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La crise de 1877 dans l’arc méditerranéen

Aspects politiques et institutionnels

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Published on Monday, December 20, 2021

Abstract

La crise du 1877, que l’historienne Fresnette Pisani-Ferry n’hésite pas à qualifier, dans son ouvrage de « coup d’état manqué », marque la transition entre deux époques de la troisième République. Elle est la résultante logique d’une crise politique et institutionnelle en germe depuis plusieurs mois. Paradoxalement, alors que le 16 mai et ses répercussions jouent un rôle fondamental dans l’histoire institutionnelle et politique de la France contemporaine, jusqu’à influencer nos sensibilités contemporaines, l’historiographie liée à cette crise est relativement mince. Dans le cadre de l’arc méditerranéen (actuelles régions PACA, Occitanie et Corse) comment cet événement est-il perçu ?

Announcement

Argumentaire

La crise du 1877, que l’historienne Fresnette Pisani-Ferry n’hésite pas à qualifier, dans son ouvrage de « coup d’état manqué », marque la transition entre deux époques de la troisième République. Elle est la résultante logique d’une crise politique et institutionnelle en germe depuis plusieurs mois. En effet, après le vote des lois constitutionnelles de 1875, si les élections du 30 janvier 1876 confèrent à la droite une mince majorité au Sénat, les premières élections législatives du régime, les 20 février et 5 mars 1876, témoignent des progrès de l’idée républicaine en France. Au Sénat, les conservateurs l’emportent de deux voix seulement sur les républicains (151 voix contre 149). La Chambre, quant à elle, est majoritairement républicaine, elle est alors composée de 360 députés républicains et 155 députés conservateurs. Le conflit qui s’étend entre la Chambre d’une part et le président de la République et son entourage très monarchiste et nostalgique d’autre part, éclate le 16 mai. Le passage d’une République pondérée et institutionnelle à une République conventionnelle est loin de se faire sans heurts.

En effet le maréchal de Mac-Mahon, président de la République, fait publier au Journal Officiel le 16 mai une lettre contraignant le président du Conseil Jules Simon, membre de la gauche républicaine, à donner sa démission. Le duc Albert de Broglie est alors chargé de constituer un nouveau ministère conservateur qui ressemble fortement à celui du 24 mai 1873, jour de la démission d’Adolphe Thiers et de l’élection à la présidence de la République du maréchal de Mac-Mahon. C’est aussi le début d’une tentative de restauration monarchique par une politique conservatrice avec, notamment, le rétablissement de « l’ordre moral ».

Lors du 16 mai 1877, la Chambre émet un vote de défiance par 363 voix républicaines contre 158 conservatrices. Cette date scelle alors l’union des républicains qui, par un manifeste, dénoncent une politique de réaction et d’aventures. Le nombre 363 prend valeur de symbole. Pour contrer cette opposition, et avec l’accord du Sénat, le maréchal dissout la Chambre le 25 juin. L’objectif du chef de l’Etat est de renverser la majorité à la Chambre en pesant sur l’opinion publique par tous les moyens encore disponibles. La campagne pour les futures élections législatives prévues pour le mois d’octobre 1877 est organisée par le cabinet de Broglie qui, prônant le thème du rétablissement de l’ordre moral pour lutter contre le républicanisme, exerce une pression officielle des plus singulières dans tout le pays. Caricatures, créations lexicales et objets de propagande prouvent à quel point la France est secouée par la crise politique. Car cette dernière pose une question fondamentale qui est celle de la conception même du pouvoir central. Dans ce court moment qui débute au mois de mai 1877 et s’achève au mois de décembre, c’est la nature même de l’Etat qui est en jeu. Comme le souligne l’historienne Jacqueline Lalouette, si le souvenir du 16 mai 1877 semble maintenant bien estompé dans la mémoire collective, cette date reste un point de repère fondamental dans l’histoire politique de la France contemporaine pour les historiens, les historiens du droit, les constitutionnalistes et les politistes. Cette crise illustre comment deux conceptions du rôle du Président de la République se sont affrontées : d’un côté une conception qui se rapproche de celle de la Ve République : le Président a sa responsabilité engagée devant le pays (même s’il est irresponsable devant la chambre) et il a le droit d’avoir une politique personnelle (c’était la conception de Mac Mahon) ; d’un autre côté, la conception républicaine exprimée par Gambetta pour qui seule la Chambre des députés est investie de la souveraineté nationale et exprime les souhaits des électeurs, le Président de la République devant se plier aux volontés de représentants de la nation.

La crise du 16 mai fait aussi partie d’un ensemble d’événements, elle ne désigne pas une journée précise, mais, plus largement, une période politiquement agitée et profondément troublée. Quelques jours auparavant, le 4 mai, Léon Gambetta lance lors d’une séance à la Chambre des députés : « Le cléricalisme, voilà l’ennemi ! ». Pour l’historien Jean-Marie Mayeur, le 16 mai est aussi à considérer comme une affaire cléricale. Les républicains y dénoncent avec la plus grande véhémence le rôle des jésuites, des prêtres, du Vatican.

Les effets institutionnels de la crise, ne vont pas s’effacer au bout de quelques années mais vont se faire sentir durant plusieurs décennies. Pendant longtemps, aucun président de la République ne va utiliser son droit de dissolution et priver ainsi le régime parlementaire français de stabilité gouvernementale. Il faudra attendre la cinquième République, soit près de quatre-vingts ans, pour que disparaisse cette phobie républicaine, d’autant que les souvenirs de 1877, se sont mêlés à ceux de 1873 mais surtout à ceux du 2 décembre 1851.

