Página inicialApprivoiser la rente ? Les enjeux des phénomènes rentiers et leur traitement par l’économie institutionnelle

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Apprivoiser la rente ? Les enjeux des phénomènes rentiers et leur traitement par l’économie institutionnelle

Dealing with Rent and Rentier Economies: New Challenges for Institutional Economics

Revue de la régulation

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Publicado terça, 31 de março de 2020

Resumo

La question de la rente parcourt toute l’histoire contemporaine de la pensée économique. Des économistes classiques, puis marxistes, aux variantes actuelles de l’économie standard et aux approches institutionnalistes les plus récentes, la rente jouit, en tant que concept théorique et objet empirique, d’une remarquable popularité depuis plus de deux siècles. On peut expliquer cet intérêt par le caractère imprévisible et paradoxal – donc attirant pour l’analyste – de certains effets secondaires indésirables que l’abondance en ressources naturelles semble porter en elle, mais aussi par le fait que ses angles d’approches peuvent être variés.

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Coordinateurs du numéro

  • Adrien Faudot (adrien.faudot@univ-grenoble-alpes.fr) 
  • Julien Vercueil (julien.vercueil@inalco.fr).

Argumentaire

La question de la rente parcourt toute l’histoire contemporaine de la pensée économique. Des économistes classiques, puis marxistes, aux variantes actuelles de l’économie standard et aux approches institutionnalistes les plus récentes, la rente jouit, en tant que concept théorique et objet empirique, d’une remarquable popularité depuis plus de deux siècles. On peut expliquer cet intérêt par le caractère imprévisible et paradoxal – donc attirant pour l’analyste – de certains effets secondaires indésirables que l’abondance en ressources naturelles semble porter en elle, mais aussi par le fait que ses angles d’approches peuvent être variés.

  • Celui de sa formation d’abord : la rente des matières premières ne se laisse pas « apprivoiser » facilement et doit son existence à une combinaison de facteurs sur lesquels ni les compagnies ni les gouvernements n’ont de prise. La localisation et les coûts d’exploitation des gisements recèlent des surprises, tandis que la volatilité souvent sauvage des cours pose des problèmes redoutables aux prévisionnistes et aux entreprises. À l’échelle sectorielle, l’hétérogénéité et la variabilité intrinsèques des sources de revenus pour les industries qui en dépendent produisent à la fois des chocs et des distorsions de concurrence qui peuvent se traduire par des phénomènes cumulatifs de concentration et de rendements croissants difficiles à réguler par les autorités.

  • Sous l’angle de la répartition des revenus, l’exploitation de matières premières, lorsqu’elle est privée, entraîne une différenciation considérable des revenus primaires et des patrimoines. Lorsqu’elle est le fait d’une compagnie nationale, l’État endosse alors un rôle central dans la réallocation de la rente (Talha, 2003). Par ailleurs, la source de la rente est le plus souvent constituée d’un stock de matières premières épuisable. Ces caractéristiques et leurs conséquences sur la distribution des revenus sont le plus souvent prises en charge par un traitement fiscal spécifique – qui, plus rarement, peut aussi tenter de tenir compte des enjeux intergénérationnels de l’épuisement de la rente –, dont les variantes possibles sont nombreuses et sont à chaque fois le fruit de compromis politiques spécifiques (Hertog, 2017).

  • Sous l’angle des « grands équilibres macro-économiques » enfin, la rente des matières premières oblige ceux qui l’étudient à revisiter des questions classiques, comme celle des sources et de la nature des processus inflationnistes, ou celle des déterminants du solde courant et de la compétitivité structurelle de l’appareil industriel (Bresser-Pereira, 2008). Parmi ces questions figurent également les régimes de change en vigueur dans les économies rentières.

Le présent appel à contributions de la Revue de la régulation entend participer à un renouvellement des approches institutionnelles de la rente des matières premières sur toutes ces dimensions. Les contributions du dossier pourront s’atteler à répondre à plusieurs questions dont voici une liste non-exhaustive :

  • À la lumière des évolutions des dernières décennies, a-t-on des raisons d’élaborer une nouvelle théorie de la rente ?

  • Quel pourrait-être le noyau commun aux régimes rentiers contemporains ?

  • Une comparaison des trajectoires nationales permet-elle d’expliciter les conditions qui ont permis de surmonter la malédiction de la rente ?

  • Peut-on dresser une taxinomie des régimes juridiques et institutionnels de la rente liée aux ressources naturelles ?

  • Quels sont les régimes monétaires et fiscaux associés aux régimes rentiers ?

  • Comment expliquer la faiblesse de la démocratie dans les États-Nations typiquement rentiers ?

  • Quel rôle jouent les États rentiers dans la dynamique de l’économie mondiale ?

