Home« Métro, boulot, dodo », quoi de neuf dans nos routines ?
Published on Friday, April 19, 2013
Abstract
Ce colloque porte sur les enjeux spatio-temporels des routines de la mobilité quotidienne. Derrière le terme péjoratif de « routine », relativement peu abordé dans les recherches en sciences sociales, se cache une dimension potentiellement structurante dans les arbitrages individuels quotidiens de la mobilité et des programmes d'activités. Ainsi, il s'agit d'interroger l'émergence, la nature et l'évolution des déplacements routiniers. Ce colloque est envisagé comme une rencontre interdisciplinaire visant à faire dialoguer sociologues, géographes, démographes, psychologues, économistes, aménageurs, urbanistes et ingénieurs des transports en présence d'acteurs encharge des territoires et de la mise en oeuvre de la politique publique.
Announcement
Le groupe de travail n°23 « Mobilités spatiales et fluidité sociale » de l'Association internationale des sociologues de langue française (AISLF) tiendra son XIIIe colloque international les 26 et 27 mars 2014 à Lille, France. Le comité d'organisation est assuré par le CEREMA (CETE Nord-Picardie) dansle cadre de l'Équipe de Recherche Associée à l'IFSTTAR (DEST)« Connaissance et analyse croisée des mobilités ».
Argumentaire
Ce colloque porte sur les enjeux spatio-temporels des routines de la mobilité quotidienne. Derrière le terme péjoratif de "routine", relativement peu abordé dans les recherches en sciences sociales, se cache une dimension potentiellement structurante dans les arbitrages individuels quotidiens de la mobilité et des programmes d'activités. Ainsi, il s'agit d'interroger l'émergence, la nature et l'évolution des déplacements routiniers. L'organisation de ce colloque répond à l'urgence d'un dialogue entre les différentes approches disciplinaires d'une part (de la plus strictement sociologique à celles qui convoquent aussi la psychologie, l'économie, la géographie, l'urbanisme ou l'anthropologie), entre les différentes sources de données d'autre part (enquêtes transports-déplacements, enquêtes emploi du temps, enquêtes par carnet de déplacements, enquêtes censitaires, enquêtes qualitatives... ) pour produire une analyse sociale et spatiale des comportements de déplacements routiniers. L'objectif est de mettre en présence et de faire dialoguer des chercheurs qui s'efforcent, chacun à sa manière, d'explorer nos « sentiers du quotidien » (JUAN, 1997). Le contexte est marqué par un vaste mouvement de recomposition de nos mobilités et de nos modes de vie (GAY, KAUFMANN, LANDRIÈVE, VINCENT-GESLIN, 2011). Entre contraintes (risques environnementaux, crise économique et énergétique ...) et opportunités (développement des technologies de l’information et de la communication), la mobilité fait figure de paradigme porteur d’innovations et de changements dans les usages, les rapports au temps, à l’espace et au corps (AMAR, 2010). Dans ce contexte, il est nécessaire de réinterroger le « métro – boulot – dodo » pour se demander ce que deviennent nos routines de mobilité : sous quelles formes existent-elles encore et par quoi ont-elles été remplacées sinon ?
Giddens la place au coeur de sa théorie de la structuration (GIDDENS, 1987) ; la routine est à la fois facteur de maintien de la personnalité de l'individu qui se déplace sur des chemins balisés et facteur de stabilité des institutions sociales dont la fonction dépend de leur capacité à se reproduire continuellement. Indispensables réductrices de charge mentale, les routines sont potentiellement génératrices d'inertie, notamment dans le choix modal, les itinéraires empruntés ou les activités programmées. Les routines permettent une « délégation du choix » en un « dispositif de promesse » (KARPIK, 1998) puisqu’elles offrent la garantie d'atteindre un résultat, un but ou une destination dans des conditions prévisibles (affluence, niveau de confort, opportunités de rencontres... ). Les routines de déplacement, plus particulièrement, répondent à une construction sociale et historique du rapport à l’espace de la personne. Elles révèlent un principe plus général de « replacement » (RAMADIER, 2011) en lien avec la familiarité cognitive (lisibilité) des lieux qui participe de l'accessibilité. Si les mobilités occasionnelles comme les vacances, tous les ans dans le même lieu de villégiature, renvoient aussi à une pratique routinière, ce colloque se concentre sur les routines qui concernent la mobilité spatiale des personnes à l’échelle du quotidien.
