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À l’interface de la phonologie et de la lexicologie

The Phonology-Lexicology interface

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Publié le mercredi 16 novembre 2022

Résumé

Dans de nombreux travaux en lexicologie, la description du lexique d’une langue donnée est traditionnellement envisagée de deux points de vue complémentaires : le plan de la forme, qui concerne la morphologie lexicale, et le plan du sens que traite, entre autres, la sémantique lexicale. Force est de constater que lexicologie et phonologie s’interpénètrent, au point qu’une lexicologie prenant en compte toutes les composantes des mots ne saurait faire l’économie de la dimension phonologique. Ce numéro de Lexis, co-dirigé par Christophe Coupé, Quentin Dabouis, Olivier Glain et Vincent Hugou, se propose précisément d’approfondir le lien fort, voire consubstantiel, entre lexicologie et phonologie.

Annonce

Coordination scientifique

  • Christophe Coupé (Université Jean Moulin Lyon 3, France),
  • Quentin Dabouis (Université Clermont Auvergne),
  • Olivier Glain (Université Jean Monnet – Saint-Etienne),
  • Vincent Hugou (Sorbonne Université, France).

Argumentaire

Dans de nombreux travaux en lexicologie, la description du lexique d’une langue donnée est traditionnellement envisagée de deux points de vue complémentaires : le plan de la forme, qui concerne la morphologie lexicale, et le plan du sens que traite, entre autres, la sémantique lexicale. Ainsi, dans une perspective saussurienne, une unité lexicale est une entité à double face, alliant un signifiant (la forme) et un signifié (le sens). La face « auditive » des mots, qui fait pourtant partie intégrante du signifiant, est, quant à elle, le plus souvent réservée aux études phonologiques ou phonétiques, qui se sont constituées en domaines de recherche autonomes depuis longtemps. Or, force est de constater que lexicologie et phonologie s’interpénètrent, au point qu’une lexicologie prenant en compte toutes les composantes des mots ne saurait faire l’économie de la dimension phonologique. Ce numéro de Lexis, co-dirigé par Christophe Coupé, Quentin Dabouis, Olivier Glain et Vincent Hugou, se propose précisément d’approfondir le lien fort, voire consubstantiel, entre lexicologie et phonologie.

Les contributions pourront se situer sur un plan théorique général. Quelles approches illustrent l’influence de la phonologie sur la morphologie et la sémantique ? Quels sont les apports et les limites des modèles ? Comment la phonologie améliore-t-elle notre compréhension et apprentissage du lexique ?

On pourra notamment envisager la question sous l’angle des procédés de formation lexicale : par exemple, dans le cas de la troncation, qui altère le signifiant du mot de départ, comment le calcul du point de troncation se fait-il et quelles sont les incidences éventuelles sur la structure phonologique de l’output (comme dans combiˈnation vs. ˈcombo) ? On pourra également s'intéresser à la manière dont certains suffixes sélectionnent leurs bases en fonction de leurs propriétés phonologiques. Le suffixe nominal -al, par exemple, ne s’attache qu’à des verbes à accentuation finale (refuserefusal).

Si l’on adopte une conception élargie du lexique, en y incluant des unités phraséologiques, comme les idiomes, les proverbes ou autres unités polylexicales, il pourra être intéressant de déterminer dans quelle mesure les paramètres intonatifs qui leur sont attachés participent au calcul interprétatif. Ainsi l’expression get out of here reçoit-elle des interprétations divergentes, au sens de « sors d’ici » ou au sens de « je ne te crois pas », selon le schéma intonatif, entre autres. Quelle est alors la part de la phonologie dans la construction du sens ? Selon l'une des perspectives ouvertes par les grammaires de construction, Lacheret et Legallois [2013] développent l’idée selon laquelle la prosodie ferait partie intégrante du programme d’une construction, au même titre que sa syntaxe et sa sémantique. Elle participe à la signature de la construction, et n’est donc pas « surajoutée » (contrairement à ce que le mot suprasegmental sous-tend).

On pourra s’intéresser également aux emprunts. Dans la mesure où les emprunts récents ou les néologismes ont leurs particularités morphologiques, sémantiques et phonologiques, on pourra aussi souhaiter se pencher sur la question de leur adoption et de leur adaptation tant sur les plans sémantique, morphologique que phonologique. Dabouis & Fournier [2022] posent l’hypothèse que le lexique anglais s’organise en sous-systèmes partageant un certain nombre de propriétés morphologiques, sémantiques et phonologiques, qui sont liées à l’étymologie réelle (par exemple, les mots français ont un comportement similaire) ou perçue (voir Wells [2008] qui note « Not a real French expression » pour l’entrée bon viveur).

Les données phonologiques nous informent parfois sur la structuration du lexique. Bell & Plag [2013] ont montré que l’accentuation des composés nom + nom dépend de facteurs lexicaux comme leur graphie, la fréquence du composé et de ses constituants, ainsi que l’informativité du deuxième élément. De nombreuses travaux en phonologie ont aussi mis au jour des comportements distincts pour les préfixés historiques de type contain, resist ou submit qui suggèrent que, malgré l’absence de sémantisme clair et de productivité des constituants impliqués, ces mots sont traités comme des entités complexes, ce qui est corroboré par de nombreuses études en psycholinguistique (voir Forster & Azuma [2000], Ktori et al. [2016], McKinnon et al. [2003] et Rastle & Coltheart [2000]).

