Published on Friday, March 08, 2024
Abstract
Une machine peut-elle véritablement être autrice ? Peut-elle inventer, ou bien doit-elle être traitée comme un simple outil, ou une forme de partenaire avec lequel des créateurs collaborent ? Et ses créations, qui s’appuient sur la collecte et l’analyse de milliards de textes ou d’images préexistants relèvent-elles d’une forme de pillage ? Enfin, si la créativité des Intelligences Artificielles génératives n’est qu’un leurre, les artistes ne doivent-ils pas craindre, plus que les machines, le manque d’ambition véritable des commanditaires qui, parfois, se satisfont de gestes répétés et attendus, voire se défient de l’invention réelle ? La création autant que son économie sont chamboulées par ces questions nouvelles, et c’est ce qui nous amène à organiser une journée d’étude sur le sujet, avec des spécialistes du droit d’auteur et de l’éthique de l’Intelligence Artificielle, ainsi que quelques-uns des artistes les plus inventifs dans le domaine.
Announcement
Présentation
L’école supérieure d’art et design Le Havre Rouen (ESADHaR) propose des formations dans les champs de l’art, du design graphique et de la création littéraire lesquelles s’inscrivent dans les mutations technologiques. Il est proposé durant cette journée d’étude de s’interroger sur la place et l’avenir des artistes face à l’émergence d’une nouvelle technologie : l’I.A.
Au cours de l’été 1956, au Dartmouth College, une poignée de chercheurs (Informaticiens, Physiciens, Mathématiciens, Psychologues,...) ont réfléchi à un sujet déjà ancien (Aristote, Lulle, Leibnitz, Boole, Turing, Von Neumann, etc.) mais stimulé par l’apparition de l’ordinateur, celui de la formalisation et de l’imitation des facultés liées à l’entendement humain, telles que le raisonnement déductif et la perception. Deux des organisateurs, Marvin Minsky et John McCarthy ont proposé comme nom générique pour ces recherches celui d’« Intelligence artificielle ». La discipline a rapidement porté des espoirs de progrès stupéfiants autant que la peur fantasmatique d’un remplacement de l’Humain par la machine sur le point qui semblait être l’honneur et la supériorité de l’espèce : son intelligence. Vieille de près de soixante-dix ans, la discipline a progressé malgré des péripéties dans le monde académique, dans le monde industriel autant que dans la perception qu’en a eu le grand public, tantôt médiatisée, tantôt un peu éclipsée. Au fil des décennies, l’Intelligence Artificielle a participé à redéfinir l’intelligence (se penchant notamment l’intelligence non-humaine et sur l’émergence de l’intelligence) et posé de passionnantes questions mathématiques, philosophiques ou anthropologiques.
Il y a une quinzaine d’années, la puissance de calcul et de stockage des ordinateurs a permis de redonner une vigueur nouvelle à une branche relativement ancienne de la discipline, celle des réseaux de neurones artificiels, qui permettent la mise au point de systèmes de perception ou d’apprentissage automatisé. C’est de ces recherches que procèdent les logiciels d’analyse ou de génération de texte ou d’image (notamment) qui font parler d’eux depuis quelques années et suscitent des annonces presque quotidiennes : Midjourney, Stable Diffusion, ChatGPT, et leurs innombrables concurrents. Avec la popularisation de ces services de génération d’images et de textes, les enjeux qui entourent l’Intelligence Artificielle se sont décentrés, car si les questions sociales et politiques telles que la surveillance, la biométrie ou la justice prédictive n’ont pas perdu de leur actualité, un sujet inattendu a fini par s’imposer : alors que l’on supposait jusqu’ici que l’automatisation numérique s’appliquerait en priorité aux corvées, ce sont des professions créatives qui se voient bousculées : écrivains, musiciens, artistes visuels.
Une machine peut-elle véritablement être autrice ? Peut-elle inventer, ou bien doit-elle être traitée comme un simple outil, ou une forme de partenaire avec lequel des créateurs collaborent ? Et ses créations, qui s’appuient sur la collecte et l’analyse de milliards de textes ou d’images préexistants relèvent-elles d’une forme de pillage ? Enfin, si la créativité des Intelligences Artificielles génératives n’est qu’un leurre, les artistes ne doivent-ils pas craindre, plus que les machines, le manque d’ambition véritable des commanditaires qui, parfois, se satisfont de gestes répétés et attendus, voire se défient de l’invention réelle ? La création autant que son économie sont chamboulées par ces questions nouvelles, et c’est ce qui nous amène à organiser une journée d’étude sur le sujet, avec des spécialistes du droit d’auteur et de l’éthique de l’Intelligence Artificielle, ainsi que quelques-uns des artistes les plus inventifs dans le domaine.
Programme
9h - 12h | Table ronde : aspects juridiques, éthiques et sociologiques de la création artistique et littéraire à l’aide de l’intelligence artificielle.
- Jean-Noël Lafargue, professeur à l’École Supérieure d’Arts du Havre, co-auteur de l’ouvrage Processing : Le code informatique comme outil de création (Pearson, 2011) et auteur de Entre la plèbe et l’élite (Atelier Perrousseaux, 2012), de Les Fins du Monde, de l’antiquité à nos jours (chez Bourin Editeur, 2012), de L’Intelligence artificielle (2016).
