L’enseignement du jazz  s’est largement développé depuis des décennies, avec la création de cursus dans les domaines de la performance, de la pédagogie et de la recherche. À la suite du jazz, d’autres musiques apparues au XX^e siècle ont progressivement intégré les universités et les conservatoires. La question de la dénomination de ce vaste champ musical et pédagogique est complexe : musiques populaires, phonographiques ? Le terme de « musiques actuelles », choisi en France par le ministère de la Culture, témoigne de cette difficulté. Ce numéro du Journal de Recherches en Éducation Musicale est l’occasion de questionner cette difficulté terminologique et d’initier une réflexion commune entre chercheurs, enseignants et musiciens sur les enjeux du secteur au niveau de la recherche, de la pédagogie et de la pratique artistique.

Coordination du numéro thématique

Stéphane Audard et Laurent Cugny (Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)

Argumentaire

L’institutionnalisation de l’enseignement du jazz débute après la Seconde Guerre mondiale aux États-Unis (University of North Texas, Schillinger House, Westlake College of Music). En l’espace de soixante-quinze ans, l’offre éducative s’est largement développée dans le monde, avec la création d’un grand nombre de cursus diplômants dans les domaines de la performance, de la pédagogie et de la recherche. À la suite du jazz, d’autres musiques apparues au XXe siècle ont progressivement intégré les universités et les conservatoires. La question de la dénomination de ce vaste champ musical et pédagogique est complexe : musiques populaires, phonographiques ? Le terme de « musiques actuelles », choisi en France par le ministère de la Culture (Lephay-Merlin et al., 2001), témoigne de cette difficulté en regroupant sous cette appellation générique le jazz, les musiques actuelles amplifiées, la chanson et les musiques traditionnelles. Tout d’abord, ce critère d’actualité, qui par définition est sans cesse à reconsidérer, est-il pertinent pour chacune de ses composantes ? Ensuite, on observe à l’usage une préemption du terme « musiques actuelles » par les seules musiques actuelles amplifiées (Revel, 2012). Enfin, cette terminologie n’a pas d’équivalent à l’étranger, ce qui accentue une spécificité française. Cependant, la dénomination « jazz et musiques actuelles », qui correspond à l’usage, est ici conservée. 

Ce présent numéro du Journal de Recherches en Éducation Musicale est l’occasion de questionner, et peut-être dépasser cette difficulté terminologique. L’objectif est également d’initier une réflexion commune entre chercheur.euse.s, enseignant.e.s et musicien.ne.s sur les enjeux de ce vaste secteur au niveau de la recherche, de la pédagogie et de la pratique artistique. Pour ce faire, plusieurs axes de réflexion sont proposés.

Perspective historique et institutionnelle

Du point de vue de l’enseignement artistique, l’influence historique prépondérante du modèle états-unien d’une part, et les particularismes nationaux aux niveaux culturel et éducatif d’autre part, ont amené à la constitution d’identités pédagogiques « glocalisées » (Nicholson, 2014). Du point de vue universitaire, le développement des popular music studies a permis d’ancrer l’enseignement du jazz et des musiques actuelles dans l’institution. À l’université comme dans les écoles de musique, le jazz a été la première des musiques actuelles à être enseignée. On peut s’interroger sur l’évolution de la place qu’occupe le jazz dans les institutions éducatives, et ses liens avec les musiques émergentes qui y ont été progressivement intégrées. Jazz et musiques actuelles partagent-ils les mêmes enjeux éducatifs et institutionnels ? 

Perspective pédagogique

Le jazz et les musiques actuelles ont pris place dans des institutions éducatives préexistantes dédiées à l’apprentissage de la musique savante occidentale, basé sur « le système notation/théorie musicale » (Caporaletti, 2018). Les processus de transmission historiques du jazz, largement informels (Berliner, 1994), semblent a priori antinomiques avec ce cadre institutionnel. Faut-il pour autant considérer le jazz et les musiques actuelles comme échappant à tout enseignement formel ? La création de cursus, la parution d’un grand nombre d’ouvrages et l’abondance des ressources pédagogiques en ligne semblent indiquer le contraire. De nouvelles approches, comme la Théorie des musiques audiotactiles, permettent d’envisager différemment ces questions (Audard, 2022). Il convient également de s’interroger sur l’articulation entre les cours de pratique musicale et les cours d’érudition. Jazz et musiques actuelles partagent-ils les mêmes enjeux pédagogiques ? 

Ces axes de réflexion ne sont pas limitatifs. Ils ont pour objet d’engager un dialogue entre chercheur.euse.s, pédagogues et artistes sur l’enseignement du jazz et des musiques actuelles en croisant les points de vue institutionnels, les approches disciplinaires et les expériences professionnelles. 

