HomeLa matérialisation du statut international du Cameroun par la France (1922-1960)

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La matérialisation du statut international du Cameroun par la France (1922-1960)

Entre obligations internationales et réalités impériales

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Published on Friday, October 27, 2023

Abstract

Protectorat allemand (1884-1916), condominium franco-britannique (1916-1919), territoire sous mandat de la SDN (1919-1945) et territoire sous tutelle des Nations Unies (1946-1960/1961), le Cameroun se singularise par succession de statuts. Ceci en fait sa spécificité qui a suscité curiosité, admiration, insatisfaction voire critique. L’institution du mandat et de tutelle crée en principe des droits et des devoirs du mandataire vis-à-vis du mandaté, exercés sous le contrôle de la SDN puis de l’ONU. L’objectif de cet ouvrage est de ressortir de cette constitution générale du système du mandat et de tutelle une analyse historique et objective de la matérialisation de ses principes et des obstructions créées par la France pour en contrôler ou freiner sa mise en œuvre.

Announcement

Appel à contributions pour ouvrage collectif La matérialisation du statut international du Cameroun par la France : entre obligations internationales et réalités impériales (1922-1960)

Argumentaire

Protectorat allemand (1884-1916), condominium franco-britannique (1916-1919), territoire sous mandat de la SDN (1919-1945) et territoire sous tutelle des Nations Unies (1946-1960/1961), le Cameroun se singularise par une succession de statuts (Abwa, 2004). Ceci en fait sa spécificité qui a  suscité curiosité, admiration, insatisfaction, voire  critique.

L’institution du mandat crée en principe des droits et des devoirs du mandataire vis-à-vis du mandaté, exercés sous le contrôle de la Société des Nations. Le Togo et le Cameroun relèvent de la catégorie des mandats dits «de type B », ce qui permet à la France et à la Grande-Bretagne d’y imposer une domination administrative étroite. En 1945, l’avènement de l’ONU ne modifie pas complètement la donne, mais la Charte onusienne prévoit de façon plus pressante la mise en place d’un processus d’émancipation à court et moyen terme pour tous les territoires sous tutelle.

Interroger l’« administration française au Cameroun de 1916 à 1959 », c’est aussi envisager une étude de la gestion de ce Territoire. Il fut en effet un champ d’expérimentation ou la France a exercé  plusieurs prérogatives et imposé des restrictions en s’inspirant du droit international.

 Inspiré du droit privé romain, le mandat suppose trois considérations essentielles en droit international public : d’abord, il est gratuit, c’est-à-dire que le mandataire ne doit tirer aucun profit économique personnel de la gestion du mandat ; ensuite, il est provisoire, car le mandataire doit progressivement conduire les pays sous mandat vers la capacité de s’administrer eux-mêmes ; enfin, il a un but moral, sa mission étant d’assurer le bien-être des populations sous mandat (Van Ress D. F. W., 1927). Les Organisations internationales se réservaient d’ailleurs un droit de regard sur l’effectivité de ces dispositions et, notamment, les progrès réalisés au Cameroun.

L’essence du mandat international est analogue à celle du mandat de droit civil : octroi d’une compétence déterminée en vue de remplir certaines fonctions, de poursuivre une certaine activité au nom du mandat. C’est donc essentiellement un devoir qu’il impose, devoir dont l’accomplissement ne devra cependant pas profiter aux intérêts matériels du mandataire ni entraîner nécessairement pour lui des sacrifices de même nature. Le mandat, aux termes de l’article 22 du Pacte de la SDN, est une « mission » avec 12 prérogatives formulées sous forme d’articles. Parmi ces derniers, certains peuvent être considérés comme des injonctions : art 2, art 3, art 4, art 5, art 6. En vue de prévenir des abus, les rédacteurs ont fixé des limites pour l’accomplissement de cette mission (Cioriceau G. 1926). Le Pacte, en consacrant le régime des mandats internationaux, n’a donc envisagé que des obligations à la charge du mandataire ; il ne mentionne aucun droit. La France s’est t-elle conformée à son cahier de charges ? A-t-elle respecté les obligations qui lui avaient été confiées ? Le gouvernement français a-t-il observé les spécificités juridique, économique et sécuritaire du Cameroun pendant le mandat et la tutelle ? Quel constat peut-on établir au terme du mandat et de la tutelle ? L’antagonisme entre des auteurs opposées à l’administration française et ceux favorables à la France a considérablement pesé sur l’évaluation et la compréhension de l’essence même du mandat et de la tutelle dans les territoires concernés, notamment au Cameroun français.

