HomeLes atlas historiques régionaux : bilan historiographique et perspectives numériques

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Published on Thursday, December 21, 2023

Abstract

La construction et la production d’un atlas historique régional, si elles s’inscrivent dans une tradition savante et académique, dont elles tirent une véritable richesse, ont été profondément modifiées ces dernières décennies. Face aux outils développés par la géomatique, l’historien est invité à réviser ses modes de collecte, de documentation, de production, de visualisation et de diffusion des données historiques. C’est la vocation première de cette journée d’étude que d’établir un état des lieux, notamment à partir d’études de cas et d’ouvrir des perspectives, s’agissant de pratiques associant héritage historiographique et utilisations du numérique.

Announcement

Argumentaire

L’atlas historique régional se caractérise par deux composantes essentielles : d’une part il est un ensemble de données généralement multithématiques présentées sous forme de cartes accompagnées de textes, et parfois de graphiques, d’autre part il s’intéresse à un cadre spatial restreint. Cette dernière dimension suppose, de la part des concepteurs, une réflexion – sans doute inégalement poussée, néanmoins - à propos des limites de l’espace régional à cartographier, les choix n’étant jamais neutres : de nombreux découpages sont toujours possibles et les critères en sont variables.

En l’espèce, l’école allemande a particulièrement joué un rôle moteur, alors qu’elle est surtout connue pour la production d’atlas généraux. En effet, la configuration politique très éclatée des terres de l’aire germanophone a conduit les historiens à s’intéresser très tôt aux représentations cartographiques. Dès les débuts du XXe siècle, toute une série d’atlas historiques régionaux voient peu à peu le jour. Dans le cas français, des velléités apparaissent au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, avec le projet d’un Atlas du Dauphiné proposé par l’archiviste de la Drôme Jacques de Font-Réaulx (1893-1979). Ce coup d’essai est un échec en ce qu’il ne suscite pas un engouement de la communauté universitaire. Une véritable rupture historiographique intervient dans les années 1960. D’une part, en 1964, l’éditeur François Michel, avec l’appui de Robert-Henri Bautier et de François de Dainville, met en chantier un Atlas historique français par « provinces » (34 volumes prévus), « atlas qui ne fût pas seulement celui des divisions politiques et religieuses de notre pays, mais qui refléterait aussi la vie politique, sociale, économique » (J. de Font-Réaulx). Ce projet éditorial global n’a pas été mené à son terme. Toutefois, il a été repris par une structure associative associée à une SARL ad hoc, et plusieurs équipes constituées sont parvenues à publier, avec l’appui d’éditeurs différents, un atlas régional respectant le cahier des charges initial (un volume de cartes, un autre de textes) : sur la Provence (Édouard Baratier dir., 1969), l’Anjou (Robert Favreau dir., 1973), la Savoie (Jean-Yves Mariotte et André Perret dir., 1979), l’Agenais (Jean Burias dir., 1979). Parallèlement, est publié l’Atlas historique et statistique de Normandie, sous l’égide de Pierre Chaunu à partir de 1967. Celui-ci avait fondé l’année précédente à l’université de Caen le Centre de Recherche d’Histoire Quantitative. La réalisation d’enquêtes de grande ampleur permet la constitution de volumineuses bases de données. Ces dernières sont mises à la disposition des artisans des volumes de l’atlas, la première livraison étant consacrée aux cartes des communautés d’habitants. Dans les décennies les plus récentes, d’autres travaux s’inscrivent dans cet héritage, comme l’Atlas historique et statistique de la Savoie au XVIIIe siècle, paru en 2012. D’autres publications font le choix d’une thématique particulière appliquée à un territoire donné, tels que l’Atlas de la vie religieuse en Lorraine à l’époque moderne (2011) ou l’Atlas historique des pratiques religieuses. Le sud-ouest du Québec au XIXe siècle (initié en 1983, paru en 1998).

D’un point de vue technique, la cartographie historique a délaissé la planche à dessin pour l’ordinateur en deux grandes étapes. La première a été franchie dans les années 1980-1990, lorsqu’il a été possible de procéder à la digitalisation des fonds de cartes et de la combiner avec des traitements statistiques et avec la visualisation des données sur ordinateur. Cette activité s’est d’abord développée au sein de grands établissements comme l’EHESS, qui a créé un véritable atelier de « cartographie automatique ». Un des premiers grands projets intégrant ces outils, ici dans le cadre de thématiques traitées à l’échelle nationale, est l’Atlas historique de la Révolution française, paru en 11 tomes entre 1987 et 2000. La seconde étape est évidemment celle des développements géomatiques et numériques que nous connaissons actuellement. À l’ère du GPS, les progrès techniques de la cartographie ont modifié notre compréhension de l’espace. La création et la mise en œuvre d’un système d’information géo-historique nécessitent d’affronter un défi technologique. En l’espèce, une étape importante a été franchie récemment avec l’émergence des atlas historiques régionaux accessibles via internet, dont il convient d’interroger les modalités techniques et scientifiques de la mise en ligne. Celle-ci introduit par exemple un rapport à la diffusion du savoir bien spécifique, notamment concernant l’actualisation des contenus.

