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In Relation to Life

Biological Relationality in Contemporary Science, Theory, and Politics

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Published on Wednesday, April 10, 2024

Abstract

La relationalité, en tant que concept et cadre théorique, est devenue une composante essentielle dans les sciences, théories et politiques contemporaines. Son importance transversale se manifeste dans sa description comme un changement de paradigme dans les sciences, un tournant relationnel dans la philosophie et la théorie, et une nouvelle finalité de la politique. Ce colloque vise à établir des liens entre les sciences, théories et politiques contemporaines en se concentrant sur les différentes façons dont ces dernières abordent et intègrent la relationalité biologique, comprise comme l'enchevêtrement des entités vivantes entre elles à différentes échelles (cellulaire, physiologique, multi-espèces, écosystémique, planétaire, etc.) et avec des entités non vivantes (polluants, machines, matière elle-même, etc.).

Announcement

Argumentaire

La relationalité, en tant que concept et cadre théorique, est devenue une composante essentielle dans les sciences, théories et politiques contemporaines. Son importance transversale se manifeste dans sa description comme un changement de paradigme dans les sciences (Walsh et al. 2021), un tournant relationnel dans la philosophie et la théorie (Dépelteau 2013), et une nouvelle finalité de la politique (Drichel 2021).

Ce colloque vise à établir des liens entre les sciences, théories et politiques contemporaines en se concentrant sur les différentes façons dont ces dernières abordent et intègrent la relationalité biologique, comprise comme l’enchevêtrement des entités vivantes entre elles à différentes échelles (cellulaire, physiologique, multi-espèces, écosystémique, planétaire, etc.) et avec des entités non- vivantes (polluants, machines, matière elle-même, etc.).

Dans le contexte des sciences de la vie et des théories contemporaines (incluant les travaux de philosophie et de sciences humaines), et en fonction des champs disciplinaires, des épistémologies et des cadres conceptuels, la relationalité biologique est désignée par diverses notions et se voit accorder des degrés d’importance variables. En reliant l’idée de l’établissement d’un paradigme relationnel dans les sciences de la vie à celle d’un tournant relationnel dans la théorie contemporaine, le colloque tente d’encourager les discussions et de poser des questions transversales en rapport avec la vie.

En invitant à la fois les scientifiques et les théoricien·ne·s de la vie à entrer en conversation, le colloque vise ainsi à générer un champ d’échanges interdisciplinaires dépassant la séparation habituelle entre science et théorie, où les prémisses, les concepts et les méthodologies de chacune sont à la fois centrés et décentrés. Tout en respectant les points de départ des différentes disciplines et domaines, il valorise une forme de relationalité pensée comme la fusion de différents problèmes, par le biais d’une pratique de réflexivité, de répondance et de synergie. De quelle manière la relationalité biologique est-elle opérationnalisée dans le monde universitaire et quelles reconfigurations du savoir pourraient être produites par la rencontre frictionnelle de la science, de la théorie et de la politique ?

Outre les considérations issues des aspects épistémologiques et ontologiques des sciences et théories de la vie, les sessions de conférence viseront à élargir le champ de la réflexion à l’horizon social et politique de la relationalité dans les sciences et théories contemporaines de la vie, avec une attention particulière pour les contributions féministes. À la fin du colloque, une session semi- informelle sera consacrée à des remarques collectives, des retours d’expérience et des échanges axés sur les frictions et les synergies générées par la portée transversale de la conférence.

Nous accueillons des contributions provenant, sans s’y limiter, des domaines suivants :

  • sciences de la vie contemporaines : approches biomédicales (infectiologie, oncologie, etc.), écologie, éco-évo-dévo, éthologie, évolution, épi-/post-/génétique, microbiologie, neurobiologie, biologie végétale, zoologie
  • études contemporaines de la science : épistémologies critiques, épistémologies féministes, épistémologies historique, humanités médicales, biologie politique et biopolitique, études (féministes) de la science et de la technologie
  • théories contemporaines de la vie : études animales (critiques), études décoloniales et autochtones, écoféminismes, humanités environnementales, philosophie de l’environnement, biologie philosophique, éthologie philosophique, études multi-espèces, études végétales (critiques), nouveaux matérialismes et posthumanismes (féministes), approches (anti)relationnelles de la vie et de l’écologie dans les études queer.