Les systèmes de mandat et de tutelle étaient fondés sur des principes classiques de colonisation, qui marquaient une distinction entre les colonisateurs, sujets agissants, et les colonisés, objets d’étude et de gouvernement, mais introduisirent une distance supplémentaire du fait de la supervision internationale exercée par la SDN puis de l’ONU. Face aux pressions contradictoires, d’un côté des administrations coloniales désireuses d’exercer souverainement leur autorité, et de l’autre l’opinion de certains gouvernements qui voyaient d’un mauvais œil l’expansionnisme croissant des États mandataires, l’esprit du mandat et de la tutelle constituerait-il une controverse ? Pourquoi le mandat et la tutelle suscitent-ils autant de passions ?

Était aussi nouveau le mécanisme de légitimation enclenché par la Société des Nations : les nations mandataires devaient désormais prouver régulièrement devant une Commission des Mandats qu’elles gouvernaient bien en conformité avec ces principes par des preuves concrètes, c’est-à-dire, entre autres, des rapports annuels discutés lors des sessions. La Commission Permanente des Mandats (CPM) était composée de personnalités réputées indépendantes, mais pour la majorité d’entre elles, issues des milieux coloniaux. Au cours de ses sessions, les puissances mandataires présentaient des rapports sur leur administration répondant à un long questionnaire portant sur les différentes obligations inhérentes au mandat. Nous pouvons aussi nous interroger sur le choix des membres de la CPM qui ont exercé au Cameroun.

L’objectif de cet ouvrage est de ressortir de cette constitution générale du système du mandat et de tutelle une analyse historique et objective  de la matérialisation de ses principes et des obstructions créées par le mandant pour en contrôler ou freiner la mise en œuvre. Cet ouvrage est l’occasion de renouveler un dialogue entre spécialistes de différentes disciplines (historiens, politologues, géographes, littéraires, anthropologues, juristes, économistes…) afin d’appréhender cette question dans une perspective holistique. Nous voulons produire un travail scientifique dans une approche diachronique et une approche évaluative qui offrent une explication de l’action tout en mettant en avant la transdisciplinarité. Il ne s’agit pas de réécrire l’histoire sur le statut international du Cameroun, mais de la revisiter à travers une étude empirique en s’appuyant sur ce qui a été déjà fait afin de mettre au jour les histoires oubliées et méconnues. Il est question d’analyser la complexité de l’action française oscillant entre les idées généreuses des institutions internationales et l’obsession impériale. Un autre objectif est d’expliquer le sens et la portée de ces principes/ des termes inscrits dans le Traité de Paix et le Pacte, ainsi que les conséquences juridiques, économiques et sociales qu’a entraînées leur application dans le Cameroun français. Certains axes seront mis en avant, mais ils sont loin d’être exhaustifs :

Axe 1 : La France et la spécificité juridique du Cameroun sous mandat et sous tutelle.

Placé sous mandat de la SDN  puis sous tutelle de l’ONU, conformément au Pacte et à la Charte, l’administration du Cameroun fut confiée à la France et à la Grande Bretagne. Dès lors ledit territoire  ne saurait être confondu à un territoire métropolitain, ni même à une colonie française. Il était un territoire distinct reconnu par un acte international. Comment la France s’était-elle accommodée aux mesures restrictives   imposées par le statut international du Cameroun  sur ce territoire conquis par les armes et où elle affichait sa volonté de l’intégrer à son domaine colonial ? Comment la France avait-elle concilié ses prérogatives à ses ambitions ? Telles sont les principales questions auxquelles le présent axe de réflexion se propose d’apporter des réponses.

Axe 2 : La France et la spécificité économique du Cameroun sous mandat/tutelle.

La fin de la Grande Guerre est marquée en Europe par une aggravation du protectionnisme, caractérisé entre autres par l’augmentation des tarifs douaniers. Les colonies deviennent donc des pivots alternatifs pour les puissances impérialistes en vue de leur reconstruction. Cependant, la consternation va très vite s’installer avec l’institution de la politique de la porte ouverte encore appelée l’égalité économique et commerciale dans les territoires à statut international. Le principe impliquait, en théorie, l’égalité des puissances et de leurs ressortissants en ce qui concerne l’instauration d’activités économiques de toute nature par des personnes physiques et morales au Cameroun. La notion de monopole était donc remplacée par le libre-échange et la libre concurrence. Dans cet axe, les contributeurs sont invités à étudier les mécanismes employés par la France pour règlementer et coordonner cette ouverture économique au Cameroun français dans l’esprit du mandat et de la tutelle.

