Announcement
Argumentaire
L’objet de ce corpus est de questionner ensemble « rapports de genre » et « rapports au travail » dans un contexte où s’exacerbent, dans ces deux registres comme dans leurs intersections, les tensions entre les dynamiques d’émancipation et le renouvellement ou l’aggravation des logiques de domination. Le sens des processus d’engagement/désengagement du travail (professionnel) en est sans doute rendu plus énigmatique. Il mérite d’être décrypté de manière fine. Il ne s’agit donc pas de décrire, une nouvelle fois, les multiples inégalités et discriminations manifestant le poids des rapports sociaux de sexe, mais d’interroger la question de la centralité subjective du travail à partir d’une perspective genrée (1) ; de questionner, à partir de cette même perspective, le rapport au travail, par une exploration des résistances, des émancipations, des adaptations ou des accommodements aux contraintes du travail moderne (2) ; d’explorer de nouvelles pistes d’interprétation pour penser le rapport au travail (3).
1– Genre, rapport au travail et centralité du travail
Qu’attendent les hommes et les femmes du travail dans un contexte socio-économique particulièrement dégradé ? Et d’ailleurs, « qui » croit encore au travail émancipateur alors que le « travail moderne » semble de plus en plus dur, inhumain et individualisant, les salariés faisant souvent l’expérience du travail comme une épreuve solitaire ? Quels sont les impacts des dynamiques négatives du monde du travail – la précarité, les carrières/salaires bloqués, les atteintes au sens du travail, la casse des métiers, la dégradation des collectifs, les prescriptions impossibles, la multiplication d’instruments quantitatifs de contrôle du travail… – sur le rapport au travail des individus, hommes et femmes ? Entraînent-elles un rapport tendanciellement désabusé, désenchanté au travail, ou bien la position singulière des femmes dans les rapports de domination contribue-t-elle à alimenter chez elles des attentes et des espérances plus fortes (parce que l’enjeu du travail, pour elles, dépasse la seule sphère professionnelle et affecte l’ensemble du processus d’individuation) ? Comment se traduisent ces attentes ? Par une soumission ou une résignation plus forte (aux contraintes du monde du travail contemporain), ou par l’adoption d’autres pratiques à l’égard de son activité, de sa vie quotidienne, de sa consommation ? Dans ce dernier cas de figure, ces modes d’appropriation sont-ils porteurs de dynamiques émancipatrices ? Et si oui, en quel sens ? On s’interrogera également – généralement plutôt du côté des travailleurs masculins cette fois –, sur l’émergence de nouvelles formes d’engagement au travail, prenant parfois la forme de véritables innovations sociales et économiques (comme la création d’espaces professionnels innovants fondés sur le partage des savoirs, la mise en œuvre d’activités coopératives et gratuites, Lallement, 2015).
2– Résistances, émancipation au travail, et rapports sociaux de sexe
« Ne pas perdre sa vie à la gagner », ne pas s’engager sur le mode agonistique dans la compétition pour la promotion : cette logique peut concerner les hommes comme les femmes. On a pu observer ainsi des résistances chez les salariés des deux sexes relevant des professions intermédiaires, qui passent par le refus du passage-cadre signifiant à leurs yeux corvéabilité et soumission accrues, et « trahison » des collègues. Reste que les uns et les autres ne sont pas placés dans les mêmes conditions et ne mobilisent probablement pas, en tendance, les mêmes ressorts ni les mêmes ressources pour résister.
L’évocation du plaisir tiré de son activité, de la satisfaction à exercer un métier que l’on apprécie peut aussi émerger dans le cas des professionnels qui, pour progresser dans leur carrière, doivent renoncer à exercer leur « métier » d’origine. Résister à la promotion en ce cas n’a rien à voir avec les discours essentialisants sur la (supposée) moindre appétence des femmes pour le pouvoir et ne peut être davantage expliqué par le seul impact de la « double journée ». C’est du côté du rapport au travail, de sa centralité dans la vie des acteurs sociaux, mais aussi du côté d’un rapport à fois intime, « affectif » et collectif au travail, adossé à l’attachement à des normes de métier définissant le « beau » travail ainsi qu’au désir de posséder une « vraie » qualification, qu’il faut sans doute chercher les éléments d’interprétation de ce type de comportements « hors norme » (car non compétitif) aujourd’hui.