- Elodie Migliore, chercheuse en droit de la propriété intellectuelle, Élodie Migliore est doctorante, sur le sujet du rapport entre Intelligence artificielle et droit d’auteur.
- Wilhelmina Huguet (Société des Auteurs des arts visuels et de l’Image Fixe), diplômée en droit des techniques de l’information et de la communication et en droit des propriétés intellectuelles, Wilhelmina HUGUET travaille à la SAIF depuis plus de 10 ans, d’abord en tant que juriste, puis en tant qu’adjointe au directeur général.
- Jean-Louis Dessalles, maître de conférences à Télécom Paris au sein du laboratoire LTCI et membre de l’équipe de recherche DIG. Il utilise l’intelligence artificielle pour modéliser et simuler la pertinence qui caractérise la communication humaine spontanée. Il est l’auteur de plusieurs livres, notamment Why We Talk (Oxford University Press. 2007), La pertinence et ses origines cognitives (Hermes), Le fil de la vie (Odile Jacob, 2016), Des intelligences TRÈS artificielles (Odile Jacob, 2019).
Temps d’échange
14h - 17h | Table ronde : la création artistique et littéraire à l’aide de l’intelligence artificielle.
- Benoît Carré (alias Skygge), artiste à la croisée de la pop et de la recherche en intelligence artificielle pour la création musicale. Il acontribué au développement de prototypes en travaillant étroitement avec les chercheurs du laboratoire Sony Computer Science Laboratory puis chez Spotify.
- Grégory Chatonsky, artiste franco-canadien. Pionnier du Netart et de l’IA. Il fonde Incident.net en 1994. Son exploration de la matérialité numérique le mène à interroger les ruines et les flux dans les années 2000. A partir de 2009, il expérimente l’IA, suivi d’un séminaire à l’ENS Ulm sur l’imagination artificielle où il est artiste-chercheur invité. Ses œuvres évoquent l’extrêmité de l’espèce humaine où l’hypermnésie du Web et l’IA apparaissent comme une tentative pour préserver la possibilité d’un avenir.
- Albertine Meunier, artiste qui pratique l’art dit numérique depuis 1998 et utilise Internet comme matériau de création. Elle explore l’essence d’une poésie, d’une esthétique du numérique et des réseaux. Elle cultive les formes simples, minimales, semblant parfois « bricolées », volontairement loin de l’hyper-technicité de certains dispositifs numériques. Ces travaux questionnent, autant de manière critique que ludique, les grands acteurs de l’internet. Elle tente dans ses recherches et pièces créées à révéler l’invisible ou la poésie des choses numériques. Albertine déroule le fil d’une poésie ludique, impertinente et drôle. Elle est DataDada et cela se voit !
- Etienne Mineur, ancien étudiant aux Arts décoratifs, Étienne Mineur est co-fondateur des studios Incandescence et Volumique, maison d’édition, mais aussi un studio d’invention, de conception et de développement de nouveaux types de jeux, de jouets et de livres, basé sur la mise en relation du tangible et du numérique.En 2020, il commence à s’intéresser de nouveau aux Intelligences artificielles génératives et donnent de nombreux cours et ateliers dans les écoles sur ce sujet.
- Eric Tabuchi, après des études de sociologie où il découvre l’œuvre d’August Sanders, Eric Tabuchi commence son travail photographique. À partir de 2007, il publie plusieurs livres – Hyper Trophy, Twentysix abandoned Gazoline Stations, Alphabet Truck – chez Florence Loewy. Il expose notamment au Palais de Tokyo, au Confort Moderne et aux Abattoirs. À partir de 2014, il travaille à l’élaboration d’Atlas of Forms qu’il publie en 2018 chez Poursuite. Depuis 2017, il se consacre à la réalisation de l’Atlas des Régions Naturelles, projet mené en duo avec Nelly Monnier.
17 h - 18 h : temps d’échange et conclusion
Organisation
La journée s’articulera autour de conférences, sous un format table ronde, données par des spécialistes renommés qui aborderont ces sujets en profondeur et proposeront une sélection de leur travail. Ces conférences seront suivies d’un débat avec les étudiants et le public.
Inscription
Entrée libre sur réservation auprès de communication@esadhar.fr
Subjects
Places
- Amphi 6 - Université Le Havre Normandie - 25, rue Philippe Lebon
Le Havre, France (76)
Event attendance modalities
Full on-site event
Date(s)
- Friday, April 19, 2024
Keywords
- intelligence artificielle, création artistique, art, littérature
Contact(s)
- Emmanuelle Lepeltier
courriel : emmanuelle [dot] lepeltier [at] esadhar [dot] fr - Diane Chevallier
courriel : communication [at] esadhar [dot] fr
Reference Urls
Information source
- Emmanuelle Lepeltier
courriel : emmanuelle [dot] lepeltier [at] esadhar [dot] fr
License
This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.
To cite this announcement
« Artifices. La création artistique à l’heure de l’intelligence artificielle », Study days, Calenda, Published on Friday, March 08, 2024, https://doi.org/10.58079/vziq