Modalités de soumission

Les auteurs sont invités à envoyer l’article, accompagné d’un titre, d’un résumé de 200 à 250 mots, de cinq mots-clés, ainsi que de leur traduction en langue anglaise (voir la « Note aux auteurs »). Il est possible d’adresser d’abord à la revue un texte d’intention d’environ 1500 signes (espaces compris) ; une réponse rapide vous serait renvoyée par les coordinateurs. L’article (ou intention de texte) est à envoyer aux adresses suivantes : revueJREM@gmail.com et stephane.audard@cnrs.fr

• Date de réception des articles : 1^e ocrobre 2024

• Date de publication : Premier semestre 2025

Directeur de publication

Philippe LALITTE (Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)

Rédacteur en chef

Adrien BOURG (RCS, EA 7403, Institut Supérieur de Pédagogie-ICP)

Comité de rédaction

• Nathalie ABOU JAOUDE (Centre de recherche sur les traditions musicales, Université Antonine)
• Stéphane AUDARD (Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)
• Adrien BOURG (RCS, EA 7403, Institut Supérieur de Pédagogie-ICP)
• Sébastien DURAND (Interactions Culturelles et Discursives, EA 6287, Université de Tours-CFMI)
• Gérald GUILLOT (membre associé de l’Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)
• Philippe LALITTE (Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)
• Lorraine ROUBERTIE SOLIMAN (Université de Clermont-Auvergne, Acté UR 4281)
• Odile TRIPIER-MONDANCIN (Lettres, Langages et Arts - Création, Recherche, Émergence en Arts, EA 4153, Univ. Toulouse-Jean Jaurès-INSPE)

Comité scientifique

• Jésus AGUILA (Lettres, Langages et Arts - Création, Recherche, Émergence en Arts, EA 4153, Université Toulouse Jean-Jaurès)
• Frédéric BILLIET (Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)
• Gilles BOUDINET (Éducation, Cultures, Politiques, EA 4571, Université Lyon 2-ISPEF)
• Marc BRU (Éducation, Formation, Travail, Savoirs, UMR 122, Université Toulouse Jean-Jaurès)
• Jean-Marc CHOUVEL (Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)
• Pierre-François COEN (Unité de recherche Évaluation – Identité – Enseignement, Haute École Pédagogique de Fribourg)
• Gilles COMEAU (Laboratoire de recherche en pédagogie du piano et Institut de recherche en musique et santé, Université d’Ottawa)
• Gordon COX (Université de Reading)
• Francis DUBÉ (Centre d’excellence en pédagogie musicale et Laboratoire de recherche en formation auditive et didactique instrumentale, Université Laval)
• Maya GRATIER (Laboratoire Éthologie Cognition et Développement, EA 3456, Université Paris Nanterre)
• Aurélie HELMLINGER (Laboratoire d'ethnologie et sociologie comparative, CNRS UMR 7186, Université Paris Nanterre)
• Michel IMBERTY (Centre de Recherche en Psychologie et Musicologie Systématique, Université Paris Nanterre)
• François MADURELL (Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)
• Jean-Pierre MIALARET (Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)
• Danièle PISTONE (Institut de Recherche en Musicologie, CNRS UMR 8223, Sorbonne Université)
• Gérard SENSEVY (Centre de recherches sur l'éducation, les apprentissages, et la didactique, EA 3875, Université de Bretagne Occidentale)
• Barbara TILLMANN (Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon, CNRS UMR 5292, Inserm U1028, Université Lyon 1)
• André TRICOT (Epsylon – Dynamique des Capacités Humaines et des Conduites de Santé, EA 4556, Université de Montpellier)
• Ingrid VERSCHEURE (Éducation, Formation, Travail, Savoirs, UMR 122, Université Toulouse II Jean Jaurès)

Bibliographie

• Audard, S. (2022). Histoire de l’enseignement du jazz : Apports de La Théorie des Musiques Audiotactiles. Revue d’études du Jazz et des Musiques Audiotactiles, 3.
• Berliner, P. (1994). Thinking in Jazz : The Infinite Art of Improvisation. University of Chicago Press.
• Caporaletti, V. (2018). Une musicologie audiotactile (Traduit par L. Cugny). Revue d’études du Jazz et des Musiques Audiotactiles, 1, 1–17.
• Lephay-Merlin, C., Faye-Mora, M., Lucchini, A. et Babé, L. (2001). Les Musiques actuelles dans Les Établissements d’enseignement spécialisé contrôlés par l’État. Ministère de la Culture et de la Communication.
• Nicholson, S. (2014). Jazz and Culture in a Global Age. Northeastern University Press.
• Revel, B. (2012). Étude sur l’analyse de l’enseignement et de l’accompagnement dans le secteur des musiques actuelles. Ministère de la Culture et de la Communication.