Published on Wednesday, September 28, 2022
Abstract
L’échec se manifeste par un élément nouveau, le commencement de quelque chose qui, en fin de compte, n’est pas allé jusqu’au bout. Il y a eu une action (tel qu’un projet rédigé) à laquelle était affectée une finalité précise mais cette finalité n’a jamais été atteinte. C’est donc par la réunion de quatre critères que l’on reconnait l’échec : une intention, une action, une finalité et l’interruption subite du processus avant qu’il aille à son terme. La définition donnée vaut pour tout type d’échecs, y compris normatifs. Il reviendra aux participants de nous faire découvrir les raisons profondes et parfois méconnues de différents échecs normatifs rencontrés en France et ailleurs, hier et aujourd’hui.
Announcement
Présentation
La XIVe journée d’étude annuelle de l’UMR (7318 Droit international comparé et européen - DICE), portant sur Les échecs normatifs, est organisée par le Centre de droit et de politique comparés Jean-Claude Escarras, à la Faculté de droit de Toulon (35 rue Alphonse Daudet, 83000 Toulon).
L’échec se manifeste par un élément nouveau, le commencement de quelque chose qui, en fin de compte, n’est pas allé jusqu’au bout. Il y a eu une action (tel qu’un projet rédigé) à laquelle était affectée une finalité précise mais cette finalité n’a jamais été atteinte. C’est donc par la réunion de quatre critères que l’on reconnait l’échec : une intention, une action, une finalité et l’interruption subite du processus avant qu’il aille à son terme. La définition donnée vaut pour tout type d’échecs, y compris normatifs.
Certains échecs normatifs semblent liés aux circonstances extérieures, par exemple les divisions politiques ayant entraîné le rejet par référendum du projet de réforme de la Constitution italienne en 2016. D’autres échecs paraissent s’expliquer à raison du contenu du projet, par exemple la Constitution européenne. Néanmoins, cette distinction causes externes/internes s’avère trop simpliste car, en examinant de près les deux expériences mentionnées, on constate que le contenu du projet de la réforme constitutionnelle italienne n’emportait pas l’unanimité (notamment l’idée de revaloriser le rôle du Gouvernement au détriment du Parlement) et, inversement, la Constitution européenne a été proposée à un moment de l’évolution de l’Union européenne, l’entrée des Etats de l’Est, qui fragilisait la cohésion. Il serait par conséquent réducteur de vouloir simplifier à l’excès les échecs normatifs selon qu’ils aient été causés par les circonstances ou par le contenu des textes.
Le thème de notre recherche consiste tout au contraire à ne partir d’aucun préjugé déterminé, de manière à pouvoir évaluer librement les échecs normatifs ainsi que leur portée.
Il ne faut pas non plus s’arrêter sur la forme pour déterminer s’il y a ou non échec. Un texte est un échec même lorsqu’il a été mis en application si sa durée de vie s’avère courte. Il en va ainsi de la Constitution de 1946, dans la mesure où une Constitution, en tant qu’acte fondateur, a vocation à durer sur le long terme. Pour la même raison, on ne peut pas conclure à l’échec d’un texte au motif qu’il n’a connu formellement aucune application. Le mot « application » est polysémique en droit : il peut s’exprimer à la fois dans l’adoption et dans l’absence d’adoption d’actes d’exécution, comme en témoigne l’article 47-1 al. 3 C. (les dispositions du projet de loi de finances pourront être mises en œuvre par ordonnance si le Parlement ne se prononce pas dans un délai de cinquante jours). Il n’a jamais donné lieu à application formelle, dans le sens où aucune ordonnance de l’article 47-1 al. 3 n’a été prise. C’est justement là que se situe sa réussite, ce texte ayant une finalité dissuasive.
À l’inverse, des textes sont appliqués mais en deçà de leur contenu. On pense ici aux échecs normatifs consécutifs à une politique, aussi ancienne et constante que les dispositifs juridiques qui sont censés la mettre en œuvre, mais dont on sait qu’elle ne pourra pas être en réalité appliquée telle qu’annoncée. La situation est illustrée par la politique d’éloignement des étrangers.
