Argumentaire

Les paradoxes que vit la scène artistique mondiale à la fin du premier quart du 21 é siècle, on fait qu’un grand nombre des œuvres artistiques produites, grâce à l’Intelligence Artificielle, ont raflé une multitude de prix et de récompenses, et se présentent comme étant des créations artistiques, véhiculant beaucoup de créativité. Nous citons comme exemple, l’œuvre : « Le théâtre de l’Opéra Spatial » de l’artiste américain « Gisone Aline ». Il s’agit d’une création réalisée, en ayant recours à l’Intelligence Artificielle générative, grâce au programme « Midjourney ». Cette œuvre a obtenu le premier prix, décerné par les organisateurs de la Foire du Colorado. Dans un contexte connexe, les tableaux réalisés grâce à l’Intelligence Artificielle ont commencé à concurrencer l’artiste en photographie, et à imposer leur prééminence au sein du marché de l’art, là où ils ont été écoulés à prix forts. On y trouve parmi eux, l’œuvre du groupe Obvius, produite sous le titre « Le portrait d’Edmond de Belamy ».

Il s’agit d’un portrait, conçu sur la base de plusieurs données algorithmiques, mais cette reconnaissance de la réussite artistique n’a pas pour parallèle une reconnaissance similaire de l’action qui conduit au résultat, d’autant plus que les processeurs de ces œuvres d’art, sont produites grâce à des applications d’intelligence artificielle, et ne sont pas appelées créativité artistique, mais sont plutôt considérées comme œuvres générées.

En revanche, on ne peut pas être sûr que la situation restera telle qu’elle est dans le futur, contrairement à la machine photographique, qui a opéré une révolution technique et artistique, qui a menacé la position du photographe dans les années 1830, puis s’est imposée comme un genre d’expression artistique et une spécialité enseignée dans les instituts d’art. L’Intelligence Artificielle est venue, une fois de plus, ébranler la plateforme créative dans diverses spécialisations artistiques, notamment la photographie, le design et tout ce qui appartient aux domaines de la créativité, qu’il s’agisse des arts visuels, de la musique, ou encore de la littérature, et de la poésie. Nous ne dévoilerons pas un secret, quand on avance que la tendance de l’Intelligence Artificielle s’imposera à tous les domaines scientifiques, car elle s’avère d’ores et déjà comme un phénomène culturel, lié à une géographie spécifique, autant qu’un phénomène civilisationnel, dont les répercussions se propagent dans le monde entier, et affectent également les domaines, scientifique, littéraire et artistique.

Ici, nous devons faire la différence entre ce qui est culturel local, né de l’histoire, et ce qui est civilisationnel, qui cherche à se propager à l’échelle mondiale. Hichem Djaït estime que toute civilisation est vouée à se propager, comme il le dit dans son livre « La crise de la culture islamique » : « la civilisation occidentale va s’étendre de force dans toutes les sociétés, tout comme elle a inclus la civilisation agricole. Presque toute l’humanité, et donc toutes les théories et toutes les questions, conflits et confusions, entrent dans une période temporaire, où il n’y a guère d’échappatoire au rattrapage, que cela nous plaise, ou non ». Si nous acceptons que nous sommes impliqués - inévitablement - dans cette nouvelle ère, nous devons accepter - en plus d’absorber ces changements et de les engager pour ceux qui le peuvent - d’avancer dans leur légalisation et de réduire leurs dérapages, d’autant plus que nous sommes en proie à un processus d’invasion d’images fabriquées, telles que celles d’enfants décapités, et le reste du récit de l’entité occupante, qui a été promue et défendue par les principales chaînes occidentales, jusqu’à ce que ces images « sauvages et honteuses », soient considérées presque comme « faits divers » et perçues « presqu’ordinairement ».

Nous sommes aussi appelés, en retour, à promouvoir les apports et avantages de ces évolutions technologiques, jusqu’à leurs plus extrêmes limites, car de nombreux domaines ont su exploiter ces atouts au profit de l’humanité, ce qui est le cas dans le domaine médical par exemple, et la meilleure preuve en est, l’utilisation de l’Intelligence Artificielle dans la fabrication de vaccins contre la pandémie de Corona à l’époque où les laboratoires étaient en activité. La recherche se déroule dans une course contre la montre, l’intelligence artificielle était donc le moyen et l’avantage pour fournir les solutions les plus appropriées dans les plus brefs délais.

Quant aux domaines de créativité, ils ont leurs spécificités propres, d’autant que tous les programmes tels que (Active GNT), (DAL-A), Migdorney, ou Stable Diffusion, ne créent pas de solutions, au sens d’œuvres d’art visuelles ou lisibles, sauf à partir des images disponibles dans leur banque de données, ou de textes ou de poésie - et le programme de diffusion stable, par exemple, a annoncé qu’il disposait de plus de deux millions d’images -.

