AccueilLe chantier cathédral en Europe

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Le chantier cathédral en Europe

The cathedral construction site in Europe

Diffusion et sauvegarde des savoirs, savoir-faire et matériaux du Moyen Âge à nos jours

The distribution and safeguard of knowledge, know-how and materials from the Middle Ages to the present day

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Publié le vendredi 05 avril 2019

Résumé

À la suite de l’inclusion des savoir-faire de la Fondation de l’Œuvre Notre-Dame de Strasbourg à l’inventaire national du patrimoine culturel immatériel en France (2017), la recherche de reconnaissance de la sauvegarde des savoirs, compétences techniques et pratiques sociales des ateliers de cathédrales a progressivement fédéré dix-huit ateliers dans cinq pays européens (Allemagne, Autriche, France, Norvège, Suisse). Les contributeurs du colloque étudieront la spécificité du fonctionnement des chantiers et des métiers impliqués dans la construction des cathédrales hier et dans leur restauration aujourd’hui, et mettront en valeur les sources, écrites ou figurées, autorisant la recherche en ces domaines et la façon dont elles ont été exploitées ces toutes dernières décennies ; ils questionneront enfin le phénomène de circulation et d’échanges des savoirs et des compétences que l’on connaît depuis le Moyen Âge autour des chantiers des cathédrales.

Annonce

Contexte

Parmi les ateliers encore actifs aujourd’hui en Europe, certains le sont sans interruption depuis l’époque médiévale, comme l’Œuvre Notre-Dame à Strasbourg (France) ou la Freiburger Münsterbauhütte à Fribourg-en-Brisgau (Allemagne). Du XIXe au XXIe siècle encore, des ateliers se sont recréés, afin de conserver et restaurer des cathédrales, tels les ateliers en Bavière, ou d’autres grands bâtiments, telle la Zwingerbauhütte à Dresde (Allemagne). Au XIXe siècle, l’achèvement des églises gothiques en Allemagne devient le symbole d’une identification nationale. Si l’achèvement de la cathédrale de Cologne, dont les travaux reprennent en 1823, était motivé par un contexte de conflits politiques et confessionnels, la réouverture des ateliers d’Ulm (1844) et de Schwäbisch-Gmünd (1848) découle d’un très fort engagement citoyen. En Norvège, la réouverture de l’atelier de Trondheim (1869) est liée à la requalification de l’église-cathédrale de Nidaros en symbole national et église principale du pays. Une autre vague de réouvertures s’observe dans les années 1920 à Bamberg, Passau, Ratisbonne et Xanten, en réponse au mauvais état des cathédrales, qui souffrent des conséquences environnementales et climatiques de l’ère industrielle. D’autres ateliers ont été ouverts, en particulier au cours du XIXe siècle, afin d’édifier de nouvelles cathédrales, comme à Linz (Autriche), ou de nouveaux édifices néogothiques, avant de fermer, le plus souvent, à l’issue du chantier de construction. Certains ateliers se sont formés après la seconde guerre mondiale pour reconstruire ou restaurer les édifices fortement endommagés par la guerre, comme à Aix-la-Chapelle (1949), Mayence (1950) et Lübeck (1951) en Allemagne. Enfin, la dernière vague de créations d’ateliers dans les années 1980-1990, à Bâle (1986) en Suisse et à Dresde (1991) et Soest (1994) en Allemagne, découle de la prise de conscience que l’entretien continu et systématique des édifices par un atelier dédié présente l’avantage de pouvoir suivre les monuments sur un temps long et de les entretenir au quotidien. La dernière création en Europe date de 2017, pour assurer l’entretien de la cathédrale de Stavanger (Norvège).

Confrontés à la carence progressive des compétences techniques aujourd’hui, les ateliers de cathédrales s’érigent en institutions de préservation, de transmission et de développement des techniques et savoir-faire traditionnels en Europe. Ils développent des protocoles de conservation de la pierre, dans le souci constant de préserver la pierre d’origine. Leur objectif est de maintenir vivants les savoirs et savoir-faire artisanaux traditionnels et d’encourager les méthodes contemporaines de conservation-restauration, démontrant ainsi que la préservation des traditions artisanales est compatible avec le recours aux nouvelles technologies. Reflété dans leur organisation et dans leur système de formation à la pratique in situ, cet engagement en faveur de la préservation et de la promotion du patrimoine culturel immatériel est exemplaire. Il se traduit par des mesures de sensibilisation, d’information et de communication ciblées et par une coopération étroite avec un vaste panorama d’acteurs (professionnels de la conservation des monuments historiques, entreprises, chercheurs académiques, représentants des Églises).

Ils permettent à un public non expert de connaître et de comprendre la construction et l’organisation des chantiers et des grands édifices du Moyen Âge et du début des temps modernes et leur conservation ultérieure. De nombreux édifices auxquels sont adjoints de tels ateliers sont protégés conformément aux législations nationales en vigueur sur les monuments historiques ou ― telles les cathédrales d’Aix-la-Chapelle, Bamberg, Cologne, Ratisbonne et Strasbourg et les églises de la vieille ville de Lübeck ― sont reconnus Patrimoine mondial par l’UNESCO.

