AccueilLes géographies du commerce alimentaire : vers de nouvelles logiques de territorialisation ?

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Les géographies du commerce alimentaire : vers de nouvelles logiques de territorialisation ?

Geographies of food trade. Towards news logics of territorialization?

Revue « Géocarrefour »

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Publié le jeudi 07 juin 2018

Résumé

Le commerce alimentaire connaît des évolutions fortes depuis la fin des années 1990 dans un contexte de contestations de tous les maillons du système agro-alimentaire tertiaire dominant et hyperconcentré (Rastoin et al., 2010 ; Deverre, Lamine, 2010 ; Colonna et al., 2014) : remise en cause de l’agriculture productiviste, montée des revendications des consommateurs pour une alimentation saine et traçable (crise ESB en 1996, scandales alimentaires, etc…), accroissement des inégalités d’accès à l’alimentation (Paddeu, 2012) et perte de confiance envers les distributeurs. Ce numéro de Géocarrefour souhaite explorer les adaptations et les nouvelles modalités de ce commerce alimentaire, dont les formes (de la vente directe à l’hypermarché, du marché de plein vent au marché de gros, des CSA aux food stores…) montrent aujourd’hui un éclatement toujours plus grand.

Annonce

Argumentaire

Le commerce alimentaire connaît des évolutions fortes depuis la fin des années 1990 dans un contexte de contestations de tous les maillons du système agro-alimentaire tertiaire dominant et hyperconcentré (Rastoin et al., 2010 ; Deverre, Lamine, 2010 ; Colonna et al., 2014) : remise en cause de l’agriculture productiviste, montée des revendications des consommateurs pour une alimentation saine et traçable (crise ESB en 1996, scandales alimentaires, etc…), accroissement des inégalités d’accès à l’alimentation (Paddeu, 2012) et perte de confiance envers les distributeurs. Ce numéro de Géocarrefour souhaite explorer les adaptations et les nouvelles modalités de ce commerce alimentaire, dont les formes (de la vente directe à l’hypermarché, du marché de plein vent au marché de gros, des CSA[1] aux food stores…) montrent aujourd’hui un éclatement toujours plus grand.

Notre propos s’inscrit d’une part dans la continuité des travaux de la Commission Commerce du Comité National Français de Géographie (CNFG), qui, dans une bibliographie thématique, reprend l’ensemble des productions francophones depuis un demi-siècle et ouvre les chantiers à venir (Deprez et al., 2017). D’autre part, il fait suite aux études anglophones autour de la Food geography (Steel, 2009) et de l’Ecole de Bristol (Morgan et Sonnino, 2013) intégrant les notions de durabilité notamment à partir des food miles et des food desert (Coley, Howard, Winter, 2009). En effet, l’objectif est d’interroger l’ensemble du système commercial alimentaire dans ses inscriptions spatiales, depuis les évolutions qui affectent les discounts alimentaires (supermarchés, hypermarchés, etc.) devenus dominants à la fin du XX° siècle (Metton, 1984 ; Moati, 2001), jusqu’aux formes alternatives, dites parfois signaux faibles, autour des circuits-courts et du nouveau mot d’ordre de proximité (Chaffote et Chiffoleau, 2007 ; Pouzenc, 2016), voire des formes d’échanges non monétarisés ou de dons. De surcroît, loin de présenter des oppositions claires, nombre de modalités récentes entrent aussi en hybridation avec les anciennes formes commerciales et traduisent leurs mutations. Surtout, elles s’intègrent dans des logiques de consommation de plus en plus marquées par les mobilités individuelles, relatives aux temporalités quotidiennes et aux parcours de vie multiples.

Ce nouvel agencement du commerce alimentaire renvoie ainsi à plusieurs questionnements. Peut-on parler d’alternatives ou de recompositions par rapport au système agroindustriel tertiarisé et quels rapports aux territoires ? La « consommation engagée » ou encore « critique », comme nouvel ordre alimentaire individuel et collectif (Pleyers, 2011), produit-elle de nouvelles hybridités susceptibles de recomposer l’appareil commercial et la nature même des systèmes ?