La construction et la production d’un atlas historique régional, si elles s’inscrivent dans une tradition savante et académique, dont elles tirent une véritable richesse, ont donc été profondément modifiées. Dans ce contexte, face aux outils développés par la géomatique, l’historien est invité à réviser ses modes de collecte, de documentation, de production, de visualisation et de diffusion des données historiques. Le chercheur ou la chercheuse s’appuient toujours sur les archives et les cartes patrimoniales, mais disposent de nouveaux outils pour les exploiter, les interroger, redessiner des circonscriptions territoriales disparues et matérialiser sur ces fonds des stratégies et des pratiques de maîtrise du territoire, traitant des données diverses ayant trait à l’histoire culturelle, sociale, économique, politique ou religieuse. La construction de bases de données concourant à une représentation dans l’espace, assistée par l’informatique, ne va pas sans interroger l’élaboration de stratégies de recherche. Les historiens doivent tout à la fois veiller à ne pas rompre le fil de la connaissance héritée et accepter une mutation professionnelle profonde, qui les place en situation d’apprentissage méthodologique et technique permanent.

C’est la vocation première de cette journée d’étude que d’établir un état des lieux, notamment à partir d’études de cas et d’ouvrir des perspectives, s’agissant de pratiques associant héritage historiographique et utilisations du numérique.

Axes

Les communications s’organiseront autour de plusieurs thèmes de réflexion :

  • Une interrogation sur l’évolution de l’approche du concept de province ou de région dans le cadre d’atlas. La façon de considérer un territoire, n’a-t-elle pas été transformée, à la fois par la régionalisation puis par la décentralisation, et par le détachement voire le rejet qui se manifeste parfois vis-à-vis de la légitimité d’un cadre régional comme référence ?
  • Une approche des chantiers éditoriaux et de recherche successifs, depuis les premières décennies du siècle dernier jusqu’aux programmes les plus contemporains. On sera particulièrement attentif aux modalités de réalisation de ces atlas, notamment leur dimension collective et les compétences mobilisées afin de caractériser les évolutions des thématiques traitées.
  • La prise en compte, dans les atlas régionaux, des échelles nationale et internationale. En effet, ce serait une erreur de considérer l’espace régional pour lui-même, tel un îlot coupé d’un contexte plus global. Considérer les marges et les confins interroge également la notion de continuité spatio-temporelle.
  • Les modalités de la publication en ligne des notices historiques et cartographiques. Cela pose la question de la mise à disposition de productions, de nature variée, s’adressant à différents publics, qu’il s’agisse de ressources géo-historiques disponibles au téléchargement, dans une perspective de libre accès, ou de science ouverte ou collaborative.

Organisation

  • Stéphane Gomis, professeur d’histoire moderne
  • Vincent Flauraud, maître de conférences d’histoire contemporaine

La journée d’étude se déroulera le mercredi 26 juin 2024 à la Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand, Centre d’Histoire « Espaces et Cultures » (CHEC UPR 1001), Université Clermont Auvergne.

Modalités de soumission

Nous vous invitons à proposer une présentation de vos travaux en nous envoyant une courte biobibliographie et un titre de communication accompagné d’un résumé d’une dizaine de lignes exposant votre projet et indiquant le thème dans lequel celui-ci s’inscrit.

Les propositions sont à envoyer avant le 31 mars 2024 à :

stephane.gomis@uca.fr

vincent.flauraud@uca.fr

Places

  • Maison des Sciences de l’Homme de Clermont-Ferrand - 4, rue Ledru
    Clermont-Ferrand, France (63)

Date(s)

  • Sunday, March 31, 2024

Keywords

  • atlas, atlas historique, régions, territoires, cartographie, géomatique

Contact(s)

  • Vincent Flauraud
    courriel : vincent [dot] flauraud [at] uca [dot] fr
  • Stéphane Gomis
    courriel : stephane [dot] gomis [at] uca [dot] fr

Reference Urls

Information source

  • Vincent Flauraud
    courriel : vincent [dot] flauraud [at] uca [dot] fr

License

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To cite this announcement

« Les atlas historiques régionaux : bilan historiographique et perspectives numériques », Call for papers, Calenda, Published on Thursday, December 21, 2023, https://doi.org/10.58079/vdz5

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