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Spatialiser les rumeurs environnementales

Spatializing environmental rumors

Revue « Géocarrefour »

« Géocarrefour » Review

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Veröffentlicht am Freitag, 25. Mai 2018

Zusammenfassung

Cet appel à articles pour la revue Géocarrefour a pour but de questionner les rumeurs avec un regard spatialisé. Si les travaux de sociologues se sont déjà bien intéressés aux rumeurs, appréhender ce phénomène sous un angle spatial implique de réfléchir à ce qu’un territoire fait aux rumeurs et ce que des rumeurs font aux territoires. Les rumeurs sont de prime abord labiles, insaisissables dans leur matérialité (spatiale). Pourtant, leur dimension immatérielle semble pouvoir s’incarner dans les territoires, influer sur leurs représentations, voire modifier les pratiques des acteurs du territoire. Les textes auront pour but de préciser et interpréter les ancrages territoriaux des rumeurs : où naissent-elles, d’un lieu très précis ou d’un ensemble de lieux ? Quel événement en est la cause, où s’est-il produit, son discours est-il rapporté directement ou indirectement ? Quelles représentations du territoire de telles rumeurs véhiculent-elles ? Les contributions s’intéresseront à des rumeurs qui traitent d’enjeux environnementaux, ce qu’encore peu de travaux ont étudiés.

Inserat

Argumentaire

La rumeur peut se définir comme « une information inexacte ou exagérée qui se déforme à mesure qu’elle est transmise de façon directe par le mode du bouche à oreille ou de façon indirecte, via un média informationnel » (Scharnitzky, 2007). Elle a connu une évolution sémantique rappelée par Pascal Froissard (2000) avec un travail fondateur d’Edgar Morin (1982). Mais c’est dès 1902 que Stern l’avait conceptualisée : ce qui fait la rumeur est la reprise sans cesse renouvelée d’un discours à l’état initial par plusieurs expérimentateurs. La puissance de la presse puis des autres médias va aller croissant dans la diffusion et la remobilisation de rumeurs jusqu’à nos jours.

Cet appel à articles pour la revue Géocarrefour a pour but de questionner les rumeurs avec un regard spatialisé. Si les travaux de sociologues se sont déjà bien intéressés aux rumeurs (dont Campion-Vincent et Renard, 1990), appréhender ce phénomène sous un angle spatial implique de réfléchir à ce qu’un territoire fait aux rumeurs et ce que des rumeurs font aux territoires. Les rumeurs sont de prime abord labiles, insaisissables dans leur matérialité (spatiale). Pourtant, leur dimension immatérielle semble pouvoir s’incarner dans les territoires, influer sur leurs représentations, voire modifier les pratiques des acteurs du territoire. Dans le nord du Cotentin par exemple, la rumeur a couru que le pont au-dessus des marais de Carentan était miné pour pouvoir isoler la presqu’île en cas d’accident nucléaire, concourant ainsi à véhiculer une représentation angoissante de la presqu’île nucléarisée et l’incarnant comme un territoire soumis à un risque majeur.

Les textes auront pour but de préciser et interpréter les ancrages territoriaux des rumeurs : où naissent-elles, d’un lieu très précis ou d’un ensemble de lieux ? Quel événement en est la cause, où s’est-il produit, son discours est-il rapporté directement ou indirectement ? Quelles représentations du territoire de telles rumeurs véhiculent-elles ? Ces questionnements, avec la spatialisation en fil directeur, peuvent être pris en compte par différentes disciplines et nous invitons très largement des contributeurs des différents champs de la science à proposer un article où « l’analyse de la rumeur doit toutefois être reliée à celle du territoire de façon à définir son rôle » (Boudou, 2015, p. 368).

Les contributions s’intéresseront à des rumeurs qui traitent d’enjeux environnementaux, ce qu’encore peu de travaux ont étudiés (Brodu, 1990 ; Boudou, 2015, via l’exemple de la rumeur d’Abbeville en 2000-2001). Nous envisagerons l’environnement comme un construit social sujet à des appropriations différenciées selon les groupes sociaux. Avec des interrogations spatiales et environnementales, les auteurs pourront répondre à quelques questionnements non-exhaustifs proposés ci-après.