Un des enjeux principaux sera d’étudier les éventuelles reterritorialisations, les circulations entre local et global, et ce à plusieurs échelles (Poulot, 2012). Cet appel attend des contributions sur différents types d’espaces : ruraux, périurbains et urbains. De même, des études sur les pays des Suds ou sur des relations entre les Nords et les Suds sont les bienvenues. La construction de réseaux d’acteurs du commerce alimentaire et leurs imbrications territoriales pourraient aussi constituer un point d’intérêt particulier pour l’analyse de ces nouvelles logiques commerciales.

Trois axes de réflexion sont suggérés :

  • Acteurs du commerce alimentaire : adaptations et appropriations,
  • Commerce alimentaire, projet alimentaire, projet de territoire,
  • Les régulations du commerce alimentaire : des réglementations nationales aux contournements locaux.

Acteurs du commerce alimentaire : adaptations et appropriations

Dans un contexte marqué par la crise économique et des changements culturels profonds, de nouveaux acteurs du commerce alimentaire construisent des relations territoriales à même d’interroger les mécanismes des systèmes du commerce alimentaire et leurs configurations (coordination, concurrence, hybridation). Ils développent des compétences ainsi que des savoir-faire inédits et/ou revalorisent leurs métiers. Cet axe permet d’étudier, par exemple, les modalités variées d’adaptations des filières agro-industrielles aux nouvelles logiques du commerce alimentaire : rôle des marchés de gros, de la grande distribution dans l’appropriation d’innovations portées par des niches (bio, local, etc.). Et inversement, des producteurs agricoles empruntent des modes d’organisation de la grande distribution (exemple des Pom’Drive).

Ces mutations interrogent l’institutionnalisation des attentes et les pratiques des consommateurs à l’œuvre depuis quelques années (Dubuisson-Quellier, 2014). De surcroît, appellent-elles des processus susceptibles de bouleverser le classique rapport producteur/consommateur ?

Commerce alimentaire, projet alimentaire, projet de territoire 

Le commerce alimentaire reste marqué par des lieux fixes ou mobiles, par des inscriptions temporelles et spatiales qui viennent rappeler les relations existantes entre territoires, production et distribution alimentaires. Alors que le localisme alimente les projets de territoires et des formes, parfois balbutiantes, de promotion des circuits-courts et de modalités commerciales alternatives, la place du territoire semble jouer un rôle nouveau et central dans cette construction (Lardon, Loudiyi, 2014). Cet axe s’intéresse particulièrement aux stratégies territoriales mises en place pour accueillir ces formes originales de mise en commerce. Si certains territoires choisissent des procédés de marketing territorial (marques territorialisées), d’autres espaces sont plus enclins à procéder à des formes d’hybridation entre local et global, d’autres enfin jouent des relations villes-campagnes.

Plusieurs questions demeurent face à ces nouvelles relations territoire - commerce alimentaire : quelle est la place du commerce alimentaire dans ces projets alimentaires territoriaux ? Existe-t-il des terreaux plus favorables que d’autres et quels instruments et outils sont utilisés (labellisation sur appel d’offre national, projets autonomes, collectifs d’agriculteurs) ?

Les régulations du commerce alimentaire : des réglementations nationales aux contournements locaux

Dans l’optique de compléter les travaux sur la gouvernance alimentaire, déjà envisagés dans le numéro 89 de Géocarrefour (2014), il paraît judicieux d’interroger les processus de régulations et structuration institutionnelle du commerce alimentaire. Le cas français illustre la domination de la grande distribution qui n’a pas connu beaucoup de contraintes réglementaires ces quarante dernières années, malgré les lois Royer (1973), Sapin (1993) et Raffarin (1996), annoncées comme des lois de rupture, mais aisément contournées par les élus. Il serait, dans ce cadre, intéressant d’avoir des comparaisons avec d’autres contextes moins marqués par l’hyperconcentration commerciale et/ou par des règlements pensés à d’autres échelles.

L’introduction de normes, de cahiers des charges visant des pratiques responsables et durables constitue un autre angle d’approche. Quelles sont les adaptations, les stratégies, les freins du côté des systèmes d’acteurs, des grands groupes aux petits producteurs, face à ces nouvelles régulations ?  Des contributions sont également attendues sur les appropriations, à plusieurs niveaux (nationaux, régionaux, locaux), de la commande publique, comme dans le cadre réglementaire européen.

