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Orders and law

Des ordres et du droit

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Published on Tuesday, May 28, 2013

Abstract

L’analyse de Max Weber relative à la formation de l’État moderne montre que la monopolisation de la contrainte légitime n’a pu se produire que par le dépassement d’autres communautés ou formes sociales. Mais si le droit de l’État moderne tend à s’imposer aux autres ordres (famille, religion, corporations, etc.), ceux-ci n’ont pas pour autant disparu. Ils revendiquent des logiques propres et semblent par là défier les prétentions de l’ordre juridique à les dépasser. L’analyse des rapports entre les grands principes du droit de l’État et ceux des autres ordres, entre l’individualisme libéral et la logique des communautés – qui ne saurait se réduire au phénomène dénoncé habituellement sous le terme de « communautarisme » –, entre le volontarisme juridique et la défense d’un ordre social ou naturel (ou prétendu tel) sera au cœur des préoccupations de cette journée d’étude.

Announcement

Argumentaire

L’analyse de Max Weber relative à la formation de l’État moderne montre que la monopolisation de la contrainte légitime n’a pu se produire que par le dépassement d’autres communautés ou formes sociales. Mais si le droit de l’État moderne tend à s’imposer aux autres ordres, ceux-ci n’ont pas pour autant disparu. La famille, la religion, le marché économique, les corporations professionnelles, les institutions disciplinaires, les groupes socio-professionnels, les agences, etc. impliquent autant de façons de réguler les comportements et peuvent être apparentés à de tels « ordres » ; ils revendiquent des logiques propres et semblent par là défier les prétentions de l’ordre juridique à les dépasser. L’analyse des rapports entre les grands principes du droit de l’État et ceux des autres ordres, entre l’individualisme libéral et la logique des communautés – qui ne saurait se réduire au phénomène dénoncé habituellement sous le terme de « communautarisme » –, entre le volontarisme juridique et la défense d’un ordre social ou naturel (ou prétendu tel) est au cœur des préoccupations de cette journée d’étude, conçue selon deux axes.

  • Un premier axe consiste à interroger la notion d’ordre juridique au regard des autres ordres existants.

Quels peuvent être ces ordres ou ces institutions, corporations, groupes, organismes et comment penser le droit comme un ordre parmi d’autres ?

Il s’agira de s’intéresser à l’ordre juridique et à ses influences croisées avec d’autres types d’ordres ou d’institutions, ou aux phénomènes d’importation des concepts. Ainsi, il n'est pas rare de voir le droit assimilé à l’ordre familial : par une délégation de puissance, le « bon père de famille » en droit civil serait à l’image du chef d’État. Le lien entre l’ordre juridique et l’ordre religieux a pu être affirmé : pour Carl Schmitt, les concepts juridiques sont des concepts théologiques sécularisés – le « pouvoir constituant originaire » serait ainsi la traduction du « miracle » en théologie. De quelle manière l’ordre juridique est-il l’héritier d’autres ordres qui l’auraient précédé ou qu’il aurait intégrés ?

Le détour par les théories institutionnelles du droit présentées par Maurice Hauriou et Santi Romano peut permettre de mieux éclairer la définition de l’ordre ou de l’institution, mus par une « idée d’œuvre », une « logique de justice » oude nouveaux « modes d’agir ». Ainsi, le couple juridique/non juridique (ou valide/non valide), qui se trouve au cœur de l’évaluation des actes du droit, pourrait être mis en parallèle avec l’opposition entre bien et mal ou juste et injuste pour la morale ou la religion, ou entre concurrentiel et non concurrentiel pour les acteurs économiques intervenant sur un marché ; on songerait encore à l’opposition entre efficace et non efficace dans le milieu professionnel, et biologique et non biologique en matière de filiation, etc.

Un second axe entend traiter du droit dans ses rapports avec les autres ordres.

L’ordre juridique semble orienté dans deux directions contradictoires : la première vise à  préserver les institutions préexistantes et à leur reconnaître une logique propre, y compris un mode autonome de régulation, quel que soit leur ancrage. La seconde veut à l’inverse les dépasser et contrarier ces logiques au nom du droit. De ce point de vue, le droit est en tension avec les autres ordres.

Si le droit tend globalement à préserver l’autonomie de certains ordres, ainsi qu’en témoigne l’importance des juridictions spécialisées comme le Conseil de l’ordre des médecins et des avocats, le Conseil Supérieur de la Magistrature (objet d’un projet de révision constitutionnelle récemment présentée en Conseil des Ministres) ou les fédérations sportives, certaines évolutions récentes témoignent d’un mouvement inverse. Le droit saisit désormais une matière juridique qui auparavant lui échappait, notamment dans les institutions qui nécessitent une discipline particulière telles que les prisons, les casernes ou les écoles. Sous l’impulsion de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, la réduction des mesures d’ordre intérieur ou le développement du contrôle du juge vers le contrôle de proportionnalité traduisent une plus forte prise en compte des droits de l’individu contre une certaine logique institutionnelle ; on pourrait à ce propos s’interroger sur l’éventuel parallélisme entre le rapprochement des ordres juridiques nationaux et l’absorption par le droit étatique de ces « autres » ordres.