Dans le domaine de la linguistique diachronique, on pourra notamment s’intéresser aux processus de diffusion lexicale (lorsque l’unité du changement phonologique est le mot, ou plutôt sa racine, et non le phonème ; voir Labov [2010 : 260]) et à ce qu’ils nous apprennent du lexique et du stockage lexical.

Que penser aussi de l’influence de la phonologie sur l’orthographe dans différents types de discours dans lesquels les règles sont utilisées à des fins stylistiques (ex. sposta pour supposed to, eejit pour idiot, dans les bandes dessinées ou dans le discours publicitaire ; le eye dialect en littérature, etc.) ?

La question des variantes phonologiques intéresse la sociolinguistique, voire les langues de spécialité. Ainsi, selon Hall-Lew, Coppock & Starr [2010], le nom du pays « Irak » serait prononcé différemment en anglais américain lors de débats au Congrès, selon que l’on appartient au parti démocrate ou au parti républicain. On pourra donc s’intéresser aux prononciations variables de certains mots, qui rempliraient, entre autres, une fonction identitaire et/ou indexicale.

Ce numéro pourrait aussi mobiliser les didacticiens. Le lexique, qui est souvent considéré comme le parent pauvre des études en anglistique ou dans le secondaire, aurait tout intérêt à être abordé en y intégrant la dimension phonologique. De même, peut-on aller jusqu’à concevoir un cours de phonologie à l’université qui allierait systématiquement étude du lexique et phonologie ? L’enseignement des règles de prononciation et d’accentuation peut-il se faire à partir de corpus oraux pour compléter les données des dictionnaires, afin de rendre compte des phénomènes de variation et de changement ?

Les éléments ci-dessus ne sont que quelques suggestions et la liste n’est en rien exhaustive. Seront accueillies favorablement toutes les contributions qui traitent, en les illustrant par des exemples (voire des familles de mots), du lien entre lexique et phonologie.

Modalités de soumission

Votre fichier devra comporter le titre de votre contribution, un abstract entre 3.000 et 6.000 caractères, espaces comprises, une liste de mots-clés et des références bibliographiques.

Toutes les soumissions feront l’objet d’une évaluation en double aveugle par un comité scientifique international composé de spécialistes de différents domaines. Les contributions seront de préférence rédigées en anglais ou éventuellement en français.

Les soumissions pourront être acceptées, acceptées sous réserve de modification ou rejetées, telles quelles. Le nombre de pages n’est pas limité.

Les abstracts et les articles sont à envoyer en version électronique à lexis@univ-lyon3.fr

avant le 30 avril 2023

Lexis – Journal in English Lexicology mettra en ligne en 2024 son numéro 23

Calendrier

  • Novembre 2022 : appel à contributions
  • 30 avril 2023 : abstracts à envoyer à Lexis

  • Juillet-août 2023 : avis aux auteurs
  • 15 novembre 2023 : réception des articles (Consignes pour la rédaction des articles : https://journals.openedition.org/lexis/1026)
  • Novembre et décembre 2023 : relecture des articles par les membres du Comité scientifique
  • Janvier 2024 : corrections par les auteurs
  • 1er février 2024 : réception de la version définitive des articles

Bibliographie

Bell Melanie & Plag Ingo, 2013, “Informativity and analogy in English compound stress”, Word Structure, 6(2), 129–155.

Dabouis Quentin & Fournier Pierre, 2022, “English PhonologieS”, in Arigne V. & Migette C. (Eds.), Models and Modelisation in Linguistics, Bern, Peter Lang, 215258.

Forster Kenneth I. & Azuma Tamiko, 2000, Masked priming for prefixed words with bound stems: Does submit prime permit?”, Language and Cognitive Processes 15: 4–5, 539–561.

Hall-Lew Lauren, Coppock Elizabeth & Starr Rebecca, 2010, “Indexing Political Persuasion: Variation in the Iraq Vowels”, American Speech, 85: 1, 91–102.

Ktori Maria, Tree Jeremy J., Mousikou Petroula, Coltheart Max & Rastle Kathleen, 2016, “Prefixes repel stress in reading aloud: Evidence from surface dyslexia”, Cortex 74, 191–205.

McKinnon Richard, Allen Mark & Osterhout Lee, 2003, “Morphological decomposition involving non-productive morphemes: ERP evidence”, NeuroReport, 14: 6, 883–886.

Labov William, 2010, Principles of Linguistic Change, Volume 3: Cognitive and Cultural Factors, collection ‘Language in Society’, Wiley-Blackwell, Chichester.

Lacheret Anne & Legallois Dominique, 2013, « Expressivité vocale et grammaire : comment le symbolique construit le prosodique », in de Gaudemar Martine (Ed.), Les plis de la voix, Limoges, Lambert-Lucas, 45–56.

Rastle Kathleen & Coltheart Max, 2000, “Lexical and Nonlexical Print-to-Sound Translation of Disyllabic Words and Nonwords”, Journal of Memory and Language, 42, 342–364.

Wells John, 2008, [1990], Longman Pronunciation Dictionary, London: Longman (3rd edition).

Catégories


Dates

  • dimanche 30 avril 2023

Mots-clés

  • phonology, lexicology, phonologie, lexicologie

Contacts

  • Olivier Glain
    courriel : olivier [dot] glain [at] univ-st-etienne [dot] fr

Source de l'information

  • Denis Jamet
    courriel : lexis [at] univ-lyon3 [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« À l’interface de la phonologie et de la lexicologie », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 16 novembre 2022, https://doi.org/10.58079/19yj

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