  • Comment se forment les prix des matières premières et quelles en sont les conséquences pour la viabilité des régimes domestiques ?

  • De quelles manières le caractère épuisable de certaines ressources, la prise en compte de l’impact écologique de leur exploitation et la contestation nouvelle de leur exploitation par une partie grandissante des populations devraient modifier la manière d’envisager les politiques publiques liées à la rente ?

Cet appel prend appui sur un constat et une interrogation empiriques : les économies nationales où la rente des matières premières demeure importante aujourd’hui sont réparties sur tous les continents, mais seule une poignée d’entre elles sont des économies avancées, et elles l’étaient déjà avant de développer des activités rentières (Australie, Canada, Norvège pour les plus importantes). Au contraire, l’écrasante majorité des économies rentières ne participe pas de manière active aux flux internationaux de production et d’innovation industrielle. Tout se passe comme si l’exploitation de telles richesses avait bloquées ces économies dans une configuration institutionnelle et productive sans issue, caractérisée par une polarisation industrielle fortement marquée, une difficulté certaine à développer des écosystèmes innovants au-delà des industries extractives, un niveau d’inégalités de revenus et de patrimoine anormalement élevé, un État largement dépendant financièrement de ses prélèvements sur la rente et une conjoncture macroéconomique indissociablement liée aux fluctuations des cours des matières premières (Rosales, 2017 ; Faudot, 2019 ; Vercueil, 2019). En dépit de ces ressemblances, n’existe-t-il pas aujourd’hui encore une diversité de formes prises par les économies rentières, dont il serait important de rendre compte pour mieux en saisir les défis ?

L’appel est ouvert à des contributions analytiques et théoriques de la rente. Le constat dressé ci-dessus n’est en définitive pas très éloigné de celui qu’ont pu faire, avec des approches variées, nos aînés, il y a vingt, trente ou quarante ans (Mahdavy, 1970), considérant l’effet des fluctuations des cours des matières premières sur les économies rentières : sous leur forme néoclassique via les modèles du « syndrome hollandais » (Dutch disease) (Corden & Neary, 1982 ; Corden, 1984), à travers les analyses en termes de « piège des produits de base » (staples traps) (Hidalgo et al., 2007) ou économétriques lorsqu’il est question de la « malédiction des ressources naturelles » (resource curseparadox of plenty) (Sachs & Warner, 2001). Il est à noter que, bien que ne partageant pas les mêmes options méthodologiques, ces approches standard de la rente ont produit des conclusions qui n’étaient pas toujours éloignées de celles des approches hétérodoxes.

Les premières analyses des économies rentières ont-elles été prolongées, voire dépassées dans la période récente par des avancées significatives ? La littérature contemporaine sur le néo-extractivisme, dont l’attention s’est beaucoup portée sur l’Amérique latine (Burchardt & Dietz, 2014), peut-elle être considérée comme un prolongement de celles-ci ? Sur la base d’études contemporaines du rôle de la rente dans la régulation macro-économique et sectorielle, quelles sont les propositions utiles à soumettre à la discussion, en termes d’encadrement institutionnel et de politiques structurelles vis-à-vis des secteurs rentiers ?

À la croisée des entrées empiriques et analytiques, les propositions que cet appel entend susciter peuvent aussi avoir une portée plus conceptuelle ou méthodologique : quels méthodes et outils d’analyse seraient-ils susceptibles de mieux rendre compte de la dynamique de la rente et de l’exposition des économies nationales à celle-ci ? D’un point de vue conceptuel, jusqu’à quel point les économies rentières contemporaines peuvent-elles être qualifiées d’économies capitalistes, voire d’économies de marché ?

Les contributeurs pourront trouver dans les approches régulationnistes de nombreuses pistes et sources pour nourrir leur propre réflexion sur le sujet (Boyer, 2015). Cet appel ne se limite toutefois pas à la théorie de la régulation. Au contraire, les auteurs de l’appel souhaitent que ce dossier soit l’occasion de confronter l’ensemble des approches d’économie politique et institutionnelle sur une thématique riche, par nature propice à une grande variété de perspectives.

Soumission des articles

Les contributeurs sont invités à envoyer une proposition d’article de trois pages, incluant au moins cinq références bibliographiques majeures.

Les propositions doivent être adressées à

  • Adrien Faudot (adrien.faudot@univ-grenoble-alpes.fr) 
  • Julien Vercueil (julien.vercueil@inalco.fr).