Le juridique est continuellement en tension avec d’autres valeurs. La logique propre aux relations de travail est distincte de celle qui prévaut dans l’ordre familial, celle propre aux relations à l’intérieur d’une prison se distingue de celle prévalant entre médecin et patient, comme l’appréhension d’un crime international l’est d’un crime ordinaire. Chaque ordre relèverait-il de la compétence d’une juridiction particulière ? Dans ce cadre, les comportements sont évalués à l’aune de références spécifiques et les juges dissocient parfois chaque ordre spécifique des exigences du système juridique dans son ensemble. Autre exemple, les différentes conceptions de la séparation de la religion et de l’État, et en particulier la version française de la laïcité, assurent selon des modalités variables la prévalence de la neutralité sur la préférence accordée à tel ou tel culte. Pourtant, les cas de religion d’État ou la récente validation par le Conseil constitutionnel du régime concordataire de l’Alsace-Moselle nous conduisent à interroger à nouveau le principe de la neutralité de l’État vis-à-vis du religieux.

En outre, si l’État reconnaît ou valide des logiques contraires à la sienne au sein de certains ordres, la question porte également sur les champs laissés délibérément ouverts à d’autres ordres par le droit. Il conviendra d’étudier les types d’arguments utilisés pour préserver une institution ou un ordre particulier contre la logique proprement juridique. L’argument du « naturel » – comme l’invocation d’une loi du marché économique ou d’une loi naturelle en matière de filiation – repose sur l’idée d’un ordonnancement per se auquel l’ordre juridique devrait se soumettre sans le dénaturer. Dans le même sens, mais sous couvert d’une idéologie différente, les arguments du «social », du « culturel », de « l’universel » ou du « traditionnel » permettent de défendre des mécanismes de régulation des comportements. À chaque fois, l’argument de l’« ordre existant » doté d’une logique spécifique défie les prétentions du volontarisme juridique à s’en affranchir. La problématique du droit en ordres devient celle des limites de l’ordre étatique et des potentiels conflits qui s’y jouent.

On pourrait même être tenté de renverser la perspective : l'ordre juridique lui-même est-il autre chose, malgré ses prétentions au pluralisme, qu'un ordre parmi d'autres, marqué par une logique propre mais nullement universelle, pas plus en tout cas que la logique présidant à chacun de ces autres ordres présentés comme des lieux de résistance ?

Cette journée d’études a ainsi pour but d’interroger les processus à l’œuvre dans la composition et la recomposition des ordres du droit et de ses confins, qu’il s’agisse de leur tensions respectives comme de leurs imbrications les plus récentes, au travers du paradigme de la « constitutionnalisation », des rapports de systèmes comme des institutions inter- ou extra-étatique.

Conditions de soumission

Les jeunes chercheurs (doctorants, docteurs, chargés de recherche et maîtres de conférences) qui désirent participer à la journée d’études doivent présenter leur proposition de communication

au plus tard le 15 juillet 2013.

Celle-ci ne devra pas dépasser 5000 signes.

Elle sera idéalement accompagnée d’une brève présentation de son auteur (diplôme(s), statut et éventuelles publications).

Les propositions seront recueillies à l’adresse suivante : journee.ctad@gmail.com.

La liste des communications retenues sera envoyée avant la fin du mois d’août.

La journée d’étude jeunes chercheurs est organisée par le Centre de théorie et d’analyse du droit de l’Université Paris Ouest Nanterre la Défense le jeudi 14 novembre 2013.

La journée fera l’objet d’une publication. Une première version de la communication devra, à cet effet, être envoyée avant le 30 octobre 2013.

Après la journée d’études, la version finale sera relue par un comité scientifique spécialement constitué.

Comité d’organisation

  • Manon Altwegg-Boussac,
  • Antoine Basset,
  • Eleonora Bottini,
  • Marie-Xavière Catto,
  • Keziban Kilic,
  • Jeremy Mercier,
  • Guillaume Richard,
  • Lionel Zevounou

Places

  • Université Paris Ouest Nanterre La Défense - 200 avenue de la République
    Nanterre, France (92)

Date(s)

  • Monday, July 15, 2013

Keywords

  • droit, relations entre ordres, communautés, État, autonomie

Contact(s)

  • Guillaume Richard
    courriel : guillaume [dot] richard [at] u-paris [dot] fr

Information source

  • Guillaume Richard
    courriel : guillaume [dot] richard [at] u-paris [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« Orders and law », Call for papers, Calenda, Published on Tuesday, May 28, 2013, https://doi.org/10.58079/nnv

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