Aussi confortable et rassurante soit-elle, la régularité des rythmes quotidiens comporte des césures, des ruptures, des impossibilités. Certaines sont fortuites, d'autres sont recherchées. Certaines sont objectives et quantifiables (retard, événement impromptu... ), d'autres sont plus subjectives et impalpables, témoignant de représentations individuelles ou d'impensés. Si les routines peuvent être analysées comme des dispositifs profondément conservateurs, leurs transformations sont fondatrices ou annonciatrices d'évolutions potentiellement radicales des comportements de déplacement quotidien (choix d'itinéraire, choix modal...). Plus particulièrement, on peut s'interroger sur le rôle des ruptures biographiques qui peuvent apparaître comme un moment clé de la recomposition des habitudes modales ou sonner le glas de toute forme de régularité : certains« altermobilistes », par exemple, optent pour un système flexible dans lequel les usages peuvent évoluer d'un jour sur l'autre et s’éloigner de toute« systématicité » (VINCENT, 2010).
Les questions abordées dans ce colloque se concentrent sur la nature des routines, leur évolution et les enjeux associés. Si l’on sait que certaines activités (travail, étude... ) produisent de la routine plus que d'autres, dispose-tonde connaissances plus approfondies sur ce lien entre mobilités et activités replacé dans la perspective des routines individuelles et sociales qui en découlent ? Les routines évoluent-elles uniformément dans tous les groupes sociaux ? Pourquoi et comment résistent-elles à certains bouleversements de notre quotidien ? Quelles sont celles qui dépendent des évolutions technologiques et celles qui sont dépendantes de l’évolution de nos attentes et de nos contraintes de la vie quotidienne ?
On peut également se demander si les routines spatiales et temporelles de mobilité peuvent évoluer quand bien même les enjeux qui y sont associés (coût, temps passé, activités pratiquées, familiarité des lieux, sentiment de sécurité... )restent en l’état. Qui s'aventure à faire évoluer la stabilité des mobilités routinières ? Comment et pourquoi faire évoluer ses repères du quotidien ? Cette ouverture à d'autres opportunités de déplacement constitue-t-elle une posture valorisée, contrainte, crainte ? Dans quelle mesure les différences de routines ne produisent-elles pas du classement – et corrélativement du déclassement – autant que les pratiques modales ? Dans quelles mesures sont elles héritées de pratiques familiales antérieures ?
Trois axes de travail sont proposés pour orienter les contributions attendues :
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Vers de nouvelles pérégrinations routinières ?
La routine dérivée des activités
Ce premier débat propose d'observer les routines dans le cadre spatio-temporelles programmes d'activités qui les produisent ; car pour les comprendre, il faut d’abord montrer où sont les routines et où elles ne sont pas. Comment l’analysée programmes d'activités alimente-t-elle une réflexion sur les routines ? On s'intéressera, notamment, à la question périurbaine et aux tendances à faire de la mobilité un palliatif de l’éparpillement spatial des activités de l'individu. Le prix à payer est souvent une augmentation des distances parcourues quotidiennement (et parfois des temps), ce qui interroge sur les arbitrages que doivent effectuer les ménages. Dépassant la routine linéaire domicile-travail, assiste-t-on à des « pérégrinations » routinières (WIEL, ROLLIER, 1993) ? Celles-ci interviennent-elles comme un élément d’ajustement de plus en plus important au fur et à mesure que le nombre d’activités augmente ? Comment les ménages coopèrent-ils pour s’accommoder des distances parcourir ? Parvient-on mieux à rendre compte de la complémentarité ou de l’incompatibilité des programmes d'activités ainsi que des négociations interindividuelles que l'harmonisation suppose au sein de la famille ? La mise en place de routines négociées implique des inerties dans les choix de mobilité. Dans quelles mesures les routines apparaissent-elles comme des freins au report modal recherché par les pouvoirs publics ? Comment les politiques de transport peuvent-elles agir sur les comportements pour tenter de casser le« réflexe automobile » alors qu’elles investissent massivement dans des modes de transport alternatifs ? L’enjeu est de taille puisque l’étalement urbain et l’éclatement fonctionnel (des résidences comme des bassins d'emploi) font peser sur les déplacements routiniers une lourde responsabilité tant environnementale, économique que sociale.
