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Histoire de la clandestinité

Concept, pratiques, usages politiques

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Publié le mercredi 20 mai 2015

Résumé

Se cacher pour résister : la journée d'études doctorales du Centre de recherches historiques de l'Université Paris 8 qui se tiendra le 12 octobre 2015 interroge le passage à la clandestinité comme conséquence d'une résistance à l'autorité à travers les âges. Qu'est-ce qui rapproche ou sépare les pratiques de clandestinité dans l'Antiquité et les formes contemporaines de lutte clandestine ? Comment les contemporains parlent-ils des pratiques clandestines, des résistants qui choisissent l'illégalité de manière durable ? Comment la clandestinité donne-t-elle lieu à des formes originales de luttes et d'organisation ? Quels sont les discours de revendication qui justifient le passage hors de la légalité ? Enfin, comment une société peut-elle se recomposer après une division politique et idéologique totale comme l'est l'expérience de la lutte armée clandestine ?

Annonce

Argumentaire

Se cacher pour résister. Que ce soit pour préserver des pratiques religieuses interdites ou pour former une opposition politique, le passage à la clandestinité apparaît comme la conséquence d'une résistance à l'autorité, et donc un choix individuel et collectif radical.

Par clandestinité, nous entendons le fait d'entrer dans l'illégalité et de s'y maintenir – en cela, elle implique une durée qui la distingue du simple acte illégal – que cette entrée se fasse volontairement ou sous la contrainte1. Elle suppose une dissimulation et une certaine forme de marginalité. La clandestinité est aussi lutte contre un pouvoir qui tend à réprimer ou persécuter ceux qui lui résistent. On doit cependant la distinguer de la guerre civile, car la clandestinité suppose un combat asymétrique entre une organisation aux moyens limités et un pouvoir qui lui est théoriquement supérieur.

Pendant des siècles, le refuge dans la clandestinité apparaît comme un moyen de se protéger des persécutions, en particulier religieuses (des premiers chrétiens aux protestants). Mais les actes clandestins sont aussi un moyen de contourner la censure (que l'on songe aux éditeurs, passeurs ou lecteurs de livres interdits, par exemple2), s'affirmant dans les périodes moderne et contemporaine comme le terme d'un processus de lutte politique rejetant ouvertement la légitimité de l’État.

Mais la clandestinité implique aussi des zones grises, car tous ses acteurs ne sont pas toujours clandestins et certains de ceux qui y concourent – en apportant une aide logistique, un soutien moral – ne sont pas à proprement parler des clandestins. Semblent ainsi émerger plusieurs degrés de clandestinité, depuis les acteurs perpétuellement cachés à ceux qui, insérés dans la société, se contentent de soutenir certaines actions.

En conséquence, se pose la question des relations entre les clandestins et la société dans laquelle ils évoluent, celle-ci pouvant être un appui ou un obstacle au développement du mouvement clandestin : climat de délation ou, au contraire, de soutien, permettant, selon la célèbre formule de Mao, au révolutionnaire d'être « dans le peuple comme un poisson dans l'eau ».

Le rapport de la lutte clandestine avec la violence et son lien avec les différentes cultures politiques, sur un temps long, apparaît une perspective stimulante et rarement abordée en tant que telle, tant en histoire que dans les autres sciences sociales3. Nous avons ainsi choisi d'étudier cette question sur une période très large afin d'interroger la pertinence d'un concept, il est vrai, essentiellement utilisé par l'histoire contemporaine4 mais qui semble pouvoir trouver des prolongements intéressants dans d'autres périodes.

Axes de recherche

  • Le concept de clandestinité dans un sens politique : est-il pertinent de parler de « clandestinité » à travers les âges, et comment définit-on dans les différentes périodes et dans les différents espaces ceux qui choisissent cette voie ? Qui en parle et avec quels mots ? Qu'est-ce qui rapproche ou sépare les pratiques de clandestinité dans l'Antiquité et les formes contemporaines de lutte clandestine ?

Existe-t-il une différence fondamentale entre la lutte clandestine contre une tyrannie et celles qui naissent en contexte démocratique ? La lutte clandestine prend-elle un caractère plus massif lorsqu'elle s'oppose à un État dans lequel les libertés politiques sont réduites, voire supprimées ? Par ailleurs, en démocratie, cadre théoriquement pacifié et voué à éviter toute violence par une résolution majoritaire des conflits, comment s’accommode-t-elle de l'apparent paradoxe que constitue la sortie de la légalité ?