Des compétences des ateliers de cathédrales à la circulation des savoir-faire entre les chantiers

En Europe, des ateliers rattachés à une église ou à une cathédrale existent en Allemagne, en Suisse, ainsi qu’en Autriche, en Europe du Nord, en Italie, en Espagne et en Angleterre. Les ateliers italiens comptent parmi les plus anciens, la création de l’atelier de Pise étant attestée dès le XIIe siècle. À Strasbourg, l’atelier de la Fondation de l’Œuvre Notre-Dame est le seul atelier affecté à une cathédrale existant encore en France ; ailleurs, les travaux de restauration des cathédrales françaises sont attribués, par marché, à des entreprises spécialisées, sous la direction des architectes en chef des monuments historiques et sur commande des directions régionales des Affaires culturelles, services déconcentrés de l’État. Le mode d’administration et de gestion des ateliers en Europe diffère selon les structures : la gestion peut en être confiée au chapitre, au diocèse, à une association, à des services spécialisés d’administrations territoriales, etc. Apparue en Île-de-France, l’architecture gothique s’est répandue dans toute l’Europe. La complexification de l’art de bâtir (croisée d’ogives, arc-boutant, charpente) et l’enrichissement du décor amènent l’implantation d’ateliers à proximité immédiate des chantiers, délaissant la pratique d’itinérance des bâtisseurs de la période romane. Dans les ateliers, les ouvriers des divers corps de métier travaillant main dans la main au rythme des saisons ; au Moyen Âge comme aujourd’hui, ces ateliers de cathédrales accueillaient différents corps de métiers, œuvrant en étroite collaboration et transmettant leurs savoirs de génération en génération, des experts aux apprentis : maîtrise d’œuvre, taille de pierre, sculpture, maçonnerie travail du métal, travail du plâtre, menuiserie, couverture, techniques d’échafaudage, travail du bois, art de la charpente, art du vitrail, sans oublier les compétences associées (fonte de cloches, facture instrumentale…).

Ces ateliers abritent une communauté de travail, mais aussi une communauté vivante avec ses rituels, ses fêtes et des formes de communication bien établies. Ils conservent les traditions coutumières des ouvriers du bâtiment, ainsi qu’une mine de connaissances intellectuelles et techniques, transmises à la fois oralement, d’artisan à artisan, par l’imitation et l’observation, et par écrit, grâce à de nombreuses archives en particulier. Les dessins d’architecture médiévaux qui nous sont parvenus ont servi de modèle à l’achèvement des édifices et les architectes s’en inspirent pour réaliser leur projet. Aujourd’hui encore, cette pratique de conservation, au sein des ateliers de cathédrales en Europe, s’inscrit dans un processus de transfert durable des connaissances. Avec le développement de l’architecture gothique et l’essor urbain au XIIIe siècle apparaît une nouvelle forme hautement spécialisée d’organisation et d’exécution de la construction monumentale. Les conditions d’admission et de formation au métier de tailleur de pierre sont fixées dans des règlements, telles que les ordonnances de Strasbourg (1459) ou de Rochlitz (1462). Alors que les artisans se regroupent en confréries dans les villes, maîtres d’œuvre et tailleurs de pierre sont souvent mobiles à l’échelle suprarégionale et les déplacements des artistes et des œuvres connaissent peu à peu une ampleur et une importance croissantes.

Pour une grande partie, les ateliers médiévaux cessent leur activité, soit après l’achèvement du chantier, soit au XVIe siècle avec l’émergence de nouvelles conceptions de l’architecture, avant de connaître, à partir du XIX e siècle, dans certains pays européens, les renaissances déjà évoquées. En France, alors que les fabriques, gestionnaires des affaires temporelles, répandues partout du Moyen Âge à la fin de l’époque moderne, ont disparu avec la Révolution française, les ateliers de cathédrales, à l’exception du cas de Strasbourg, n’ont pas été recréés. Comme celui de Fribourg-en-Brisgau, l’atelier strasbourgeois perdure depuis le Moyen Âge, sur un modèle essentiellement rhénan ; il fut un modèle pour certaines réouvertures d’ateliers en Allemagne aux XIXe et XXe siècles et, jusqu’aux temps modernes, fit autorité pour la taille de la pierre. De même en Suisse, nombre de fabriques n’ont pas été recréées à l’issue de la Révolution. Des tentatives de recréation de fabriques, pour gérer le financement et l’administration des travaux, sont intervenues dans ces deux pays au cours du XIXe siècle, avecdes temporalités différentes. Il serait intéressant d’élargir cet examen à la Belgique, à la Grande-Bretagne, à l’Italie et à d’autres pays européens. Aucune synthèse à l’échelle de l’Europe n’a jamais été faite de ces initiatives et de leur devenir. Le colloque pourra ainsi contribuer à une histoire comparée de ces structures (fabriques, ateliers…) et des institutions et administrations créées à leur suite. Pendant des siècles, l’existence même des ateliers a donc préservé à la fois des techniques artisanales, un savoir traditionnel ou nouvellement acquis et des coutumes liées à la construction et à la préservation d’édifices nécessitant un entretien constant, mais elle a aussi créé les conditions d’une transmission des techniques, des formes et des thèmes et d’une circulation et d’une émulation des savoirs à grande échelle. Ces deux dernières décennies, les avancées de la recherche en histoire de l’architecture et en histoire et anthropologie des techniques ont fait sensiblement progresser les connaissances sur l’institution des chantiers de cathédrales, sur le fonctionnement des métiers en leur sein et sur la circulation des savoirs et des hommes d’un chantier à l’autre. Les travaux ont cherché aussi à expliciter les causes et les conséquences, au plan politique, culturel, économique, mais aussi administratif et statutaire, de ces transferts techniques et artistiques sur la production architecturale à l'échelle européenne. Pour autant, si ces aspects ont été étudiés localement et/ou pour certaines périodes, il n’en a été proposé que peu de synthèses à l’échelle européenne, surtout sur le temps long, y compris jusqu’à nos jours, pour en faire émerger les constances et les ruptures, les points de convergence et les spécificités, et ainsi mieux qualifier le contexte d’élaboration de la culture architecturale et technique autour des cathédrales européennes, replacées dans leur contexte.

