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Les champs des possibles

Fields of possibilities

Expérimentations sociales, politiques et existentielles en milieu rural

Social, political and existential experiments in rural areas

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Publié le mardi 20 septembre 2022

Résumé

Ces deux journées d’étude souhaitent donner à voir et à entendre des formes d’expérimentation en milieu rural, dans des contextes géographiques divers et à des échelles spatio-temporelles multiples, afin de saisir les enjeux socio-politiques et écologiques des initiatives qui s’inscrivent dans la visée d’une réappropriation des territoires et des terres soumis à l’emprise du capitalisme mondialisé.

Annonce

Organisation

Organisées par l’équipe de recherche LAA-UMR LAVUE 7218 CNRS

Argumentaire

Dans un contexte de crise de destruction et de dévastation de la Terre, qui est à la fois une crise écologique, sociale et civilisationnelle, c’est-à-dire des conditions d’existence, renaissent des expériences de résistance et de ré-existence face aux exploitations et dépossessions – territoriales et culturelles – du capitalisme mondial néolibéral. Il ne s’agit pas seulement de luttes politiques pour la réforme agraire, pour l’accès à la terre et pour la protection de la Terre, mais également pour la reconnaissance et la défense d’autres modèles de vie et d’autres rapports au vivant. Ces mouvements pour exister et construire des mondes et des savoirs d’une manière différente, sont en même temps des mouvements pour revendiquer les droits de la nature et la sauvegarde du vivant.  

Faire défection à des modes d’habiter urbains, s’installer à la campagne dans un geste de « retrait actif » : les tentatives de vie en communauté en milieu rural ne datent certes pas d’hier mais le contexte a quelque peu changé, passant de la naissance d’une écologie politique dans les années 1970 à une urgence climatique pouvant frôler un certain fatalisme et « effondrisme ». Les graves bouleversements écologiques qui touchent la Terre et ses habitant.es amènent de nombreux individus ou collectifs, au Nord comme au Sud du monde, à réactualiser leurs gestes politiques. Des habitants de la ville qui aspirent à une redéfinition de leurs territoires géographiques et existentiels essaient de se soustraire non pas tant à la ville en soi mais plutôt aux transformations dont elle fait l’objet dans le système économique et productif actuel (formes d’accélération, saturation, rythmes insoutenables); en même temps, des populations rurales construisent des stratégies pour rester ou revenir dans ces territoires et/ou s'engagent dans des expérimentations locales afin de dépasser les contraintes et les difficultés existantes.

Ces tentatives dépassent la dichotomie rural/urbain et renforcent les porosités entre ces différentes réalités. Des expériences très politiquement engagées (dont la ZAD de Notre Dame des Landes est un exemple emblématique) côtoient des expérimentations d’habiter collectif de taille plus réduite, plus « discrètes » et s’inscrivant dans des engagements du quotidien (et pas forcément dans des luttes ouvertes) et dans la redécouverte de savoir-faire liés au travail de la terre et au souci du vivant. Ces revendications éco-territoriales et existentielles ne sont pas toujours ouvertement militantes ; dans de nombreux cas, elles prennent la forme de pratiques quotidiennes, a priori plus ordinaires mais toujours politiques et qui peuvent également avoir une portée transformatrice (notamment des formes de partage, d’entraide et de coopération). 

Ces expérimentations peuvent aussi développer des projets de vie apportant aux sites habités des dimensions supplémentaires : projets d’autosuffisance alimentaire, projets artistiques et culturels (organisations de résidences, festivals, création de tiers-lieux ou de collectifs), actions pédagogiques et participatives, destiné tant aux habitants quant à des nouveaux résidents et touristes potentiels. “Quitter” la métropole est en ce sens une aspiration bien plus complexe qu’une simple translation géographique de l’existence. Ces tentatives des néo-ruraux croisent parfois les conditions d’existence de « ceux qui restent » et qui ont déserté sur place, peuvent conduire à de nouvelles formes de vie communes mais aussi produire des échecs, des formes de désenchantement et des conflits. 

