AccueilVi(es)rus : (in)certitudes en situation d'épidémie

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Vi(es)rus : (in)certitudes en situation d'épidémie

Life vs. virus: (un)certainties at times of epidemics

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Publié le vendredi 16 juillet 2021

Résumé

Ce colloque s’inscrit dans une perspective pluridisciplinaire visant à interroger les épidémies en tant que « faits sociaux totaux » depuis le prisme des incertitudes qu’elles soulèvent. Nous souhaitons partir de l’analyse de la place qu’y occupe le vivant, qu’il soit humain ou non-humain. Ce positionnement se révèle important pour interpréter la maladie, comme pour formuler des dispositifs à même de la soigner ou de la contenir. En effet, si les épidémies ne changent pas le monde tel qu’il est, elles n’en remodèlent pas moins nos perceptions. Les situations d’incertitude qu’elles sous-tendent s’accompagnent souvent d’un renversement des ordres établis. Dès lors, les épidémies « bousculent » nos modes de vie en nous rappelant leur part invisible, et ce, que ce soit en pratiques ou en représentations. Ainsi, nous partons du postulat que si l’épidémie est un « évènement », elle n’en demeure pas moins une situation de renversement de valeurs, lesquelles passent, dans ce contexte, de produit à signe, et inversement.

Annonce

Argumentaire

Ce colloque s’inscrit dans une perspective pluridisciplinaire visant à interroger les épidémies en tant que « faits sociaux totaux » depuis le prisme des incertitudes qu’elles soulèvent. Nous souhaitons partir de l’analyse de la place qu’y occupe le vivant, qu’il soit humain ou non-humain. Ce positionnement se révèle important pour interpréter la maladie, comme pour formuler des dispositifs à même de la soigner ou de la contenir. En effet, si les épidémies ne changent pas le monde tel qu’il est, elles n’en remodèlent pas moins nos perceptions. Les situations d’incertitude qu’elles sous-tendent s’accompagnent souvent d’un renversement des ordres établis. Dès lors, les épidémies « bousculent » nos modes de vie en nous rappelant leur part invisible, et ce, que ce soit en pratiques ou en représentations. Ainsi, nous partons du postulat que si l’épidémie est un « évènement », elle n’en demeure pas moins une situation de renversement de valeurs, lesquelles passent, dans ce contexte, de produit à signe, et inversement.

Il ne s’agit donc pas de dresser le constat des multiples bouleversements sociaux, politiques, sanitaires, environnementaux ou, au-delà, épistémologiques provoqués par l’émergence de nouveaux pathogènes. Le propos est de rendre compte de la façon dont les sociétés et les groupes humains négocient avec les virus. Là, des postures s’affirment sur fond de certitudes, mais aussi du fait des incertitudes qui perdurent au-delà des explications fournies sur ce que la maladie nous dit de cette cohabitation virale. À ce titre, les épidémies s’insèrent tout autant dans un canevas d’expériences qui les précèdent, qu’elles ne participent de situations « inédites » ou « attendues », notamment en matière, de médecine, d’écologie, d’humanitaire, de sécuritaire, de relations économiques ou encore de directives politiques.

Comment les virus transforment-ils notre rapport à l’espace, au temps, aux groupes et aux « autres », qu’ils soient humains ou non humains ? Dans quelles mesures les situations d’épidémies participent-elles de l’accélération, de la décélération, de la résurgence, mais aussi de l’émergence de « nouvelles » maladies ? Que nous révèlent les épidémies sur nos relations écosystémiques, sur les limites de nos modes et conception de l’habiter ainsi que sur les politiques de l’espace ? Comment les mobilités interfèrent-elles sur la circulation virale, et inversement ? Dans quelles mesures les épidémies accentuent-elles les situations de violence, de défiance et de vulnérabilité socio-économique ? Comment participent-elles aux transformations des systèmes politiques et économiques ? Comment transforment-elles notre rapport à la vie, à la maladie, mais aussi à la perte et au deuil, en remaniant notre perception du changement et des possibles ? Que révèlent-elles de nos façons d’être au monde et jusqu’où les bouleversent-elles ?

Autant de questions dont nous souhaiterions débattre dans le cadre de ce colloque avec, comme trame de fond, une volonté commune : rendre compte de la place qu’occupe l’incertitude dans les réponses adoptées en situation d’épidémies. Pour aborder ces enjeux, nos échanges s’organiseront autour de 4 interfaces humains-virus que sont les récits, les croyances, les soins et les habitats.

Interfaces thématiques 

Interface A : Récits et épidémie

L’avènement d’une menace épidémique n’est pas un évènement comme les autres. Une fois identifié, son caractère « unique » exige souvent des groupes exposés à l’agent pathogène qu’ils reconfigurent leurs pratiques quotidiennes. Que ce soit par des dispositifs de protection vaccinaux comme non vaccinaux, par l’orchestration de temporalités différentielles, par la régulation ou l’interdiction d’accéder à des espaces communément destinés à être partagés, qu’ils soient publics ou privés, ou encore par la suspension des pratiques de socialisation, ordinaires comme extraordinaires, ces transformations matérielles font l’objet d’une narration dont l’effet temporalise l’expérience épidémique tout autant qu’elle ne la spatialise.

