Página inicial« Une petite rébellion de temps en temps » : divergences temporelles et drames sociaux

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« Une petite rébellion de temps en temps » : divergences temporelles et drames sociaux

"A little rebellion from time to time": temporal divergences and social dramas

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Publicado sexta, 20 de janeiro de 2012

Resumo

Le séminaire interlaboratoire du Département d'anthropologie d'Aix-Marseille Université, organisé par les doctorants du CEMAF, CNE, CREDO, IDEMEC et IRASIA, se déroulera toute la journée du vendredi 27 janvier 2012 dans l'amphi de chimie sur le campus St-Charles à Marseille. Le séminaire, intitulé « Une petite rébellion de temps en temps », discutera des divergences temporelles dans l'étude contemporaine des phénomènes sociaux.

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Séminaire interlaboratoire du Département d’Anthropologie d’Aix-Marseille Université, Journée du 27 janvier 2012, organisée par des doctorants du CEMAF, du CNE, du CREDO, de l’IDEMEC et de l'IRASIA

Présentation du séminaire

Une petite rébellion de temps en temps[1] : divergences temporelles et drames sociaux

Sociétés froides contre sociétés chaudes, temps cyclique contre temps linéaire, la notion de temporalité a été mobilisée à maintes reprises dans l’étude de l’organisation, ou du changement, des sociétés dites « primitives ». Ces dernières étant souvent renvoyées à une altérité radicale qui postule leur inscription dans un temps figé ou un temps ralenti alors même qu’elles étaient contemporaines des ethnographes qui les observaient. Cette idée sous-tend en partie les différentes élaborations théoriques de la discipline. C'est ainsi que la construction de l’altérité temporelle a puisé dans la notion de temps cyclique, opposé à la linéarité supposée du temps des sociétés dites « modernes », pour construire cette image de l’autre lointain, dans le temps et dans l'espace. Un grand débat eut lieu quant à cette opposition entre le temps cyclique et le temps linéaire, notamment sous l’impulsion de l’école de Manchester. Il s’agissait de remettre en question la première catégorie en considérant le conflit social ou politique, constitutif de tout groupement, comme l’évidence de l’historicité de toute société, et conséquemment de l’inscription universelle dans un temps linéaire. Mais l’historicité de tous les collectifs signifie-t-elle pour autant la linéarité de la temporalité dont ils participent ? Est-il suffisant d’interroger le conflit social à l'aune de la linéarité supposée d’un temps prétendument universel ? Ne pourrait-on pas voir au contraire le caractère éminemment conflictuel du social, comme résultant de conjonctions de temporalités divergentes ?

Les mutations contemporaines du politique, résultant du phénomène de globalisation, aujourd’hui bien connues et commentées de toutes parts par les anthropologues, nous amènent à interroger de nouveau la notion de temporalité. C’est ce que nous proposons de faire, lors de ce séminaire. Il sera question de remettre ce débat à jour, notamment vu sous l'angle des mobilisations contestataires dont les nouvelles technologies de l’information et de la communication nous amènent aujourd'hui les échos des quatre coins du globe, avec des temporalités nouvelles qui sont de l'ordre de l'instantanéité. De part et d'autre, ces mouvements collectifs ont pour point commun de contester l’ordre politique, moral, économique et social établi, captant des ressources interprétatives à différentes échelles : locale, nationale aussi bien que mondiale. Par ailleurs, l’instantanéité évoquée remet en cause les anciennes temporalités de la mobilisation du fait du déplacement immédiat de l’information d’un point à l’autre de la planète. Les événements et leurs interprétations semblent de plus en plus simultanés à une même temporalité. Ces nouvelles modalités du vécu politique favorisent aussi l'émergence de différentes conjonctions de temporalités qui se rencontrent. Il s’agira ici de construire une approche multidimensionnelle de la mobilisation et des représentations du temps dans lesquelles elle s’inscrit et prend sens. Nous proposerons par conséquent d’éclairer les mouvements d’opposition contemporains et les mobilisations qu’ils génèrent à l’aune des temporalités qui y sont en jeu.