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Enrichir le temps des routines ?
La routine comme activité
Ce deuxième débat porte sur le contenu des déplacements routiniers. Dans les transports, les sociabilités créées et maintenues produisent parfois des formes mobiles de territoires. L'enjeu est de mieux appréhender l'épaisseur des routines dans les mobilités quotidiennes et leur utilité propre. La conception du déplacement comme le seul produit de demandes dérivées, pourtant l'un des principaux postulats en socio-économie des transports, est contestée. Sociologues et psychologues montrent que les déplacements peuvent avoir en sus une utilité intrinsèque, justifiant qu'on y consacre du temps. Et en l’occurrence, la routine, parce qu'elle réduit la charge mentale, confère à l’individu mobile des capacités d'enrichissement du temps de déplacement qui n’obère en rien la promesse d'arriver à destination. En quoi l'observation de l’utilité « primaire » des déplacements routiniers peut permettre une meilleure connaissance des arbitrages quotidiens de mobilité : choix modal, détours, rythmes... ? À quelles conditions l'individu parvient-il à « enrichir son usage du temps en valorisant le temps de transport » (CROZET, 2011) ? Cet axe porte à la fois sur le potentiel des individus à optimiser leurs routines et sur le potentiel des lieux et noeuds du transport à offrir des opportunités d’activités. Dans quelle mesure, par exemple, le passage dans un pôle d’échanges peut-il constituer un atout dans la chaîne de déplacements et donner une utilité propre à la pratique d’une intermodalité routinière généralement perçue comme une contrainte ?
Anticiper et planifier les routines ?
Des activités dérivées de la routine Ce troisième débat n’envisage plus la mobilité quotidienne comme un palliatif de l’éloignement des activités, mais comme un facteur structurant de leur organisation. Cette perspective permet d'appréhender les dé-construction et reconstruction des routines selon un registre individuel ou collectif : le registre individuel vient souligner le rôle des ruptures biographiques dans l'évolution des routines et dans l'émergence d'une mobilité plus "apprivoisée". Lorsqu'une rupture impose de les faire évoluer, se contente-t-on de reproduire nos routines aussi fidèlement que possible ou les recompose-t-on au gré des leçons tirées des précédentes ? Est-ce que les individus ou les ménages cherchent anticiper la recomposition de leurs pratiques routinières ? À quels moments (par exemple, lors d'un choix de localisation résidentielle) et dans quelles conditions ? Le registre collectif renvoie aux différentes politiques publiques de mobilité, d’aménagement ou de gestion des temps. Les "ruptures" dans la conception des politiques publiques (liées notamment au développement des préoccupations environnementales) vont-elles dans le sens d’une reconfiguration des routines reposant sur une organisation des activités moins dépendante d'une consommation excessive de mobilité ? Les diverses expériences récentes et innovantes dans l'aménagement (concept de ville intense basé sur une mixité fonctionnelle), dans la gestion des temps urbains (politique de synchronisation des temps individuels et des temps sociaux qui s'interpénètrent de plus en plus),dans le management de la mobilité (futures Autorités Organisatrices de Mobilités Durables) ou dans l'organisation du travail (télétravail, développement des espaces de co-working) méritent d'être analysées et évaluées dans cette perspective. L'action publique peut-elle et doit-elle inciter à d'autres formes de planification des activités en vue de faire évoluer les routines dans le sens d'une mobilité plus "durable" ?
- Ce colloque s’adresse aux chercheurs en sciences humaines et sociales, et notamment aux doctorants et jeunes chercheurs, dont les travaux visent à éclairer les enjeux des déplacements routiniers.
- Un regard approfondi sur les méthodes qualitatives et quantitatives permettant d'observer les routines de mobilité, d'analyser leurs contenu sou de comprendre leurs (dé-/ré-) constructions est vivement attendu.
- Les travaux dont les perspectives stimulent l'action des collectivités locales ou peuvent trouver une traduction en termes de politiques publiques trouveront un écho particulièrement favorable.