On se demandera donc si ces formes de résistance se retrouvent autant chez les hommes que chez les femmes ; et si tel est le cas, si elles déclinent de la même façon pour les femmes et les hommes. Dans une société où le modèle de « monsieur gagne-pain » est encore très fort, comment les professionnels masculins peuvent-ils défendre une telle posture tant au travail (vis-à-vis des collègues, de la hiérarchie) que dans la famille et auprès de leurs cercles de sociabilité ? Si le renoncement à des ambitions de carrière fait partie des attentes sociales traditionnellement adressées aux femmes, est-ce pour autant si simple pour ces dernières de s’y conformer ?
Parmi les terrains de la résistance aux formes contemporaines de l’exploitation et de la domination on pourra accorder un intérêt spécifique aux enjeux de préservation et/ou de développement de la santé. Comment les femmes font-elles pour préserver leur santé, pour anticiper sur leur récupération (lorsqu’elles travaillent la nuit, par exemple) alors qu’elles se confrontent à la division sexuée du travail domestique ? Quelles astuces, quels arrangements autres que ceux qui tendent à se soumettre à cette dernière ? Et qu’en est-il des salariés masculins ? En effet ces derniers ne peuvent plus compter autant qu’avant sur leurs compagnes pour assurer à leur place ce travail reproductif. Alors comment tiennent-ils ?
3. Une analyse genrée du rapport au travail : vers de nouvelles pistes théoriques d’interprétation ?
Cet appel à contributions de la NRT qui se centre sur la question du rapport au travail peut sans doute permettre de dégager ou d’éprouver à un niveau plus théorique les liens entre engagement/désengagement au travail et genre.
Une première perspective consisterait à prolonger l’hypothèse de D. Kergoat, et E. Galerand (sur le « potentiel subversif du rapport au des femmes ») : ce n’est pas le travail lui-même, mais le rapport particulier que les femmes entretiennent au travail en raison des positions qu’elles occupent dans la division sexuelle du travail qui est au principe de ce rapport potentiellement subversif. Ainsi, le rapport positif au travail de care, tel qu’il a pu être observé chez nombre de travailleuses concernées, tiendrait en partie au fait qu’il réhabilite théoriquement le travail domestique comme travail… On ne peut rabattre ce phénomène sur les seuls rapports de domination. Reste que ce rapport au travail n’est que « potentiellement » subversif, encore faut-il que se produise un passage au collectif, ce qui s’est produit dans le mouvement social de la coordination infirmière au cours des années 1980.
Une autre perspective pourrait être dégagée soit du côté de l’exploration du plaisir au travail – ce qui permet de tenir même quand la situation professionnelle est précaire, non reconnue, mal payée –, ou encore du côté de la conflictualité – comment faire bouger les droits sociaux, pour que le travail soit davantage qu’une source de difficulté pour concilier vie privée et vie professionnelle ?
La Nouvelle Revue du Travail attend des contributions originales, mobilisant des enquêtes empiriques dans les secteurs d’emploi les plus variés – et non spécifiquement marqués par une sur représentation des femmes –, autour des axes suivants :
- Genre, rapport au travail et centralité du travail
- Résistances et émancipation au travail, et rapports sociaux de sexe : quelles postures professionnelles innovantes ou critiques (vis-à-vis du travail, de la carrière, du salaire, de la préservation de la santé....) ; quelle dimension genrée dans ces postures ? quelles formes de résistance individuelles et collectives au travail sont-elles désormais à l’œuvre ? Comment s’articulent action collective de transformation du travail et genre ?