Les exemples mentionnés ne sont évidemment pas exhaustifs, tant les hypothèses d’échecs peuvent être légion.
Pour mesurer l’échec normatif, au-delà de ses classifications, il conviendrait sans doute de distinguer, à la manière italienne, les dispositions et les normes ou, à la manière française, le contenant et le contenu. Cela nous permettrait de constater que si le texte (ou la jurisprudence) est abandonné mais que son contenu est repris par ailleurs, ce qui semblait être un échec sur le court terme s’avère en réalité un succès. L’élément déterminant est constitué en effet par le contenu du texte. C’est la raison pour laquelle le critère de l’évaluation de l’échec est le contenu plus que le contenant.
De fait, l’échec sera complet si le texte est totalement rejeté, sans que rien de son contenu n’ait été maintenu, comme l’illustre l’abandon en 2021 par l’Union européenne du projet de taxe numérique. L’échec sera partiel lorsque des parties du texte ou même son esprit sont réutilisés sous une forme ou une autre. C’est le cas de la Constitution européenne ou des propositions de la Convention citoyenne sur le climat. Au final, il s’agit moins de compter les échecs que de chercher, au-delà de l’apparence d’un échec, ce qui peut s’avérer être un succès. L’évolution du droit ne saurait alors s’apprécier exclusivement en fonction de mutations expresses, elle se traduirait également par l’insertion de normes qui ont su s’imposer indépendamment du sort réservé à leur contenant initial.
Si nous devions distingués les échecs normatifs entre eux, le plus simple serait de les classer en fonction de l’étape dans laquelle ils se sont manifestés, autrement dit selon un ordre chronologique : à l’étape du projet, à celle du texte ou de la jurisprudence adoptée mais jamais appliquée, à celle du texte ou de la jurisprudence adoptée et appliquée pour une durée très courte.
Cependant, il existe des cas sui generis, tels l’échec d’une codification ou l’échec possible mais pas encore vérifié d’un texte de loi. À la simplicité du plan chronologique, il a été par conséquent préféré une distinction générale, entre les causes juridiques et les causes politiques des échecs. Certes, l’insuccès d’un texte ou d’une jurisprudence est souvent dû à plusieurs facteurs, aussi les thèmes développés sont-ils classés selon la cause la plus apparente. Il reviendra aux participants de nous faire découvrir les raisons profondes et parfois méconnues de différents échecs normatifs rencontrés en France et ailleurs, hier et aujourd’hui.
Programme
Vendredi 14 octobre 2022
- 8h45 Allocutions d’ouverture, Thierry Di Manno, PU de droit public, doyen honoraire, directeur du CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon et Marthe Fatin-Rouge Stefanini, Directrice de recherches CNRS, directrice de l’UMR DICE 7318 du CNRS
- 8h50 Laurent Reverso, PU d’histoire du droit, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon, Propos introductifs
I – Les échecs normatifs provoqués par le système juridique
Sous la présidence de Guillaume Payan, PU de droit privé, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon
- 9h00 Rémy Cabrillac, PU de droit privé, Laboratoire de droit privé, Université de Montpellier, L’échec d’une codification
- 9h25 Anna Maria Lecis Cocco Ortu, MCU de droit public, CED, UMR-CNRS 5116, membre associée du CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, IEP de Bordeaux, L’omission législative comme échec normatif : quels remèdes ? Réflexion à partir de l’expérience italienne
- 9h50 Guillaume Payan, PU de droit privé, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon, L’échec normatif en droit judiciaire privé : l’exemple de la juridiction nationale d’injonction de payer
- 10h10 Wilfried Adou, doctorant en droit public, CERIC, UMR-CNRS 7318 DICE, Aix-Marseille Université, Les échecs normatifs en matière de protection des droits de l’homme sur les réseaux sociaux : mythe ou réalité