Merci de noter les dates suivantes :

  • Date limite de soumission des propositions d’article : 1er juin 2020

  • Réponse aux auteurs : 1er juillet 2020
  • Date limite de soumission des articles entiers : 1er novembre 2020

Il est à noter que l’acceptation d’une proposition d’article n’engage pas les éditeurs à accepter la version rédigée de l’article. Les articles entiers sont évalués par deux rapporteurs anonymes, en conformité avec la politique rédactionnelle de la Revue de la Régulation.

Merci de suivre les instructions aux auteurs : https://journals.openedition.org/regulation/1701 notamment nos recommandations éditoriales.

Pour toute information supplémentaire, veuillez contacter :

  • Adrien Faudot : adrien.faudot@univ-grenoble-alpes.fr
  • Julien Vercueil : julien.vercueil@inalco.fr

Bibliographie

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Beblawi H. & G. Luciani (eds) (1987), The Rentier State: Nation, State and Integration in the Arab World, London, Croom Helm.

Bina C. (1989), « Some controversies in the development of rent theory : the nature of oil rent », Capital & Class, vol. 13, no 3, p. 82-112.DOI : 10.1177/030981688903900104

Boyer R. (2015), Économie politique des capitalismes. Théorie de la régulation et des crises, Paris, La découverte, coll. « Grands repères. Manuels ».

Bresser-Pereira L.-C. (2008), « The Dutch disease and its neutralization: a Ricardian approach », Brazilian Journal of Political Economy, vol. 28, no 1, p. 47-71.DOI : 10.1590/S0101-31572008000100003

Burchardt H. J. & K. Dietz (2014). « (Neo-)extractivism – a new challenge for development theory from Latin America », Third World Quarterly, vol. 35, no 3, p. 468-486.

Corden W. M. & J. P. Neary (1982), « Booming sector and de-industrialisation in a small open economy », Economic journal, vol. 92, no 368, December, p. 825-848.DOI : 10.2307/2232670

Corden W. M. (1984), « Booming sector and Dutch disease economics: survey and consolidation », Oxford Economic Papers, vol. 36, no 3, November, p. 359-380.DOI : 10.1093/oxfordjournals.oep.a041643

Faudot A. (2019), « Saudi Arabia and the rentier regime trap: a critical assessment of the plan Vision 2030 », Resources Policy, vol. 62, p. 94-101.DOI : 10.1016/j.resourpol.2019.03.009

Hertog S. (2017), « Making wealth sharing more efficient in high-rent countries: the citizens’ income », Energy Transitions, vol. 1, no 2, p. 1-14.DOI : 10.1007/s41825-017-0007-2

Hidalgo C., Klinger B., Barábasi A.-L. & R. Hausmann (2007), « The product space conditions the development of nations », Science, 27 July, vol. 317, no 5837, p. 482-487.DOI : 10.1126/science.1144581

Luciani G. (ed.) (2017), Combining Economic and Political Development : The Experience of MENA, International Development Policy series No.7, Graduate Institute Publications, Genève et Brill-Nijhoff, Boston.

Mahdavy H. (1970). « The patterns and problems of economic development in rentier states: the case of Iran » in Cook M. A. (ed.), Studies in the Economic History of the Middle East, London, Oxford University Press, p. 427-467.

Rosales A. (2017), « Contentious nationalization and the embrace of the developmental ideals: resource nationalism in the 1970s in Ecuador », The Extractive Industries and Society, vol. 4, no 1, p. 102-110.DOI : 10.1016/j.exis.2016.12.007

Sachs J. & A. Warner (2001), « The curse of natural resources », European Economic Review, vol. 45, nos 4-6, p. 827-838.DOI : 10.1016/S0014-2921(01)00125-8

Talha L. (2003), « Le régime rentier et son mode de régulation. Essai de problématique », communication présentée au Forum de la Régulation, 9-10 octobre, Paris.

Vercueil J. (2019), Économie politique de la Russie (1918-2018), Paris, Le Seuil, coll. « Points. Économie ».

Locais

  • Revue de la régulation - MSH Paris Nord, 20 avenue George Sand
    La Plaine-Saint-Denis, França (93 100)

Datas

  • segunda, 01 de junho de 2020

Palavras-chave

  • rente, économies rentières, matières premières, économie institutionnelle, régulation macro-économique et sectorielle

Contactos

  • Adrien Faudot
    courriel : adrien [dot] faudot [at] univ-grenoble-alpes [dot] fr
  • Julien Vercueil
    courriel : julien [dot] vercueil [at] inalco [dot] fr

Fonte da informação

  • Julien Vercueil
    courriel : julien [dot] vercueil [at] inalco [dot] fr

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« Apprivoiser la rente ? Les enjeux des phénomènes rentiers et leur traitement par l’économie institutionnelle », Chamada de trabalhos, Calenda, Publicado terça, 31 de março de 2020, https://doi.org/10.58079/14rp

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