Axes thématiques du colloque

Les contributeurs sont invités à étudier la spécificité du fonctionnement des chantiers et desmétiers impliqués dans la construction des cathédrales hier et dans leur restaurationaujourd’hui, à mettre en valeur les sources, écrites ou figurées, autorisant la recherche en cesdomaines et la façon dont elles ont été exploitées ces toutes dernières décennies, et enfin, àquestionner le phénomène de circulation et d’échanges des savoirs et des compétences que l’onconnaît depuis le Moyen Âge autour des chantiers des cathédrales.Cet appel à communications propose d’explorer les trois grands axes thématiques suivants.Des communications proposant une approche comparative ou étudiant la diffusion de savoirset de modèles au-delà du continent européen, en Amérique du Nord et du Sud ou en Asienotamment, pourront être prises en compte.

1. Chantiers et métiers : approches historiques et géographiques

  • Panorama institutionnel du Moyen Âge à nos jours
  • Déontologie et contexte des travaux en Europe
  • Organisation et mise en réseau des chantiers à travers les âges
  • Quels métiers pour quels savoirs ?

2. Pensée et savoir-faire techniques : de leurs supports à leur circulation

  • Supports de la pensée technique
  • Transmission des savoirs techniques et transferts d’innovation

3. Stratégies de sauvegarde et de diffusion autour des cathédrales

  • Des lieux privilégiés pour la sauvegarde moderne et contemporaine des savoir-faire
  • Centres de documentation et laboratoires de recherche sur les savoirs techniques et sur les enjeux patrimoniaux
  • Du mythe à la réalité : ouvrir le chantier au public

Coordination du colloque

Le colloque est organisé par la direction générale des Patrimoines (ministère de la Culture) et par le Centre André-Chastel, avec le soutien du labex « Écrire une histoire nouvelle de l’Europe » (axe 7 Traditions nationales,circulations et identités dans l’art européen), de l’Institut national du Patrimoine et de l’Observatoire des patrimoines Sorbonne Université.

Calendrier et modalités de candidature

Les interventions sont ouvertes aux praticiens de l’architecture et de la restauration monumentale et artistique, aux professionnels du patrimoine, aux chercheurs et enseignants-chercheurs (anthropologie, économie de la construction, histoire de l’architecture, histoire de l’art, histoire des techniques, histoire institutionnelle…), afin de valoriser les approches mixtes et pluridisciplinaires et favoriser l’échange des points de vue professionnels.

Pour soumettre un projet de communication, adresser les deux pièces suivantes :

  • Une proposition écrite d’environ 1 page (2000 signes maximum), accompagnée de quelques références bibliographiques à l’appui
  • Un bref curriculum vitae (2 pages)

Langues du colloque : français, anglais, allemand et italien.

Les propositions de communications doivent être adressées, au format PDF et par courriel,

avant le samedi 20 avril 2019,

conjointement à :

Lieux

  • Auditorium Colbert - 2 rue Vivienne
    Paris, France (75002)

Dates

  • samedi 20 avril 2019

Mots-clés

  • construction, architecture, technique, chantier médiéval, réseau, bâtiment, circulation, savoir technique, art monumental

Contacts

  • Isabelle Chave
    courriel : isabelle [dot] chave [at] culture [dot] gouv [dot] fr
  • Etienne Faisant
    courriel : etienne [dot] faisant [dot] 2 [at] paris-sorbonne [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • Isabelle Chave
    courriel : isabelle [dot] chave [at] culture [dot] gouv [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Le chantier cathédral en Europe », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 05 avril 2019, https://doi.org/10.58079/12gk

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