AccueilBilan des réformes de la représentation du personnel et du « dialogue social »

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Bilan des réformes de la représentation du personnel et du « dialogue social »

« Chroniques du travail » – Numéro 13 et « Varia »

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Publié le mardi 28 juin 2022

Résumé

Depuis les années 1980, les relations entre représentants des salariés, de la direction et l’État, ont connu d’importantes mutations. Une série de textes, dont la production s’est accélérée récemment, entendent renouveler aussi bien le fonctionnement et le rôle de la négociation collective que celui des instances de représentation du personnel (IRP). En créant une instance unique, le Comité social et économique (CSE), les ordonnances de 2017 ont ainsi parachevé le mouvement de regroupement des IRP et modifié en profondeur leur organisation et leur fonctionnent. Quatre ans après les ordonnances « Travail », de nombreux CSE arrivent au bout de leur mandat et les trois fonctions publiques s’apprêtent elles aussi à fusionner leurs IRP. Dans ce contexte, ce numéro thématique de la revue Chroniques du travail souhaite faire le point sur les mutations des relations professionnelles, sur leur sens et leur portée.

Annonce

Argumentaire

Depuis les années 1980, les relations professionnelles, c’est-à-dire les relations entre représentants des salariés, de la direction et l’État, ont connu d’importantes mutations. Une série de textes, dont la production s’est accélérée récemment (loi « Rebsamen », loi « Travail », ordonnances « Travail »), entendent renouveler aussi bien le fonctionnement et le rôle de la négociation collective que celui des instances représentatives du personnel (IRP). En créant une instance unique, le Comité Social et Economique (CSE), les ordonnances de 2017 ont ainsi parachevé le mouvement de regroupement des IRP, amorcé dès 1993, et modifié en profondeur leur organisation et leur fonctionnement.

Dans l’esprit de leurs promoteurs, ces réformes visent à favoriser la production de règles mieux adaptées aux situations particulières des entreprises, afin de stimuler leur compétitivité d’une part, et de « simplifier » les rouages d’un « dialogue social » décrié pour sa « lourdeur » et sa « rigidité ». D’un autre côté, plusieurs observateurs (scientifiques, syndicalistes, inspecteurs du travail, etc.) dénoncent les ambitions d’un projet réformateur qui, sous couvert de « rationalisation », a pour principal objectif de flexibiliser le droit du travail et de promouvoir un certain type de syndicalisme. Contre un syndicalisme dénoncé pour sa « culture du conflit », il s’agirait de promouvoir des militants disposés à s’engager dans des « compromis rationnels » au nom du « réalisme économique » et à abandonner un ensemble de pratiques jugées trop conflictuelles (grèves, débrayages, manifestations, etc.).

Quatre ans après les ordonnances « Travail », alors que de nombreux CSE arrivent au bout de leur mandat et que les trois fonctions publiques s’apprêtent elles aussi à fusionner leurs IRP, ce numéro thématique de la revue Chroniques du travail souhaite dresser un premier bilan. Il s’inscrit dans la suite d’autres appels à contributions (Nouvelle revue du travail, Les mondes du travail…) visant à faire le point sur les mutations des relations professionnelles, sur leur sens et leur portée.

Appuyées sur des enquêtes (quantitatives et/ou qualitatives), les contributions (en droit, économie, sociologie, gestion, etc.), pourront porter, de manière non exclusive, sur les quatre axes ci-après. Elles pourront prendre pour objet les différents acteurs des relations professionnelles, syndicalistes et représentants du personnel bien sûr, mais aussi les managers, acteurs des ressources humaines et des directions, experts CSE et CSSCT (Commission Santé Sécurité et Conditions de Travail), conseillers en relations sociales, médecins et inspecteurs du travail, etc. 

Les contributions pourront aussi bien concerner le niveau local (entreprise, établissement), que celui des branches professionnelles, l’échelon national voire international pour les auteurs qui souhaiteraient mettre en perspective les transformations du cadre français des relations professionnelles avec celles d’autres pays européens par exemple.