- Nouvelles pistes d’analyse des rapports « genre et travail »
Ces différents axes pourront être traités séparément dans les différentes contributions ou de façon articulée.
Modalités pratiques d'envoi des propostions
Les articles ne doivent pas dépasser les 45 000 signes (espaces et bibliographie compris) et sont à adresser
avant le 1er octobre 2016
à nrtravail@gmail.com en suivant les modalités et les normes de présentation précisées à la rubrique Soumission et évaluation sur le site web de la NRT : nrt.revues.org
Coordination
- Sabine Fortino
- Paul Bouffartigue
Références
- Galerand E. et Kergoat D. (2008), « Le potentiel subversif du rapport des femmes au travail », Nouvelles Questions féministes, vol. 27, p. 67-82.
- Kergoat D. (2012), « Le potentiel subversif du rapport des femmes au travail », in Se battre disent-elles, Paris, La Dispute.
- Lallement M. (2015), L’Âge du faire. Hacking, travail, anarchie, Paris, Le Seuil.
Argument
The purpose of this corpus is to simultaneously question “gender relationships” and “the relationship to work” in a context where these registers (and their intersections) have been exacerbated by tensions between emancipation dynamics and the renewal or aggravation of a domination logic. The meaning of (professional) work engagement/disengagement processes has clearly become more enigmatic and deserves being studied in a nuanced manner. The goal is not to once again describe the multiple inequalities and discriminations attesting to the importance of gender-related social relationships but to scrutinise, from a gendered perspective, work’s subjective centrality (1); relationships to work (exploring resistance, emancipation, adaptation or accommodation responses to modern work constraints) (2); and new ways of thinking about relationships to work (3).
1– Gender, relationships to work and the centrality of work
A slew of questions arise at this level, including working men and women’s expectations in today’s particularly degraded socioeconomic environment; “who” still believes in the emancipatory effects of work given the increasingly hard, inhuman and individualising attributes that “modern work” seems to have adopted (with employees often experiencing work as a solitary struggle); the individual relationship to work effects of the working world’s increasingly negative dynamics (precariousness, frozen wages and deadend careers, work deprived of meaning, undermined professions, downgraded collectives, impossible prescriptions and the spread of quantitative work control instruments) and whether they tend to drive a disabused and disenchanted relationship to work or instead if women’s singular position in domination relationships nurtures amongst them more advanced expectations and hopes (because they view the challenge of work as transcending the professional sphere and affecting all individualisation processes instead); how to materialise these expectations (through greater submission to or acceptance of the constraints associated with the modern work world, or else by adopting other practices relating to this activity and its consumption and daily experience); in this latter case, whether these modes of appropriation convey emancipating dynamics (and if so, in what direction they are evolving). A final series of questions might look at male workers and the emergence of new kinds of engagement at work, sometimes coming in the shape of real social and economic innovations (like the creation of innovative professional spaces based on shared knowledge and free cooperative activities, Lallement, 2015).
2– Resistance, emancipation at work and gendered social relationships
“Not living to work” - and not submitting to fashionable agonism in the competition for promotions – is a logic that applies to both men and women. Resistance by employees of both sexes has been observed in certain intermediary professions, based on a refusal of transitional frameworks that people equate with workaholism or greater submission and including a “betrayal” of colleagues. Yet people are not all experiencing the same conditions nor do they probably tend to mobilise the same drivers or resources in their resistance.
References to the fun that can be had with a certain activity, and to the satisfaction of liking one’s work, can also be found in case studies of professionals who, if they want to progress in their careers, find they must renounce their original “business”. In cases such as these, resisting promotion is very different from the essentialising narratives that speak to women’s (supposedly) lesser interest in power, nor can it be explained any better by the impact of their “double day” alone. Probably the best place today to discover elements enabling interpretations of this kind of “abnormal” (because non-competitive) behaviour is in the area of the relationship to work and its centrality to social actors’ lives – without forgetting work’s intimate, “emotional” and collective aspects, backed by attachment to professional standards defining “good” work and by people’s desire for “real” qualifications.