La relationalité biologique dans les sciences contemporaines : origines, contributions et limites d’un changement de paradigme

Les sciences de la vie contemporaines intègrent de plus en plus de modèles relationnels. Au niveau moléculaire et génétique, les conceptions fixes et déterministes cèdent la place, grâce à l’épigénétique, à une hérédité souple ou plastique, accordant à l’environnement un rôle plus décisif dans le développement et l’héritage du matériel génétique, et ouvrant de nouveaux domaines de recherche tels que la plasticité phénotypique et l’épidémiologie épigénétique (McGuinness et al. 2012). Au niveau cellulaire et microbiologique, l’attention est portée sur les relations entre les microbes, les humains et les non-humains (Hey, Cañada et Ng 2023), ainsi qu’entre les cellules et leur environnement. En infectiologie, l’attention portée à la dimension écosystémique des infections bactériennes a conduit au développement de phagothérapies (Brives 2022, Brives et Zimmer 2021). Un tournant relationnel s’opèrerait ainsi en microbiologie depuis la théorie endosymbiotique (Margulis 1967), qui rompt avec les conceptions autopoïétiques et fermées de la cellule (Varela, Maturana et Uribe 1974). Au niveau des organismes, en rupture avec l’organicisme, l’idée de systèmes complexes marqués par des interactions multispécifiques variées s’est incarnée à travers le concept d’holobionte et le champ de la biologie relationnelle (Rosen 1959, Modera 2020). Les modèles « éco-évo-dévo » (Gilbert 2015), en combinant l’épigénétique, la plasticité développementale et les relations symbiotiques, ont également mis l’accent sur l’enchevêtrement des corps avec et à travers leur environnement moléculaire et social (Warin 2016). Au niveau de l’évolution, une synthèse élargie est proposée qui inclut de plus en plus de nouveaux phénomènes relationnels, comme la symbiogenèse, le transfert latéral de gènes, l’hybridation, etc. (Gontier 2015).

Cet apparent changement de paradigme dans les sciences de la vie soulève de nouvelles questions en termes d’ontologie, d’épistémologie et de méthodologie de la science. Il interroge les fondements ontologiques de la science et soulève des préoccupations philosophiques quant à sa capacité à éviter des fondations virtualistes ou idéalistes et à renouveler le matérialisme scientifique en mettant l’accent sur la relationalité. En outre, la complexité des relations entre les entités biologiques pousse à une nouvelle articulation des disciplines scientifiques et à une multidisciplinarité des hypothèses scientifiques, dont la nature doit être clarifiée. En ce qui concerne la testabilité des théories scientifiques et leur capacité à prédire des résultats ou à générer des applications, la relationalité devient une composante essentielle des protocoles expérimentaux. Enfin, la simultanéité des mutations des sciences et des théories contemporaines de la vie vers des modèles relationnels mérite une investigation spécifique. Les premières sont-elles un effet des secondes, ou leur cause ? Comment cartographier l’émergence, le développement, les échanges et les influences de ces changements spécifiques dans la science, la théorie et la politique ?

La relationalité (post-)biologique dans la théorie contemporaine : ontologie, éthique et politique du tournant relationnel

La relationalité biologique et plus-qu’humaine est devenue un enjeu décisif dans la philosophie contemporaine. La théorie féministe, en particulier, a généré des notions telles que la sympoièse (Haraway 2016) et la symbiogenèse (Margulis 1997), l’enchevêtrement et l’intra-action (Barad 2006), etc. Les corps biologiques ont à leur tour été décrits comme fuyants [leaky] (Shildrick 1997), cyborgiens (Haraway 2016 [1985]), transcorporels (Alaimo 2010), bioculturels (Frost 2016), etc.

En prenant pour objet d’étude l’enchevêtrement des animaux, des plantes, des micro-organismes, des minéraux, des machines, de la planète et de la matière elle-même, les théories contemporaines de la relationalité plus-qu’humaine déconstruisent les binarismes de la pensée occidentale (animal/végétal, vivant/non-vivant, organique/non-organique, etc.) et tentent de complexifier l’ontologie en passant du bios au zoe (Agamben 1997, Braidotti 2008), des ontologies naturalistes aux ontologies autochtones (TallBear et Willey 2019), ou vers le post-biologique (Lestel 2017). En même temps, leur tendance à positionner la relationalité comme qualité ontologique primaire les a soumises au risque d’aplatir l’ontologie (DeLanda 2002), c’est-à-dire de négliger les qualités portées par des formes spécifiques d’êtres à travers la force régulatrice et omniprésente de l’autopoïèse.

