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Politiques du pèlerinage

Politics of pilgrimage

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Publié le mardi 15 mars 2011

Résumé

L’histoire du pèlerinage se trouve à la croisée de plusieurs champs d’étude : anthropologie et sociologie religieuses, administration publique, cultures politiques. Elle met en œuvre des échelles multiples, du local à l’international en passant par le national. Certains pans de cette histoire ont été largement défrichés, mais ils ont dans le même temps soulevé d’autres interrogations. L’objet du colloque organisé par le laboratoire Gerhico-Cerhilim des universités de Poitiers et de Limoges sera d’explorer les interactions entre le religieux et le politique.

Annonce

Journées d’études, Université de Poitiers-GERHICO-CERHILIM, Politiques du pèlerinage

Argumentaire

L’histoire du pèlerinage se trouve à la croisée de plusieurs champs d’étude : anthropologie et sociologie religieuses, administration publique, cultures politiques. Elle met en œuvre des échelles multiples, du local à l’international en passant par le national. Certains pans de cette histoire ont été largement défrichés, mais ils ont dans le même temps soulevé d’autres interrogations. L’objet du colloque organisé par le laboratoire Gerhico-Cerhilim des universités de Poitiers et de Limoges sera d’explorer les interactions entre le religieux et le politique.

Le pèlerinage est considéré par les anthropologues et historiens du fait religieux comme une rupture (Dupront, 1987), un arrachement d’avec le quotidien, un acte extraordinaire au plein sens du terme (Julia). La décision du pèlerin est une réponse à un irrésistible appel à partir, que la société qu’il laisse encourage, pour pèleriner par procuration ou pour éloigner les indésirables. Le pèlerin a beau être tendu vers un terme mystique, l’historien ne peut faire abstraction du chemin qu’il parcourt et qui l’inscrit, passager et précaire, dans un territoire et un ordre  politico-social. Il est pour les habitants des territoires qu’il traverse un sans-foyer, un vagabond, un gyrovague. Car ce « marcheur de Dieu » est d’abord un « pérégrin », un « per eger » qui traverse des frontières (Chélini et Branthomme, 1982), bref un migrant. Si cette fragilité liée à sa qualité d’étranger a pu lui valoir les protections des pouvoirs politiques et religieux à l’époque médiévale, la tendance, depuis l’âge moderne, est plutôt à l’encadrement de ses déplacements (Boutry, Julia et Fabre, 1999). Dans un Etat et une société modernes caractérisés de manière croissante par leur sédentarité, ces populations flottantes que constituent les pèlerins sont alors fréquemment envisagées comme une menace potentielle. La demande sociale pèse alors en faveur d’une plus large régulation des flux de pèlerins, dans les pays de départ, de traversée et d’accueil (Julia, 1993). Il importe alors de s’interroger sur  l’effet induit par les réglementations du pèlerinage sur les pratiques pèlerines.

Par ailleurs la politique peut s’inviter au cœur des Lieux Saints que ce soit par l’attitude des « gardiens » de ces lieux, par la participation de personnalités politiques (hauts dignitaires, « rois-pèlerins », personnalités politiques d’opposition,…) aux cérémonies du pèlerinage, voire de groupes politique venus pour des motifs variés qu’il serait intéresser de mettre en valeur. Toutefois le politique peut surgir, sans y avoir été invité, de manière parfaitement accidentelle, au détour d’un emblème brandi, d’un chant, discours ou d’une répartie à l’instar ces pèlerins ouvriers pris à partie en 1891 par la population romaine pour avoir crié « Vive le pape ! ». Ces événements et faits divers obéissent sans aucun doute à une logique politique plus profonde sur laquelle il conviendra de nous interroger.

Les pèlerinages locaux ou vers des sanctuaires de proximité, peuvent également être pris en considération. Si les déplacements sont modestes, les rassemblements et les manifestations organisés à l'occasion de ces pèlerinages peuvent avoir une couleur politique, ou être perçus comme tels. Le culte des saints protecteurs de la cité, des premiers évêques par exemple, (Martial à Limoges, Hilaire ou Radegonde à Poitiers, Front à Périgueux, Eutrope à Saintes....) mérite une attention particulière. A deux moments au moins (Guerres de religions, Révolution française),  leurs reliques ou leur tombeau ont pu subir des violences. Après ces crises, le statut des reliques, l'endroit où elles étaient conservées , les liens avec les autorités civiles et religieuses ont pu être modifiés. La dévotion envers ces reliques, envers celles des saints locaux,  les pèlerinages, au XIXe siècle en particulier, ont parfois eu une dimension politique, locale ou nationale (les pèlerinages à saint Martial ou à Sainte Radegonde dans les années 1880-1890).