The issue is whether men and women are similarly engaged in these forms of resistance, and if so, whether they play out in the same way for both. Otherwise, in a society where the model of “the male breadwinner” remains ubiquitous, it is worth determining how male professionals define this attitude whether at work (vis-a-vis colleagues or management), in their families or in their social circles. It is also worth asking if the social expectations to which women have traditionally been subjected include turning their backs on any and all career ambitions, and how hard it has been for women to fall in line.
Among the areas of resistance to modern forms of exploitation and domination, one worthy of specific interest is healthcare and the preservation and/or development challenges found in this field. Scrutiny here should be focused on what strategies and tricks women use to stay healthy and get some rest (when, for instance, they work night shifts) given the gendered division of labour they experience at home. Indeed, the same question might be asked about their male counterparts, who can no longer count on women as much as before to take care of the business of raising children, and must therefore find a new way of coping.
3. New theoretical interpretations of a gendered analysis of relationships to work
This NRT call for contributions on relationships to work situates analysis of the connection between gender and engagement/disengagement at work on a more theoretical plan.
An initial approach might be to work on a hypothesis formulated by D. Kergoat and E. Galerand (relating to the “subversive potential of female relationships”). The idea here is that it is not work itself driving this potentially subversive connection but the specific relationship that women have to work due to the sexual division of labour. Many women’s positive relationship to care work might theoretically be explained as a re-packaging in the professional world of the work they do at home, meaning that domination effects are not the only dynamics at play here. It remains that this particular work relationship is only “potentially” subversive, depending on how widespread it becomes, being a collectivisation witnessed for instance during the social movement that nurses coordinated in France back in the 1990s.
Another perspective might start by exploring the idea of fun a work, something that helps people to cope even when their professional situation is precarious, unrecognised and poorly paid. Conflictuality is another interesting topic, with its focus on how social progress might change work so that instead of causing problems it becomes a place where people can reconcile their private and professional lives.
Nouvelle Revue du Travail magazine is hoping for original contributions mobilising specific studies in a wide range of sectors of employment, i.e. not only ones specifically marked by their representation of women. The themes to be explored are:
- Gender, relationships to work and the centrality of work
- Resistance and emancipation at work and gendered social relationships, looking at professional stances that are innovative or critical (of work, careers, wages and health); the extent to which these stances are gendered; which forms of individual and collective resistance to work are in effect; and how to organise collective action transforming work and gender.
- New paths for analysing the relationship between “gender and work”
Contributions can treat these themes separately or as interconnected phenomena.
References
Galerand E., Kergoat D. (2008), ”Le potentiel subversif du rapport des femmes au travail”,
Nouvelles Questions Féministes, vol. 27, p. 67-82
Kergoat D. (2012), “Le potentiel subversif du rapport des femmes au travail”, in Se battre disent-elles, Paris, La Dispute.
Lallement M. (2015), L’Âge du faire. Hacking, travail, anarchie, Paris, Le Seuil.
Argumentos
Este corpus tiene por objeto interrogar de manera colectiva las “relaciones de género” y las “relaciones con el trabajo” en un contexto de exacerbación, en ambos registros y en sus intersecciones, de las tensiones entre las dinámicas de emancipación y la renovación o la agravación de las lógicas de dominación. Con ello, el sentido de los procesos de implicación/desinterés en el trabajo (profesional) se torna indudablemente más enigmático y merece una descodificación fina. De manera que no se trata de describir, una vez más, las múltiples desigualdades y discriminaciones que expresan el peso de las relaciones sociales de género, sino de interrogar el tema de la centralidad subjetiva del trabajo a partir de una perspectiva de género (1); de cuestionar, desde esa misma perspectiva, la relación con el trabajo a través de una exploración de las resistencias, de las emancipaciones, de las adaptaciones o de los acomodos a los imperativos del trabajo moderno (2); de explorar nuevas pistas de interpretación para pensar la relación con el trabajo (3).