Axes thématiques

1) Quelles mutations des instances de représentation du personnel (IRP) ?

Un premier axe de réflexion invite à étudier ce que les réformes successives ont fait au travail des représentants du personnel au sein des IRP. Les premières études disponibles (post-enquête REPONSE, rapport du Comité d’évaluation des ordonnances, etc.) soulignent l’éloignement des CSE des lieux de travail et des travailleurs, la concentration et la réduction des mandats disponibles. Qu’induisent ces changements sur les thèmes pris en charge au sein des CSE et sur la manière dont les représentants du personnel s’en emparent ? Cela entraine-t-il une hiérarchisation des sujets, avec un accent mis sur les enjeux économiques et stratégiques des entreprises au détriment des questions comme celles de santé au travail, d’égalité professionnelle, de handicap, dont plusieurs études ont montré la place fragile ? La création des CSE renforce -t-elle le mouvement de managérialisation du droit mis en évidence par certains travaux ou les logiques d’individualisation du traitement des problèmes de santé des salariés, par exemple ? À l’inverse, les élus ont-ils réussi à investir les Commissions Santé Sécurité et Conditions de Travail (CSSCT) afin de renforcer l’attention et la prise en charge des enjeux de santé au travail ? La séquence de l’épidémie du Covid souvent présentée comme ayant mis sur le devant de la scène ces enjeux, a-t-elle réellement permis leur meilleure appréhension ?

Quels sont les usages des commissions spécialisées, obligatoires pour les entreprises de plus de 300 salariés (commission santé, sécurité et conditions de travail, de la formation, de l’égalité professionnelle d’information et d’aide au logement) ? Ces commissions constituent-elles des leviers pour les représentants du personnel ou participent-elles à canaliser leurs actions et les velléités contestataires ?

On pourra également se demander ce que le passage au CSE change au niveau de l’usage et de la répartition des heures de délégations entre ses membres. L’investissement sur certains enjeux (activités sociales et culturelles, santé au travail, égalité professionnelle, etc.) est-il réduit au profit de la préparation de réunions des CSE dont la durée semble s’être considérablement étendue du fait de l’élargissement du périmètre de l’instance ?

On pourra aussi s’interroger sur la notion d’établissement distinct d’une même organisation, notion centrale, car elle détermine l’implantation des CSE[1]. La mise en place des CSE a -t-elle généré du contentieux, contribuant à modifier la définition de ce qu’est un établissement distinct, dans quel sens et avec quels effets ?

2) Quelles transformations des acteurs des relations professionnelles et de leurs pratiques ?

Les réformes des relations professionnelles à l’œuvre depuis 40 ans (entrainant notamment un éloignement des IRP des lieux de travail, une diminution de l’offre d’engagement, un élargissement du champ de la négociation collective et une exigence accrue de professionnalisation des représentants du personnel) posent toute une série de questions. Celles-ci touchent notamment l’évolution du profil des représentants du personnel, aux logiques de l’engagement ou du désengagement dans le syndicalisme, ou encore aux liens entre représentants du personnel et salariés. Alors que les salariés s’engagent le plus souvent pour des problèmes locaux, liés à leur environnement immédiat de travail ou à la faveur d’une prise de mandat, comment continuer à les mobiliser, dans un contexte d’éloignement des lieux de travail, de diminution de l’offre d’engagement et de technicisation accrue des activités de représentation du personnel ? Ces évolutions interrogent également l’organisation et la division du travail au sein des collectifs syndicaux (entre élus dans les IRP, délégués syndicaux, suppléants, simples adhérents, etc.).

Un autre sujet d’investigation pourrait être celui des représentants de proximité. Quels sont les usages effectifs de cette possibilité, ouverte en 2017, de disposer de représentants des salariés théoriquement proches (géographiquement) d’eux ? Quel rôle et quelles prérogatives sont attribués effectivement à ces nouveaux acteurs ? Enfin, ce second axe invite à élargir la réflexion sur la manière dont ces changements affectent les interlocuteurs des représentants du personnel et des syndicalistes que sont les managers, les représentants des directions et les acteurs auxquels chacun peut faire appel (médecins et inspection du travail, experts, etc.).