Programme

9h-9h15 : Accueil des participants

9h15-9h30 : Emmanuel Galland (doctorant CEMAF) : Introduction

  • 9h30-10h15 : Natacha Collomb (invitée IRASIA, Chercheure associée à l'IRASIA),
    « Usages et mésusages du temps dans la pratique anthropologique, lire ou relire Le temps et les autres. Comment l'anthropologie construit son objet »
  • 10h15-11h : Laurent Vidal (invité CEMAf, Directeur de Recherche, IRD-INSERM),
    « La fabrique de la recherche : Les temps de l’anthropologie »

11h-11h15 : Pause

  • 11h15-12h : Sophie Chave-Dartoen (invitée CREDO, MCF à l'Université Bordeaux-2 Segalen, ADES),
    « La crise de 2005 à Wallis. Quand la 'modernité' est mise au service des logiques locales »

12h-14h : Pause déjeuner

14h : Reprise

  • 14h30-15h15 : Dana Diminescu (invité Centre Norbert Élias, Enseignant chercheur à l’École d’Ingénieur Télécom Paritech),
    « Double absence versus présences connectes. »
  • 15h15-16h : Richard Jacquemond (invité IDEMEC, Professeur, Université de Provence, IREMAM.),
    « Traduire la révolution égyptienne »

16h-16h30 : Emir Mahieddin (doctorant IDEMEC) : Conclusion

Résumés des interventions

Natacha Collomb (invitée IrASia), Chercheure associée à l'IrAsia.
« Usages et mésusages du temps dans la pratique anthropologique, lire ou relire Le temps et les autres. Comment l'anthropologie construit son objet » (J. Fabian, 2006, ed. Anacharsis, [première édition en anglais, 1983])
Résumé : Cette communication s’empare plus particulièrement de la moitié « divergence temporelle » de l’argumentaire du séminaire interlaboratoire. Elle évoque l’ouvrage, toujours mal connu en France, de Johannes Fabian, Le temps et les autres. Fabian y attaque en fait la construction de l’altérité. À travers une histoire critique minutieuse et érudite des usages du temps dans les écrits des anthropologues, il avance que L’Autre nait d’une mise à distance tout à fait discordante avec les conditions de l’enquête, ce qu’il appelle le « déni de co-temporalité ». Une discussion des thèses avancées par Fabian permettra de déplacer le débat engagé ici sur la temporalité : la temporalité en question étant moins celle des sociétés étudiées que celle à travers laquelle passe leur étude.

Laurent Vidal (invité CEMAF), Directeur de Recherche, IRD-INSERM.
« La fabrique de la recherche : Les temps de l’anthropologie »
Résumé : Je souhaiterais dans cette communication appliquer à la question du rapport de l’anthropologie aux temps de la recherche, la démarche suivante qui me parait essentielle : associer l’étude d’objets et le décryptage des processus qui sont mis en œuvre à cet effet. Autrement dit, analyser la fabrique de la recherche doit devenir partie intégrante de l’exercice anthropologique, elle n’en est pas un appendice. L’une nourrit fondamentalement l’autre. Ce que j’appelle alors une épistémologie appliquée sera illustrée en se penchant sur les différentes temporalités qui se conjuguent dans le travail de l’anthropologue : celles caractérisant le travail « de laboratoire » et celles marquant le « terrain ». Les premières relèvent de l’écriture, de la lecture, de la conception de la recherche, de la recherche de financement, ces deux derniers temps prenant une place croissante dans notre métier. Le « terrain » se trouve lui aussi redessiné, et j‘expliquerai, à partir d’une analyse de projets de recherche auxquels j’ai participé, le rôle que jouent à cet égard les contraintes qui pèsent sur le temps de la recherche. Ceci en distinguant trois situations archétypiques, selon la proximité revendiquée avec la « demande sociale » et avec les autres disciplines.
Fondées sur des recherches portant sur les questions de santé, dans des pays en développement, ces réflexions sur les temporalités de l’anthropologie dans ces contextes précis ont pour objectif, par extension, de penser les conditions de renouvellement de l’anthropologie : en effet, à travers cette question du rapport aux temporalités de notre discipline, s’expriment des interrogations sur la relation à l’action, aux autres disciplines, au terrain et, plus généralement, sur la « scientificité » de nos démarches.

 Sophie Chave-Dartoen (invitée CREDO), MCF à l'Université Bordeaux-2 Segalen, ADES (Aménagement, Développement, Environnement, Santé et Sociétés, UMR-CNRS 5185).
« La crise de 2005 à Wallis. Quand la 'modernité' est mise au service des logiques locales »
Résumé : Les événements qui ont accompagné, à Wallis, la mort du roi Tomasi Kulimoetoke et l’investiture de l’actuel souverain s’inscrivent dans un temps social dont la dimension cosmique est de nos jours exprimée, comme pour toute royauté divine en contexte chrétien,  en termes de bénédiction divine et d’engagement religieux. Les logiques organisant ce temps social préexistaient à l’évangélisation de l’archipel, réglant le devenir des hommes et de leur société sur celui des déités et des ancêtres médiateurs.
Si l’action des missionnaires catholiques s’est coulée dans des logiques anciennes bien comprises et retravaillées dans la durée, il n’en fut pas de même avec les institutions républicaines françaises, dont les valeurs, les modes d’actions et les temporalités entrent bien souvent en confrontation avec ce que les Wallisiens appellent les manières de faire du pays. En 2005 pourtant, une partie de la population suivait quelques « rénovateurs » défendant ces valeurs, ces modes d’actions et ces temporalités au point de générer une crise très grave.
Cette communication vise à montrer que, contrairement aux apparences, la contestation vise moins à remplacer des logiques anciennes par de nouvelles logiques qu’à instrumentaliser ces dernières pour mieux conforter les premières, tout en modifiant leur portée.