Modalités de soumission
Les propositions de communication sont à soumettre
avant le 26 juillet 2013
sous forme de résumé (format .docx, .doc, .odt) via le site du CETE Nord-Picardie rubrique Conférences et journées techniques ou lien suivant : http://www.cete-nord-picardie.developpement-durable.gouv.fr/colloque-msfs-2014-r178.html
La taille des résumés est limitée à 6.000 signes ou caractères (espaces compris).
Les propositions doivent comporter un titre, des mots-clés (3 à 5), nom, prénom, fonction, affiliation et courriel du ou des auteur-e-s.
Les propositions de communication seront évaluées et sélectionnées par le comité scientifique en double aveugle.
En cas d'acceptation, un texte long (10 à 12 pages) est impérativement attendu pour le 28 février 2014.
Calendrier
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26 juillet 2013 : Date limite d'envoi des propositions de communication
- Décembre 2013 : Information aux auteurs des avis du comité scientifique
- Janvier 2014 : Ouverture des inscriptions au colloque (attention, le nombre de places disponibles est strictement limité à 100 personnes)
- 28 février 2014 : Date limite d'envoi des textes longs des communications (10 à- 12 pages) pour figurer dans les actes du colloque
- 26 et 27 mars 2014 : Déroulement du colloque. Un numéro spécial de la revue Espace, Populations, Sociétés est envisagé pour publier les actes du colloque.
Comité scientifique
- Leslie BELTON-CHEVALIER, IFSTTAR / DEST, Marne-la-Vallée, France.
- Alexandra BIDET, CNRS / Centre Maurice Halbwachs, Paris, France.
- Samuel CARPENTIER, CNRS-ESPACE / Aix-Marseille Université, France.
- Elodie CASTEX, Université Lille I / TVES, France.
- Alexis CONESA, CNRS-LIVE / Université de Strasbourg, France.
- Eric CORNELIS, Université de Namur, Belgique.
- Josette DEBROUX, MEPS- Centre Max Weber / Université Lyon 2, France.
- Sandrine DEPEAU, CNRS-ESO / Université Rennes 2, France.
- Thierry EGGERICKX, FNRS / Université Catholique de Louvain, Belgique.
- Christophe ENAUX, CNRS-LIVE / Université de Strasbourg, France.
- Philippe GERBER, CEPS / INSTEAD, Luxembourg.
- Tristan GUILLOUX, CERTU-Département Déplacements Durables, Lyon, France.
- Frédéric HÉRAN, CNRS-Clersé / Université Lille I, France.
- Vincent KAUFMANN, EPFL, Lausanne, Suisse.
- Olivier KLEIN, ENTPE/ LET, Lyon, France.
- Jean-Loup MADRE, IFSTTAR / DEST, Marne-la-Vallée, France.
- Denis MARTOUZET, Université de Tours / CITERES, Tours, France.
- Philippe MENERAULT, Université Lille I / TVES, France.
- Catherine MORENCY, École Polytechnique de Montréal, Québec, Canada.
- Nathalie ORTAR, ENTPE/ LET, Lyon, France.
- Francis PAPON, IFSTTAR / DEST, Marne-la-Vallée, France.
- Thierry RAMADIER, CNRS-SAGE / Université Strasbourg, France.
- Kamila TABAKA, CNRS-PACTE / Institut d'Urbanisme de Grenoble UPMF, France.
- Joël ZAFFRAN, CNRS-Centre Emile-Durkheim / Université de Bordeaux, France.
Subjects
- Sociology (Main category)
- Society > Ethnology, anthropology > Social anthropology
- Society > Geography > Urban geography
- Mind and language > Psyche > Psychology
- Society > Urban studies
- Society > Sociology > Urban sociology
Places
- 2 rue de Bruxelles
Lille, France (59)
Date(s)
- Friday, July 26, 2013
Attached files
Keywords
- mobilités, routines, déplacements quotidiens, activités
Contact(s)
- Joël Meissonnier
courriel : joel [dot] meissonnier [at] cerema [dot] fr
Reference Urls
Information source
- Joël Meissonnier
courriel : joel [dot] meissonnier [at] cerema [dot] fr
License
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To cite this announcement
« « Métro, boulot, dodo », quoi de neuf dans nos routines ? », Call for papers, Calenda, Published on Friday, April 19, 2013, https://doi.org/10.58079/nbm