3) Quelles transformations de la négociation collective ?

Un troisième axe de réflexion portera sur les pratiques de négociation collective, aussi bien dans leur dimension formelle qu’informelle. Alors que le nombre d’accords collectifs entre représentants des salariés et des employeurs n’a cessé d’augmenter depuis 40 ans, les pratiques de négociation demeurent très contrastées selon les lieux de négociation (branches, groupes, entreprises, établissements) et les contextes socio-productifs des entreprises (secteur, taille des entreprises, présence d’IRP et d’organisations syndicales, pratiques de management, forme d’organisation du travail, composition de la main-d’œuvre, etc.).

Les contributions pourront examiner les effets des différentes réformes sur ces pratiques variées de négociation. Que négocie-t-on et à quel niveau ? Quel est le « bon » niveau de négociation selon les caractéristiques de l’entreprise et les enjeux de la négociation (droit syndical, politiques de rémunérations, etc.) ? Que produit l’éloignement des centres de décision sur les pratiques et le contenu des négociations ? Quelle est la place des négociations formelles et informelles, etc. ?

On pourra aussi questionner les effets des modifications des règles de validation des accords collectifs, le recours au référendum d’entreprise, les usages des différents « blocs » de négociation mis en place par les ordonnances de 2017[2] ou encore interroger les effets de ces nouvelles dispositions sur les conditions de travail et d’emploi des salariés.

4) Les relations professionnelles face aux évolutions du travail et de l’emploi

Enfin, les contributions resituant les transformations des relations professionnelles dans les évolutions plus larges du monde du travail (évolutions des conditions de travail et d’emploi, précarisation du travail, numérisation de l’économie, concentration des structures économiques, recours accru à la sous-traitance, etc.) sont aussi bienvenues. Ce pourra être l’occasion, par exemple, d’examiner l’articulation entre ces évolutions et celles de la conflictualité dans les entreprises et des modes de régulation sociale de cette conflictualité

Varia

Ce numéro accueillera, en parallèle de l’appel thématique, une rubrique Varia. Aussi, toutes les contributions de chercheurs en sciences humaines et sociales, en lien avec les questions de travail et d’emploi, portant sur d’autres thématiques que celles développées ci-dessus sont bienvenues.

Les auteurs peuvent donc soumettre des textes à la revue dans la rubrique Varia dont la vocation est de regrouper des articles scientifiques hors dossier.

Modalités de soumission

Les contributions correspondent à un texte complet qui ne doit pas dépasser 60.000 signes. Les références bibliographiques sont à mettre en note de bas de page. Les contributions doivent être accompagnées d’un résumé de 1000 à 1500 signes maximum (espaces compris).

Ces contributions et résumés seront soumis exclusivement par courriel à :

irt-contact@univ-amu.fr et à chroniquesdutravail@gmail.com

avant le 1er février 2023

Calendrier

  • Date limite de réception des contributions : 1er février 2023
  • Réponse du Comité de rédaction aux auteurs : 15 mars 2023
  • Retour des versions définitives : 1er mai 2023
  • Publication : décembre 2023