Axe 3 : La France et la spécificité sécuritaire  du Cameroun sous mandat/tutelle.

Les textes politiques de portée théorique sont un fait, les réalités quotidiennes de l’exercice du pouvoir en sont un autre. L’article 3 du mandat français sur le Cameroun stipulait que la France ne devra établir sur le territoire aucune base militaire ou navale, ni édifier aucune fortification, ni organiser aucune force militaire indigène sauf pour assurer la police locale et la défense du territoire. Les évènements qui se succédèrent au Cameroun modifiaient le contexte sécuritaire et la France usa de différents moyens pour maintenir l’ordre et la paix au Cameroun. L’histoire de l’ordre en situation coloniale ne saurait être séparée de l’histoire du renseignement. Dans cet axe, il conviendra d’évaluer le rôle, la place et l’objectif du dispositif policier mis en place par la France en rapport avec la SDN et l’ONU pour contenir la menace allemande au Cameroun français, les violences orchestrées par l’interdiction de l’UPC et le début de sa clandestinité, etc. 

Axe 4 : Les acteurs et organismes internationaux de contrôle du mandat et de la tutelle.

La crédibilité d’un organisme de contrôle passe par l’impartialité des membres qui le constitue. Nous voudrons dans cette articulation interroger la trajectoire des acteurs qui, d’une manière ou d’une autre, ont veillé au respect des principes du mandat et de la tutelle. Comme son sous-titre l’indique, l’objectif principal n’est autre que de questionner son organisation, son fonctionnement et l’esprit dans lequel elle a poursuivi sa tâche délicate au Cameroun français. Dans la mesure où aucune sanction n’était possible contre une violation éventuelle de ces principes, le contrôle que l’on pensait ainsi instaurer était-il efficace ?

Conditions de soumission

Les chercheurs et spécialistes intéressés par cet appel sont invités à envoyer simultanément leurs propositions d’articles en français ou en anglais (200 mots maximum) accompagnés de leurs noms et prénoms, une adresse électronique et leurs institutions d’attaches aux adresses suivantes :

  • contact@cerdym.org 
  • ninarlette@yahoo.fr  

Calendrier prévisionnel

  • Lancement de l’appel à contributions : 18 octobre 2023 
  • Date limite pour la soumission des propositions : 25 novembre 2023 
  • Réponse aux appels : 25 décembre 2023
  • Date limite d’envoi des textes complets : 31 mars 2024
  • Expertises et corrections : 1er avril-  30 septembre 2024
  • Publication de l’ouvrage : décembre 2024 

Comité scientifique

  • Abdouraman HALIROU, Maître de Conférences, historien, Université de  Ngaoundéré.
  • Bidias AMBASSA, Maître de Conférences, juriste internationaliste, Université de Douala.
  • Brenda DIANGHA, Maître de Conférences, linguiste, Université de Douala.
  • Christian Joël AKONO, Maître de Conférences, juriste internationaliste, Université de Douala.
  • David MOKAM,  Professeur, historien, Université de NGaoundéré.  
  • Desmonds EYANGO, Maître de Conférences,  juriste, Université de Douala.
  • Emmanuel TCHUMTCHOUA, Professeur, historien, Université de Douala.
  • Ernest MESSINA, Maître de Conférences, historien, Université de Douala.
  • Japhet ANAFAK LEMOFAK, Maître de Conférences, historien, Université de Yaoundé I.
  • Jeannette FOTSO, Maître de Conférences, anthropologue, Université de Douala.
  • Jules KOUOSSEU, Professeur, historien,  Université de Dschang.
  • Martha MBU, Maître de Conférences, linguiste,  Université de Maroua.
  • Pierre FADIBO,  Maître de Conférences, historien, Université de Garoua. 
  • Vivien MELI MELI, Maître de Conférences, sociologue, Université de Dschang.
  • Ramsès TSANA, Maître de Conférences, politologue, Université de Douala.
  • Sourna LOUMTOUANG, Maître de Recherche, Minresi.
  • Williams POKAM,  Maître de Conférences, historien, Université de Dschang.