Enfin le pèlerinage peut purement ou simplement être instrumentalité par des groupes politico-religieux, comme les pèlerinages de l’Ordre Moral de La Salette (Angelier et Langlois, 2000) ou de Paray-le-Monial (Boutry, 1980), ou encore comme la spectaculaire prise de la Grande Mosquée de La Mecque par des extrémistes chiites en 1979 (Zeghidour, 1989). L’Etat lui-même peut-être à l’origine de l’impulsion de la geste pèlerine par le biais de pèlerinages d’empire dans le cas de l’Islam (Peters, 1994) ou « pèlerinages politiques nationaux » de la chrétienté médiévale consistant, pour un roi à placer son territoire sous la protection d’un saint dont il atteint faveurs et victoires (Sigal, 1987). Si récupération il y a, ces pèlerinages suscités par la puissance publique ne participent-ils pas plus durablement à la redéfinition même du politique (Maes, 2002) ?

Il n’est pas tenable de réduire l’intervention du politique dans la sphère du religieux au diptyque « récupération et contrôle ». Les relations sont infiniment plus complexes. Au XIXe siècle, le processus d’émergence des cultures politiques (Berstein, 1987) a vu l’émergence de rituels mi-civiques mi-religieux qui ont pris la forme de pèlerinages à la maison natale ou sur la tombe d’un héros ou encore un lieu de commémoration d’un événement remarquable. Au XXe siècle, les totalitarismes ont mis en œuvre des « religions de la politique » (Emilio Gentile, 2001). Elles furent mises en œuvre par différentes familles politiques, en particulier par celles qui se voulaient détachées des Églises confessionnelles.  Pour comprendre le pèlerinage politique, il importe d’en identifier les lieux, d’en décrypter les cérémoniaux et de repérer les usages générationnels.

L’objet de la rencontre sera, en mettant en valeur et en décryptant les facettes de leurs rapports à travers le prisme du pèlerinage, en des lieux et des moments variés, de comprendre comment le politique et le religieux s’influencent mutuellement et se définissent l’un par rapport à l’autre.

Les propositions de communications pourront porter sur les axes suivants :

  • Axe 1. Trajectoires de pèlerins et encadrement politique des déplacements : quels lieux de pèlerinages furent l’objet d’une intervention politique, comment les autorités publiques s’efforcèrent-elles de gérer les pèlerinages ; quelle fut l’incidence de cette intrusion sur le phénomène religieux ?
  • Axe 2. Discours et représentations politiques du pèlerinage : les mots du religieux et ceux du politique furent-ils similaires ; quelle image du pèlerinage et du pèlerin fut véhiculée par les politiques ; quelle furent les arguments en faveur de la méfiance, du contrôle ou de l’interdiction ?
  • Axe 3. L’usage politique du pèlerinage : quels furent les pèlerinages dont la fonction politique interféra avec la démarche religieuse ; à quelles occasions émergèrent des pèlerinages entièrement politiques ; quelles furent leurs caractères : lieux, gestes, paroles, emblèmes ?

Modalités pratiques

Cette rencontre a une vocation interdisciplinaire, l’objet du pèlerinage interrogeant aussi bien géographes et historiens, qu’anthropologues, politistes ou sociologues. La prise en compte des différentes échelles de pèlerinages (local, national, international) sera par ailleurs privilégiée. La première rencontre se tiendra à Limoges le 14 octobre 2011. La deuxième à Poitiers les 10 et 11 mai 2012.

Les propositions de communication (titre de l’intervention, résumé, titres et qualités de l’auteur) sont à envoyer pour le

13 mai 2011

aux adresses suivantes :

Les propositions seront évaluées par un comité scientifique composé de

  • Paul d'Hollander,
  • Christian Sorrel,
  • Jacques-Olivier Boudon,
  • Jérôme Grévy

Dates

  • vendredi 13 mai 2011

Mots-clés

  • politique, religieux, pèlerinage, représentations, usages

Contacts

  • Paul D'HOLLANDER
    courriel : paul [dot] dhollander [at] unilim [dot] fr
  • Jérôme Grévy
    courriel : jerome [dot] grevy [at] univ-poitiers [dot] fr
  • Luc Chantre
    courriel : luc [dot] chantre [at] univ-rennes2 [dot] fr

Source de l'information

  • Luc Chantre
    courriel : luc [dot] chantre [at] univ-rennes2 [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Politiques du pèlerinage », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 15 mars 2011, https://doi.org/10.58079/i09

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