- 10h20 Alexandra Bouscavert, doctorante en droit privé, LDPSC, Aix-Marseille Université, L’échec normatif en droit privé
10h30 Pause
- 10h50 Sylvie Schmitt, MCU HDR de droit public, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon, L’échec de la taxe carbone
- 11h10 Véronique Fumaroli, MCU de droit public, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon, L’échec normatif en droit de l’urbanisme
- 11h35 Cédric Aguzzi, doctorant de droit public, ILF-GERJC, UMR-CNRS 7318 DICE, Aix-Marseille Université, L’échec de la Constitution
- 11h45 Shirine Arab, doctorante de droit public, ILF-GERJC, UMR-CNRS 7318 DICE, Aix-Marseille Université, La Constitution du 27 octobre 1946 ou la Constitution de la IVe République
11h55 Débats
12h25 Pause déjeuner
II – Les échecs normatifs provoqués par le contexte politique
Sous la présidence de Julien Giudicelli, MCU HDR de droit public, Institut de recherche Montesquieu, membre associé du CDPC J-C Escarras, Université de Bordeaux
- 14h00 Julien Giudicelli, MCU HDR de droit public, Institut de recherche Montesquieu, membre associé du CDPC J-C Escarras, Université de Bordeaux, Droit de pétition : désuétude ou échec normatif ?
- 14h25 Frédéric Schneider, MCU de droit public, CERC, Université de Toulon, La mise en échec franco-australienne de la Convention sur la réglementation des activités relatives aux ressources minérales de l’Antarctique (Wellington, 1988)
- 14h50 Marie-Pierre Maurin, MCU HDR de droit privé, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon, Sur l’éventuel échec de la loi du 31 janvier 2022, portant interdiction des pratiques visant à modifier l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’une personne
- 15h15 Kévin Boyer, docteur en droit privé, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon, L’échec de la réforme constitutionnelle haïtienne de 2011 relative à la création du Conseil constitutionnel
- 15h25 Laurent Drouvot, doctorant en droit public, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon, Un échec à l’étape de projet : le projet constitutionnel de protection de la nation du président François Hollande en France après novembre 2015
15h35 Pause
- 16h00 Hubert Alcaraz, PU de droit public, IE2IA, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Pau et des pays de l’Adour, Le recours préventif d’inconstitutionnalité contre les lois organiques et les statuts d’autonomies en Espagne. Échec persistant ou solution opportune ?
- 16h25 Pascale Ricard, chargée de recherche CNRS, CERIC, UMR-CNRS 7318 DICE, Aix-Marseille Université, L’absence de ratifications suffisantes pour l’entrée en vigueur d’un traité international : le cas du Traité de 1986 sur les conditions d’immatriculation des navires
16h50 Débats
17h20 Fin des travaux
Informations pratiques
Possibilité de suivre la XIVe Journée de l’UMR en visioconférence.
Communication du lien de connexion sur inscription auprès de celine.maillafet@univ-tln.fr
Organisateurs
- Sylvie Schmitt, MCU HDR, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon
- Guillaume Payan, PU, CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Toulon
- Julien Giudicelli, MCU HDR, Institut de recherche Montesquieu, membre associé du CDPC J-C Escarras, UMR-CNRS 7318 DICE, Université de Bordeaux
Subjects
- Law (Main category)
Places
- Faculté de droit, amphi 100 - 35 rue Alphonse Daudet
Toulon, France (83)
Event attendance modalities
Hybrid event (on site and online)
Date(s)
- Friday, October 14, 2022
Attached files
Keywords
- droit, échec normatif, système juridique, contexte politique
Contact(s)
- Pascal GAUTTIER
courriel : pascal [dot] gauttier [at] univ-amu [dot] fr
Reference Urls
Information source
- Pascal GAUTTIER
courriel : pascal [dot] gauttier [at] univ-amu [dot] fr
License
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To cite this announcement
« Les échecs normatifs », Study days, Calenda, Published on Wednesday, September 28, 2022, https://doi.org/10.58079/19kz