Comité scientifique

  • Jessica ATTALI-COLAS, maîtresse de conférences en Droit privé, CORHIS, Université Paul Valéry Montpellier III
  • Christophe BARET, professeur des Universités en Gestion, LEST, UMR 7317 CNRS, AMU
  • Thierry BERTHET, politiste, directeur de recherches au CNRS, directeur du LEST, UMR 7317 CNRS, AMU
  • Paul BOUFFARTIGUE, directeur de Recherche émérite CNRS, sociologue, LEST, UMR 7317, AMU
  • Alexis BUGADA, professeur des Universités en Droit social, directeur du Centre de Droit Social (CDS), UR 901, AMU
  • Mario CORREIA, maître de conférences en Sociologie du travail, LEST, UMR 7317 CNRS, AMU
  • Vanessa di PAOLA, maîtresse de conférences en Économie, LEST, UMR 7317 CNRS, AMU, directrice du Centre associé régional au Céreq
  • Arnaud DUPRAY, ingénieur de recherche au Céreq en socio-économie et chercheur associé au LEST, UMR 7317 CNRS
  • Henri ECKERT, professeur en Sociologie, GRESCO (EA 3815), Université de Poitiers
  • Céline GASQUET, directrice Scientifique, Céreq, Marseille
  • Jérôme GAUTIÉ, professeur des Universités en Sciences économiques, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
  • Baptiste GIRAUD, maitre de conférences en Sciences politiques, LEST, UMR 7317 CNRS, AMU
  • Annie LAMANTHE, professeure des Universités en Sociologie, LEST, UMR 7317 CNRS, AMU
  • Arnaud MIAS, professeur des Universités en Sociologie, PSL (Paris Sciences et Lettres), Université Paris-Dauphine, IRISSO UMR 7170
  • Philippe MEHAUT, directeur de Recherche émérite CNRS, économiste, LEST, UMR 7317, AMU ; 6 Institut Régional du Travail – Aix-Marseille Université
  • Ariel MENDEZ, professeure des Universités en Sciences de gestion, LEST, UMR 7317 CNRS, AMU
  • Claire MORIN, maîtresse de conférences en Droit social, CDS, UR 901, AMU
  • Philippe MOSSÉ, directeur de Recherche émérite CNRS, économiste, LEST, UMR 7317, AMU
  • Stéphanie MOULLET, maîtresse de conférences en Économie du travail et de l’éducation, EST, UMR 7317 CNRS, AMU
  • Jean-François PAULIN, maître de conférences en Droit privé, IUT (Université Claude Bernard Lyon 1), CNRS, (UMR 5137, Erds-CERCRID, Saint-Etienne)
  • Rémy PONGE, maître de Conférences en Sociologie, LEST, UMR 7317 CNRS, AMU
  • Olivier PUJOLAR, maître de conférences en Droit privé, vice-Président en charge des Partenariats et des Territoires, Université de Bordeaux
  • Michel ROCCA, professeur des Universités en Sciences économiques, Université Grenoble Alpes, CREG EA 4625
  • Caroline VANULS, enseignante-chercheure en Droit social, LEST, UMR 7317 CNRS, AMU
  • Pierre-Yves VERKINDT, professeur émérite à l’École de Droit de la Sorbonne, Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne
  • Serge VOLKOFF, statisticien, HDR en Ergonomie, chercheur affilié au CEET-CNAM.

(* lorsque nécessaire, le Comité a recours à des rapporteurs externes)

Directrice de la publication

  • Stéphanie MOULLET

Rédacteurs en chef

  • Claire MORIN
  • Rémy PONGE

Notes

[1] Le nombre et le périmètre des établissements distincts sont fixés par accord d’entreprise s’il y a des délégués syndicaux (DS) ou à défaut de DS par accord entre l’employeur et les élus du CSE. Faute de parvenir à un accord, c’est l’employeur qui fixe le nombre et le périmètre des établissements distincts en tenant compte du pouvoir de gestion du responsable d’établissement. En cas de litige, c’est l’autorité administrative (la DREETS) qui tranche.

[2] « Bloc 1 » : ensemble des thématiques pour lesquelles les accords branches priment sur les accords d’entreprise ; « bloc 2 » possibilité de verrouillage des accords de branches sur certains thèmes ; « bloc 3 » primauté de l’accord d’entreprise.


Dates

  • mercredi 01 février 2023

Mots-clés

  • relation profesionnelle, syndicat, travail, représentant du personnel, salaire, santé, emploi, négociation collective, CSE

Contacts

  • Stéphanie MOULLET
    courriel : stephanie [dot] moullet [at] univ-amu [dot] fr
  • Rémy Ponge
    courriel : remy [dot] ponge [at] univ-amu [dot] fr

Source de l'information

  • Mélanie Tennevin
    courriel : melanie [dot] tennevin [at] univ-amu [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Bilan des réformes de la représentation du personnel et du « dialogue social » », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 28 juin 2022, https://doi.org/10.58079/196x

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