1– Género, relación con el trabajo y centralidad del trabajo
¿Qué esperan del trabajo los hombres y las mujeres en un contexto socioeconómico particularmente deteriorado? Y además, ¿“quién” cree aún en el trabajo emancipador cuando el “trabajo moderno” parece cada vez más pesado, inhumano e individualizante, cuando los trabajadores viven a menudo el trabajo como una prueba solitaria? ¿Cuáles son los impactos de las dinámicas negativas del mundo laboral (precariedad, carreras y salarios bloqueados, ataques al sentido del trabajo, destrucción de los oficios, deterioro de los colectivos, prescripciones imposibles, multiplicación de instrumentos cuantitativos de control del trabajo...) sobre la relación de las personas, hombres y mujeres, con el trabajo? ¿Conllevan acaso esas dinámicas una relación que tiende al desengaño, al desencanto en el trabajo, o bien contribuye la posición singular de las mujeres en las relaciones de dominación a alimentar en ellas expectativas y esperanzas más grandes (porque para ellas lo que está en juego en el trabajo rebasa la esfera laboral y afecta todo el proceso de individuación)? ¿En qué se traducen esas expectativas? ¿En una mayor sumisión o resignación (a los imperativos del mundo laboral contemporáneo) o en la adopción de otras prácticas en relación con su actividad, su vida cotidiana, su consumo? En este último caso, ¿son esos modos de apropiación portadores de dinámicas emancipadoras? En caso afirmativo, ¿en qué sentido? También nos interrogaremos, en general más bien respecto a los hombres trabajadores, acerca del surgimiento de nuevas formas de compromiso en el trabajo, que en ocasiones revisten la forma de verdaderas innovaciones sociales y económicas (como la creación de espacios profesionales innovadores basados en los saberes compartidos, la organización de actividades cooperativas y gratuitas, Lallement, 2015).
2– Resistencias, emancipación en el trabajo y relaciones sociales de género
“No perder la vida al ganársela”, no implicarse de una manera agonística en la competencia por los ascensos: es ésta una lógica en la que pueden entrar tanto hombres como mujeres. Así, se han podido observar resistencias entre los trabajadores de ambos sexos de profesiones intermedias que implican la negativa a pasar a ser ejecutivos, lo que ven como mayor sumisión y un trabajo más pesado, así como la “traición” de los compañeros. La diferencia es que unos y otras no están en las mismas condiciones y probablemente no tienden a movilizar los mismos resortes ni los mismos recursos para resistir.
La evocación del placer que se obtiene del trabajo, de la satisfacción de ejercer un oficio que a uno le gusta, también puede surgir en el caso de los profesionales que, para hacer carrera, deben renunciar a ejercer su “oficio” original. En ese caso, resistir al ascenso no tiene nada que ver con los discursos esencializantes sobre la (supuesta) menor apetencia de las mujeres por el poder y tampoco se puede explicar mejor únicamente por el impacto de la “doble jornada”. Sin duda, hoy hay que buscar los elementos de interpretación de ese tipo de comportamiento “fuera de la norma” (por no ser competitivos) por el lado de la relación con el trabajo, de su centralidad en la vida de los actores sociales, pero también por el lado de una relación a la vez íntima, “afectiva” y colectiva con el trabajo, apoyada en el apego a normas de oficio que definen el trabajo “bello”, así como en el deseo de poseer una “verdadera” calificación.
Cabe, pues, preguntarse si esas formas de resistencia se observan tanto en los hombres como en las mujeres; y de ser así, si se declinan de la misma manera para los hombres que para las mujeres. En una sociedad donde el modelo del “señor que gana el pan” sigue siendo muy fuerte, ¿cómo pueden los profesionales masculinos defender esa postura tanto en el trabajo (ante sus compañeros y la jerarquía) como en su familia y su círculo social? Si la renuncia a ambiciones de carrera es parte de las expectativas sociales destinadas tradicionalmente a las mujeres, ¿es por ello tan fácil para éstas adecuarse a dichas expectativas?