En mettant l’accent sur la critique des dualismes, les théories de la relationalité risquent-elles de passer à côté de la spécificité du phénomène de la vie et des différents héritages évolutifs et prédicats ontologiques incarnés par les plantes et les animaux (agentivité, sentience, intentionnalité, désir, etc.), qui contribuent à leurs manières particulières d’entrer en relation avec d’autres agents ? Comment rendre compte de l’enchevêtrement des corps biologiques entre eux et avec les entités non-vivantes sans impliquer une telle forme de réductionnisme ontologique ? En d’autres termes, (comment) est-il possible de laisser une place à la différence au sein de la relationalité, conformément à l’affirmation de Rosi Braidotti selon laquelle « nous sommes dans le même bateau mais nous ne sommes pas une seule et même chose » (Braidotti 2021) ?

Enfin, dans quelle mesure les ontologies relationnelles peuvent-elles s’accompagner de corrélats éthiques et politiques progressistes, notamment dans le contexte de la biopolitique, de l’activisme animaliste/antispéciste, de l’éthique environnementale et des politiques de la vie au sens large ? L’accent mis sur des échelles spécifiques de relationalité (physico-chimique, intracellulaire, métabolique, multispécifique) plutôt que sur d’autres est-il un moyen de hiérarchiser, de prioriser et d’exclure des entités particulières au niveau politique (Giraud 2019) ? Compte tenu des diverses façons dont la relationalité biologique a servi des politiques d’altruisme (Kropotkin 1902), d’agression (Lorenz 1966), de compétition (Dawkins 2006 [1976]) et de contamination (Esposito 2011), le tournant relationnel contemporain pourrait-il générer une nouvelle biologie politique progressiste, ou est-il déjà surestimé et facilement récupéré par les forces conservatrices (Meloni 2016) ?

Instructions

Nous invitons des présentations de 20 minutes en anglais. Les propositions de 350 mots maximum (incluant les références), accompagnées du nom, de l’affiliation et d’une bio-bibliographie de 100 mots maximum, doivent être envoyées à inrelationtolifeconference@gmail.com

avant le 22 avril 2024

Veuillez indiquer dans votre courriel si vous envisagez de participer en ligne ou en personne.

Les doctorant·e·s, les chercheur·euse·s en début de carrière et les chercheur·euse·s indépendant·e·s sont chaleureusement invité·e·s à soumettre des propositions.

Calendrier

  • Date limite de soumission des propositions : 22 avril 2024
  • Notification d’acceptation : d’ici juin 2024
  • Dates du colloque : 16-18 octobre 2024

Organisatrices du colloque

  • Aurore Franco-Ricord (IHPST, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne)
  • Ombre Tarragnat (LEGS, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis)

Institutions de soutien

  • Institut d’Histoire et de Philosophie des Sciences et des Techniques (IHPST) : Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)
  • Laboratoire d’Études de Genre et de Sexualité (LEGS) : Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, Université Paris Nanterre, Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS)