La question des zones rurales et des aires exclues des processus d’urbanisation massive est souvent liée à celle de la transition démographique et sociale et, plus particulièrement, aux phénomènes importants de déclin démographique et de vieillissement de la population dans ces territoires. Dans le contexte européen, plusieurs zones intérieures, périphériques et éloignées par rapport aux grands pôles métropolitains s’interrogent aujourd’hui sur les stratégies, les politiques et les projets susceptibles d’inverser la tendance démographique négative, devenue chronique dans certains contextes (par exemple, les aree interne en Italie, la « diagonale du vide » française ou La España vaciada en Espagne). Si, d’un point de vue quantitatif, le dépeuplement est identifié exclusivement comme la diminution du nombre de résidents officiellement enregistrés dans une municipalité, d’un point de vue qualitatif ce phénomène produit des conséquences plus complexes sur les différentes formes de vie qui coexistent dans un contexte donné. Résidents fixes et temporaires, flux de navetteurs à différentes échelles temporelles et spatiales, et encore touristes et visiteurs coexistent dans le territoire et le transforment. Dans les dernières années, à la lumière d’un intérêt renouvelé vers les zones rurales, parfois biaisé par une image stéréotypée et banalisée de la « vie à la campagne», une série d’expériences qui font du repeuplement – temporaire ou non – l’objectif principal, ont trouvé place dans ces contextes. Bien que la majorité de ces expériences soient encore en phase de démarrage, on peut déjà en observer de nombreuses déclinaisons : le projet de maisons à 1 euro, les projets d’accueil pour les smart-workers ou pour les réfugiés politiques, mais aussi l’essor de résidences artistiques ou de recherche. Quel impact ont-elles sur le tissu social et spatial existant et comment des manières différentes d’habiter les milieux ruraux peuvent-elles coexister sur un même territoire ?

Il s’agira donc de donner à voir et à entendre ces différentes formes d’expérimentation dans des contextes géographiques divers et à des échelles spatio-temporelles multiples, afin de saisir les enjeux socio-politiques et écologiques des initiatives qui s’inscrivent dans la visée d’une réappropriation des territoires et des terres soumis à l’emprise du capitalisme mondialisé.

Ces journées d’études pourront donc ouvrir (de façon non exhaustive) plusieurs axes de réflexion : 

  1. Projet de repeuplement et enjeux de promotion territoriale : dans des contextes de crise démographique, les expérimentations sociales sont souvent liées à des enjeux de repeuplement et de redynamisation. Dans quelle mesure elles proposent des réponses à ces problématiques? Comment se conjuguent ou se superposent-elles à des actions de promotion du territoire? Quel est l’impact sur le long terme de ces actions ? 
  2.   Le « retour à la terre » : de quel « retour » s’agit-il ? Quelles formes de rencontre se produisent entre des pratiques et des imaginaires différents autour de la terre comme milieu de vie et de production ? Quels sont les écarts entre les dynamiques motivées par un imaginaire du « retour à la terre », source d’engagement écologique ou quête d’autosuffisance, et la réalité du tissu politique, social, productif existant? Quelles sont les formes de désillusion, d’échec,  éventuellement produites par ces tentatives ?      
  3. Mouvements de réappropriation de la terre et des territoires face aux dépossessions capitalistes : comment peut-on interroger et interpréter des pratiques qui aspirent à devenir des laboratoires de transformations sociales, environnementales et politiques, en œuvrant à la réactualisation de systèmes de production, de consommation, de santé et d’éducation alternatifs? Comment une écologie environnementale s’associe-t-elle ainsi à une écologie relationnelle? En Amérique latine, par exemple, on parle de luttes pour le territoire plutôt que de luttes pour la terre. Le territoire est conçu comme une totalité interconnectée et interdépendante, et est entendu comme un concept politique axé sur la notion de Buen Vivir et en relation avec celles d’autonomie, de dignité, de diversité, de souveraineté.
  4.   Les terres et la Terre : dans un contexte de crise et d’urgence environnementale, comment les différentes formes d’expérimentation en cours peuvent-elles contribuer à produire de nouveaux savoirs sur le vivant, sur les liens entre humains et non humains, sur les stratégies de sauvegarde de l’environnement terrestre ? Par qui et à travers quelles modalités elles sont portées?