Entre los terrenos de la resistencia a las formas contemporáneas de la explotación y de la dominación se podrá prestar un interés específico a la importancia de la preservación y/o del desarrollo de la salud. ¿Cómo hacen las mujeres para preservar su salud, para anticipar su recuperación (por ejemplo cuando trabajan de noche), cuando se enfrentan a la división del trabajo doméstico entre los sexos? ¿Qué mañas hay, qué arreglos distintos de los que llevan a someterse a esa división? ¿Y qué hay de los hombres trabajadores? Efectivamente, éstos ya no pueden contar tanto como antes con sus compañeras para ocuparse en su lugar de ese trabajo reproductivo. Entonces, ¿cómo hacen para aguantar?
3. Un análisis de género de la relación con el trabajo: ¿hacia nuevas pistas teóricas de interpretación?
Este llamado a contribuciones de la NRT centrado en el tema de la relación con el trabajo puede sin duda alguna permitir identificar o experimentar a un nivel más teórico las relaciones entre implicación/desinterés en el trabajo y género.
Una primera perspectiva consistiría en prolongar la hipótesis de D. Kergoat y E. Galerand sobre el “potencial subversivo de la relación de las mujeres con el trabajo”: no es el trabajo mismo, sino la relación particular que las mujeres mantienen con el trabajo debido a las posiciones que ocupan en la división sexual del trabajo lo que fundamenta esa relación potencialmente subversiva. Así, la relación positiva con el trabajo de cuidado de las personas, tal como se ha podido observar en muchas trabajadoras que realizan esas actividades, puede deberse en parte a que ese tipo de trabajo rehabilita teóricamente el trabajo doméstico como trabajo. No se puede reducir ese fenómeno tan sólo a las relaciones de dominación. Ahora bien, esa relación con el trabajo es sólo “potencialmente” subversiva y se requiere pasar a un nivel colectivo, que fue lo que ocurrió durante el movimiento social de la coordinación de enfermeros en los años 1980.
Se podría identificar otra perspectiva, ya sea del lado de la exploración del placer en el trabajo (lo que permite aguantar aun cuando la situación profesional sea precaria, no reconocida, mal pagada), o bien por el lado de la conflictualidad: ¿cómo hacer avanzar los derechos sociales para que el trabajo sea algo más que una fuente de dificultades al tratar de conciliar la vida privada con la vida profesional?.
La Nouvelle Revue du Travail espera contribuciones originales, que movilicen estudios empíricos en los sectores de empleo más variados (no específicamente caracterizados por una sobrerrepresentación de las mujeres), en torno a los siguientes ejes:
- Género, relación con el trabajo y centralidad del trabajo.
- Resistencias y emancipación en el trabajo y relaciones sociales de género: ¿cuáles son las posturas profesionales innovadoras o críticas (respecto al trabajo, la carrera, el salario, la preservación de la salud...)?; ¿qué dimensión de género se expresa en esas posturas? ¿Qué formas de resistencia individuales y colectivas al trabajo están actuando hoy? ¿Cómo se articulan acción colectiva de transformación del trabajo y género?
- Nuevas pistas de análisis de las relaciones “género y trabajo”.
Esos diferentes ejes podrán tratarse por separado en las diferentes contribuciones o de manera articulada.
Referencias
Galerand E., Kergoat D. (2008), “Le potentiel subversif du rapport des femmes au travail”,
Nouvelles Questions Féministes, vol. 27, pp. 67-82
Kergoat D. (2012), “Le potentiel subversif du rapport des femmes au travail”, in Se battre disent-elles, Paris, La Dispute.
Lallement M. (2015), L’Âge du faire. Hacking, travail, anarchie, Paris, Le Seuil.