L’ancrage socio-spatial des rumeurs environnementales

« La rumeur peut aussi être définie comme la mise en commun des ressources intellectuelles du groupe pour parvenir à une interprétation satisfaisante de l’événement » (Shibutani, 1966) : elle est donc un construit social catégorisé par des groupes qui participent de la culture d’une société. Au sens où la définit Paul Claval, la culture désigne en effet un « ensemble de schèmes mentaux, d’échelles de valeurs et de techniques d’action et de transaction qui délimitent le champ des comportements possibles et le champ des comportements considérés comme souhaitables dans un groupe » (2015, p. 136). Quels acteurs en sont à l’origine, peut-on identifier des « portraits types de coupables qui resteront longtemps ancrés dans les mentalités » (Chalvet, 2016) ? Sont-elles plus ou moins déformées et diffusées selon les lieux, les acteurs, les sociétés ? Comment les réseaux sont-ils mobilisés ? Y-a-t-il selon les enjeux des « chambres d’amplification » aux rumeurs ? Des lieux « carrefours » qui les transforment ? Des inégalités socio-spatiales dans l’accès, la diffusion et la prise en compte des rumeurs ? Les contributions se demanderont aussi qui porte le diagnostic de rumeur, visant par là même souvent à disqualifier le récit (Froissard, 2010). D’où viennent les contre-offensives ? Ces lanceurs d’alerte mettent-ils en avant des irrationalités spatiales dans ce qu’ils nomment rumeur ? Il s’agira alors d’analyser l'écart supposé entre ceux qui mettent en cause et ceux qui sont mis en cause (qu’ils s’agissent d’autres humains ou non-humains) et de situer dans l'espace la distance physique et sociale entre ceux qui subissent et ceux qui sont sensés provoquer. Où s’arrêtent les rumeurs, y-a-t-il des frontières selon les espaces, les groupes sociaux ? Il sera intéressant de proposer des cartographies de rumeurs, dans la lignée des travaux cartographiant les récits (Fournier, 2016).

Les temporalités des rumeurs environnementales

Les contributions pourront prendre en compte des discours présents (une géographie culturelle des rumeurs environnementales) ou passés (une géohistoire), afin de montrer aussi ce qui fait la spécificité de chaque époque et/ou de chaque rumeur dans sa diffusion et mobilisation spatiale. Comparer les temporalités de différentes rumeurs permettra aussi de voir comment chaque époque construit sa définition de la rumeur. Les rumeurs sont universelles et intemporelles, « et elles le resteront tant elles remplissent des fonctions sociales et psychologiques vitales pour les individus » (Scharnitzky, 2007). Mais ont elles certaines spécificités selon leurs époques de propagation ? Il s’agira également d’analyser à une échelle plus fine la géohistoire d’une rumeur précise rapportée à son déroulé chronologique. Vers où se propagent-elles selon les acteurs qui les reprennent, à quelle rapidité ?

La rumeur et la fabrique des évènements environnementaux

Incertitudes, rumeurs et fausses vérités peuvent accompagner les discours sur tel événement ou tel enjeu environnemental que les contributions à ce numéro spécial viendront mettre en lumière. Les auteurs pourront alors se demander si certains événements environnementaux sont plus ou moins propices à l’expression de rumeurs et comment les rumeurs peuvent contribuer à fabriquer certains évènements environnementaux. D’une part les catastrophes environnementales peuvent être très sujettes à des rumeurs à différentes échelles spatiales : tsunamis, cyclones, inondations, éruptions volcaniques… Ce type d’événement s’analyse via des interprétations tantôt scientifique, vernaculaire, culturelle, religieuse, parfois en concurrence et générant différentes formes de rumeurs répétées. D’autre part certains événements moins dommageables et/ou médiatiques selon les époques ont pu susciter des rumeurs plus ciblées aussi bien dans une région que dans un groupe social. Pensons par exemple aux rumeurs se propageant dans les milieux maritimes comme le Nautilus pris pour un monstre marin dans Vingt mille lieues sous les mers. Les contributions pourront aussi s’orienter vers l’étude de rumeurs autour de certaines « grandes peurs » liées à d’éventuelles dégradations environnementales qui peuvent être territorialisées, comme la peur de l’hiver nucléaire ou des pluies acides.

La diffusion des fake news environnementales et leurs réseaux

Avec l’essor du partage de l’information en temps direct via Internet, de nouvelles rumeurs ont vu le jour et peuvent avoir un retentissement énorme, les « fake news ». Différentes des rumeurs, car elles participent intentionnellement à des tentatives de désinformation, elles sont selon Frédéric Lordon (2018) une « obsession » récente et sont symptomatiques d’une crise de légitimité des autorités. Il pourra être alors intéressant de questionner certaines fictions manipulatrices ou rumeurs en environnement sous l’angle de ce nouveau terme. Les textes pourront questionner la source matérielle de ces fake news : que disent-elles des phénomènes environnementaux et de sa réception socio-spatiale, selon qu’elles prennent la forme d’une image truquée, un faux témoignage, un récit alambiqué… ? La structuration des interactions et des échanges entre individus via les réseaux pourra aussi être interrogée dans l’analyse d’une fake news environnementale, où les institutions et médias qui font nœud peuvent contribuer à conditionner la diffusion : comment se diffusent et se propagent les fake news ? Par quels canaux d’information ?