Ces dispositifs tendent à faire office de « marqueur de temps ». Ils marquent l’irruption d’un évènement mais ils ne l’absorbent pas. Sans doute, les pratiques et les techniques qu’ils sous-tendent sont le reflet d’actions négociées en vertu de l’ayant-lieu. À ce titre, ces dispositifs répondent à la certitude d’être confronté à une situation d’urgence mais ce n’est pas parce qu’ils sont le produit d’une certitude qu’ils font de facto sens. L’évènement, tout critique soit-il, prend toujours place dans un horizon d’attentes mêlées de certitudes et d’incertitudes. Il n’est pas seulement « ce qui arrive » mais aussi ce qui s’inscrit dans une expérience collective qui le précède. Tout à la fois évènement et processus, les épidémies relèvent ainsi de ces situations paradoxales où l’exception, si elle justifie la suspension des règles de la vie ordinaire, n’en consolide pas moins des formes de solidarités souvent rendues invisibles au quotidien.  

Dans cette quête de sens, les récits formés en réponse aux situations épidémiques entrent dès lors en écho avec divers phénomènes qu’ils côtoient, révèlent, forment ou transforment. Construits sur fond de certitudes, ils contiennent une part de contradictions et d’ambiguïtés qui tendent le tissu de la vie sociale. 

Interface B : In certitudes et in croyances virales

Longtemps considérées comme le produit de l’ignorance, les croyances peuvent aussi être engendrées par l’inflation des connaissances. Les rationalités supposées dans les conduites de nos sociétés contemporaines, mieux informées, ne protègent pas contre les croyances. L’ignorance comme la connaissance, peuvent être des matrices d’incertitude, à l’origine à la fois d’incroyance et de croyances. La saturation et la dissémination de l'information peuvent favoriser des croyances multiples et contradictoires qui finissent par s’annuler dans un horizon d’incertitude.

Il n’est donc pas étonnant de voir ré émerger des croyances anciennes, notamment de type religieux et d’autres inédites, les unes et les autres inscrites dans certaines formes de spiritualités. La colère divine expliquait jadis les fléaux qui s’abattaient sur une humanité démunie. Aujourd’hui, des rumeurs technophobiques ou des croyances en des extraterrestres manipulées par un génie malin peuvent venir à la rescousse d’une humanité qui a cru à l’efficacité de la rationalité technique. Ramenée à une sorte d’incertitude ontologique, mise face à son impotence, l’humanité renoue avec le spirituel et se met alors à la recherche d’une croyance salvatrice. Dans ce contexte, l’étude des séquences d’actions formulées pour répondre aux temps et aux lieux des épidémies est particulièrement révélatrice des tensions générées par ces incertitudes virales. Parce qu’elles impliquent des acteurs qu’ils changent leurs manières d’être et d’agir au quotidien, l’application de ces dispositifs s’accompagne ainsi d’émotions et de valeurs souvent contradictoires. Ces transformations, qui concernent tant la dimension matérielle qu’idéelle des collectifs humains dans leurs relations avec l’environnement où émergent les maladies, se heurtent ainsi à certaines pratiques traditionnelles, l’épidémie faisant dès lors office d’épreuve morale pour les collectifs affectés.   

Interface C : Soins et épidémies

Si les épidémies relèvent de ces phénomènes qui reconfigurent nos pratiques et nos représentations du vivre ensemble, c’est probablement autour des questions du soin porté à l’humain qu’elles se donnent le plus à voir, comme à penser. Alors que les pathogènes infectent des cellules, les épidémies affectent en premier des corps et, par extension, l’ensemble des relations qu’ils entretiennent avec leur environnement social, culturel, religieux, politique ou économique.

Ainsi, les épidémies bousculent les frontières de notre expérience de la collectivité et, par corrélation, nos rapports aux autres. En effet, les contacts et les échanges qui rythment l’activité sociale quotidienne deviennent alors des situations « à risque » de contagion. Certes, les dispositifs et les protocoles sanitaires adoptés en réponse à la circulation d’un pathogène entendent limiter et contenir ces risques. Pour autant, ils ne peuvent à eux seuls neutraliser l’incertitude générée par cette temporalité de crise.

La certitude que la maladie se transmet par contact et par échanges d’humeurs place les autorités médicales ou politiques dans une situation pour le moins ambiguë. Il est attendu d’elles puissent répondre immédiatement à toutes crises menaçant les vies humaines, que ce soit dans leur dimension biologique comme sociale. Pour autant, l’émergence d’un virus ne met pas un terme à la circulation d’autres pathogènes. Par ailleurs, l’état de crise sanitaire qu’il provoque se doit de composer avec les crises précédentes, qu’elles soient d’ordre médicale ou sociale. Se pose dès lors la question des modalités de maintien des protocoles de soins ou des dispositifs d’aides d’urgences qui prévalaient avant l’épidémie. Aussi, qu’il s’agisse d’actes médicaux ou caritatifs, la question des soins en temps d’épidémie nous invite à penser la place du vivant et des formes de vies depuis leur singulière ambivalence, le soin devenant tour à tour « acte » de vie et « menace de mort », les dispositifs vaccinaux occupant, dans cette relation, une place particulière.