  • Les pratiques : qu'est-ce qu'être clandestin et comment le devient-on ? Comment la clandestinité donne-t-elle lieu à des formes originales de luttes et d'organisation – réseaux, sociétés secrètes, conjurations ? Mais être clandestin, est-ce nécessairement se rattacher à une organisation et faire usage de la violence ?

Peut-on parler de « clandestinité partielle » à partir du moment où un individu s'investit dans des activités illicites dans une optique de résistance politique, tout en continuant par ailleurs à intervenir à visage découvert dans la vie publique ?

  • Les discours clandestins : quand la clandestinité est un acte politique, elle s'accompagne nécessairement d'un discours construit. Quels sont les références, les discours qui justifient le passage hors de la légalité ? Ce choix, nécessairement radical, produit une série de justifications théoriques : on n'entre pas en résistance sans références au passé, afin de construire une légitimité au combat. Celui-ci est en général revendiqué au nom d'un intérêt supérieur (la vraie religion, la démocratie, la Nation...), dans un combat symbolique de (dé)légitimation.

Par ailleurs, la clandestinité fait l'objet d'un discours, de la part du pouvoir, dont l'étude s'inscrit dans l'analyse des représentations, des mythes – voire des phantasmes – politiques mobilisés. Cette interrogation rejoint la réflexion autour d'un « ennemi intérieur » caché et menaçant, dont la peur peut être une ressource politique fort utile pour les détenteurs de l'autorité, qui peuvent largement l'utiliser5.

  • La sortie de la clandestinité : comment retourner à la normalité après un parcours clandestin ? Comment une société peut-elle recomposer son passé après une division politique et idéologique totale comme l'est l'expérience de la lutte armée clandestine, souvent vécue comme une guerre civile ? Cette question implique, là aussi, une réflexion sur la mémoire et le poids du passé dans les sociétés.

Notes

1 Comme dans le cas de persécutions qui obligent un groupe à se cacher et donc à enfreindre la légalité.
2 Cf. la revue annuelle imprimée par les Presses Universitaires de la Sorbonne, La lettre clandestine, qui a pour objet la circulation des écrits clandestins des XVII et XVIIIème siècles, notamment dans la construction de la philosophie des Lumières.
3 Signalons un numéro de la Revue de l'histoire des religions : « Religion, secret et autorité. Pratiques textuelles et cultuelles en clandestinité », 2011.
4 Voir notamment Laurent Douzou, « L'entrée en résistance », Le mouvement social, n° 180, 1997, pp. 9-20.
5 Que l'on pense au discours des gouvernements démocrates-chrétiens italiens de l'après-guerre à propos de l'armée clandestine du parti communiste et de son supposé Piano K destiné à s'emparer du pouvoir.

Modalités de soumission

Nous invitons les doctorants et jeunes docteurs intéressés à envoyer leurs propositions aux organisateurs

avant le 15 juin 2015.

La durée des interventions est fixée à 25 minutes. Nous vous prions de noter que notre laboratoire ne pourra prendre en charge les frais de déplacement.

La journée d'études doctorales d'histoire aura lieu le 12 octobre 2015.

Comité d'organisation

  • Élodie CAPET (elodie.capet[at]yahoo.fr)
  • Virgile CIREFICE (virgile.cirefice[at]gmail.com)
  • Grégoire LE QUANG (glequang[at]gmail.com)
  • Charles RIONDET (charlesriondet[at]gmail.com)

Comité scientifique

  • Martin GRAVEL, maître de conférences, histoire médiévale.
  • Pierre KAPITANIAK, maître de conférences, études anglophones.
  • Marie-Anne MATARD-BONUCCI, professeure d'histoire contemporaine.
  • Claudia MOATTI, professeure d'histoire romaine.
  • Catherine SALIOU, professeure d'histoire romaine et directrice de l'EA 1571.

Lieux

  • Université Paris 8 2, rue de la Liberté
    Saint-Denis, France (93)

Dates

  • lundi 15 juin 2015

Mots-clés

  • clandestinité, résistance, hérétiques, sociétés secrètes, répression, lutte armée, violences politiques

Contacts

  • Grégoire Le Quang
    courriel : glequang [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Grégoire Le Quang
    courriel : glequang [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Histoire de la clandestinité », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 20 mai 2015, https://doi.org/10.58079/snh

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