Conditions de soumission

Ce projet de numéro thématique prolonge les travaux et réflexions engagés dans le cadre du séminaire « Rumeurs et fake news en environnement » au CERES (Centre de formation sur l’environnement et la société, ENS-Ulm) début 2018. Ce séminaire a rassemblé des chercheurs en géographie, histoire, sociologie, ethnologie, biochimie, géochimie, science de l’environnement et économie.

Les auteurs peuvent s’adresser aux coordinateurs du numéro, Alexis Metzger (alexis.metzger[at]ens.fr) et Annaig Oiry (annaig.oiry[at]gmail.com) pour signaler leur intérêt dans un résumé d’une page

d’ici le 30 juin 2018

et poser toute question en lien avec ce texte. Les articles seront proposés au plus tard le 30 septembre 2018 pour une publication prévue début 2019.

Ils devront respecter les normes de la revue (http://journals.openedition.org/geocarrefour/1017) et pourront être rédigés en français ou en anglais, d’un volume optimum de 40 000 signes espaces compris.

Les articles seront évalués en double aveugle par le comité de lecture. Les auteurs recevront une notification de la décision (et des instructions de correction) fin 2018.

Coordinateurs scientifiques

  • Alexis Metzger, docteur en géographie, ATER au CERES, ENS-Ulm
  • Annaig Oiry, docteur en géographie, PRAG à l’ESPE de l’université Paris-Est Créteil

Références bibliographiques

  • Boudou Martin, Approche multidisciplinaire pour la caractérisation d’inondations remarquables. Enseignements tirés de neuf évènements en France (1910-2010). Thèse de l’université Paul Valéry Montpellier 3, soutenue le 30/11/2015. Sous la direction de Freddy Vinet et Michel Lang.
  • Brodu Jean-Louis. Une rumeur de sécheresse. In: Communications, 52, 1990. Rumeurs et légendes contemporaines, sous la direction de Véronique Campion-Vincent et Jean-Bruno Renard. pp. 85-97.
  • Campion-Vincent Véronique et Jean-Bruno Renard (sous la direction de), Communications, 52, 1990. Rumeurs et légendes contemporaines.
  • Chalvet Martine, « La vulnérabilité de la forêt provençale face aux incendies : naissance d’une notion
  • (fin XIXe siècle) », VertigO - la revue électronique en sciences de l'environnement [En ligne], Volume 16
  • numéro 3 | décembre 2016, mis en ligne le 20 décembre 2016, consulté le 27 janvier 2017. URL :
  • http://vertigo.revues.org/18012
  • Claval Paul, Penser le monde en géographe. Soixante ans de réflexion, Paris, L’Harmattan, 2015.
  • Fournier Mauricette, Cartographier les récits, Presses de l’université Blaise Pascal, Clermont Ferrand, 2016.
  • Froissart Pascal, « L’invention du “plus vieux média du monde” », MÉI « Médiation et information », n° 12-13, 2000.
  • Lordon Frédéric, « Fake news : le vrai du faux », La Grande table, France culture, 19 janvier 2018.
  • Morin Edgar, La rumeur d’Orléans, Paris, Seuil, 1982.
  • Rouquette Michel-Louis, « Le syndrome de rumeur », Communications, n° 52, 1990.
  • Scharnitzky Patrick, « La fonction sociale de la rumeur », Migrations Société 2007/1 (n° 109), p. 35-48.
  • Shibutani T., Improvised News : A Sociological Study of Rumor, Indianapolis, Bobbs Merrill, 1966.

Orte

  • Lyon, Frankreich (69)

Daten

  • Samstag, 30. Juni 2018

Schlüsselwörter

  • environnement, rumeur, spatialité, fake news, réseaux

Kontakt

  • Alexis Metzger
    courriel : alexis [dot] metzger [at] ens [dot] fr
  • Annaig Oiry
    courriel : annaig [dot] oiry [at] gmail [dot] com

Verweis-URLs

Informationsquelle

  • André Buisson
    courriel : andre [dot] buisson [at] univ-lyon3 [dot] fr

Lizenz

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Zitierhinweise

« Spatialiser les rumeurs environnementales », Beitragsaufruf, Calenda, Veröffentlicht am Freitag, 25. Mai 2018, https://doi.org/10.58079/106f

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