Interface D : Habitats et épidémie

Sachant que ces virus ne se répliquent que chez des hôtes, leur propagation implique fatalement la mise en contact de différents hôtes qui, par échange d’humeurs, s’infectent mutuellement. Une autre certitude concernant ces hôtes, ce n’est qu’aucun d’entre eux, humains comme non-humains, ne vit en autarcie. Ainsi, virus et hôtes partagent-ils les mêmes habitats, mais sans pour autant s’y inscrire ou s’y disposer de la même façon.

En outre, même s’ils sont partagés, ces habitats ne sont pas de l’ordre de l’unique. Multiples, ils se déclinent selon plusieurs modèles qui en appellent à des administrations différentielles : certains sont urbains et d’autres ruraux ; certains sont organisés pour des modes de vie nomades, là où d’autres sont agencés pour répondre à des quotidiennetés sédentaires ; certains sont occupés de manières collectives, et d’autres de façon dispersée ; certains sont régis par le droit régulier, là où d’autres répondent à une pluralité de régime d’ordre de nature moral comme social ; certains sont administrés par des économies formelles, là où d’autres le sont par des économies souterraines.

Ainsi, malgré la certitude que le contrôle d’une épidémie passe par celui des interactions entre agents pathogènes et potentiels hôtes, la question de l’habitat et des divers modes d’habiter continue à soulever nombre d’incertitudes à l’heure de déployer des stratégies pour contenir ou prévenir les épidémies. Il faut alors hiérarchiser les signaux d’alertes pour se préparer à différentes formes de catastrophes dont la pandémie peut être la préfiguration.  

Modalités de participation

Les propositions de communication sont à envoyer par courriel avant le 30 septembre 2021 à virus.incertitudes@gmail.com          

Elles comprendront :

  • un résumé de la communication de 4 000 signes maximum, espaces compris et bibliographie incluse, et identifiant, si possible, l’interface de communication souhaitée.
  • un CV synthétique du(des) auteur(s), d’une page maximum.

Calendrier

  • Date limite de soumission des propositions de communications : 30 septembre 2021

  • Notification d’acceptation des propositions : 4 octobre 2021.
  • Dates du colloque : 17 et 18 novembre 2021

Lieu : Lyon

Comité d’organisation

  • Tiphaine Duriez (MCF Anthropologie – ULL2 - LADEC)
  • Frédéric Keck (DR Anthropologie – CNRS – LAS)
  • Abderrahmane Moussaoui (PR Anthropologie – ULL2 - LADEC)
  • Jean Michel Rossignol (PR Honoraire– Université Paris Saclay)

Comité scientifique

  • Julien Bondaz (MCF Anthropologie – ULL2 – LADEC)
  • Bianca Botéa (MCF Anthropologie – ULL2 – LADEC)
  • Pierre Capy (PR Evolution – Université Paris Saclay – EGCE)
  • Juliette Cleuziou (MCF Anthropologie – ULL2 – LADEC)
  • Michèle Cros (PR Anthropologie – ULL2 – LADEC)
  • Dejan Dimitrijevic (PR Anthropologie – ULL2 – LADEC)
  • Abderrahmane Moussaoui (PR Anthropologie, ULL2 – LADEC)
  • Perig Pitrou (DR Anthropologie – CNRS - LAS)
  • Maxime Ratinier (MCF Virologie – EPHE – IVPC)
  • Jean Michel Rossignol (PR Honoraire, Virologie - Université Paris Saclay
  • Sophie Hélène Trigeaud (HDR Anthropologie – Chercheuse associée au LADEC)
  • Christian Trépo (PR Émérite en Médecine – INSERM – CRCL)
  • Yannick Simonin (MCF Virologie – Université de Montpellier- PCCEI)
  • Martin Soares (MCF Anthropologie – ULL2 – LADEC)
  • Thierry Wirth, (DE-EPHE, Microbiologie évolutive et génomique).

Lieux

  • Université Lumière Lyon 2, Campus des Berges du Rhône, 16 Quai Claude Bernard
    Lyon, France (69007)

Format de l'événement

Événement uniquement sur site


Dates

  • jeudi 30 septembre 2021

Mots-clés

  • incertitude, récit, habitat, soin, (in)croyance

Contacts

  • Tiphaine Duriez
    courriel : virus [dot] incertitudes [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Tiphaine Duriez
    courriel : virus [dot] incertitudes [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Vi(es)rus : (in)certitudes en situation d'épidémie », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 16 juillet 2021, https://doi.org/10.58079/1707

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