Dana Diminescu (invitée Centre Norbert Élias), Enseignant chercheur à l’École d’Ingénieur Télécom Paritech. Directrice scientifique de TIC-Migrations programme de recherche thématique de la FMSH
« Double absence versus présences connectes. »
Résumé : « Qu’elle relève d’une problématique définie en termes de territoire, d’identité culturelle ou d’intégration sociale et institutionnelle, la définition du migrant réfère à, et se concentre sur une série de ruptures et d’oppositions inhérentes à son destin et qui sont constamment mises en avant comme un principe organisateur de toute une réflexion théorique sur les populations en mouvement : Mobile/immobile, ni là bas/ni ici, absent/présent, au centre/à la marge, etc. Or, il nous semble que cette manière de concevoir les déplacements des personnes est une simplification historiquement et sociologiquement abusive. Ces concepts tiennent difficilement dans un monde atteint par une mobilité généralisée et par une complexification sans précédent de la communication. La fracture générique entre migrant, étranger, immigrant, nomade et même sédentaire tend à s’estomper. » Article de Dana Diminescu, publié dans la revue Migrations/Société, vol. 17, n° 102, pp. 275-292

Richard Jacquemond (invité IDEMEC), Professeur, Université de Provence, IREMAM.
« Traduire la révolution égyptienne »
Résumé : J'envisage la question de la traduction non seulement dans son sens courant de transfert d'un message d'une langue à l'autre, mais aussi dans le sens plus général de la circulation des représentations entre des espaces sociaux différents. Dans ce sens, je propose de réfléchir sur la manière dont la révolution égyptienne a été "traduite", c'est-à-dire représentée à l'extérieur. Cela suppose au préalable une analyse de la manière dont elle s'est elle-même représentée, sous l'effet notamment de la révolution antérieurement survenue en Tunisie. D'où un questionnement sur les métaphores dominantes dans le discours médiatique: "contagion", "printemps arabe", "Facebook revolution". On peut aussi s'interroger sur la résurgence de la catégorie du "peuple", évacuée par la science politique. Que signifie au juste le slogan "Al-Sha3b yurid isqat an-nizâm"? Au delà des mots, les écarts entres représentations internes et externes sont frappants. La représentation dominante en Egypte, après le 28 janvier au moins, a été unanimiste : la place Tahrir, métaphore du pays entier, parlant d'une seule voix et agissant comme un seul homme. A l'étranger, la révolution égyptienne a été traduite et réappropriée par divers acteurs en fonction de leurs référents et intérêts spécifiques. Les médias, anglo-saxons notamment, ont fait prévaloir ce qu'Antoine Berman appelait une "traduction ethnocentrique" qui a construit l'image d'une jeunesse égyptienne identique à ses pairs d'Europe et d'Amérique du Nord (Wael Ghonim, personnalité de l'année pour le magazine Time), image inversée du "barbu" et du "terroriste". Cette représentation ethnocentrique s'est d'autant mieux imposée que ses producteurs étaient éloignés du théâtre des opérations: aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne bien plus qu'en France et dans l'Europe du Sud en général où les pouvoirs en place agitaient la peur d'une vague d'immigration massive, et bien sûr qu'en Israël, où c'est une représentation inversée qui prévalait. On pourra soumettre au même type d'analyse le moment actuel, celui des élections remportées par les partis "islamistes" en Tunisie et en Egypte.

Notes

[1] De T. Jefferson, « Une petite rébellion de temps en temps, c'est comme un orage qui purifie l'atmosphère ».

Locais

  • 3 Place Victor Hugo (Campus de Marseille Saint-Charles, Amphithêatre de Chimie)
    Marselha, França

Datas

  • sexta, 27 de janeiro de 2012

Contactos

  • Luc Benaiche
    courriel : luc [dot] benaiche [at] gmail [dot] com

Fonte da informação

  • Luc Benaiche
    courriel : luc [dot] benaiche [at] gmail [dot] com

Licença

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Para citar este anúncio

« « Une petite rébellion de temps en temps » : divergences temporelles et drames sociaux », Seminário, Calenda, Publicado sexta, 20 de janeiro de 2012, https://doi.org/10.58079/k1b

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