AccueilPunir moins pour punir mieux ? La culture juridique du libéralisme pénal

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Punir moins pour punir mieux ? La culture juridique du libéralisme pénal

Doctrine, lois, pratiques et imaginaire (XVIIIe-XXIe siècles)

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Publié le lundi 19 décembre 2022

Résumé

Au croisement de l’histoire intellectuelle, institutionnelle, sociale et des pratiques judiciaires, ce colloque international vise à questionner la culture juridique qui fonde le libéralisme pénal au prisme de la doctrine, des lois, des pratiques et des imaginaires, du XVIIIe siècle à nos jours. Ce colloque est organisé et coordonné par l’équipe Damoclès qui, depuis une quinzaine d’années, fédère et amplifie à l’université de Genève les études consacrées à la justice, au droit de punir, à la magistrature, aux régulations sociales et à la police aux époques moderne et contemporaine.

Annonce

Argumentaire

Dès la Renaissance, le monopole de l’État sur le droit de punir forge le pénal hégémonique en attribut régalien de la souveraineté. Avec la procédure inquisitoire (écrite, secrète, aveu probatoire), il exclut la vengeance privée.

Protéger et réprimer : le pénal est à la fois le bouclier et le glaive des libertés. Cette dualité inquiète le libéralisme politique. Contre l’absolutisme de droit divin, la culture politique du libéralisme valide l’individualisme normatif, la neutralité institutionnelle et la juridicité. Entre l’habeas corpus (1679) et la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (1789), se noue le moment du libéralisme pénal que véhiculent les Lumières. Il sape le pénal hégémonique dont le régime suppliciaire comme pouvoir-spectaculaire du souverain, avant les pouvoirs disciplinaire et sécuritaire (M. Foucault). Si la force du glaive est dans sa retenue pour Montesquieu, le libéralisme pénal est un « minimalisme » punitif axé vers la modération pour optimiser l’effet des peines garantes de l’ordre et des libertés. En 1764, avec Dei Delitti e delle pene qui prône l’abolition du gibet, la légalité vs l’arbitraire, la sécularisation des crimes et la modération des châtiments, Beccaria oppose un bien politique — la sécurité publique — à l'incessible « droit de l’individu et sa liberté inviolable »1. Sous les lois modérées, chacun consent à la peine certaine et utile pour l’intérêt général. La liberté est la norme, la coercition l'anomalie. Punir moins pour punir mieux : tel est le cadre épistémologique du colloque sur le libéralisme pénal. Entre légalité, nécessité (prévention, réhabilitation), prudence procédurale contre la torture judiciaire ou la détention arbitraire puis aversion de la souffrance-sanction, quatre points définissent le libéralisme pénal :

  1. Un droit pénal sécularisé qui va du providentialisme répressif à l’étatisme juridique. L’infraction légale remplace le péché. La peine n’est plus une rétribution divine, mais l’« obstacle politique » du mal social qu’est le crime.
  2. Un droit pénal humain qu’idéalisent la « douceur » et la « modération » de la justice criminelle.
  3. Un droit pénal égalitaire où l’intérêt général prohibe les privilèges et instaure l’égalité juridique.
  4. Un droit pénal public où les crimes et les peines sont qualifiés et motivés publiquement contre le secret de la procédure inquisitoire.

Au-delà de son périmètre intellectuel, le libéralisme pénal se matérialise en des pratiques judiciaires, des processus normatifs ou constitutionnels. Magistrats, juristes et philosophes l’incarnent. Ils en portent les aspirations, en traduisent les attentes, mais aussi en portent les carences ou en révèlent les vices. Contentieux, législation, incrimination, pratique pénale, procédure, régime des peines, statut des victimes, police et experts des savoirs judiciaires ou criminologiques, figures intellectuelles, réformisme et abolitionnisme institutionnels : ces objets pointent les problématiques que le colloque approfondira. Des Lumières à aujourd’hui, de la pénalité corporelle à la prison comme peine, des normes aux archives judiciaires, la culture juridique du libéralisme pénal s’historicise entre doctrine, pratique et discours.

Histoire intellectuelle, institutionnelle, sociale et des pratiques judiciaires: ce colloque prend un relief contemporain quand le pouvoir et le populisme sécuritaires fragilisent l’héritage des Lumières juridiques en dégradant le volet libéral du pénal.

Modalités de contribution

Les propositions de communication au colloque avec titre et résumé de 1000 caractères environ parviendront aux deux adresses suivantes : Numa.Graa@unige.ch; Elisabeth.Salvi@unige.ch

avant le 15 février 2023.

Les travaux du colloque paraitront dans : Beccaria. Revue d’histoire du droit de punir.

Comité d’organisation

  • Frédéric Chauvaud (Criham - Université de Poitiers)
  • Marco Cicchini (MdH - Université de Genève)
  • Vincent Fontana (Musée Yverdon et région)
  • Numa Graa (Faculté de droit - Université de Genève)
  • Michel Porret (Faculté des lettres - Université de Genève)
  • Alice Rey (Faculté des lettres - Université de Genève)
  • Robert Roth (Faculté de droit - Université de Genève)
  • Élisabeth Salvi (MdH - Université de Genève)

Note

1. Mario Sbriccoli « Beccaria et l’avènement de l’ordre. Le philosophe, les juristes et l’émergence de la question pénale », in M. Porret éd., Beccaria et la culture juridique des Lumières, Genève, 1997, p. 177-187.

Lieux

  • Université de Genève
    Genève, Confédération Suisse

Format de l'événement

Événement uniquement sur site


Dates

  • mercredi 15 février 2023

Mots-clés

  • liberté, libéralisme, peine, prison, justice, Lumières, Montesquieu, Beccaria, loi, police, sécurité, victime, criminologie

Contacts

  • Elisabeth Salvi
    courriel : Elisabeth [dot] Salvi [at] unige [dot] ch
  • Graa Numa
    courriel : Numa [dot] Graa [at] unige [dot] ch

URLS de référence

Source de l'information

  • Marco Cicchini
    courriel : marco [dot] cicchini [at] unige [dot] ch

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Punir moins pour punir mieux ? La culture juridique du libéralisme pénal », Appel à contribution, Calenda, Publié le lundi 19 décembre 2022, https://doi.org/10.58079/1a80

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