Comité de lecture

  • Alexis Armelien GASISOU, Chargé de Cours, ENS Yaoundé.
  • Arlette ETOA, Chargé de Cours, Université de Douala.
  • Gervais DOUMTSOP, Associate Professor, Université d’Ottawa.
  • Gnebora OUMAROU, Chargé de Cours, Université de Douala.
  • Prince Nico TCHOUDJA, Chargé de Cours, Université de Douala.
  • Amadou SOULEYMANOU, Chargé de Cours, Université de Douala.
  • Vivian NKONMENEC, Chargé de Cours, Université de Douala.

Bibliographie indicative

  • Amara Cissé, D. (1988), Histoire économique de l’Afrique Noire, Paris, L’Harmattan.
  • Andler, C. (1919), Les contre-propositions allemandes, Le Temps. ????
  • Antonelli, E. (1931), L’Afrique et la paix de Versailles, Paris : Éditions Grasset.
  • Auchene, A. (1948), La politique coloniale de la France, Paris : Payot.
  • Baroudi, M. (1949), Les problèmes juridiques concernant l’administration des communautés sous mandat, Genève,  Imprimerie genevoise.
  • Bentwich, N. (1930), The mandates system, London, Longmans.
  • Beer, L. G., African questions at the Peace Conference, New York, Putman’s.
  • Chazelas, V. (1931), Territoires africains sous mandat de la France : Cameroun et Togo, Paris, Sociétés d’Éditions.
  • Chowdhuiri Ramendra, R. (1955), International mandates and trusteeship system: a comparative study, India, Martinus Nijhoff.
  •  Cioriceau, G. (1926), Les mandats internationaux : une des conséquences des principes fondamentaux de la Société des Nations, Paris, La Vie universitaire.
  • Fauchille, P. (1925), Traité de droit international public, t.1, Paris. ?????
  • Ferro, M., (1990), La Grande Guerre 1914-1918, Paris, Gallimard.
  • Furukaki, P. T. (1923), Les mandats internationaux de la Société des Nations, Lyon, Librairie Paul Philly.
  • Guiffo, J. P. (2007), Le statut international du Cameroun 1921-1961, Yaoundé, Essoah.
  • Lafitte P. (1887), Le paradoxe de l’égalité, Paris, Hachette.
  • Le Grand, J. (1906), La liberté de commerce dans le Bassin conventionnel du Congo, Paris, Alfred Leclerc.
  • Owona, A. (1996), La naissance du Cameroun 1888-1914, Paris : L’Harmattan.
  •  Oyono, D. (1992), Colonie ou mandat international, Paris, L’Harmattan.
  • Pillias, G. (1900), La navigation internationale du Congo et du Niger, Paris,
  • Rousseau, A. et Renouvin P. (1977), Histoire des relations internationales, Paris, Hachette.
  • Roume, E. (1917), La conquête des colonies allemandes, Paris, Bloud et Gay.
  • Rudin, H. (1938), Germans in the Cameroons 1884-1914, New Haven, Yale university press. Sarraut, A. (1923), La mise en valeur des colonies françaises, Paris : Payot.
  • Sfez, L. (1984), Leçons sur l’égalité, Paris, PFNSP.
  • Smuts, J. C. (1918), The League of Nations: A Practical Suggestion, London, ?????
  • Stoyanvsky, J. (1925), La théorie générale des mandats internationaux, Paris. ????
  • Suret Canale, J. (1962), Afrique noire : l’ère coloniale (1900-1945), Paris, Sociales.
  • Tambi, E. (1974), A history of Cameroon, London, Longmann.
  • Temgoua, A. P. (2014), Le Cameroun à l’époque des Allemands 1884-1916, Paris, L’Harmattan.
  • Temperly (1924), A history of the peace conference of Paris, vol. VI, London, Oxford University Press.
  • Van Ress, D. F. W. (1927), Les mandats internationaux : le contrôle international de l’administration mandataire, vol I, Paris, Rousseau et co.
  • Van Rees, D. F. W. (1928), Les principes généraux du régime des mandats, vol. II, Paris, A. Rousseau.

Date(s)

  • Saturday, November 25, 2023

Keywords

  • Statut international, obligations , materialisation, imperial, France, Cameroun

Contact(s)

  • Amadou Souleymanou
    courriel : souleymanou [dot] amadou [at] gmail [dot] com

Information source

  • Arlette Francine Njomou Yonké
    courriel : ninarlette [at] yahoo [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« La matérialisation du statut international du Cameroun par la France (1922-1960) », Call for papers, Calenda, Published on Friday, October 27, 2023, https://doi.org/10.58079/1c1y

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