De là est né un nouveau type de problème concernant le droit d’auteur, divisé entre le matériel et l’immatériel, c’est-à-dire entre un programme intelligent, qui génère le produit artistique en se référant à un ensemble de données stockées dans le programme lui-même, et entre l’artiste, qui utilise ce programme avec ses propres capacités, pour que l’idée promue devienne un texte, parfois de simples mots, ou une image apparemment homogène, harmonieuse, solidement construite et esthétiquement agréable. Mais son origine est fragmentée en éléments tirés des œuvres d’autres artistes, y compris ceux qui n’ont pas caché leur protestation contre leur implication forcée dans de tels programmes, estimant que ses œuvres, comme la plupart des œuvres artistiques répertoriées dans les banques de données, ont été exploitées sans autorisation de leurs propriétaires - et ces artistes ne contribuent pas intentionnellement aux produits artistiques générés par l’Intelligence Artificielle - Ils sont les tiers dans le conflit du droit d’auteur, ce qui semble délicat à prouver, comme le dit Alexandra Ben Samoun, professeur de droit et de sciences politiques à l’université de Rennes – « Le choix d’un statut pour les productions culturelles de l’IA apparaît comme une question presque philosophique qu’il faudra trancher juridiquement. » et la question de la propriété intellectuelle ne suffit pas. En présentant non seulement des formes juridiques et philosophiques, mais également des formes éthiques et épistémologiques, ce qui fait remonter à la surface des questions sur l’intelligence artificielle, nature de l’art, de l’artiste, et de la réalisation artistique.

D’un autre côté, dans le domaine académique des sciences humaines et des écrits littéraires en diverses langues, ainsi que des écrits liés aux théories des arts, les problématiques ne sont pas dénuées de complexité. On peut plutôt dire que ces domaines s’activent dans une en extrême prudence, de codification et d’éclairage, car ils peuvent être les plus touchés par les applications de l’Intelligence artificielle, nonobstant que le phénomène des chercheurs, qui éditent des textes, n’est en fait qu’une synthèse entre des textes que d’autres chercheurs ont travaillés, et pour compléter les applications et les programmes qu’ils ont entrepris d’exploiter.

Ce phénomène est devenu alarmant et a occupé de nombreuses études, comités et individus - afin d’approfondir toutes ces questions et d’autres questions qui peuvent ouvrir la recherche à ceux qui s’intéressent à des sujets aussi actuels, qui nécessitent une réflexion de groupe multidisciplinaire (scientifique, juridique, philosophique, artistique et de design).

Cette journée d’étude a pour objectif de mettre en lumière la relation entre la créativité et l’intelligence artificielle dans le monde, et en Tunisie, et amener à la table, des cours, des discussions et des expériences qui éclairent de nouveaux aspects de la vie académique et scientifique. On tend aussi à appréhender des traitements à dimensions contemporaines, présentés par des chercheurs, dont les échos ne nous sont pas parvenus jusqu’alors. Peut-être aspirons-nous à présenter de nouvelles approches nées du sein de toutes ces fertilisations croisées.

Axes de recherche

1 - La révolution de l’intelligence artificielle dans les arts visuels : Défis techniques et enjeux esthétiques. Quel avenir pour la situation de l’artiste et peut-il remplacer ou concurrencer l’intelligence artificielle ? Celle-ci peut-elle compenser l’artiste et créer, hors des sentiers battus de la banque d’informations, stockées au sein du programme que produit l’artiste ? Comment l’artiste peut-il atteindre la réussite intellectuelle ?

2 -Intelligence artificielle : Surmonter la crise des arts visuels contemporains ou déclarer clairement la crise ? Dans quelle mesure l’intelligence artificielle peut-elle menacer l’individualité de l’artiste et son esprit entrepreneurial ?

3 -Discours créatif et intelligence artificielle : Dans quelle mesure le réformiste et le concepteur peuvent-il suivre le rythme de la production des diverses technologies, et en particulier les capacités de l’intelligence artificielle ?

4 -Intelligence artificielle : Propriété intellectuelle et éthique de la recherche scientifique

5 -Quel avenir pour le marché artistique, et quel statut pour les éléments du processus créatif habituel (l’artiste, l’œuvre artistique et le destinataire) ?

Modalités de contribution

février 2024 : Appel à participation

Le 15 févier 2024 : dernier délai pour recevoir des propositions

(dans la limite de 500 mots, en précisant l’axe de recherche choisi) à l’adresse email : intelligenceartificielle.24@gmail.com

Les interventions peuvent être en français, en anglais ou en arabe

Le 22 févier 2024, réponses du Comité Scientifique.

Les 08 et09 mars : les journées d’étude.

Comité scientifique

• Pr. Kamal Skandar
• Pr. Arbi Dhifaoui
• M.C. Mohamed Jerbi
• Pr. Samir Triki
• Pr. Nomen Gmach
• -M.C. Mondher Mtibaa
• Pr. Mounira ben Mustapha
• Pr. Mootaz Enad Ghazwen
• M.C. Habib Zouinakh

Comité d’organisation

• Dr. Imen Tahari
• Dr. Kaouthar Dammak
• Dr. Zinet Bouhajeb
• Dr. Lobna Massaoudi
• Mme. Sabeh Mouelhi
• Mme. Chebla Fandouli
• Mme. Islam ben Dhaou
• Mme. Fatima Regaieg

Coordinatrices

• Dr. Kaouthar Dammak
• Dr. Imen Tahari
• Dr. Zinet Bouhajeb