Paradoxalement, alors que le 16 mai et ses répercussions jouent un rôle fondamental dans l’histoire institutionnelle et politique de la France contemporaine, jusqu’à influencer nos sensibilités contemporaines, l’historiographie liée à cette crise est relativement mince. L’ouvrage de Fresnette Pisani-Ferry date de 1965 et il a fallu attendre l’année 2009 pour qu’une journée d’étude, intitulée Le Seize-Mai revisité, soit organisée par l’IRHIS de l’Université de Lille 3, à l’initiative de Jean-Marc Guislin, Professeur en histoire contemporaine. Une journée néanmoins centrée autour d’une vision « par le haut », tant au niveau des instances gouvernementales que politiques.

Aussi, les champs vierges de toutes formes d’analyse restent nombreux. A l’échelle des départements, pratiquement tout reste encore à dépouiller au niveau des archives et à analyser. Une question reste en effet sans réponse : quels sont, « vus d’en bas », les effets et les répercussions de la crise à l’échelon local ?

Dans le cadre de l’arc méditerranéen (actuelles régions PACA, Occitanie et Corse) comment cet événement est-il perçu ? Au regard des carences de l’historiographie, il peut être particulièrement utile de s’interroger sur le sens de cette crise politique telle qu’elle est vécue localement, en particulier dans un espace où sont apparues précocement des formes d’adhésion à la République. Il s’agit en effet de départements qui, dès le milieu du XIXe siècle ont manifesté leur adhésion aux valeurs de la démocratie et au rôle politique des assemblées. Quel est le rôle de la presse, des discours, des élites, celui de l’imagerie, de la symbolique ou même des lieux de « sociabilité coutumière » comme le définit Maurice Agulhon ? Quels sont le niveau d’implication des pouvoirs publics dans l’élection et les pressions exercées sur l’électorat ? Quelles répercussions (éventuelles épurations) affectent le personnel politique, le personnel préfectoral, administratif, judiciaire ? Une géographie politique s’esquisse-t-elle, durant et à l’issue de cet épisode ? Un particularisme régional voire local peut-il se dessiner ?

Les résultats auxquels parviendra ce colloque appellent ensuite une comparaison à l’échelle nationale et feront l’objet d’une nouvelle manifestation scientifique.

Programme prévisionnel

  • Un volet d’histoire politique et institutionnelle générale, relatif à la crise de 1877.
  • Un volet sur les acteurs locaux de la crise : préfet, presse, Eglise, armée, élites, personnel administratif.
  • Un volet sur la dimension politique et l’attitude des élus : députés, sénateurs, élus locaux, épuration.
  • Un volet comparatif avec d’autres départements voisins.
  • Un volet consacré à cette crise vue de l’étranger.

Modalités de soumission des propositions

Les propositions de communications sont à soumettre en français à :  jean-paul.pellegrinetti@univ-cotedazur.fr et/ou marc.ortolani@univ-cotedazur.fr

Elles ne devront pas excéder 5 000 signes (tout compris) et devront comporter une brève présentation de l’auteur et un bref descriptif des sources envisagées. Le dépôt des propositions s’effectuera jusqu’au 15 mars 2022. Les candidats seront informés de la décision du comité organisateur au plus tard le 1er juin 2022.

Les communications au colloque seront d’une durée de vingt minutes et en langue française. Les actes du colloque seront publiés. 

Le colloque aura lieu à Nice les 13 et 14 octobre 2022.

Comité scientifique

  • Jean-Paul Pellegrinetti, Professeur en histoire contemporaine (Université Côte d’Azur, CMMC) ;
  • Marc Ortolani, Professeur en histoire du droit et des institutions (Université Côte d’Azur, ERMES) ;
  • Olivier Vernier, Professeur en histoire du droit et des institutions (Université Côte d’Azur, ERMES) ;
  • Ralph Schor, Professeur émérite en histoire contemporaine (Université Côte d’Azur, CMMC) ;
  • Jean Garrigues, Professeur en histoire contemporaine (Université d’Orléans, POLEN) ;
  • Pierre Allorant, Professeur en histoire du droit et des institutions (Université d’Orléans, POLEN) ;
  • Noëlline Castagnez, Maître de conférences HDR en histoire contemporaine (Université d’Orléans, POLEN, UMR SIRICE) ;
  • Eric Anceau, Maître de conférences HDR en histoire contemporaine (Sorbonne-Université) ;
  • Bruno Dumons, Directeur de Recherche (CNRS, Lyon, LARHRA) ;
  • Jean-Marie Guillon, Professeur émérite en histoire contemporaine (Université Aix-Marseille, UMR TELEMME) ;
  • Frédéric Monier, Professeur en histoire contemporaine (Université d’Avignon, Centre Norbert Elias ) ;
  • Éric Savarese, Professeur de science politique (Université de Montpellier, CEPEL).

Places

  • Faculté de Droit et Science Politique-Université Côte d'Azur-Avenue du Doyen Louis Trotabas
    Nice, France (06)

Event attendance modalities

Full on-site event


Date(s)

  • Tuesday, March 15, 2022

Keywords

  • droit, crise, coup d'état, IIIe République, politique

Contact(s)

  • Amale Ziad
    courriel : amale [dot] ziad [at] univ-cotedazur [dot] fr

Reference Urls

Information source

  • Amale Ziad
    courriel : amale [dot] ziad [at] univ-cotedazur [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« La crise de 1877 dans l’arc méditerranéen », Call for papers, Calenda, Published on Monday, December 20, 2021, https://doi.org/10.58079/17x9

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