Informations pratiques

Les journées d’études se tiendront les 23 et 24 mars 2023 dans la salle de conférences du site Ardennes de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris La Villette - 23 rue des Ardennes - 75019 Paris Les langues d’expression seront le français et l’anglais. Une sélection d’articles sera considérée pour publication. Le colloque aura lieu uniquement en présentiel.

Modalités de soumission

Les propositions de communication, en anglais ou français (et en format .doc, .docx ou .odt) devront comporter un titre, un résumé de 300 mots précisant l’axe thématique choisi, une courte bibliographie critique et une notice bio-bibliographique d’environ 10 lignes (comprenant le nom, l’appartenance institutionnelle et l’adresse électronique de l’auteur·rice).

Elles sont à envoyer par courriel à l’adresse  colloques.laa@gmail.com

d’ici le 30 novembre 2022.

La décision du comité scientifique sera communiquée le 16 décembre 2022.

Comité scientifique

Le comité scientifique et d’organisation est assuré par le LAA-UMR LAVUE :

  • Manola Antonioli,
  • Alessia De Biase,
  • Victorine Dréau (aussi, Université Nationale de Colombie-Medellin),
  • Sara Escudero Rubio,
  • Valérie Jouve,
  • Mélanie Richer,
  • Rémi Simon,
  • Valeria Volpe (aussi, IUAV-Venise),
  • Piero Zanini
  • Thibaut Téranian (EHESS).

Références bibliographiques 

Acosta A., El Buen Vivir–Sumak Kawsay, una oportunidad para imaginar otros mundos, Barcelone, Icaria, 2013.

Acosta A., Demaria F., Escobar A. et alii, Pluriverse. A Post-Developement Dictionary, New Delhi, Tulika Books/Columbia University Press, 2019.

Balaud L. et Chopot A., Nous ne sommes pas seuls. Politique des soulèvements terrestres, Paris, Seuil, 2021.

Charbonnier P., Abondance et liberté. Une histoire environnementale des idées politiques, Paris, La Découverte, 2020.

Charbonnier P., Culture écologique, Paris, Presses de Sciences Po, 2022.

Collectif Mauvaise Troupe, Constellations. Trajectoires révolutionnaires du jeune XXIe siècle, Paris, L’Éclat, 2016;

Conseil Nocturne, Habiter contre la métropole, Paris, Divergences, 2019.

Coquard B., Ceux qui restent, Paris, La découverte, 2019.

Escobar A., Sentir-penser avec la Terre, Paris, Seuil, 2018.

Latour B., Où atterrir ?, Paris, La Découverte, 2017.

Lindgaard J. (dir.), Éloge des mauvaises herbes. Ce que nous devons à la ZAD, Paris, Les Liens qui libèrent, 2018.

Magnaghi A., Le projet local, Liège, Mardaga,  2003.

Morizot B., Manières d’être vivant, Arles, Actes Sud, 2020.

Noulhianne X., Le ménage des champs. Chronique d’un éleveur au XXIème siècle, Paris, Les éditions du bout de la ville, 2016.

Pruvost G., Quotidien politique. Féminisme, écologie et subsistance. Paris, La Découverte, 2021.

Lieux

  • Salle de conférences du site Ardennes de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris La Villette - 23 rue des Ardennes
    Paris, France (75)

Format de l'événement

Événement uniquement sur site


Dates

  • mercredi 30 novembre 2022

Fichiers attachés

Mots-clés

  • milieu rural, expérimentation

Contacts

  • LAA - Laboratoire Architecture Anthropologie
    courriel : colloques [dot] laa [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Sara Escudero Rubio
    courriel : colloques [dot] laa [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Les champs des possibles », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 20 septembre 2022, https://doi.org/10.58079/19if

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