres champs de la société romaine (économie, religion, droit, résidence, esclavage…). Le concept de « fait social total » est dû à Mauss. Mais bien qu’il ne l’eût pas explicitement formulé, Lacombe en avait fait un des principes directeurs de ses analyses. Et c’est pour cette raison que chaque fois qu’il aborde un sujet nouveau, il y apporte quelque chose d’inattendu. En ce sens, Lacombe a été le contraire d’un simple compilateur.
Il n’a pas non plus été uniquement un savant. Il a aussi été un militant, et cette dimension est inséparable des autres : il y a fait preuve de la même liberté d’esprit. Dans un de ses premiers écrits, Le Mariage libre (1867), il trouve le moyen de faire, sur le plan politico-juridique, des propositions qui restent aujourd’hui aussi surprenantes par leur actualité que les hypothèses présentées dans La Famille…, et il est évident que les deux livres sont le produit d’une même réflexion. Mais là encore, la multiplicité de ses engagements a été considérable. Et s’il est trop tôt pour en dresser la liste, il ne l’est pas pour affirmer que chaque fois que Lacombe aborde un sujet de société, c’est pour y apporter un sens du concret tout à fait remarquable.
Le pragmatisme du militant procède de la même source que le réalisme, voire le matérialisme de l’homme de science : un attachement tenace et assumé à l’héritage des Lumières. Pour autant, Lacombe n’a pas ignoré les nombreux bouleversements théoriques qui se succédèrent au XIXe siècle (à l’exception peut-être du marxisme). Il a plutôt cherché à les utiliser quand cela lui paraissait opportun. Mais toujours avec un certain recul, car il voyait trop bien les défauts de l’esprit de système pour s’y laisser prendre. Sa critique de Taine (« le milieu, la race, le moment ») est un modèle du genre. Lacombe a été le contraire d’un idéologue.
PROGRAMME
Jeudi 24 septembre
13h30, accueil des participants
14h *Discours d’accueil : Monsieur le Maire de Lauzerte, Monsieur le représentant du Conseil Général du Tarn et Garonne et Monsieur le représentant du Conseil Régional de Midi-Pyrénées
*Introduction : Agnès Fine, directrice d’études à l’EHESS et François Sigaut, directeur d’études à l’EHESS
14h45-16h45 : Lacombe, l’homme de science, le militant, les engagements
Guy Astoul, historien, Université de Toulouse II, FRAMESPA
Paul Lacombe : sa jeunesse, ses engagements républicains.
Didier Foucault, historien, PR, Université de Toulouse II, ERASME
Paul Lacombe, libre penseur
Hervé Terral, sociologue, PR, Université de Toulouse II, LISST-Cers
Paul Lacombe : un projet de réforme pédagogique
17h30-19h : suite
Florence Rochefort, historienne, CR, CNRS, GSRL
Paul Lacombe : Laïcisation des mœurs et émancipation des femmes
Sylvie Chaperon, historienne, MCF (HDR), Université de Toulouse II, FRAMESPA
« Le mariage libre », Paul Lacombe, féministe
Jean-Claude Sangoï, historien, MCF, Université de Toulouse II, LISST-Cas
Paul Lacombe, sa famille, sa parenté, sa propriété de St Fort.
Vendredi 25 septembre,
L’évolution du mariage et de la famille. Lectures de P. Lacombe aujourd’hui
Président de séance : André Burguière (Directeur d’Etudes à l’EHESS)
9h-11h : Les outils théoriques de Paul Lacombe
Agnès Fine, anthropologue, DE, EHESS, LISST-Cas
Les lectures de Paul Lacombe
Philippe Moreau, latiniste, PR, Université de Paris XII - Val de Marne
Analyse de La famille dans la société romaine de Paul Lacombe
Claudine Leduc, historienne, MCF émérite, Université de Toulouse II
Lecture de La famille dans la société romaine
Bernard Vernier, anthropologue, PR émérite, Université de Lyon II
Paul Lacombe : une anthropologie de l'intérêt et des rapports de force
Joan Bestard, anthropologue, PR, Université Centrale de Barcelone
Le comparatisme de Paul Lacombe et le comparatisme dans l’anthropologie de la parenté aujourd’hui.
11h30-13h- Actualité de Paul Lacombe. Mariage, union libre, égalité entre époux, relations entre générations
Martine Segalen, anthropologue, PR émérite, Université de Paris X - Nanterre
Mariage et famille. Modernité de Paul Lacombe
Irène Théry, anthropologue, DE, EHESS, SHADYC
L’enjeu du mariage pour les études de parenté. De Paul Lacombe à nous.
Enric Porqueres i Gené, anthropologue, MCF, EHESS, IIAC - Laios
Parenté et personne. Lacombe à la lumière des débats contemporains
Agnès Martial, anthropologue, CR, CNRS, SHADYC
La paternité selon Paul Lacombe
Françoise-Romaine Ouellette, anthropologue, PR, INRS « Urbanisation, Culture et Société », Montréal, Canada
La protection de l’enfant, l’État et le législateur.
Françoise Zonabend, anthropologue, DE, EHESS, LAS
Actualité de Paul Lacombe
15h-19h Visite commentée du cloître de Moissac
20 h- 23h, repas suivi d’une table ronde ouverte sur les interventions de la journée.
samedi 26 septembre
Paul Lacombe et les sciences sociales : sa réception, sa place.
9h-10h30 - Paul Lacombe et l’histoire
Nicolas Adell-Gombert, anthropologue, MCF, Université de Toulouse II, LISST-Cas
Lacombe, l'histoire et les sciences sociales
Danielle Rives, historienne, chercheur associée, LISST-Cas
De l’histoire considérée comme science ou la tentation de la modernité
Dominique Ottavi, sciences de l’éducation, PR, Université de Caen
Lacombe et les illusions du progrès
11h-13h : Paul Lacombe et la sociologie de son temps
Massimo Borlandi, sociologue, PR, Université de Turin
Lacombe, Durkheim et les durkheimiens
Antoine Savoye, sciences de l’éducation, PR, Université de Paris VIII, SESS
Lacombe et l’Ecole de Le Play
Miriam Grossi, anthropologue, PR, Université Fédérale de Santa Catarina (Florianopolis, Brésil)
Questions de parenté et de genre dans l'Année Sociologique.
Sylvie Sagnes, anthropologue, CR, CNRS, IIAC-Lahic
Lacombe, le polygraphe oublié
14 heures, clôture du colloque,
Contacts pour inscriptions :
- Agnès Fine : fine@ehess.fr
- Nicolas Adell-Gombert : nicolasadell@yahoo.fr
Subjects
- Ethnology, anthropology (Main category)
- Society > Science studies > History of science
- Society > History
Places
- Lauzerte, France
Date(s)
- Thursday, September 24, 2009
- Friday, September 25, 2009
- Saturday, September 26, 2009
Attached files
Keywords
- Lacombe, histoire, anthropologie
Contact(s)
- Agnès Fine
courriel : - Nicolas Adell-Gombert
courriel : nicolasadell [at] yahoo [dot] fr
Information source
- Nicolas Adell-Gombert
courriel : nicolasadell [at] yahoo [dot] fr
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To cite this announcement
« Aux origines de l'anthropologie française : Paul Lacombe (1834-1919) », Conference, symposium, Calenda, Published on Monday, April 06, 2009, https://doi.org/10.58079/dvv