Délais et consignes

Les auteurs peuvent s’adresser aux coordinateurs du numéro, Julien Essers  (julien.essers@parisnanterre.fr), Lisa Rolland (lisa.rolland@archi.lyon.fr) et Monique Poulot (mpoulotmoreau@parisnanterre.fr) pour signaler leur intérêt  et poser toute question scientifique en lien avec cet appel.

Les articles seront proposés au plus tard le 1er septembre 2018

pour une publication prévue en 2019.

D’un volume optimum de 40 000 signes, espaces compris (la rédaction se réservant la possibilité de rejeter les articles dépassant les 60 000 signes), ils devront respecter les normes de la revue (https://geocarrefour.revues.org/1017). Les articles seront évalués en double aveugle par le comité de lecture.

Les auteurs recevront la notification de la décision et des instructions de correction fin novembre 2018.

Bibliographie

CHAFFOTTE L., CHIFFOLEAU Y., 2007, Circuits courts et vente directe : définition, typologie et évaluation, Cahiers de l'Observatoire CROC, n°1-2, p. 1-8.

Coley D., Howard M., Winter M., 2009, Local food, food miles and carbon emissions: A comparison of farm shop and mass distribution approaches, Food policy, 34(2), p.150-155.

COLONNA P. et al., 2014, Systèmes alimentaires, Paris, Quæ.

DEPREZ S. et al., 2017, Commerce & Géographie, Bibliographie thématique en géographie du commerce, Comité National Français de Géographie (CNFG), Commission Géographie du commerce, https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01471984/document

DEVERRE C., LAMINE C., 2010, Les systèmes agroalimentaires alternatifs, une revue de travaux anglophones en sciences sociales, Economie rurale, n°317, p. 57-73.

DUBUISSON-QUELLIER S., 2014, Du consommateur éclairé au consommateur responsable, in PIGENET M., TARTAKOWSKI D. (dir.), Histoire des mouvements sociaux en France, Paris, La Découverte, p. 708-715.

LARDON S., LOUDIYI S., 2014, Agriculture et alimentation urbaines : entre politiques publiques et initiatives locales, Géocarrefour, n°89.

METTON A., 1984, Le commerce urbain français, Orléans, PUF, coll. Université d’Orléans.

MOATI P., 2001, L’avenir de la grande distribution, Paris, Odile Jacob.

Morgan K., Sonnino R., 2013. The school food revolution: Public food and the challenge of sustainable development, London, Routledge.

PADDEU F., 2012, L’agriculture urbaine dans les quartiers défavorisés de la métropole new-yorkaise : la justice alimentaire à l’épreuve de la justice sociale, VertigO, volume 12, n°2, en ligne.

PLEYERS G. (dir.), 2011, La consommation critique : Mouvements pour une alimentation responsable et solidaire, Paris, Ed. Desclée de Brower.

POULOT M., 2012, Vous avez dit locavore ? De l’invention du locavorisme aux Etats-Unis, Pour, n°215-216, p. 349-354.

POUZENC M., 2016, Introduction : Les circuits courts contre la société de consommation… tout contre, in DESSE R.-P., LESTRADE S. (dir.), Mutations de l’espace marchand, Presses Universitaires de Rennes, coll. Espace et territoires, p. 89-92.

RASTOIN J.-L., GHERSI G., DE SHUTTER O., 2010, Le système alimentaire mondial : concepts et méthodes, analyses et dynamiques, Versailles, Quae.

[1] Ces formes se déclinent aujourd’hui partout dans le monde : Community supported agriculture aux USA, Teikkei au Japon, Association pour le maintien de l’agriculture paysanne en France, Gruppi di acquisto solidale en Italie, (…).

Lieux

  • 18 rue Chevreul
    Lyon, France (69007)

Dates

  • samedi 01 septembre 2018

Mots-clés

  • commerce alimentaire, territorialisation, acteur, réglementation

Contacts

  • Monique Poulot
    courriel : mpoulotmoreau [at] parisnanterre [dot] fr
  • Julien Essers
    courriel : julien [dot] essers [at] parisnanterre [dot] fr
  • Lisa Rolland
    courriel : lisa [dot] rolland [at] archi [dot] lyon [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • andré buisson
    courriel : andre [dot] buisson [at] univ-lyon3 [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Les géographies du commerce alimentaire : vers de nouvelles logiques de territorialisation ? », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 07 juin 2018, https://doi.org/10.58079/10c9

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