AccueilExpérience spectatorielle transcendantale

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Expérience spectatorielle transcendantale

Transcendental spectator experience

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Publié le vendredi 14 février 2020

Résumé

Que dire des œuvres qui radicalisent l’idéalité du point de vue jusqu’à en faire une impossibilité empirique ? La perspective de la Renaissance permet des points de vue tellement surplombants que l’être humain ne peut les atteindre. Toutefois, ce qu’on a pu appeler la « perspective inversée », et plus généralement l’esthétique iconique, appellent aussi un point de vue bien différent du point de vue empirique, peut-être un point de vue eschatologique, depuis la fin des temps. Dans un autre registre, les nouvelles techniques numériques génératives permettent à présent d’engendrer des œuvres d’une durée infinie. Il n’est résolument pas possible de vivre une expérience spectatorielle de ces œuvres sans, à un moment, ne serait-ce que supposer une dimension transcendantale de sa propre subjectivité. La question est de savoir comment décrire ces expériences paradoxales, à la lisière de l’empirie et du transcendantal justement : l’expérience d’échapper à son propre point de vue, d’avoir à prendre un point de vue – dicté par l’œuvre – dont le spectateur réel est par principe incapable.

Annonce

Argumentaire

L’avènement de la perspective albertienne à la Renaissance s’accompagnait de l’idée qu’une peinture perspectiviste devait être appréhendée depuis un seul et unique point de vue. Même si ce point de vue est généralement accessible à l’appréhension – puisqu’il s’agit géométriquement de celui campé par l’artiste – toute la foule d’un musée ne se fond pas en un même individu à un seul œil pour faire l’expérience des peintures. Il semblerait que l’expérience des œuvres soit dès lors possible en reconstruisant mentalement, sans doute malgré soi, ce qui aurait été perçu depuis ce point. Une approche contemporaine dirait que c’est sans doute par la déambulation et la multiplication des points de vue que la perspective est expérimentée non pas uniquement comme technique, mais véritablement comme dispositif artistique. Dans tous les cas, le point de vue idéal n’aurait donc pas à être nécessairement réel.

Que dire toutefois des œuvres qui radicalisent l’idéalité du point de vue jusqu’à en faire une impossibilité empirique ? La perspective de la Renaissance permet des points de vue tellement surplombants que l’être humain ne peut les atteindre. Toutefois, ce qu’on a pu appeler la « perspective inversée », et plus généralement l’esthétique iconique, appellent aussi un point de vue bien différent du point de vue empirique, peut-être un point de vue eschatologique, depuis la fin des temps. Dans un autre registre, les nouvelles techniques numériques génératives permettent à présent d’engendrer des œuvres d’une durée infinie. Il n’est résolument pas possible de vivre une expérience spectatorielle de ces œuvres sans, à un moment, ne serait-ce que supposer une dimension transcendantale de sa propre subjectivité. La question est de savoir comment décrire ces expériences paradoxales, à la lisière de l’empirie et du transcendantal justement : l’expérience d’échapper à son propre point de vue, d’avoir à prendre un point de vue – dicté par l’œuvre – dont le spectateur réel est par principe incapable. Il y a là comme une forme d’outrance du procédé de l’anamorphose, et c’est sur cette tentative que nous souhaiterions réfléchir.

D’autant que cette expérience apparemment impossible est en fait de plus en plus commune. De la caméra numérique faisant passer le point de vue par le chas d’une aiguille au point de vue surplombant du drone, le regard est de plus en plus fréquemment désubjectivé. Partant, l’on est de moins en moins perturbé par de tels points de vue décorporant l’acte cognitif, de moins en moins dérangé d’être aussi à son tour regardé avec surplomb – que ce regard soit de l’ordre de la protection, la prévention, la surveillance ou encore la punition. En ce sens, au-delà de son ancrage résolument esthétique, la question du point de vue, mise en tension par les expériences spectatorielles transcendantales, pose des questions à trois niveaux au moins : philosophique, politique et théologique. Au point de vue philosophique, cette question de l’expérience impossible met en jeu à la fois la question cognitive ou développementale de la constitution du sujet scientifique. Étrangement, le déploiement dans tous les champs du savoir de cette forme de subjectivité non empirique va de pair avec sa contestation via la revendication d’épistémologies situées : féministes, décoloniales, entre autres. Dans cette perspective, c’est la neutralité y compris linguistique du « spectateur », avant même qu’il soit dit transcendantal, qui est destituée au profit du·de la spectateur·rice. Ces épistémologies semblent d’ailleurs jouer politiquement à contre-temps d’une autre forme, hors du champ philosophique et épistémologique, de spectacle transcendantal : celle du contrôle omnipotent (dans la statistique ou la télé-surveillance). Ces questions rejoignent enfin la discussion théologique ancienne relative à l’articulation de la pluralité des regards et de l’unité omnivoyante qui renvoie au pari de transcendance, non sans rapport avec l’opposition précédente : providence bienveillante ou surveillance punitive.

Ces trois champs de questions ne doivent pas être séparés entre eux ni de l’esthétique. Au contraire, notre objectif est de réfléchir au schème du spectateur transcendantal dans la mesure où il les traverse et les structure. C’est dans cette visée que cette journée d’étude espère réunir des chercheuses et chercheurs de différentes disciplines afin d’aborder le sujet conjointement et de manière résolument transdisciplinaire.

Modalités de proposition

Plus que la tenue d’un petit colloque, cette journée d’étude a pour objectif de constituer un groupe de travail. L’idéal serait donc de prévoir des interventions relativement brèves afin de permettre la discussion.

Merci de nous envoyer vos propositions avant le 20 mars 2020.

Précisions logistiques

Les frais de transport et d’hébergement seront à la charge des personnes répondant à l’appel. Le repas du midi sera à la charge de l’équipe organisatrice.

La rencontre aura lieu le mercredi 20 mai dans les locaux de l’IPT (83, boulevard Arago – 75017 Paris).

Comité d'organisation

  • Anthony Feneuil
  • Yves Meessen
  • Bruno Trentini 

Contacts

  • Anthony Feneuil : anthony[point]feneuil[at]univ-lorraine.fr
  • Yves Meessen : yves[point]meessen[at]univ-lorraine.fr
  • Bruno Trentini : bruno[point]trentini[at]univ-lorraine.fr

Lieux

  • IPT, salle à confirmer - 83, boulevard Arago – 75017 Paris
    Paris, France (75)

Dates

  • vendredi 20 mars 2020

Contacts

  • Bruno Trentini
    courriel : bruno [dot] trentini [at] univ-lorraine [dot] fr

Source de l'information

  • Bruno Trentini
    courriel : bruno [dot] trentini [at] univ-lorraine [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Expérience spectatorielle transcendantale », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 14 février 2020, https://doi.org/10.58079/14e2

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