Le projet d’influencer politiquement un autre pays ou de mener une expansion idéologique hors de ses frontières n’est pas récent. Si les première et seconde guerres mondiales ou la guerre froide fournissent des exemples bien documentés des méthodes déployées par les États, on trouve déjà des informations riches chez les orateurs et écrivains historiques. Les technologies numériques donnent une nouvelle consistance aux stratégies étatiques pour influencer les opinions publiques. Ce présent numéro s’intéressera aux particularités de la diplomatie numérique et de l’influence, à travers l’étude des États, mais aussi des acteurs extérieurs à la sphère diplomatique traditionnelle, ainsi que des stratégies d’influence mises en œuvre pour guider les opinions publiques en engageant un dialogue direct avec les sociétés civiles, en particulier via les réseaux sociaux.

Argumentaire

Le projet d’influencer politiquement un autre pays ou de mener une expansion idéologique hors de ses frontières n’est pas récent. Si les Première et Seconde Guerres mondiales ou la guerre froide fournissent des exemples bien documentés des méthodes déployées par les États, on trouve déjà des informations riches chez les orateurs et écrivains historiques. Les technologies numériques donnent une nouvelle consistance aux stratégies étatiques pour influencer les opinions publiques. Les États, mais aussi les acteurs extérieurs à la sphère diplomatique traditionnelle, mettent en œuvre des stratégies d'influence pour guider les opinions publiques en engageant un dialogue direct avec les sociétés civiles, en particulier via les réseaux sociaux ; en changeant le format et les supports de communication ; en mobilisant les avancées technologiques pour prédire les tendances politiques, identifier les personnes les plus susceptibles d’être influencées, générer et diffuser des informations ou discréditer des adversaires politiques. La nature virale des contenus partagés et distribués et les interactions qui en résultent entre les utilisateurs ont également des implications négatives bien identifiées, notamment la désinformation et la propagande, la radicalisation et l’atteinte à la protection de la vie privée et à la sécurité des données.

Dans le présent numéro, les particularités de la diplomatie numérique et de l’influence seront abordées à travers quatre axes thématiques. Ainsi, les contributions proposées peuvent s’inscrire dans l’un ou plusieurs des axes suivants :

• Axe 1 : Numérique et transformation des pratiques et des métiers diplomatiques

L’arrivée de la diplomatie numérique marque une quadruple évolution des pratiques diplomatiques : conceptuelle (celle-ci court-circuite parfois les canaux traditionnels), culturelle (les chancelleries doivent désormais partager l’information), technologique (les diplomates doivent parfois développer des compétences numériques complexes) et organisationnelle (en lien avec la dématérialisation des échanges et négociations diplomatiques).  En outre, en s’adaptant aux plateformes et outils numériques en tant que supports, les pratiques diplomatiques changent fondamentalement leur format en intégrant la brièveté des messages, le ton informel, l’imprévisibilité et l’impulsivité des échanges. Cet axe se focalise sur l’analyse des changements (ou inversement, la persistance) des pratiques et des métiers diplomatiques dans un contexte tout-numérique.

• Axe 2 : Écosystème de la diplomatie numérique et d’influence

 L’organisation « en réseaux » de la diplomatie numérique favorise l’entrée et l’influence de personnalités extérieures à la sphère diplomatique. La place, le rôle et la responsabilité des grandes plateformes privées du numérique prennent ici toute leur importance dans l’évolution de la diplomatie numérique. Ces acteurs privés renouvèlent par ailleurs la participation des sociétés civiles dans les relations internationales. Cet axe se fixe ainsi comme objectif d’analyser la composition et les fonctions de l’écosystème diplomatique, la dynamique de ses acteurs et leurs rôles.

• Axe 3 : Instruments et stratégies d’influence politique numérique

Cet axe s’intéresse à la diversité des stratégies poursuivies par les acteurs internationaux (États, mais aussi citoyens coalisés ou non) en matière d’influence numérique ainsi qu’aux outils convoqués. Aux instruments de 1990 (la télévision, la radio) puis de 2010 (YouTube, Facebook, Twitter), répondent désormais des messageries instantanées dont la fonction première se chevauche avec celle d’agora voire de place de marché (Telegram) ou des images diffusées via les réseaux sociaux pour rallier des soutiens aux politiques. De la communication en ligne à la diplomatie culturelle ou économique, les stratégies étatiques combinent plusieurs instruments en fonction des objectifs définis et des acteurs mobilisés.

• Axe 4 : Public de la diplomatie numérique 

L’analyse de la réception des canaux d’influence numérique – donc du succès ou de l’insuccès des entreprises d’influence étatiques – reste une problématique relativement peu étudiée. Liée partiellement au caractère privé des outils privilégiés par les acteurs impliqués dans des stratégies d’influence, cette difficulté d’accès et de modélisation ne doit pas en occulter le caractère politique. Cet enjeu est indissociable de l’étude des implications des pratiques diplomatiques numériques pour les opinions publiques et la confiance que celles-ci accordent en la parole publique. Tel est l’objectif de l’axe 4, qui vise à analyser les publics de la diplomatie numérique.

Calendrier

Nous vous demandons d’adresser au secrétariat de rédaction (aurelie.bur@enpc.fr) :

• pour le 15 septembre 2023, votre intention de contribution (2 pages présentant : objet, question de recherche, inscription dans la littérature, méthodologie et résultats).

Si votre intention est retenue :

• pour le 2 février 2024, soumission de l’article (65 000 signes, notes et espaces compris).

Vous trouverez plus d’informations, sur le site de la revue : http://www.revue-reseaux.fr/, notamment les consignes aux auteurs .

La publication du dossier est prévue fin 2024.

Coordination

• Inna Lyubareva  : IMT Atlantique, Laboratoire LEGO
• Julien Nocetti : GEODE (Géopolitique de la datasphère), Université Paris 8