Conférencier·e·s confirmé·e·s

  • Eva Haifa Giraud (Université de Sheffield, Royaume-Uni)
  • Nathalie Gontier (Université de Porto & Université de Lisbonne, Portugal)
  • Kuura Irni (Université d’Helsinki, Finlande)
  • Références
  • Giorgio Agamben, Homo Sacer. Le pouvoir souverain et la vie nue. Paris, Le Seuil, 1997.
  • Stacy Alaimo, Bodily Natures : Science, Environment, and the Material Self, Bloomington, Indiana University Press, 2010.
  • Karen Barad, Meeting the Universe Halfway : Quantum Physics and the Entanglement of Matter and Meaning, Duke et London, Duke University Press, 2006.
  • Rosi Braidotti, « The Politics of Life as Bios/Zoe », in Anneke Smelik and Nina Lykke (éd.), Bits of Life : Feminism at the Intersections of Media, Bioscience, and Technology, Seattle and London, University of Washington Press, 2008.
  • Rosi Braidotti, Posthuman Feminism, Cambridge et Malden, Polity, 2021.
  • Charlotte Brives, Face à l’antibiorésistance, Une écologie politique des microbes, Amsterdam, Éditions Amsterdam, 2022.
  • Charlotte Brives and Alexis Zimmer, « Ecologies and promises of the microbial turn », Revue d’anthropologie des connaissances, vol. 15, n° 3, 2021, https://doi.org/10.4000/rac.25068.
  • Richard Dawkins, The Selfish Gene, Oxford, Oxford University Press, 2006 [1976].
  • Manuel DeLanda, Intensive Science and Virtual Philosophy, London et New York, Continuum, 2002.
  • François Dépelteau, « What Is the Direction of the ‘Relational Turn’ ? », in Christopher Powell, François Dépelteau (éd.), Conceptualizing Relational Sociology. New York, Palgrave Macmillan, 2013.
  • Simone Drichel (ed.), Relationality, London and New York, Routledge, 2021.
  • Roberto Esposito, Immunitas : The Protection and Negation of Life, Cambridge et Malden, Polity, 2011.
  • Samantha Frost, Biocultural Creatures : Toward a new Theory of the Human, Durham et Londres, Duke University Press, 2016.
  • Scott Gilbert et al., « Eco-Evo-Devo : developmental symbiosis and developmental plasticity as evolutionary agents », Nature Reviews. Genetics, vol. 16, n° 10, 2015, p. 611-622, https://doi.org/10.1038/nrg3982.
  • Eva Haifa Giraud, What Comes After Entanglement ? Activism, Anthropocentrism, and an Ethics of Exclusion, Durham/London, Duke University Press, 2019.
  • Nathalie Gontier (ed.), Reticulate Evolution : Symbiogenesis, Lateral Gene Transfer, Hybridization and Infectious Heredity, Cham, Springer, 2015.
  • Donna Haraway, « A Cyborg Manifesto : Science, Technology, and Socialist-Feminism in the Late Twentieth Century », Manifestly Haraway, Minneapolis, Minnesota University Press, 2016 [1985].
  • Donna Haraway, Staying with the Trouble : Making Kin in the Chthulucene, Durham/London, Duke University Press, 2016.
  • Maya Hey, Jose A. Cañada, and Alicia K. Ng, « Introducing the Centre for the Social Study of Microbes : a Slime-Mouldian Approach to Research », EASST Review, 2023, vol. 42, n° 2, p. 30- 34. https://easst.net/wp-content/uploads/2023/12/42-2_v5.pdf.
  • Peter Kropotkin, Mutual Aid : A Factor of Evolution, New York, McClure Phillips & Co, 1902.
  • Dominique Lestel, « How Machines Force Us to Rethink What It Means to Be Living : Steps to an Existential Robotics », NatureCulture, 2017, p. 38-58.
  • Konrad Lorenz, On Aggression, New York, Harcourt, Brace & World, 1966.
  • Lynn Margulis, « On the Origin of Mitosing Cells », Journal of Theoretical Biology, vol. 14, n° 3, 1967, p. 255-74. https://doi.org/ :10.1016/0022-5193(67)90079-3.
  • Lynn Margulis, Symbiotic Planet : A New Look At Evolution, Amherst, Basic Books, 1997.
  • Dagmara McGuinness et al., « Socio-economic status is associated with epigenetic differences in the pSoBid cohort », International Journal of Epidemiology, vol. 41, n° 1, 2012, p. 151-160, https://doi.org/10.1093/ije/dyr215.
  • Maurizio Meloni, Political Biology : Science and Social Values in Human Heredity from Eugenics to Epigenetics, New York, Palgrave Macmillan, 2016.
  • Astrida Modera, « A relational definition of life for Astrobiology », Society for Social and Conceptual Issues in Astrobiology (SSoCIA) Conference. 2020.
  • Robert Rosen, « A relational theory of biological systems », Bulletin of Mathematical Biophysics, vol. 20, 1958, p. 245–260, https://doi.org/10.1007/BF02478302.
  • Margrit Shildrick, Leaky Bodies and Boundaries : Feminism, Postmodernism and (Bio)ethics, London, Routledge, 1997.
  • Kim TallBear and Angela Willey, « Introduction : Critical Relationality : Queer, Indigenous, and Multispecies Belonging Beyond Settler Sex & Nature », Imaginations, vol. 10, n° 1, 2019, p. 5-15.
  • Francisco Varela, Humberto Maturana, and Ricardo Uribe, « Autopoiesis : The organization of living systems, its characterization and a model », BioSystems, vol. 5, 1974, p. 187-196.
  • Zack Walsh, Jessica Böhme, and Christine Wamsler, « Towards a relational paradigm in sustainability research, practice, and education », Ambio, vol. 50, 2021, p. 74-84.
  • Megan Warin, Vivienne Moore, Michael Davies, et Stanley Ulijaszek., « Epigenetics and Obesity : The Reproduction of Habitus through Intracellular and Social Environments », Body & Society, vol. 22, n° 4, 2016, p. 53-78, https://doi.org/10.1177/1357034X15590485.

Places

  • Paris, France (75)

Event attendance modalities

Hybrid event (on site and online)


Date(s)

  • Monday, April 22, 2024

Keywords

  • relationalité biologique, tournant relationnel, paradigme relationnel, vie, vivants, biologie

Information source

  • Ombre Tarragnat
    courriel : ombre [dot] tarragnat [at] gmail [dot] com

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« In Relation to Life », Call for papers, Calenda, Published on Wednesday, April 10, 2024, https://doi.org/10.58079/w6wc

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